Utilisateur:Мишоко/Match007 Histoire des animaux 488-605

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LIVRE III


CHAPITRE PREMIER

Des parties qui concourent à la génération ; chez les femelles ces parties sont toujours intérieures ; différences plus nombreuses dans les mâles ; des testicules en général et de leur position ; les poissons n’ont jamais de testicules ; les serpents n’en ont pas non plus ; organisation spéciale des serpents et des poissons ; testicules des ovipares ; leur verge ; exemple de l’oie, du pigeon, de la perdrix, au moment de l’accouplement ; testicules des vivipares, munis de pieds ; description détaillée de leur organisation ; dessin Anatomique à consulter ; destruction des testicules par compression ou par ablation ; des matrices en général ; description de la matrice chez les grands animaux ; le vagin, l’utérus, la matrice et son orifice ; matrice des vivipares bipèdes ou quadrupèdes ; matrices des oiseaux, des poissons ; matrice des quadrupèdes ovipares ; matrice des animaux sans pieds ; matrice des sélaciens ; figures Anatomiques à consulter ; matrice du serpent ; la vipère est seule vivipare ; différences des ovipares et des vivipares ; matrices des animaux à cornes qui n’ont pas les deux rangées de dents ; positions diverses des embryons dans la matrice. — Résumé.

§ 1[1]. On vient de dire quelles sont les autres parties intérieures des animaux, quel est le nombre de ces parties, quelle est leur nature, et quelles sont

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les différences qu’elles présentent entre elles ; il ne reste plus qu’à parler des parties qui concourent à la génération. § 2[2]. Dans toutes les femelles, ces organes sont à l’intérieur ; mais dans les mâles, ces parties offrent des différences plus nombreuses. Ainsi, dans les animaux qui ont du sang, certaines espèces n’ont pas du tout de testicules ; d’autres espèces en ont ; mais ils sont intérieurs. Parmi ceux qui en ont à l’intérieur, les uns les ont dans le bassin, près du lieu où sont les reins ; les autres les ont dans le ventre. § 3[3]. D’autres espèces ont les testicules en dehors ; et tantôt la verge est suspendue sous le ventre et adhérente ; tantôt elle est libre, comme le sont les testicules. L’attache de la verge au ventre diffère selon que les animaux

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urinent en avant, ou qu’ils urinent en arrière. § 4[4]. Pas une seule espèce de poissons n’a de testicules, non plus qu’en général les animaux qui ont des branchies, non plus encore que tout le genre serpent. Il en est de même aussi de tous les animaux sans pieds, qui ne sont pas vivipares intérieurement. Les oiseaux ont bien des testicules ; mais leurs testicules sont intérieurs, près des lombes. Les quadrupèdes ovipares ont les testicules disposés de même ; par exemple, le lézard, la tortue, le crocodile, et parmi les vivipares, le hérisson.

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§ 5[5]. Les animaux qui ont des testicules intérieurs les ont près du ventre, comme le dauphin parmi les animaux sans pieds, ou l’éléphant parmi les quadrupèdes vivipares. Dans les autres animaux, les testicules sont extérieurement apparents. Nous venons de dire les différences qu’offre la suspension, relativement au ventre et aux parties voisines. Dans quelques animaux, par exemple, ils sont continus à la partie postérieure du ventre et n’en sont pas détachés ; c’est ce qu’on observe dans les porcs ; chez d’autres, au contraire, ils sont détachés, comme dans l’homme.

§ 6[6]. Ainsi qu’on vient de le voir, ni les poissons, ni les serpents n’ont de testicules ; mais ils ont deux conduits qui pendent au-dessous du diaphragme, de chaque côté du rachis, et qui se réunissent en un seul un peu au-dessus du point de sortie des

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excréments. Par « Un peu au-dessus », nous entendons désigner la région de l’arête ou épine. Ces conduits se remplissent de liqueur séminale dans la saison de l’accouplement ; et quand on les presse, il en sort de la semence de couleur blanche. § 7[7]. Quant aux différences que ces conduits présentent les uns par rapport aux autres, c’est par l’anatomie qu’il faut les étudier ; et un peu plus loin, il en sera question d’une manière plus détaillée, quand nous traiterons des conditions spéciales à chacun des poissons.

§ 8[8]. Tous les ovipares, soit bipèdes, soit quadrupèdes, possèdent des testicules dans le bassin, au-dessous du diaphragme, tantôt de couleur plus blanche, tantôt de couleur plus jaunâtre, et enveloppés de petites veines, excessivement ténues. De chacun des testicules, part un conduit ; et les deux se réunissent en un seul, comme chez les poissons, au-dessus du point de sortie de l’excrétion.

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C’est là précisément la verge, qu’on ne distingue pas dans les petits animaux, mais qui se voit bien mieux chez de plus grands, comme l’oie et les autres animaux de cette grosseur, quand l’accouplement va se faire. § 9[9]. Dans ces animaux comme dans les poissons, ces conduits prennent dans les lombes au-dessous du ventre et des intestins, entre la grande veine, d’où partent les deux conduits pour se rendre à chacun des testicules. Comme pour les poissons encore, la liqueur séminale se montre dans ces conduits, qu’elle remplit au temps de l’accouplement, et alors les conduits sont fort apparents ; la saison de l’accouplement une fois passée, les canaux deviennent parfois

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imperceptibles. § 10[10]. Les testicules dans les oiseaux sont encore de même : avant l’époque de l’accouplement, les testicules sont très-petits ou même tout à fait invisibles ; mais quand l’animal s’accouple, ils sont énormes. Cette transformation est surtout remarquable dans les pigeons et dans les perdrix, à tel point que quelques personnes croient que ces animaux n’ont pas de testicules en hiver.

§ 11[11]. Quand les testicules sont placés en avant, certains animaux les ont à l’intérieur, dans le ventre, comme les a le dauphin ; d’autres les ont extérieurs et très-apparents à l’extrémité du ventre. Dans ces animaux, les testicules sont pour tout le reste organisés de la même manière ; mais il y a toutefois cette différence que, quand les testicules sont intérieurs, ils sont purement et simplement des testicules séparés ; tandis que les testicules qui sont extérieurs, sont enveloppés dans ce qu’on appelle une Bourse.

§ 12[12]. Voici, dans tous les animaux qui ont des pieds

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et qui sont vivipares, l’organisation des testicules eux-mêmes. De l’aorte, partent des conduits veineux qui vont jusqu’à la tête de chacun des testicules. Il y en a deux autres qui partent des reins ; et ceux-là sont pleins de sang, tandis que ceux qui partent de l’aorte n’en ont pas. De la tête du testicule lui-même, un conduit, à la fois plus épais et plus nerveux, entre dans le testicule et se replie dans chacun des deux, en se dirigeant vers leur tête. A partir de la tête, les deux canaux se réunissent en un seul, pour aller en avant jusqu’à la verge. § 13[13]. Les conduits qui se replient ainsi, et qui reposent sur les testicules, sont entourés d’une même membrane ; et quand on ne divise pas cette

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membrane, on pourrait croire qu’il n’y a qu’un seul conduit. Le conduit qui repose sur le testicule contient une liqueur, qui est sanguinolente, moins cependant que celle des canaux supérieurs sortant de l’aorte. Dans ceux qui retournent vers le canal qui est dans la verge, la liqueur est de couleur blanche.

§ 14[14]. De la vessie, part un autre conduit, qui va rejoindre, à la partie supérieure, le canal de la verge ; et ce qu’on appelle la verge est en quelque sorte l’enveloppe de ce canal. § 15[15]. Qu’on étudie d’ailleurs tous ces détails sur le dessin ci-joint. Le point d’origine d’où partent les conduits est A. Les têtes des testicules et les canaux qui y descendent, sont

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KK. Les canaux qui, partant des testicules, descendent sur le testicule même, sont 00. Ceux qui rebroussent et qui renferment la liqueur blanche, sont BB. La verge est D ; la vessie est E ; et les testicules sont PP.

§ 16[16]. Quand on coupe ou qu’on enlève les testicules mêmes, les conduits se contractent en se retirant en haut. Quand les animaux sont jeunes, on peut détruire les testicules en les comprimant ; plus tard, il faut les couper pour les détruire. On a vu un taureau qui venait d’être coupé, saillir une vache sur-le-champ, et la féconder.

Voilà quelle est l’organisation des testicules dans les animaux.

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§ 17[17]. Dans les animaux qui ont des matrices, elles ne sont pas disposées toujours de la même manière ; elles ne sont pas pareilles dans tous ; et elles diffèrent beaucoup entre elles, dans les vivipares, et aussi dans les ovipares. Chez tous les animaux qui ont les matrices près des articulations, les matrices ont deux bords, dont l’un est dans la partie droite, et dont l’autre est dans la partie gauche. Mais le point de départ est unique, ainsi que l’ouverture, qui est comme un conduit très-charnu et cartilagineux,

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chez la plupart des animaux et chez les plus grands. De ces parties, les unes s’appellent Matrice et Utérus, d’où vient le nom de frères utérins ; et les autres s’appellent la tige et l’orifice de la matrice. § 18[18]. Dans les vivipares, bipèdes ou quadrupèdes, la matrice est toujours en bas du diaphragme, par exemple chez l’homme, le chien, le cochon, le cheval, le bœuf. Tous les animaux qui ont des cornes ont une organisation pareille à celle-là. Le plus souvent, les matrices ont, à l’extrémité de ce qu’on appelle leurs petites cornes, une spirale qui s’enroule. Dans les animaux qui pondent des œufs au dehors, les matrices ne sont pas toutes disposées de même. Ainsi, dans les

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oiseaux, elles sont près du diaphragme ; dans les poissons, elles sont placées au-dessous, comme celles des vivipares à deux pieds ou à quatre pieds ; si ce n’est que, dans les poissons, elles sont ténues, membraneuses, et larges. Aussi, dans les poissons très-petits, les deux rebords des matrices ne semblent être qu’un seul œuf chacun ; et chez les poissons dont on dit que leur œuf est comme du sable, on croirait qu’ils ont deux œufs seulement. Mais ce n’est pas un seul œuf ; c’est une multitude d’œufs, puisqu’on peut les diviser en un très-grand nombre d’œufs séparés.

