Mais n’allons pas nous lancer sur la pente opposée ; à défaut de la ruine, la maladie, la lassitude, le dégoûtée raffinement nous atteindraient bientôt. À égale distance du renoncement monastique et de la corruption il y a place pour une vie simple, aisée, même élégante. Entre la niaise sensiblerie et l’égoïsme effronté et brutal se trouve le sentiment exquis de la dignité humaine, qui peut pousser la grandeur morale jusqu’au sacrifice sans se laisser imposer bénévolement les charges inventées par les charlatans humanitaires. Enfin en présence des prétentions nationales affichées avec une âpreté, une emphase dont nous ne nous doutons guère, en ce pays si accueillant, la mesure nous enseigne à répudier les idées cosmopolites, qui, étendant la bienveillance et le dévouement à tout l’univers, ne sauraient en trouver beaucoup pour chaque cas particulier qui se présente.
On peut s’enorgueillir d’appartenir à un peuple qui a fait de grandes choses quand l’idéal qui l’inspira fut toujours noble, généreux, élevé ; quand celui qui l’inspire, qui en forme un être vivant, indissoluble, ne repose que sur le droit et sur la liberté. Souvenons-nous de nos pères, pourquoi se sont-ils levés avec enthousiasme ? Pour réaliser les visions de Saint Empire qui hantent les cerveaux coiffés de la ferraille du moyen-âge ? Non, mille fois non ; ce qui leur a donné un si impétueux effort, c’est l’union sous une grande pensée, c’est la confiance superbe qu’ils ne combattaient pas pour eux seuls, mais pour le monde entier. N’attendons pas grand résultat de l’action isolée d’individus disséminés ça et là à la surface du globe. Il en coûte davantage pour faire triompher la justice ; il y faut cet ensemble de familles rompues depuis des siècles aux mêmes habitudes, partageant les mêmes intérêts, les mêmes souvenirs, les mêmes joies, les mêmes deuils, animées du même souffle, que l’on appelle une nation. On a
