Page:Zola - Vérité.djvu/669

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du petit employé, sujets si médiocres. Après avoir épousé une simple paysanne, Rosalie Bonin, il s’était mis courageusement à l’œuvre, avait en quinze ans créé une ferme modèle admirable, qui révolutionnait toutes les cultures du pays et en décuplait la richesse.

Ayant à peine dépassé la quarantaine, il était très écouté, un peu têtu, ne cédant qu’aux arguments solides, pour le bien de tous. Et ce fut sous sa présidence que le conseil municipal eut à examiner de nouveau le projet d’une réparation publique offerte à Simon, une sorte de glorieuse amende honorable, idée qui, ensommeillée un moment, se réveillait avec une force nouvelle.

Plusieurs fois déjà, on avait consulté Marc, et il ne pouvait venir à Maillebois, sans rencontrer des gens qui lui parlaient du grand projet. Une rencontre, particulièrement, l’émotionna, celle d’Adrien Doloir, fils d’Auguste Doloir, l’aîné du maçon, et d’Angèle Bongard, la fille du paysan. Il avait commencé d’excellentes études, sous le bon Joulic, et il était devenu un architecte-entrepreneur de grand mérite. À peine âgé de vingt-huit ans, il venait d’entrer au conseil municipal, dont il était le plus jeune membre, de conceptions un peu hardies, disait-on, mais pratiques tout de même.

— Ah cher monsieur Froment, que je suis heureux de vous voir ! Je voulais me rendre un de ces matins à Jonville, pour causer un moment avec vous.

Et, souriant, très déférent, il se tenait chapeau bas devant Marc, que toute cette jeunesse nouvelle aimait et vénérait comme un patriarche, un des grands ouvriers de la vérité et de la justice, aux temps héroïques. Lui, trop jeune, ne l’avait eu pour maître que dans sa petite enfance, mais son frère, ses oncles, tous avaient grandi sur les bancs de sa classe.

— Que désirez-vous donc, mon cher enfant ? demanda