§ 19[19]. La matrice des oiseaux a, en bas, sa tige charnue et ferme ; mais la partie qui touche au diaphragme est membraneuse, et si mince qu’il semble que les œufs sont hors de la matrice. Cette membrane est plus apparente dans les grands oiseaux ; et, en soufflant par la tige de la matrice, cette membrane s’élève et se gonfle. Dans les petits

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oiseaux, tous ces détails sont moins visibles. § 20[20]. Les quadrupèdes ovipares ont la matrice disposée de cette même façon, comme on peut le remarquer sur la tortue, le lézard, la grenouille, et les animaux de même genre. La tige qui est en bas est unique et plus charnue ; la fente et les œufs sont en haut, près du diaphragme. § 21[21]. Dans tous les animaux qui n’ont pas de pieds, et qui extérieurement mettent bas des petits vivants, tout en produisant d’abord un œuf dans leur intérieur, la matrice est divisée aussi en deux parties ; par exemple, les galéïdes (chiens de mer) et tous les animaux qu’on appelle sélaciens. On sait qu’on donne ce nom de Sélacien à tout animal qui, dépourvu de pieds, a des branchies et est vivipare ; chez ces animaux,

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la matrice est composée de deux parties également, et remonte jusqu’au diaphragme, comme celle des oiseaux. Commençant en bas au milieu des deux parties, elle se dirige vers le diaphragme ; les œufs s’y produisent également, et d’abord en haut, à l’origine du diaphragme ; puis les petits, s’avançant dans une portion plus large, sortent tout vivants des œufs. § 22[22]. Du reste, les différences qui distinguent ces animaux entre eux et qui les distinguent de tous les autres poissons, se comprendront bien mieux en les étudiant sur les figures tracées d’après l’anatomie.

§ 23[23]. Le genre des serpents offre de grandes différences, soit des serpents par rapport aux animaux

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dont on vient de parler, soit des serpents les uns par rapport aux autres. Toutes les espèces de serpents sont ovipares, à l’exception de la vipère, qui seule est vivipare, après avoir d’abord produit un œuf dans son intérieur. C’est là ce qui fait que sa matrice se rapproche beaucoup de celle des sélaciens. La matrice des serpents, allongée comme l’est leur corps, va, à commencer d’en bas, jusqu’au diaphragme par un seul conduit, qui se divise en continuant des deux côtés de l’épine, comme si chaque conduit était unique. Les œufs sont disposés par rangs réguliers dans la matrice ; et la bête les pond non pas un à un, mais les œufs sortent ensemble tout d’un coup.

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§ 24[24]. Tous les vivipares qui produisent leurs petits vivants, soit dans leur intérieur, soit au dehors, ont la matrice en haut du ventre ; tous les ovipares, au contraire, l’ont en bas, près des lombes. Tous les vivipares qui produisent leurs petits au dehors, mais qui intérieurement produisent d’abord des œufs, sont organisés des deux façons, de telle sorte qu’une partie de la matrice se trouve en bas vers les lombes et contient les œufs, tandis que l’autre partie est au haut des intestins, vers le point

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d’où sortent les excréments. § 25[25]. Voici encore une autre différence que les matrices offrent entre elles. Les animaux à cornes et qui n’ont pas de dents aux deux mâchoires, ont des cotylédons dans la matrice, tant que la bête porte son embryon ; et parmi les animaux qui ont deux rangées de dents, on peut citer le lièvre, le rat et la chauve-souris. Chez tous les autres animaux à deux rangées de dents, qui sont vivipares et qui ont des pieds, la matrice est toute unie ; les embryons sont alors suspendus à la matrice même, et ils ne sont pas attachés au cotylédon.

§ 26[26]. Telle est donc dans tous les animaux la disposition des parties non-similaires, tant au dehors qu’à l’intérieur.

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CHAPITRE II

Du sang et des veines ; ce sont les parties similaires le plus communément répandues ; lymphe, fibres, chair, os, cartilages, peau, membranes, nerfs, cheveux, ongles, graisse, suif, excrétions ; les observations antérieures ont été mal faites parce qu’on a surtout étudié les veines sur les animaux morts, ou sur des hommes maigres, où les veines étaient transparentes ; système de Syennésis de Chypre ; il fait partir toutes les veines du nombril ; système de Diogène d’Apollonie ; il distingue deux grosses veines, dont toutes les autres ne sont que des ramifications ; il les fait partir du ventre des deux côtés du rachis, pour se rendre au cœur, et de là, par la poitrine et les aisselles, aux bras jusqu’aux mains, et aux cuisses jusqu’aux pieds ; rameaux secondaires ; système de Polybe ; il distingue quatre paires de veines, qui partent toutes de la tête pour se rendre aux diverses extrémités du corps.

§ 1[27]. De toutes les parties similaires, celle qui est le plus communément répandue chez tous les animaux qui ont du sang, c’est le sang, et cette partie des organes qui sont naturellement destinés à contenir le sang. Cette partie spéciale se nomme la veine. Après la veine et le sang, ce qui a le plus d’analogie avec eux, ce sont la lymphe et les fibres,

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et cette partie qui plus que toute autre est le corps des animaux, la chair ou ce qui y correspond dans chaque animal. Puis les os, ou ce qui est analogue aux os, les arêtes et les cartilages. Puis encore, la peau, les membranes, les nerfs, les cheveux, les ongles, ou les parties correspondantes. A tout cela, il faut ajouter la graisse, le suif, et les excrétions, qui sont la fiente, le phlegme, et la bile, jaune ou noire.

§ 2[28]. Comme c’est le sang surtout et les veines qui, par leur nature, semblent ici le principe de tout le reste, c’est le premier sujet qu’il faut étudier, d’autant plus que quelques-uns de ceux qui l’ont traité antérieurement n’en parlent pas bien. § 3[29]. La cause de leurs erreurs tient à ce que les faits sont

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difficiles à observer. Dans les animaux morts, on ne voit plus la nature des veines principales, parce qu’elles s’affaissent plus encore que toutes les autres, dès que le sang en est sorti ; et il en sort toujours en totalité, comme d’un vase qui se vide. Aucun organe n’a par lui-même de sang, si ce n’est le cœur, qui encore en a peu ; et la masse entière du sang est dans les veines. Sur les animaux vivants, il est impossible d’observer l’organisation des veines, puisque naturellement elles sont à l’intérieur. Il résulte de tout cela qu’en observant sur les animaux morts et disséqués, tantôt on n’a pas pu observer les principales origines des veines, et tantôt que ceux qui ont fait leurs observations sur des hommes très-maigres,

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n’ont pu constater l’origine et l’organisation des veines que d’après des apparences tout extérieures.

§ 4[30]. Syennésis, médecin de Chypre, les explique d’abord de cette façon. « Les grosses veines, dit-il, sont organisées ainsi. Elles partent de l’œil près du sourcil ; et le long du dos, elles se rendent aux poumons sous les mamelles. Celle de droite passe à gauche ; et celle de gauche passe à droite. La veine de gauche se rend par le foie, au rein et au testicule ; celle de droite se rend à la rate, au rein et au testicule, pour, de là, arriver à la verge. »

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§ 5[31]. Diogène d’Apollonie s’exprime ainsi : « Voici, dit-il, l’organisation des veines dans le corps humain. Il y en a deux, qui sont les plus grosses de toutes. Elles se dirigent par le ventre, le long de l’épine du dos, l’une à droite, l’autre à gauche dans chaque jambe, du côté où elle est elle-même. En haut, elles se dirigent dans la tête près des clavicules, en traversant la gorge. C’est en partant de ces deux grandes veines que les autres se ramifient dans tout le corps ; les veines de la droite partant de la grosse veine à droite, les veines de la gauche partant de la grosse veine à gauche. Les deux grosses veines se rendent au cœur, en longeant l’épine dorsale.

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§ 6[32]. « D’autres, placées un peu plus haut, passent par la poitrine sous l’aisselle, pour se rendre chacune à celle des mains qui est de son côté. L’une s’appelle la splénique, et l’autre l’hépatique. Les extrémités de chacune se divisent, l’une allant au grand doigt, et l’autre au poignet. De ces deux-là, partent de petites veines qui se ramifient indéfiniment dans la main et les doigts,

§ 7[33]. « D’autres rameaux plus ténus partent des

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premières veines, et se rendent de la veine droite dans le foie, de la veine gauche dans la rate et dans les reins. Celles qui vont aux jambes, se divisent vers l’attache de ces membres, et se ramifient dans toute la cuisse. La plus grosse de ces veines passe derrière la cuisse, où sa grosseur est la plus apparente ; celle qui passe en dedans de la cuisse a un volume un peu moins grand. Ensuite, ces veines vont par le genou dans la jambe et dans le pied, comme celles qui se ramifient dans les mains ; elles descendent dans le tarse (ou cou-de-pied) ; et, de là, elles se répartissent entre les doigts (ou orteils).

§ 8[34]. Des grandes veines, il se ramifie également beaucoup de petites veines sur le ventre

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et les côtes. Celles qui se rendent dans la tête par la gorge paraissent fort grandes dans le cou. De chacune d’elles, à l’endroit où elles se terminent, il se ramifie un grand nombre de veines allant à la tête : les unes de droite à gauche ; les autres, de gauche à droite ; l’une et l’autre aboutissent à l’oreille.

§ 9[35]. Dans chaque côté du cou, il y a une autre veine qui longe la grande, mais qui est un peu plus petite qu’elle. La plupart des veines qui descendent de la tête viennent s’y réunir, et elles rentrent intérieurement par la gorge. De chacune d’elles, partent des veines qui passent sous l’omoplate, et se rendent ce dans les mains. Près de la veine splénique et

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de la veine hépatique, il y en a d’autres qui sont un peu plus petites, et qu’on ouvre quand on veut guérir des douleurs sous-cutanées ; mais c’est la splénique et l’hépatique que l’on ouvre quand les douleurs sont dans le ventre.

§ 10[36]. « D’autres veines encore, partant de celles-là, se rendent sous les mamelles. D’autres qui, de chacune d’elles, descendent dans les testicules, en passant par la moelle épinière, sont ténues. D’autres encore, placées sous la peau et au travers de la chair, se rendent aux reins, et aboutissent aux testicules chez les hommes, et à la

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matrice chez les femmes. Les premières qui partent du ventre sont d’abord plus larges ; elles se rétrécissent ensuite, jusqu’à ce qu’elles chance gent de droite à gauche, et de gauche à droite : ce on leur donne le nom de veines spermatiques.

§ 11[37]. « Le sang le plus épais est absorbé dans les chairs ; le reste, qui se rend dans ces différents organes, est léger, chaud et écumeux. »

§ 12[38]. Voilà ce que disent Syennésis et Diogène ; voici maintenant ce que dit Polybe :

§ 13[39]. « Il y a, dit-il, quatre paires de veines. Une première paire, qui vient du derrière de la tête,

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descend par le cou, et extérieurement le long de chacun des côtés de l’épine dorsale, pour aller des hanches dans les jambes. De là, par le bas de la jambe, elles arrivent aux malléoles externes et dans les pieds. C’est pour cela que dans les douleurs du dos et des hanches, on se fait saigner aux jarrets et aux malléoles externes.

