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PRÉLIMINAIRE.

Deſcendu à terre, ma premiere viſite fut chez le Commandeur. Il étoit alors à ſa maiſon de campagne. J’allai l’y trouver ; je lui déclarai l’objet de mon voyage, & lui demandai la permiſſion d’aller à Veraple & à Odiamper. L’ac-

    par les eaux ſaumaches de Cochin : les François n’en ſont pas attaqués. Ce ſont vraiſemblablement les eaux qui produiſent encore l’enflure de jambe qui eſt générale chez les Naturels de Cochin & des environs.

    La poſition des Hollandois à cette Côte eſt aſſez critique. Généralement ils n’ont pas le talent de ſe faire aimer des gens du Pays. Le Samorin les inquiete du côté du Nord. En 1757, ils attendoient deux Vaiſſeaux de Batavia qui devoient leur amener trois cens Blancs & dix-ſept cens ſoldats Noirs, la guerre ayant été heureuſement terminée dans cette derniere Iſle, après la perte de bien du monde, par la valeur des François qui formoient la garde du Général. Ils comptoient avec ce renfort être en état de tenir la Campagne, comme ils avoient fait trois ans auparavant, contre le Travancour. Car, quoique le ſyſtême de la Compagnie ſoit de ne pas s’aggrandir, & même de tout ſouffrir plutôt que d’avoir la guerre, les Hollandois ne vouloient pas de paix avec le Samorin qui conſentoit à ſe retirer, qu’il ne les eût dédommagés des frais de cet armement. D’un autre côté, celle qu’ils avoient faite avec le Travancour ne leur ôtoit pas tout ſujet de crainte ; autrefois les bornes de cet Empire étoient au-delà de Kalikoulan ; il y a quelque tems qu’elles étoient près de Porca : en 1757, il s’étendoit juſqu’à la riviere de Caſtelle.

    Le Prince qui gouvernoit alors ce Royaume, occupoit le trône depuis trente ans : on le ſoupconnoit de viſer à la Monarchie de cette partie de la Côte. Il avoit été en guerre avec les François, les Anglois, les Hollandois & toujours avec avantage. Ses troupes bien diſciplinées pour le Pays, montoient à plus de cinquante mille hommes. Fidéle à ſa promeſſe, lorſque ſon intérêt n’y étoit pas abſolument oppoſé, ce Prince étoit cruel par occaſion, vif dans ſes reparties, & pénétroit un homme juſqu’au fond de l’âme. Son regne avoit été traverſé par mille événemens dont il s’étoit tiré heureuſement. Étant de Caſte Naire, il ſe trouvoit comme inférieur aux Brahmes, & ne pouvoit manger avec eux. Pour ſe naturaliſer en quelque ſorte Brahme, il fit faire en 1752 un veau d’or, entra dedans par le mufle & ſortit par-deſſous la queue. Depuis ce tems il eſt reconnu pour Brahme & date ſes lettres du jour de ſa renaiſſance du Veau d’Or. Mais les Brahmes étrangers taxent de lâcheté ceux de leur Caſte qui mangent avec lui.

    Au commencement de ſon regne, voulant tirer quelques fortunes des Hollandois, il les envoya complimenter ſur leurs pertes, les plaignant de l’état de diſette où ils ſe trouvoient. On lui répondit que grace à Dieu, malgré ſes malheurs, la Compagnie ne manquoit pas de fonds. Ce Prince, profitant de l’aveu, demanda des ſubſides, une groſſe ſomme pour en avoir au moins une petite.

    En 1749, le Baron Imhof, Commandeur de Cochin, homme d’une politique rafinée, eut quelques entretiens avec le Travancour au ſujet de la Reine de Changanat, Souveraine de Koélan. On s’échauffa de part & d’autre, & ſur ce que le Travancour répondoit aux menaces du Baron, qu’il avoit pour retraite aſſurée des rochers inacceſſibles, celui-ci répliqua que la Compagnie Hollandoiſe étoit aſſez forte pour percer les montagnes. À la bonne heure, lui dit le Travancour d’un air mocqueur, & moi avec quelques Manſchouës armées en guerre je vais faire la conquête de l’Europe. On ſe ſépara plus aigri que jamais, & l’on ſe prépara à la guerre.