Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/197

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

600 tonneaux. L’état du port a cependant donné de l’inquiétude : si on n’y eût pris garde le goulet se serait vite ensablé, mal qui va s’accroissant, et sur lequel on a consulté beaucoup d’ingénieurs. Le manque d’eau pour chasser ce que la mer apporte est si grand, qu’on a entrepris, aux frais du roi, un magnifique ouvrage, un vaste bassin, séparé de l’Océan par un mur, ou bien plutôt l’Océan lui-même a été emprisonné dans une maçonnerie solide de 700 yards de long, 5 de large, et dépassant de 10 ou 12 pieds le niveau de la haute marée ; et deux autres murs extérieurs, longs de 400 yards, larges de 3 yards, laissant entre eux un espace de 7 yards qu’on remplit de terre. On espère, au moyen de ce bassin, obtenir assez d’eau pour nettoyer le port de toute obstruction. C’est un travail qui fait honneur au pays.

La Seine, vue de cette jetée, est remarquable ; elle a cinq milles de largeur ; de hautes terres forment son horizon sur la rive opposée, et les falaises de craie qui s’ouvrent pour lui laisser porter son énorme tribut à l’Océan sont grandes et pittoresques.

Rendu visite à M. l’abbé Dicquemarre, le célèbre naturaliste, chez qui j’ai eu le plaisir de rencontrer mademoiselle Le Masson Le Golft, auteur de quelques ouvrages agréables, entre autres l’Entretien sur le Havre, 1781. quand il ne comptait que 25,000 âmes. Le lendemain, M. de Reiseicourt (Récicourt), capitaine au corps royal du génie, pour lequel j’avais des lettres de recommandation, me présenta à MM. Hombert, qui prennent rang parmi les plus notables négociants de France. On dîna dans une de leurs maisons de campagne, en nombreuse société, de façon très somptueuse. Les femmes, les filles, les cousins et les amis de ces messieurs ont beaucoup d’enjouement, de grâce et