§ 14[40]. « D’autres veines partant de la tête près des oreilles et traversant le cou, sont appelées jugulaires. Celles-là se dirigent le long du rachis et en dedans, près des lombes, aux testicules et aux cuisses. Après avoir traversé la partie interne des jarrets et des jambes, elles arrivent aux malléoles internes, et dans les pieds. C’est là encore ce qui fait que, pour les douleurs des lombes et des testicules, on se fait saigner aux jarrets et aux malléoles internes.

§ 15[41]. « La troisième paire ce de veines, partant des tempes, se dirige par le

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cou, au-dessous des omoplates, dans le poumon. Celles de droite passent à gauche, sous la mamelle, pour se rendre dans la rate et le rein ; celles de gauche passent à droite, se rendant du poumon, sous la mamelle au foie et à l’autre rein. Toutes les deux aboutissent également à l’anus. § 16[42]. « Enfin, les quatrièmes partent du devant de la tête et des yeux, au-dessous du cou et des clavicules. De là, elles se dirigent, par le haut des bras, jusqu’à leurs flexions ; et passant par les coudes, elles arrivent aux poignets et aux phalanges. Elles remontent ensuite de la partie inférieure des bras aux cuisses ; elles arrivent à la partie supérieure des côtes, jusqu’à ce qu’elles se rendent, l’une à la rate, l’autre au foie ; et après avoir passé sur le ventre, elles se terminent toutes les deux au membre honteux. »

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CHAPITRE III

Système personnel d’Aristote sur la distribution des veines dans le corps humain ; causes des erreurs antérieurement commises ; deux grosses veines dans le tronc ; la trachée-artère et l’aorte ; toutes les veines partent du cœur ; la pointe du cœur ; ses trois cavités ; leurs dimensions ; différences de la grande veine et de l’aorte ; rapports de la trachée-artère et du poumon ; ses ramifications ; citation d’Homère ; distribution des veines dans les bras, à la tête et dans les méninges ; le cerveau n’a pas de sang ; ramifications de l’aorte, analogues à celles de la trachée.

§ 1[43]. Telles sont à peu près toutes les idées que d’autres ont émises. Parmi les philosophes qui étudient la nature, il en est qui n’ont pas porté des observations aussi détaillées sur les veines ; mais tous sont d’accord pour les faire partir de la tête et du cerveau. En cela, ils ne sont pas dans le vrai.

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Ainsi qu’il a été dit plus haut, il est difficile de bien observer les veines ; et c’est seulement sur les animaux qu’on étouffe, après un long amaigrissement, qu’on peut les étudier comme il convient, quand on s’intéresse réellement à ces études. § 2[44]. Voici quelle est précisément la nature des veines. Dans le tronc, se trouvent deux veines, près du rachis et en dedans. La plus grosse des deux est en avant ; la plus petite est par derrière elle. La plus grosse est davantage à droite ; la plus petite est à gauche. On l’appelle parfois l’aorte, parce qu’on peut voir sa partie nerveuse même sur les animaux morts. Ces veines commencent en partant du cœur.

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§ 3[45]. Ce qui le prouve, c’est qu’en passant au travers d’autres viscères, elles y gardent toute leur intégrité, et y restent partout des veines. Le cœur semble, en quelque sorte, en être une partie, surtout de la veine qui est en avant et qui est la plus grosse, puisque au-dessus et au-dessous on trouve ces veines, et qu’au milieu c’est le cœur. § 4[46]. Le cœur, dans tous les animaux, a des cavités internes ; mais dans les animaux très-petits, c’est à peine si l’on peut y distinguer la plus considérable. Chez les animaux de moyenne grandeur, on voit déjà la seconde ; et sur les plus grands, on distingue aisément les trois.

§ 5[47]. La pointe du cœur étant dirigée en avant, ainsi qu’on l’a dit un peu plus haut, la cavité la

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plus grande est à droite et tout à fait en haut du cœur ; la plus petite est à gauche ; la cavité de grandeur moyenne est entre les deux. D’ailleurs, les deux réunies sont beaucoup plus petites que la grande. § 6[48]. Toutes les trois s’ouvrent dans le poumon ; mais la petitesse des conduits empêche qu’on ne le voie, si ce n’est pour une seule. La grande veine part donc de la cavité la plus grande, qui est en haut et à droite ; ensuite elle redevient veine dans la cavité du milieu, comme si la cavité n’était qu’une portion de la veine, où le sang forme une sorte d’étang. L’aorte part de la cavité moyenne ; mais ce n’est pas de la même manière ; elle communique avec le cœur par un conduit beaucoup plus étroit. La veine traverse le cœur, et se rend dans l’aorte, à partir du cœur. De plus,

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la grande veine est membraneuse et pareille à la peau ; l’aorte est moins large ; mais elle est excessivement nerveuse. En s’étendant assez loin vers la tête et vers les parties inférieures, elle se rétrécit,

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et elle devient tout à fait un nerf. § 7[49]. À partir du sommet du cœur, une portion de la grande veine se dirige vers le poumon, et au point de rencontre de l’aorte ; c’est une veine qui ne se divise pas et qui est très-grosse. Mais de cette veine, il sort deux rameaux, dont l’un se rend au poumon, et l’autre au rachis et à la dernière vertèbre du cou. La veine, qui se rend au poumon, lequel est lui-même divisé en deux portions, se partage d’abord en deux. Ensuite, elle se rend à chacune des bronches et à

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chaque orifice, plus grande pour les plus grands, plus petite pour les plus petits ; de telle sorte qu’il ne se trouve pas, dans ces organes, une seule portion où il n’y ait un orifice et une veinule. § 8[50]. On ne peut plus voir les plus petites de toutes, tant elles deviennent ténues ; mais le poumon, dans toute son étendue, paraît rempli de sang.

§ 9[51]. Tout en haut et partant de la grande veine, se trouvent les canaux des bronches, qui viennent de la trachée-artère. La veine qui se ramifie à la vertèbre

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du col et au rachis, revient de nouveau à la colonne dorsale ; et c’est d’elle qu’Homère a dit, dans ses vers :L’artère, qui des reins monte au col, est percée.

De cette veine, partent des veinules à chaque côte et à chaque vertèbre ; et elle se divise en deux, à la vertèbre qui est au-dessus des reins.

§ 10[52]. Voilà donc comment se distribuent toutes ces ramifications partant de la grande veine.

§ 11[53]. Mais au-dessus de ces rameaux de la veine qui

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part du cœur, la veine entière se divise pour se rendre à deux régions. Les unes se portent sur le côté et aux clavicules, pour se rendre ensuite par les aisselles dans les bras chez l’homme, dans les membres antérieurs chez les quadrupèdes, dans les ailes chez les oiseaux, et dans les nageoires inférieures chez les poissons. Ces veines, au point où elles se divisent tout d’abord, et où elles commencent, se nomment les jugulaires. Là où elles se divisent pour aller de la grande veine au cou, elles suivent l’artère du poumon. Il arrive parfois que, quand elles sont comprimées du dehors, on voit des hommes tomber dans l’insensibilité, sans être d’ailleurs asphyxiés, et fermer les yeux. § 12[54]. En suivant cette direction, et en enveloppant la trachée-artère,

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ces veines se rendent aux oreilles, là où les mâchoires se réunissent à la tête. À partir de ce point, elles se divisent en quatre autres veines, dont l’une, en se repliant, descend par le cou et l’épaule, et vient se réunir à la première ramification de la grande veine, vers le pli du bras. L’autre partie va se terminer aux mains et aux doigts. Une autre ramification, partant aussi de la région des oreilles, se rend au cerveau, et se partage en une foule de veinules très-petites sur ce qu’on appelle la méninge, qui enveloppe l’encéphale.

§ 13[55]. Le cerveau lui-même, chez tous les animaux,

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n’a point de sang ; pas une veine petite ou grande ne s’y rend. Les autres veines, qui se ramifient de la veine jugulaire, entourent circulairement la tête, ou bien vont se terminer aux organes des sens et aux dents, par des rameaux excessivement déliés. § 14[56]. C’est de la même manière que se ramifient les divisions de l’autre veine plus petite, appelée l’aorte ; elles accompagnent celles de la grande veine. La seule différence, c’est que ces canaux et ces veines sont en beaucoup plus petit nombre que les ramifications de la grande veine.

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CHAPITRE IV

Suite de la description des veines, dans les parties inférieures du corps ; ramifications de la grande veine dans le foie, la rate, le mésentère, les intestins ; ramifications de la grande veine et de l’aorte dans les reins, à la vessie et à la verge ; ramifications de l’aorte dans la matrice ; ramifications des deux veines par les aines aux jambes, aux pieds et aux orteils ; cette description générale s’applique à tous les animaux, pour les veines principales ; variétés des autres ; précautions à prendre pour bien observer l’organisation des veines, sur les animaux où elle est le plus apparente.

§ 1[57]. On voit donc comment se distribuent les veines au-dessus du cœur. La partie de la grande veine qui est au-dessous traverse directement le diaphragme. Elle se rattache à l’aorte et au rachis par des canaux membraneux et souples. Il en part

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une veine qui traverse le foie, courte, mais large ; et celle-là donne naissance à un grand nombre de veines très-déliées, qui se rendent dans le foie, où elles se perdent. De la veine qui traverse le foie, sortent deux rameaux, dont l’un aboutit au diaphragme et à ce qu’on appelle l’hypogastre, et dont l’autre, revenant par l’aisselle dans le bras droit, rejoint les autres veines qui se trouvent au pli du bras. C’est ce qui fait que les médecins, en ouvrant cette veine, peuvent soulager certaines douleurs de foie. § 2[58]. De la partie gauche de la grande veine, une veine courte, mais épaisse, se

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rend à la rate, où se perdent les veinules qui en sortent. Une autre portion de la grande veine, à gauche, se ramifie de la même façon, et se rend en montant dans le bras gauche. Seulement, la première est bien celle qui traverse le foie, tandis que celle-là est différente de celle qui se rend dans la rate. § 3[59]. D’autres veines encore, partant de la grande veine, se ramifient : l’une à l’épiploon ; l’autre, à ce qu’on appelle le Pancréas. De cette dernière, partent des veines nombreuses, qui traversent

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le mésentère. Toutes ces veines se terminent à une grosse veine, qui se répartit dans tout l’intestin et dans tout le ventre, jusqu’à l’œsophage. Dans ces mêmes parties, beaucoup d’autres veines se ramifient de celles-là.

