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LE MARQUIS.

Quelle folie ! En un mot, si l’on fronde
Mon changement, j’ose espérer au moins
Faire approuver ma conduite et mes soins.
Colette vient, par mon ordre on l’appelle ;
Je vais l’entendre, et commencer par elle.


Scène II.



LE MARQUIS, LE CHEVALIER, COLETTE.


LE MARQUIS.

Venez, Colette.

COLETTE.

Venez, Colette. Oh ! j’accours, monseigneur,
Prête en tout temps, et toujours de grand cœur.

LE MARQUIS.

Voulez-vous être heureuse ?

COLETTE.

Voulez-vous être heureuse ? Oui, sur ma vie ;
N’en doutez pas, c’est ma plus forte envie.
Que faut-il faire ?

LE MARQUIS.

Que faut-il faire ? En voici le moyen.
Vous voudriez un époux et du bien ?

COLETTE.

Oui, l’un et l’autre.

LE MARQUIS.

Oui, l’un et l’autre. Eh bien donc, je vous donne
Trois mille francs pour la dot, et j’ordonne
Que Mathurin vous épouse aujourd’hui.

COLETTE.

Ou Mathurin, ou tout autre que lui ;
Qui vous voudrez, j’obéis sans réplique.
Trois mille francs ! ah ! l’homme magnifique !
Le beau présent ! que monseigneur est bon !
Que Mathurin va bien changer de ton !
Qu’il va m’aimer ! que je vais être fière !
De ce pays je serai la première ;
Je meurs de joie.

LE MARQUIS.

Je meurs de joie. Et j’en ressens aussi
D’avoir déjà pleinement réussi ;
L’une des trois est déjà fort contente ;
Tout ira bien.

COLETTE.

Tout ira bien. Et mon amie Acanthe,
Que devient-elle ? On va la marier,
À ce qu’on dit, à ce beau chevalier.
Tout le monde est heureux : j’en suis charmée.
Ma chère Acanthe !