Page:Zola - Vérité.djvu/567

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pas, quatre kilomètres à peine. Vous savez, c’est ça qui me fait le plus de plaisir.

Marc s’était calmé, une douleur se réveillait en lui, assombrissait de nouveau ses yeux. Il y eut un silence, les deux autres avaient senti passer le frisson des espérances ajournées, des plaies toujours vives, au milieu de tant de ruines. Combien la lutte serait dure encore, que de larmes elle coûterait, avant de retrouver les bonheurs perdus ! Et ils se taisaient tous les trois, et Salvan, debout devant la grande baie ensoleillée donnant sur la place, semblait rêver tristement, dans son impuissance à faire plus de joie.

— Tiens ! demanda-t-il brusquement, vous attendez donc quelqu’un ?

— Comment, j’attends quelqu’un ? dit Marc.

— Oui, voilà une petite charrette à bras, avec des malles.

La porte s’ouvrit, et ils se retournèrent. Ce fut Geneviève qui entra, tenant le petit Clément par la main, ayant Louise à son côté. La surprise, l’émotion furent si fortes, que personne d’abord ne parla. Marc tremblait. Geneviève finit par dire, d’une voix entrecoupée :

— Mon bon Marc, je te ramène ton fils. Oui, je te le rends, il est à toi, il est à nous deux. Tâchons de faire de lui un homme.

L’enfant avait tendu ses petits bras, et le père éperdu l’enleva, le serra dans les siens, tandis que la mère, l’épouse ajoutait :

— Et je te reviens avec lui mon bon Marc. Tu me l’avais bien dit que je te le rendrais et que je te reviendrais… C’est la vérité qui, d’abord, m’a vaincue. Ensuite, ce que tu avais mis en moi a sans doute germé, et je n’ai plus d’orgueil, et me voici, parce que je t’aime toujours… J’ai vainement cherché un autre bonheur, ton amour seul est vivant. Il n’y a, en dehors de nous deux