§ 4[60]. Jusqu’aux reins, l’aorte et la grande veine restent, l’une et l’autre, à n’avoir qu’une branche ; mais là elles se soudent davantage au rachis ; et l’une et l’autre se divisent en deux, sous forme de Lambda. La grosse veine est un peu plus en arrière que l’aorte. L’aorte se soude de plus près au rachis, aux approches du cœur ; et l’attache s’y

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fait par des veinules nerveuses et petites. En sortant du cœur, l’aorte est très-creuse ; mais, dans son trajet, elle devient de plus en plus étroite, et se rapproche d’autant plus d’être un nerf. § 5[61]. De l’aorte, comme de la grande veine, partent des veines qui vont au mésentère ; mais elles ont beaucoup moins de volume ; elles sont étroites et fibreuses ; et elles se terminent en légers filets, creux et fibreux. Il n’y a pas de veine qui, de l’aorte, aille au foie ou à la rate. § 6[62]. Les rameaux de l’une et l’autre veine, aorte et grande-veine, se rendent à chacune des hanches ; et toutes deux,

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elles s’insèrent à l’os. Il y a aussi des veines qui, de l’aorte et de la grande veine, se rendent dans les reins ; seulement, elles n’entrent pas dans leur profondeur, et elles disparaissent dans le corps même des reins. § 7[63]. Il y a également deux autres canaux qui, partant de l’aorte, se dirigent à la vessie ; ils sont forts et continus. D’autres aussi viennent du fond des reins, et sont sans communication avec la grande veine. Du milieu de chacun des reins, part une veine large et nerveuse, qui longe le rachis lui-même, entre les nerfs. Ensuite, elles disparaissent, l’une et l’autre, dans chaque

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hanche ; et un peu plus loin, elles reparaissent, en se réunifiant sur la hanche. Leurs extrémités s’étendent à la vessie, et à la verge dans les mâles, et à la matrice dans les femelles.

§ 8[64]. Il n’y a pas de veines qui, de la grande veine, se rendent à la matrice ; mais il y en a beaucoup et de très-grosses qui viennent de l’aorte. De l’aorte et de la grande veine, quand elles se sont réunifiées, il en sort beaucoup d’autres, dont les unes vont aux aines, d’abord grandes et larges, et vont aboutir par les jambes aux pieds et aux orteils. D’autres à l’inverse, passant alternativement par les aines et les cuisses, vont, l’une de gauche à droite, et l’autre de droite à gauche ; et

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elles se rejoignent aux autres veines dans la région du jarret.

§ 9[65]. On doit voir clairement par ces descriptions comment se distribuent les veines, et quel est leur point de départ. Dans tous les animaux qui ont du sang, c’est là l’origine des veines et l’organisation des principales ; mais quant aux autres veines, la distribution n’en est pas la même dans tous les animaux, attendu que leurs parties ne sont pas non plus les mêmes, et que tous les animaux ne les ont pas toutes. On ne peut pas toujours les observer aussi distinctement ; mais on les observe surtout dans les animaux qui ont le plus de sang et qui sont les plus grands. Sur les petits et sur ceux qui n’ont pas beaucoup de sang, soit naturellement, soit par suite de la masse de leur graisse, il n’est pas aussi facile de se rendre compte des choses. Alors, les veines y sont tantôt submergées et confondues, comme les vaisseaux

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sont parfois perdus dans la vase qui les comble ; et tantôt au lieu de veines, ce sont des fibres en petit nombre, et qui ne sont que des fibres. Néanmoins la grande veine est, dans tous les animaux, la plus visible, même dans les animaux les plus petits.


CHAPITRE V

Organisation des nerfs ; ils partent aussi du cœur ; différences des nerfs et des veines sur les personnes maigres ; ordre des nerfs selon leur force, jarret, tendon, extenseur, omoplate, etc. ; nerfs autour des os ; nature des nerfs, déchirables en long ; liquide des nerfs ; action du feu ; pas d’engourdissement là où il n’y a pas de nerfs ; tous les animaux qui ont du sang ont des nerfs ; nerfs des poissons.

§ 1[66]. Les nerfs dans les animaux sont disposés de la manière suivante. Comme les veines, les nerfs

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partent aussi du cœur, qui a des nerfs et qui les contient dans sa plus grande cavité. Ce qu’on appelle l’aorte n’est qu’une veine nerveuse, dont les extrémités sont absolument de la nature des nerfs. On peut voir en effet que ces extrémités ne sont plus creuses, et qu’elles ont la même possibilité de se tendre qu’ont les nerfs, aux points où elles aboutissent aux flexions des os. § 2[67]. Néanmoins, les nerfs ne sont pas comme les veines, continus sans interruption, à partir de leur première et unique origine. Les veines ressemblent aux esquisses des peintres ; et elles prennent si bien toute la

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forme du corps que sur les personnes très-maigres, on croirait que la masse totale du corps n’est remplie que de veines ; car sur les gens maigres, les veines tiennent la même place que les chairs dans les gens gras.

§ 3[68]. Les nerfs sont répartis dans les membres, ou articulations, et dans les jointures des os, où se font les flexions ; et si, de leur nature, ils étaient continus, la continuité de tout se verrait aisément sur les personnes maigres. Les places principales des nerfs sont d’abord celle de qui dépend l’action du saut ; on la nomme le jarret ; et ensuite, un autre nerf double, le tendon. Puis, viennent, sous le rapport de la force, les nerfs qu’on appelle

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l’extenseur et le nerf de l’épaule. Puis enfin, il y a des nerfs auxquels on n’a pas donné de nom et qui servent à l’articulation des os ; car tous les os qui, en se rejoignant, s’articulent les uns sur les autres, sont reliés par des nerfs. § 4[69]. Autour de chaque os, il y a toujours une quantité de nerfs, si ce n’est pour la tête, où il n’y en a aucun, et où ce sont les sutures des os eux-mêmes qui la maintiennent. Le nerf peut, par sa nature, se diviser en long, mais non dans sa largeur ; et il peut s’allonger

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beaucoup. Autour des nerfs, il y a un liquide muqueux, de couleur blanche, gluant, qui les nourrit et qui paraît les produire. La veine peut être brûlée sans se détruire ; mais le nerf soumis au feu est détruit tout entier ; et si on le coupe, il ne reprend jamais. § 5[70]. L’engourdissement n’affecte pas les parties du corps où il n’y a pas de nerfs. Celles où il y a le plus de nerfs sont les pieds, les mains, les côtes et les omoplates, le cou et les bras.

§ 6[71]. Tous les animaux qui ont du sang ont aussi

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des nerfs ; mais dans les animaux sans articulations, et qui n’ont ni pieds, ni mains, les nerfs sont ténus et imperceptibles. Dans les poissons, les nerfs les plus apparents sont ceux des nageoires.


CHAPITRE VI

Des fibres ; liquide qu’elles contiennent ; leur nature ; fibres particulières du sang ; leur présence est indispensable pour qu’il se coagule ; exceptions pour quelques animaux ; le cerf, le lièvre, le bubale, et le mouton.

§ 1[72]. Les fibres sont placées au milieu entre les nerfs et les veines. Quelques-unes renferment un liquide, celui de la lymphe, et elles vont des nerfs aux veines, et des veines aux nerfs. § 2[73]. Il est encore

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une autre espèce de fibres qui se forment dans le sang ; mais ce n’est pas dans le sang de tout animal indistinctement. Quand on enlève ces fibres au sang, il ne se coagule plus ; il se coagule, si on les y laisse. Il y en a dans le sang de presque tous les animaux ; mais il n’y en a pas dans le sang du cerf, du chevreuil, du bubale et de quelques autres. Aussi, le sang de ces animaux ne se coagule-t-il pas comme celui des autres. § 3[74]. Le sang du cerf se coagule à peu près comme celui du lièvre. D’ailleurs, le sang de ces deux espèces ne donne pas une coagulation solide comme celles des autres, mais une coagulation flasque et humide, comme celle du lait où l’on n’aurait pas mis de présure. § 4[75]. Le sang du bubale se coagule davantage,

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et à peu près autant, ou légèrement moins que celui des moutons.

§ 5[76]. Voilà ce qu’il y avait à dire sur les veines, les nerfs et les fibres.


CHAPITRE VII

Des os ; ils ne sont jamais isolés ; ils se rattachent tous à l’épine dorsale ; description du rachis ; les vertèbres ; le crâne ; ses sutures dans l’homme ; suture circulaire dans la femme ; les mâchoires, les dents ; dureté des dents ; les omoplates ; os des bras, os des mains ; os des extrémités inférieures, ou côlènes ; chevilles ; os des pieds ; ressemblances des os chez les vivipares ; os à moelle ; os sans moelle ; le lion ; dureté de ses os ; analogies chez les sélaciens et les poissons ; arêtes des poissons ; les os du serpent ; variétés dans la consistance de l’épine dorsale selon la grandeur des animaux, et selon les organes ; différences correspondantes.

§ 1[77]. Tous les os dans les animaux n’ont qu’un point de départ ; et ils se relient les uns aux autres, tout

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comme les veines. Il n’y a point d’os qui soit isolé et séparé. Le point de départ est le rachis, dans tous les animaux qui ont des os. § 2[78]. Le rachis se compose de vertèbres, et il va de la tête aux hanches et au siège. Toutes les vertèbres sont percées. L’os qui est en haut, celui de la tête, touche aux dernières vertèbres ; et il s’appelle le crâne. La partie de cet os, dentelée en forme de scie, est la suture. § 3[79]. Le crâne n’est pas identique dans tous les animaux ; chez les uns, il est composé d’un os unique, comme dans le chien ; chez les

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autres, il est de plusieurs pièces, comme dans l’homme. Et encore la femme n’a-t-elle qu’une suture circulaire, tandis que l’homme en a trois, qui se réunissent au sommet et forment un triangle. On a même vu une fois une tête d’homme sans suture. La tête ne se compose pas de quatre os, mais de six ; et les deux qui sont vers les oreilles sont petits, comparativement aux autres. § 4[80]. Les os qui forment les mâchoires viennent de la tête. Dans tous les animaux, c’est la mâchoire d’en bas qui est mobile ; le crocodile de rivière est le seul animal qui meuve sa mâchoire d’en haut.

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Dans les mâchoires, sont placées les dents, espèce d’os qui, en un sens, n’est pas percée, et qui est percée en un autre sens. C’est, parmi les os, le seul qu’on ne puisse pas tailler.

