Page:Wanda - La femme au doigt coupé, 1886.djvu/61

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Ses deux compagnons, après s’être concertés, le suivirent de près et s’installèrent, à deux pas de la porte, en se disant avec juste raison que Ben était fort imprudent de s’engager seul dans une si dangereuse affaire ; et ils restèrent ainsi, à portée de le secourir à la première réquisition.

Ben entra brusquement.

Félix était assis auprès d’une table et fumait un cigare.

— Me voici fidèle au rendez-vous, lui cria-t-il. Ce n’est pas moi que vous attendiez ? hein ? Je vous la coupe ! Et le steamer qui va partir ! Vous ferez aussi bien de ne pas attendre Cynthia, car elle est en prison et vous allez l’y suivre. On ne prend jamais assez de précautions, voyez-vous. Malgré la maison brûlée, malgré mon emprisonnement, j’ai encore retrouvé vos traces. Et j’ai retrouvé aussi le doigt coupé, ajouta Ben en le lui présentant vivement. Ah ! vous rêviez de me donner à manger aux rats ! Eh bien, moi, je vais vous faire pendre !

À travers ce flot de paroles, Ben poursuivait son idée. Il espérait terrifier Félix, comme il avait terrifié Cynthia et lui arracher un aveu.

Mais il se produisit un résultat que notre ami n’avait pas prévu.

Félix avait compris que la partie était perdue et qu’il ne lui restait d’autre ressource que de jouer le tout pour le tout.

Au moment où Ben s’approchait, prêt à lui mettre la main sur l’épaule, d’un brusque mouvement, Félix se jeta sur lui, le renversa sous la violence du choc, et lui saisissant le cou entre ses deux mains, le serra furieusement.

— C’est pourtant vrai que c’est toi, petit monstre ! J’avais cependant bien cru être débarrassé de toi ; mais cette fois-ci j’aurai ta peau ! Si j’avais suivi les conseils de Simon, à l’heure qu’il est, tu ne serais plus à craindre, vipère ?

Cependant, la lutte continuait. Félix serrait de plus en plus fort sa victime ; et c’en était fait de Ben, si les deux