Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/154

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leur sauvagerie aussi s’était allumée. Il s’en était fallu d’une circonstance — leur rencontre — qu’ils ne fussent demeurés normaux. Aujourd’hui, ni l’un, ni l’autre ne savait plus lequel avait eu le premier « l’idée ».

Et les voici arrêtés, immobiles, devant leur proie. Ont-ils été atteints, — car la chair de leur âme est encore tendre quoiqu’il paraisse, — par des arguments directs et qu’il ne sert pas de mettre en question, comme le souvenir d’une mère disparue, d’un père héroïque ? Se sont-ils souvenus, dès les premiers propos de la Marie, d’aïeules ayant choyé leur petite enfance ? Il est certaines douceurs de la vieillesse capables d’une emprise irrésistible sur l’enfant.

Ou bien seul l’aspect soudain de Marie a-t-il eu raison de leur délire criminel ? Ce n’est pas en vain qu’une vieille femme a respiré soixante années dans la paix de l’ordre et du bien, ne cessant de tenir la main au fourmillement secret des pensées méchantes, au désir des mauvaises paroles, à tout instinct suspect. Il ne se peut qu’une majesté spirituelle n’irradie sa figure. De plus, n’y a-t-il pas dans le délire même du meurtre un état de réceptivité, amplificateur de toutes les impressions, et ne peut-on croire que cette sorte de grâce qui avait jailli là d’une vieille