§ 5[81]. C’est de l’épine dorsale que viennent, l’os qui supporte la tête, les clavicules et les côtes. La poitrine s’appuie sur les côtes ; quelques côtes se

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rejoignent à elle : d’autres ne s’y rejoignent pas ; car il n’est pas un seul animal qui ait un os autour de la région du ventre. Puis viennent les os qui sont dans les épaules, d’abord ceux qu’on appelle omoplates, puis les os des bras, qui y tiennent, et les os de la main tenant à ces derniers. Cette dis-position des os est la même dans tous les animaux qui ont des membres de devant. § 6[82]. En bas de l’épine, là où elle finit, vient, après la hanche, la cavité cotyloïde ; puis, les os des extrémités inférieures, tant ceux des cuisses que ceux des jambes,

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qu’on appelle les Côlènes. Les chevilles en sont une partie ; et dans les chevilles, on comprend ce qu’on appelle les ergots, chez les animaux qui ont une cheville. Viennent, à la suite, les os des pieds.

§ 7[83]. Les vivipares qui ont du sang et qui marchent ne diffèrent presque pas entre eux sous le rapport des os ; et les différences principales dans les os qui se correspondent, portent sur leur dureté, leur mollesse ou leur grosseur. § 8[84]. Certains os ont de la moelle ; d’autres n’en ont pas, dans un seul et même animal. Il y a même des animaux qui semblent n’avoir point du tout de moelle dans les os : le

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lion par exemple, qui n’a en effet de la moelle qu’en très-petite quantité, et très-déliée, dans quelques os à peine, n’en ayant guère que dans les cuisses et dans les pattes de devant. D’ailleurs, le lion est l’animal qui a les os les plus solides ; et ils sont tellement durs que, quand on les choque les uns contre les autres, on en fait sortir du feu, comme si c’étaient des cailloux. § 9[85]. Le dauphin a également des os ; mais il n’a pas d’épine. Chez tous les autres animaux qui ont du sang, tantôt les os ne sont que très-peu différents, comme ceux des oiseaux ; dans les autres, il y a des parties correspondantes et identiques par analogie, par exemple dans les poissons, où les vivipares ont une épine cartilagineuse, comme ceux que nous

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appelons les sélaciens, et où les ovipares ont une arête, qui reproduit le rachis des quadrupèdes. § 10[86]. Une organisation propre aux poissons, c’est qu’ils ont, dans quelques espèces, de petites arêtes isolées et minces, qui traversent la chair. Le serpent est à peu près comme les poissons, et son rachis est une sorte d’arête. Dans les quadrupèdes ovipares, les plus grands ont une épine dorsale plus semblable à l’os ; les plus petits l’ont plus semblable à l’arête. D’ailleurs, tous les animaux qui ont du sang ont un rachis de la nature de l’os,

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ou de la nature de l’arête. § 11[87]. Quant aux autres espèces d’os, tantôt les animaux les ont ; tantôt ils ne les ont pas ; et selon qu’ils ont les parties où ces os doivent se trouver, ils ont aussi les os propres à ces parties spéciales. Ainsi, les animaux qui n’ont ni jambes ni bras, n’ont pas les os Côlènes, pas plus que les animaux qui ont bien ces parties, mais qui ne les ont pas semblables. Dans tous ces animaux, il y a des différences de plus et de moins, et aussi de proportions.

§ 12[88]. Telle est donc dans les animaux la disposition des os et leur organisation naturelle.

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CHAPITRE VIII

Des cartilages ; leurs ressemblances et leurs différences avec les os ; les cartilages ne sont pas percés ; et ils n’ont pas de moelle ; cartilages des vivipares et des sélaciens.

§ 1[89]. Le cartilage est de la même nature que les os ; il n’y a entre eux qu’une différence de plus ou de moins ; et de même que l’os, le cartilage, une fois coupé, ne repousse plus. § 2[90]. Dans les animaux qui vivent sur terre et qui sont vivipares, les cartilages de ceux qui ont du sang ne sont jamais percés ; et il ne s’y forme pas de moelle, comme il s’en forme dans les os. Mais dans les sélaciens, où l’épine est cartilagineuse, ceux qui sont larges

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ont un cartilage correspondant aux os du rachis, et contenant un liquide qui a quelque chose de la moelle. § 3[91]. Les vivipares qui marchent ont des cartilages aux oreilles, au nez et à certaines extrémités de leurs os.


CHAPITRE IX

Des ongles, des cornes, des becs et des parties analogues à celles-là ; leur nature ; elles peuvent se plier et se fendre ; l’os se brise ; couleur de ces parties, pareille à celle de la peau ; les dents sont de la couleur des os ; les noirs Éthiopiens ont les dents blanches et les os blancs ; cornes généralement creuses à la base, solides à la pointe ; exception du cerf, perdant ses bois chaque année, s’il n’est pas châtré ; cornes mobiles des bœufs de Phrygie ; des ongles et des doigts ; l’homme, l’éléphant, le lion, l’aigle.

§ 1[92]. Il y a, dans les animaux, d’autres espèces de parties qui ne sont pas de la même nature que les os, et qui ne s’en éloignent guère, cependant ; ce

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sont les ongles, les soles, les griffes, les cornes, et encore le bec, tel qu’on le voit chez les oiseaux, dans ceux des animaux qui présentent ces parties diverses. Toutes ces parties nouvelles peuvent se plier et se fendre, tandis que l’os au contraire ne peut jamais, ni se plier, ni se fendre ; il ne peut que se rompre. § 2[93]. La couleur des cornes et des ongles, du sabot et de la sole, suit la couleur de la peau et des poils. Ainsi, les animaux qui ont ces parties, et dont la peau est noire, ont aussi les cornes, les sabots et les soles également noires ; les blancs les ont blanches ; elles sont de couleur intermédiaire chez les animaux qui sont entre deux. Il en est de même des ongles. § 3[94]. Les dents sont naturellement de la couleur des os. Aussi, les

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hommes de couleur noire, comme les Éthiopiens et les peuples de même race, ont les dents blanches comme leurs os, tandis que les ongles sont noirs, comme tout le reste de leur peau.

§ 4[95]. Le plus souvent, les cornes sont creuses à partir du point d’excroissance d’où vient l’os sorti de la tête ; à l’extrémité, elles sont pleines et solides ; et elles sont simples. Il n’y a que le cerf dont les cornes soient pleines dans toute leur longueur, et divisées en plusieurs rameaux. Les autres animaux qui ont des cornes ne les perdent pas ; le cerf seul les perd tous les ans, à moins qu’il n’ait été coupé. On parlera plus tard de la castration dans les animaux. § 5[96]. Les cornes tiennent plutôt à la peau qu’à l’os ; et c’est ainsi qu’on voit en Phrygie, et dans d’autres contrées, des bœufs

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qui font mouvoir leurs cornes, comme leurs oreilles. § 6[97]. Tous les animaux qui ont des doigts ont des ongles, et tous ceux qui ont des pieds ont aussi des doigts. Il n’y a d’exception que pour l’éléphant, qui a des doigts non séparés et à peine articulés, sans aucune trace d’ongles. Mais, parmi les animaux qui sont pourvus d’ongles, les uns les ont tout droits, ainsi que l’homme les a ; les autres les ont recourbés, comme le lion entre les quadrupèdes, et l’aigle entre les volatiles.

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CHAPITRE X

Des poils, de la peau et de leurs analogues ; épaisseur ou légèreté des poils ; rudesse et douceur selon les parties du corps, et selon les climats ; la peau de l’homme est la plus fine de toutes ; parties du corps où elle ne repousse pas une fois coupée ; couleur des poils ; elle varie avec l’âge ; cheveux blancs dans l’homme ; poils qu’il apporte en naissant ; poils qui viennent plus tard ; la calvitie ; les eunuques ; femmes qui ont quelque barbe ; prêtresses de Carie ; longueur des poils ; les cils ; les sourcils ; humeur visqueuse des poils ; rapports des varices et des poils ; croissance des poils ; changements de la couleur des poils dans les oiseaux ; la grue ; influence des saisons et des climats ; influences des eaux ; les rivières de la Thrace ; le Scamandre ; Homère cité ; les plumes arrachées ne repoussent pas ; ailes et aiguillon de l’abeille.

§ 1[98]. Voici maintenant ce qu’il en est des poils et de leurs analogues, et de la peau. Tous les animaux qui ont des pieds et qui sont vivipares ont des poils ; tous ceux qui ont des pieds, mais qui sont ovipares, sont pourvus de lamelles écailleuses ; les

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poissons qui ont des œufs grenus ont seuls, des écailles. Parmi les poissons à corps allongé, le congre, et la murène n’ont pas d’œufs de cette espèce ; et l’anguille n’en a point du tout. § 2[99]. L’épaisseur ou la légèreté des poils, ainsi que leur longueur, dépendent de la place où ils croissent, dans les différentes parties de l’animal, et aussi de la nature de la peau. Là où la peau est plus épaisse, le poil est plus rude et plus fort, dans presque tous les cas. Le poil est plus abondant et plus long dans les places qui sont plus enfoncées et plus humides, pourvu toutefois que cette place soit destinée à avoir des poils. Il en est de même pour les

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animaux à écailles ou à lamelles écailleuses. § 3[100]. Les animaux qui ont un poil naturellement doux, le prennent plus rude s’ils sont bien nourris ; chez ceux qui l’ont naturellement rude, il devient alors plus doux et plus rare. Le poil diffère encore selon les contrées plus chaudes ou plus froides ; c’est ainsi que les cheveux de l’homme sont durs dans les climats chauds, et doux, au contraire, dans les climats froids. Les poils tout droits sont doux ; les poils frisés et crépus sont rudes et durs.

§ 4[101]. La nature des poils permet de les fendre ; et ils diffèrent les uns des autres, en ce qu’ils sont plus ou moins divisibles. Il en est qui, prenant peu à peu plus de dureté, en arrivent à n’être plus des poils, mais des piquants, comme les poils des hérissons de terre. La même transformation a

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lieu pour les ongles ; car il y a des animaux dont les ongles sont aussi durs que des os. § 5[102]. L’homme a la peau plus mince qu’aucun autre animal, en proportion de sa grosseur. Dans la peau de tout animal quelconque, il y a toujours une humeur visqueuse, moins abondante chez les uns, plus chez les autres, comme chez les bœufs, par exemple, où elle sert à faire de la colle ; dans certains pays, on fait aussi de la colle avec cette viscosité des poissons.

§ 6[103]. La peau est par elle-même insensible quand on la coupe ; et surtout la peau de la tête, parce que là il n’y a pas du tout de chair entre la peau et l’os. Du reste, là où il n’y a que de la peau, elle

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ne reprend point quand une fois elle a été coupée, comme à la partie mince de la joue, au prépuce et à la paupière. § 7[104]. Chez tous les animaux, la peau est continue, et elle ne s’interrompt que là où les ouvertures naturelles se dégorgent, et aussi à la bouche et aux ongles. Tous les animaux qui ont du sang ont de la peau ; mais tous n’ont pas de poil, et ils se distinguent, ainsi qu’on l’a déjà expliqué plus haut.

