Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/165

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Brasseuse, résidence de madame du Pont, sœur de la duchesse de Liancourt. Quelle fut ma surprise de trouver un grand agriculteur dans cette vicomtesse ! Une dame, une Française, assez jeune encore pour goûter tous les plaisirs de Paris, vivant à la campagne et s’occupant de ses terres, c’était un spectacle inattendu. Elle fait probablement plus de luzerne que qui que ce soit en Europe, 250 arpents. Elle me donna, avec un agrément et une simplicité charmante, des détails sur ses luzernières et sa laiterie : mais ce n’est les ici le lieu d’en parler. Retourné à Liancourt par Pont, où l’on passe l’eau sur trois arches soutenues de façon originale, chaque culée consistant en quatre piliers, avec un chemin de halage sous l’une des arches ; la rivière et navigable.

La chasse était un des amusements du matin auxquels je prenais part à Liancourt. Pour le cerf, les chasseurs forment autour du bois une ligne qu’ils vont toujours resserrant, et il est rare que plus d’une seule personne puisse tirer ; c’est plus ennuyeux qu’on ne saurait aisément se l’imaginer ; comme la pêche à la ligne, une attente incessante et un désappointement perpétuel. La chasse aux perdrix et au lièvre est presque aussi différente de ce qui se pratique en Angleterre. Nous nous y livrions dans la belle vallée de Catnoir (Catenoy), à cinq ou six milles de Liancourt.

On se mettait en file, à 30 yards environ l’un de l’autre, ayant chacun derrière soi un domestique avec un fusil chargé tout prêt pour quand on aurait fait feu : de cette façon, nous parcourions la vallée en travers, forçant le gibier à se lever devant nous. Quatre ou cinq couples de lièvres et une vingtaine de couples de perdrix formaient les trophées de la journée. Cette chasse a pour moi peu de charmes de plus que celle