§ 8[105]. La couleur du poil varie quand l’animal devient vieux ; dans l’homme, les poils blanchissent avec l’âge. Ce changement se passe aussi dans les autres animaux ; mais il n’y est pas très-sensible, excepté dans le cheval. Le poil commence à blanchir par le bout ; le plus souvent, les cheveux gris deviennent

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blancs tout à coup en entier ; ce qui prouve bien que le grisonnement des cheveux ne tient pas à une dessiccation, comme on le prétend quelquefois ; car rien ne se dessèche d’un seul coup. Dans cette efflorescence qu’on appelle la lèpre blanche, tous les poils deviennent gris. Dans quelques maladies, les cheveux grisonnent ; et, après être tombés, ils repoussent noirs après la guérison. § 9[106]. Les cheveux deviennent plus vite gris quand on les couvre que quand on les laisse à l’air. Dans l’homme, ce sont les tempes qui grisonnent les premières ; le devant de la tête devient gris avant le derrière ; et les parties sexuelles grisonnent en dernier lieu.

§ 10[107]. II y a des poils que l’homme apporte en naissant ; d’autres ne poussent qu’avec l’âge, et l’homme

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est le seul parmi les animaux chez qui se manifeste cette différence. Les poils qu’il apporte en naissant sont des cheveux, des cils, et des sourcils. Les poils qui ne paraissent que postérieurement sont d’abord ceux des parties sexuelles ; puis, ceux de l’aisselle, et enfin, ceux du menton. Ainsi, le nombre des parties où poussent les poils qui paraissent dès la naissance et ceux qui viennent plus tard, est égal. § 11[108]. Ce sont les poils de la tête qui, avec l’âge, disparaissent et tombent le plus abondamment, et les premiers. Ce ne sont d’ailleurs que les cheveux de devant ; car on ne devient jamais chauve par derrière la tête. Le dépouillement du sommet s’appelle Calvitie ; le dépouillement des sourcils s’appelle, en grec, Anaphalantiasis ; mais aucun de ces changements ne se produit jamais avant qu’on n’ait eu des rapports sexuels. L’enfant ne devient jamais chauve,

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non plus que la femme, ni l’eunuque. Si l’eunuque a été opéré avant la puberté, les poils qui doivent venir après elle ne poussent plus chez lui ; s’il a été opéré plus tard, ce sont ces poils-là qui, chez lui, sont les seuls à tomber, excepté ceux des parties sexuelles.

§ 12[109]. La femme n’a pas de poils au menton ; ce n’est qu’exceptionnellement que quelques-unes en ont un peu, quand leurs mois viennent à cesser. Les prêtresses de Carie en ont aussi ; et, en elles, on regarde que c’est un présage de l’avenir.

Les autres poils viennent également aux femmes,

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mais en quantité moindre. Il y a des hommes et des femmes qui, par constitution, sont privés des poils qui poussent avec l’âge ; mais ces individus sont impuissants, lorsqu’en même temps ils n’en ont pas aux parties sexuelles.

§ 13[110]. Les poils autres que ceux-là poussent proportionnellement plus ou moins longs ; ce sont surtout ceux de la tête qui poussent le plus ; puis, ceux de la barbe ; les plus fins poussent davantage. Chez quelques sujets, les sourcils deviennent si épais dans la vieillesse qu’il faut les couper. La cause en est que les sourcils sont placés à la jointure des os, et que les os, en s’écartant dans la vieillesse, laissent passer plus d’humidité. Les cils des paupières ne croissent pas ; mais ils tombent quand on

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commence à user des plaisirs sexuels ; et ils tombent d’autant plus qu’on en use davantage. Ils ne grisonnent que le plus tard de tous. Les poils qu’on arrache peuvent repousser jusqu’à l’âge mûr ; ensuite, ils ne repoussent plus.

§ 14[111]. Tous les poils ont à leur racine une humeur gluante ; et au moment où l’on vient de les arracher, ils peuvent enlever les petits objets qu’ils touchent. § 15[112]. Les animaux dont le poil est de couleur variée, ont une variété égale sur leur peau, et aussi sur la peau de la langue. Quant à la barbe, il y a des hommes qui l’ont épaisse à la lèvre et au menton ; d’autres ont ces parties assez lisses ; et alors, ce sont les mâchoires ou les joues qui, chez eux, sont velues. Ceux dont le menton est imberbe deviennent chauves moins aisément. § 16[113]. Dans certaines maladies,

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les poils poussent davantage ; par exemple, dans les consomptions et aussi dans la vieillesse, et même sur les cadavres ; mais ils perdent de leur souplesse et deviennent plus durs. On remarque les mêmes changements dans les ongles. Les poils de naissance tombent plus vite chez les individus qui abusent des plaisirs sexuels ; les poils qui ne viennent qu’avec l’âge poussent plus vite sous la même influence. Les gens sujets aux varices sont moins exposés à la calvitie ; et si, étant déjà chauves, ils contractent des varices, on voit parfois leurs cheveux repousser.

§ 17[114]. Le poil ne pousse pas par le bout qu’on a coupé ; mais il grossit en poussant du bas de sa racine. Les écailles des poissons durcissent et épaississent ; et elles deviennent d’autant plus dures que l’animal maigrit et vieillit. Chez les quadrupèdes,

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les poils des uns, la laine des autres, deviennent plus longs, mais moins abondants ; les sabots des uns, les soles des autres, s’allongent, avec l’âge, comme aussi les becs des oiseaux. Les pinces s’accroissent également, de même que les ongles.

§ 18[115]. Ces changements amenés par l’âge n’ont pas lieu dans les animaux qui ont des ailes, comme les oiseaux. Il faut toutefois excepter la grue, qui, étant naturellement de couleur cendrée, prend avec le temps des plumes plus noires. Mais les influences que produisent les saisons sont très-marquées ; et par exemple, quand le froid redouble, on voit quelquefois les oiseaux dont le plumage est d’une couleur uniforme, passer d’un noir plus ou

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moins foncé au blanc, comme le corbeau, le moineau, les hirondelles. Mais l’on n’a jamais vu les races de couleur blanche passer au noir. Beaucoup d’oiseaux changent si bien de couleur, avec les saisons, qu’on ne les reconnaît plus, si l’on n’est point fait à ces changements. § 19[116]. Chez d’autres animaux, la couleur du poil varie avec la couleur des eaux qu’ils boivent ; ici ils deviennent blancs, et là ils deviennent noirs. Cette influence s’étend jusque sur les portées. Dans bien des lieux, on trouve des eaux qui font que les moutons, qui s’accouplent après en avoir bu, ont des agneaux noirs. On cite, par exemple, le fleuve appelé le Froid, dans la

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Chalcidique de Thrace, dans l’Assyritis, qui produit cet effet. Dans l’Antandrie, il y a deux rivières dont l’une fait produire des moutons blancs ; et l’autre, des moutons noirs. Il paraît aussi que les eaux du Scamandre, à ce que l’on dit, rendent les moutons roux ; et voilà pourquoi, dit-on encore, Homère l’appelle le Xanthe (le Roux), au lieu de Scamandre.

§ 20[117]. Aucun autre animal quelconque n’a de poils à l’intérieur ; et les poils des extrémités sont placés en dessus, et jamais en dessous. Le lièvre seul a

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des poils en dedans des joues, et sous les pattes. Le rat de mer, le cétacé, n’a pas de dents dans la bouche ; mais ce sont des soies pareilles à celles du porc.

§ 21[118]. Comme on l’a vu, les poils, quand on les a coupés, croissent par en bas, mais non par le haut. Les plumes, une fois coupées, ne poussent, ni par en haut, ni par en bas ; mais elles tombent. L’aile de l’abeille, quand elle lui a été arrachée, ne repousse pas, non plus que celles des animaux où l’aile est sans divisions. L’aiguillon ne repousse pas davantage, quand l’abeille vient à le perdre ; et dans ce cas, elle meurt.

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CHAPITRE XI

Des membranes ; il y en a dans tous les animaux, où elles sont plus, ou moins fortes ; membranes de l’encéphale ; membrane du cœur ; la membrane une fois coupée ne reprend pas ; membranes des os ; la membrane de l’épiploon est dans tous les animaux qui ont du sang ; place de l’épiploon ; la vessie est une sorte de membrane ; tous les vivipares en ont une ; la tortue, parmi les ovipares, en a une aussi ; maladie de la pierre. — Résumé partiel.

§ 1[119]. Dans tous les animaux qui ont du sang, il y a aussi des membranes. La membrane ressemble à une peau serrée et mince ; mais c’est une autre nature. La membrane ne peut, ni se déchirer, ni se distendre. Pour chaque os, pour chaque viscère, il y a une membrane, dans les animaux les plus grands et dans les plus petits ; mais dans les plus petits animaux, les membranes ne se voient

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pas aisément, parce qu’elles sont très-minces et très-peu étendues. § 2[120]. Les membranes les plus considérables sont d’abord les deux membranes qui enveloppent le cerveau ; et des deux, celle qui est près de l’os est plus forte et plus épaisse que celle qui enveloppe l’encéphale. La plus considérable ensuite est celle du cœur. Une membrane, réduite à elle seule, ne repousse pas, une fois qu’elle a été coupée ; et les os dépouillés de leurs membranes se carient. § 3[121]. L’épiploon est également une

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membrane ; on trouve l’épiploon chez tous les animaux qui ont du sang ; seulement, chez les uns, il est graisseux ; chez les autres, il est sans graisse. Dans les vivipares qui ont les deux rangées de dents, haut et bas, il commence et il est suspendu au milieu de l’estomac, là où l’estomac présente une sorte de suture. Dans les animaux qui n’ont point les deux rangées de dents, il part également du grand estomac, auquel il est attaché de la même façon.

§ 4[122]. La vessie est bien encore une sorte de membrane ; mais c’est une membrane d’une autre nature, puisqu’elle peut se distendre. Tous les animaux n’ont pas de vessie ; mais tous les vivipares en ont une. Dans les ovipares, la tortue est

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la seule à en avoir. Une fois coupée, la vessie ne se cicatrise point, si ce n’est à l’origine même de l’uretère. C’est quelque chose d’excessivement rare ; mais on en a vu déjà quelques cas. Après la mort, le liquide n’y passe plus. Pendant la vie, il s’y dépose des concrétions sèches, qui forment des pierres ; c’est une maladie ; et il arrive parfois que ces dépôts dans la vessie prennent toute l’apparence de vrais coquillages.

§ 5[123]. On le voit donc : la veine, le nerf, la peau, les fibres, les membranes, et aussi les poils, les ongles, les soles, les sabots, les cornes, les dents, les becs, les cartilages et les os, ainsi que tous les organes analogues, sont comme on vient de le dire.

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CHAPITRE XII

De la chair ; sa place entre la peau et les os ; elle est divisible en tous sens ; la maigreur ; la graisse ; influence de l’alimentation ; relation de la chair et des veines ; couleur du sang plus rouge ou plus noir.

§ 1[124]. La chair, et ce qui a une nature approchant de la chair, dans les animaux qui ont du sang, est placée, chez tous, entre la peau et l’os, ou les parties qui correspondent aux os ; car ce que l’arête est à l’os, la matière charnue l’est aux chairs proprement dites, dans les animaux qui ont des os et des arêtes. § 2[125]. La chair est divisible en tout sens, et non pas seulement dans sa longueur, comme le sont les nerfs et les veines. La chair disparaît quand l’animal maigrit, et elle fond en veines et

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en fibres. Mais si l’animal a une nourriture plus abondante, la graisse se substitue aux chairs. § 3[126]. Les animaux très-charnus ont les veines plus petites, et le sang plus rouge ; leurs viscères et leur ventre sont peu développés. Dans les animaux qui ont de grosses veines, le sang est plus noir ; les intestins sont gros ; le ventre, également ; et les chairs sont moins volumineuses. Les animaux qui ont le ventre petit deviennent charnus et gras.

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CHAPITRE XIII

De la graisse et du suif ; leurs rapports et leurs différences ; place de la graisse entre la peau et la chair ; graisse de l’épiploon ; graisse du foie ; graisse du ventre ; graisse des reins ; maladies des reins provenant de l’excès de graisse et de nourriture ; pâturages de Sicile ; suif dans les yeux ; les animaux gras, mâles ou femelles, sont moins féconds ; les animaux engraissent et s’alourdissent en vieillissant.

§ 1[127]. La graisse et le suif diffèrent l’un de l’autre, en ce que le suif est tout à fait cassant et qu’il se coagule par le froid, tandis que la graisse est fluide et ne se coagule pas. Les bouillons faits avec des animaux gras ne se coagulent point, par exemple, avec le cheval et le porc ; au contraire, les bouillons faits avec la chair des animaux à suif se coagulent, comme ceux du mouton et de

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la chèvre. § 2[128]. Les places aussi où se produisent le suif et la graisse sont différentes. La graisse se produit entre la peau et la chair ; le suif ne se produit qu’à l’extrémité des chairs. L’épiploon devient gras dans les animaux à graisse ; il se charge de suif dans les animaux à suif. Les animaux qui ont les deux rangées de dents ont de la graisse ; ceux qui n’ont pas ces deux rangées ont du suif. § 3[129]. Parmi les viscères, le foie devient gras chez quelques animaux ; par exemple, celui des sélaciens, entre les poissons ; aussi, on en tire de l’huile en le faisant fondre. Du reste, les sélaciens sont, de tous les poissons, ceux qui sont le moins gras, en graisse isolée, soit dans la chair, soit dans le ventre. Le suif des poissons est graisseux, et il ne se coagule pas. § 4[130]. Les animaux ont la

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graisse, tantôt répandue dans la chair, tantôt séparée. Ceux qui n’ont point la graisse à part, sont moins gras sur le ventre et l’épiploon, comme l’anguille, parce qu’ils ont peu de suif à l’épiploon. Dans la plupart, c’est la région du ventre qui engraisse, surtout chez les animaux qui font peu de mouvement. § 5[131]. Dans les animaux gras, la cervelle est gluante, comme celle du porc ; dans les animaux à suif, elle est sèche. Les viscères des animaux s’engraissent plus particulièrement dans la région des reins ; mais le rein droit est toujours le moins chargé de graisse ; et même quand les reins en sont surchargés, il reste toujours, vers le milieu, une place qui n’en a pas. § 6 Les animaux à suif sont surtout sujets à des maladies des reins,

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qui atteignent plus spécialement les moutons, qui meurent quand les reins sont absolument couverts de graisse. Ces maladies des reins tiennent à un excès de nourriture, comme dans les pâturages de Sicile près de Léontium. Aussi ne lâche-t-on les troupeaux que très tard à la fin du jour, pour qu’ils prennent moins de nourriture.

§ 7[132]. Chez tous les animaux, il y a de la graisse dans la partie voisine de la prunelle des yeux ; car tous ceux dont les yeux ont cet organe et qui n’ont pas les yeux durs, ont cette partie garnie de suif. § 8[133]. Les animaux, tant mâles que femelles, sont moins féconds quand ils sont gras. Avec les années, tous ils engraissent plus que dans les premiers temps de la vie, où ils sont jeunes, surtout

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quand, ayant pris tout leur développement en hauteur et en largeur, ils ne font plus que croître en épaisseur.


CHAPITRE XIV

Du sang ; il est renfermé dans les veines ; le sang n’est pas sensible, non plus que la cervelle et la moelle ; il est répandu dans tout le corps ; saveur et couleur du sang ; sa coagulation ; quantité du sang selon les espèces d’animaux ; rapports du sang et de la graisse ; le sang de l’homme est le plus pur et le plus léger de tous ; le sang est répandu dans tout le corps ; il apparaît d’abord dans le cœur ; la lymphe du sang ; le sang pendant le sommeil ; altération du sang ; hémorrhoïdes, saignements de nez, varices ; formation du pus et des abcès ; le sang selon les sexes ; menstrues des femelles ; le sang selon les âges ; dans la première enfance, dans la force de l’âge, chez les vieillards ; la lymphe.

§ 1[134]. Voici ce qu’il en est du sang. Dans tous les animaux qui ont du sang, c’est l’élément le plus nécessaire et le plus commun. Il ne leur vient pas tardivement et après coup, et il leur reste tant qu’ils ne sont pas profondément altérés. Tout le sang est renfermé dans des vaisseaux qu’on appelle

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les veines ; et il ne s’en trouve absolument nulle part ailleurs, si ce n’est dans le cœur tout seul. § 2[135]. Chez aucun animal, le sang n’est sensible quand on le touche, non plus que ne le sont les excrétions des intestins ; non plus que l’encéphale, et la moelle, qui ne marquent pas davantage de sensibilité quand on les touche, tandis que partout où l’on coupe la chair, le sang se montre, si l’animal est vivant, à moins que la chair ne soit viciée. § 3[136]. Le sang, quand il est sain, a naturellement une saveur douceâtre, et la couleur en est rouge. S’il est corrompu par nature ou par maladie, il est plus noir. Dans son meilleur état, il n’est, ni trop épais, ni trop fluide et léger, s’il

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n’est pas altéré, soit naturellement, soit par maladie.

§ 4[137]. Tant que l’être est vivant, le sang est chaud et liquide ; et dans tous les animaux, il se coagule quand il est sorti du corps. Il n’y a d’exception que pour le cerf et le daim, et pour d’autres animaux de cette espèce. Mais pour tous les autres animaux, le sang se coagule tant qu’on n’en a pas ôté les fibres. C’est le sang du taureau qui se coagule le plus rapidement. § 5[138]. Dans les animaux qui ont du sang, les vivipares, qu’ils soient d’ailleurs vivipares en eux-mêmes ou au dehors, ont plus de sang que ceux qui, ayant aussi du sang, sont ovipares. Quand les animaux sont en bon état, soit par leur constitution naturelle, soit par un bon régime, ils n’ont, ni trop de sang comme ceux qui

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boivent avec excès, ni trop peu, comme ceux qui sont trop gras. Mais si les animaux gras ont peu de sang, ils l’ont pur ; et plus ils engraissent, moins ils ont de sang ; car il n’y a pas de sang dans les parties qui sont grasses. La graisse ne se gâte point ; mais le sang et les parties où il se trouve, se putréfient le plus vite, surtout celles de ces parties qui avoisinent les os.

§ 6[139]. C’est l’homme qui a le sang le plus léger et le plus pur ; dans les vivipares, c’est le taureau et l’âne qui l’ont le plus épais et le plus noir. Le sang est aussi plus épais et plus noir dans les parties basses que dans les parties hautes. § 7[140]. Le sang bat dans les veines de tous les animaux, et au

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même instant dans toutes les parties du corps. Il est le seul liquide qui soit répandu dans l’animal tout entier, et qui y soit toujours tant que l’animal reste vivant. Il se produit d’abord dans le cœur, avant même que le reste du corps ne soit complètement formé. Quand le sang se réduit et qu’il sort plus qu’il ne faut, on tombe en défaillance ; et si l’on en perd en trop grande quantité, on en meurt. § 8[141]. Quand le sang est trop liquide, c’est une maladie ; car alors il se tourne en lymphe, et il devient séreux, au point que l’on a vu déjà de gens avoir une sueur sanguinolente. Parfois, dans ce cas, ou le sang qui est sorti ne se coagule pas du tout, ou il ne se coagule qu’en partie et en l’isolant.

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§ 9[142]. Pendant le sommeil, le sang afflue moins aux parties extérieures du corps, de telle sorte que, si on les pique, le sang n’en sort pas aussi complètement que d’habitude. Le sang vient de la lymphe par la coction ; et la graisse vient du sang. Quand le sang est malade, il se forme un flux sanguin, une hémorroïde, soit par le nez, soit au fondement, soit dans les varices. Le sang, quand il est corrompu dans le corps, y forme du pus ; et le pus forme un abcès. § 10[143]. Le sang des femelles présente des différences avec celui des mâles. Il est plus épais et plus noir, à santé égale et à âge pareil. Dans les femelles, il y a moins de sang à la surface du corps ; mais à l’intérieur il y en a davantage. De tous les animaux femelles, c’est

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la femme qui a le plus de sang. Ce que dans les femmes on appelle leurs mois, est plus abondant que dans aucune espèce d’animal ; et quand ce sang est dans un état morbide, on lui donne le nom de perte. § 11[144]. Les femmes sont moins sujettes que les hommes aux autres désordres du sang ; il est rare qu’elles aient des varices, des hémorroïdes, ou des saignements de nez ; et lorsqu’elles ont de ces affrétions, les mois viennent moins bien.

§ 12[145]. Selon les âges, le sang est différent en quantité et en qualité. Dans les sujets très-jeunes, il est lymphatique et en quantité plus forte ; dans les vieux, il devient épais, noir, et peu abondant. Chez les sujets qui sont dans la force de l’âge, il est entre les deux. Le sang des vieillards se coagule vite, même quand on le prend à la surface du corps. Chez les sujets jeunes, ce phénomène ne se produit

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pas. La lymphe est un sang qui n’a pas de coction, soit qu’il ne l’ait pas encore reçue, soit qu’il se soit tourné en sérosité.


CHAPITRE XV

De la moelle ; elle n’existe que dans certaines espèces ; elle est renfermée dans les os, comme le sang dans les veines ; la moelle varie selon les âges ; tous les os n’ont pas de moelle, même les os creux ; os du lion et du cochon sans moelle, ou presque sans moelle.

§ 1[146]. Quant à la moelle, c’est un de ces liquides qui se trouve dans quelques-unes des espèces d’animaux qui ont du sang. D’ailleurs, tous les liquides qui se trouvent naturellement dans le corps sont renfermés dans des vaisseaux, comme le sang qui l’est dans les veines ; et la moelle, dans les os.

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Les autres liquides sont renfermés dans des membranes, des pellicules et des intestins. § 2[147]. Chez les individus jeunes, la moelle est tout à fait de la nature du sang. Dans la vieillesse, la moelle devient de la graisse chez les animaux gras ; et du suif, chez les animaux à suif. § 3[148]. Il n’y a pas de moelle dans tous les os, quels qu’ils soient ; il n’y en a que dans les os qui sont creux ; et même dans quelques-uns de ceux-là, il n’y en a pas toujours. Ainsi, les os du lion, ou n’ont pas du tout de moelle, ou n’en ont que très-peu. Aussi a-t-on prétendu quelquefois, ainsi qu’on l’a dit antérieurement, que les lions n’ont pas du tout de moelle. Les os du cochon en ont également très-peu, et l’on en voit même qui n’en ont pas la moindre parcelle.

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CHAPITRE XVI

Du lait et de la liqueur séminale ; rôle des mamelles ; composition du lait ; ses deux parties ; le sérum et le caséum ; lait qui se caille dans certains animaux ; lait qui ne se caille pas dans d’autres ; en général, le lait ne vient qu’après la conception et les mâles n’en ont pas ; exemples contraires ; bouc de Lemnos ; graisse et huile du lait ; abondance du lait selon les espèces et l’alimentation ; laits plus ou moins propres à la fabrication du fromage ; manières diverses de faire cailler le lait ; suc de figuier ; présure ; origine de la présure ; relations du lait et de la grosseur des animaux ; bétail énorme de l’Épire ; actions diverses des fourrages sur le lait et sur les mamelles ; lait des femmes brunes et des femmes blondes.

§ 1[149]. Les fluides dont on vient de parler sont presque toujours de naissance dans les animaux ; mais le lait et la liqueur séminale ne viennent que postérieurement. De ces fluides, celui qui est sécrété séparément dans tous les animaux où il apparaît, c’est le lait ; mais la liqueur séminale n’existe pas

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dans tous, et quelques-uns ont ce qu’on nomme la laite, comme les poissons. § 2[150]. Tous les animaux qui sécrètent du lait l’ont dans les mamelles. Les mamelles appartiennent à tous les vivipares, soit qu’ils produisent leurs petits en eux-mêmes, soit qu’ils les produisent au dehors, et aussi à tous les vivipares qui ont des poils, comme l’homme et le cheval, ou parmi les cétacés, au dauphin, au phoque et à la baleine ; car ces derniers animaux ont aussi des mamelles et du lait. Quant à ceux qui ne sont vivipares qu’au dehors, ou qui sont ovipares, ils n’ont ni mamelles, ni lait ; tels sont le poisson et l’oiseau. § 3[151]. Toutes les espèces de lait contiennent

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deux parties, l’une aqueuse qu’on appelle le sérum, ou petit-lait ; l’autre plus solide et qui a du corps, qu’on appelle le caséum, le fromage. Les laits plus épais ont aussi plus de caséum. Dans les animaux qui n’ont pas les deux rangées de dents, le lait se coagule, et l’on fait du fromage avec le lait des animaux domestiques ; mais dans ceux qui ont les deux rangées régulières, le lait ne se coagule pas, non plus que la graisse ; il est limpide et doux. Le plus léger de tous est celui du chameau ; puis au second rang, celui du cheval ; et au troisième, le lait de l’âne. Celui du bœuf est plus épais. Ce n’est pas le froid qui coagule le lait ; il le ferait plutôt tourner au sérum ; mais c’est le feu qui le coagule et l’épaissit.

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§ 4[152]. En général, le lait ne vient pas dans l’animal avant qu’il n’ait conçu ; mais le lait se produit après la conception. Le premier n’est pas de bon usage. Plus tard et même avant que les femmes aient conçu, elles peuvent avoir un peu de lait en prenant certains aliments ; et l’on a vu quelques femmes, quoique vieilles, avoir du lait quand un enfant les tétait, et en produire assez pour que l’enfant pût s’en nourrir. § 5[153]. Les habitants des environs du mont Oeta prennent leurs chèvres quand elles n’ont pas encore subi l’approche du mâle, et ils leur frottent violemment les mamelles avec des orties. Comme cette opération les fait souffrir, leur premier lait est mêlé de sang ; puis le second est un peu purulent ; mais le dernier est enfin tout aussi bon que celui des chèvres qui ont été couvertes. § 6[154]. Ordinairement, dans toutes les espèces,

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aussi bien que dans l’homme, les mâles n’ont pas de lait ; il y a pourtant quelques exceptions. A Lemnos, un bouc donnait, par les deux mamelles que le mâle, dans cette espèce, a près de la verge, une assez grande quantité de lait pour qu’on en fit des fromages ; et ce bouc ayant couvert une femelle, le même phénomène se produisit dans le petit qu’il avait eu. § 7[155]. Mais ces faits rares sont regardés comme des présages ; et quelqu’un de Lemnos ayant consulté le Dieu, il répondit que cette singularité annonçait un grand accroissement de prospérité. Il y a aussi quelques hommes qui, après la puberté, donnent un peu de lait, si l’on presse leurs mamelles, et qui même en donnent en quantité quand un enfant les tette.

§ 8Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : les références sans nom doivent avoir un contenu.. Il y a, dans le lait, une certaine graisse qui devient pareille à de l’huile, quand il se caille.

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En Sicile et dans les pays où le lait de brebis est trop gras, on le mêle au lait de chèvre. Le lait qui se caille le plus vite n’est pas seulement celui qui contient le plus de caséum, mais celui qui en contient de plus sec. § 9[156]. Ces animaux ont plus de lait qu’il n’en faut pour nourrir les petits ; et alors, ce lait est bon pour la fabrication du fromage et on peut le conserver. Le meilleur pour cet usage est le lait de brebis et de chèvre ; et ensuite, le lait de vache. Les fromages de Phrygie sont un mélange de lait de jument et de lait d’ânesse. Il y a plus d’éléments de fromage dans le lait de vache

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que dans celui de chèvre ; car les bergers assurent que, de la quantité égale d’une amphore, on ne peut tirer que dix-neuf fromages du prix d’une obole chacun avec du lait de chèvre, tandis qu’on en tire jusqu’à trente avec du lait de vache. § 10[157]. Tantôt les animaux n’ont de lait que ce qu’il en faut pour les petits ; mais ils n’en ont pas au-delà, ni qu’on puisse employer à faire du fromage. Ce sont en général les animaux qui ont plus de deux mamelles ; aucun d’eux n’a beaucoup de lait ; et leur lait ne peut pas donner de fromage.

§ 11[158]. Le suc de figuier et la présure font cailler le lait. Le suc du figuier est recueilli sur de la laine quand il sort de l’arbre ; on lave ensuite cette laine dans une petite quantité de lait ; et ce lait mélangé à l’autre le fait prendre. La présure est déjà une sorte de lait, et on la trouve dans l’estomac des petits qui tètent encore. La présure

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est donc un lait qui contient du fromage en lui-même ; et ce lait a été cuit par la chaleur propre de l’animal.

§ 12[159]. Tous les ruminants ont de la présure ; et parmi les animaux à deux rangées de dents, le lièvre en a aussi. Plus on garde la présure, meilleure elle est. C’est surtout la vieille présure qui est bonne contre les flux de ventre ; et aussi, la présure du lièvre ; mais la meilleure des présures est celle qu’on tire du faon.

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§ 13[160]. Les animaux qui produisent du lait en donnent plus ou moins, selon leur grosseur, et aussi selon les variétés de leurs aliments. Il y a dans le Phase de petites vaches qui donnent du lait en abondance ; les grandes vaches de l’Épire donnent chacune une amphore et demie de lait, quand on trait les deux mamelles. Pour les traire, il faut se tenir debout, ou un peu penché ; car si l’on restait assis, on ne pourrait pas atteindre jusqu’au pis. Du reste, tous les quadrupèdes en Épire, l’âne excepté, sont très-grands ; les bœufs et les chiens y sont énormes. § 14[161]. Ces grands animaux ont besoin

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d’une nourriture plus abondante ; mais le pays leur offre de gras et nombreux pâturages, et des localités favorables, selon chaque saison. D’ailleurs ce sont les bœufs et les moutons dits Pyrrhiques, du nom même du roi Pyrrhus, qui sont les plus gros de tous. § 15[162]. Il y a des fourrages qui arrêtent le lait, par exemple, l’herbe médique, surtout chez les ruminants. D’autres fourrages au contraire, comme le cytise et les vesces, font beaucoup de lait ; seulement, le cytise, quand il est en fleur, n’est pas bon, parce qu’il est brûlant ; et les vesces ne sont pas meilleures pour les femelles qui sont pleines, parce qu’alors elles mettent bas plus difficilement. Généralement, les quadrupèdes qui peuvent manger beaucoup sont plus productifs au propriétaire, et ils donnent une grande quantité de lait, si la nourriture qu’ils prennent est très-abondante. Certains fourrages flatueux, joints

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aux autres, poussent au lait ; et c’est ainsi qu’on donne des quantités de févrolles à la brebis, à la chèvre, à la vache, et même à la petite chèvre au-dessous d’un an. Cette alimentation fait descendre et allonger la mamelle.

§ 16[163]. Un signe qui annonce que l’animal aura plus de lait que d’ordinaire, c’est lorsque la mamelle tend à baisser beaucoup, avant que la bête ne mette bas. Les animaux qui ont du lait en donnent d’autant plus longtemps qu’ils restent sans porter, et qu’ils ont tout ce qu’il leur faut. Ce sont les brebis qui, parmi les quadrupèdes, en ont le plus longtemps ; on peut les traire pendant huit mois de l’année. D’une manière générale, ce sont les ruminants qui ont le plus de lait, et de lait bon pour faire le fromage. § 17[164]. Les vaches de Torone cessent d’avoir du lait quelques jours avant de mettre bas ;

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et tout le reste du temps, elles en ont. Chez les femmes, le lait un peu bleuâtre vaut mieux pour les nourrissons que le lait tout à fait blanc ; le lait des brunes est plus sain que celui des blondes. Le lait qui a le plus de caséum est le plus nourrissant ; mais celui qui en contient le moins est plus salutaire aux enfants.


CHAPITRE XVII

De la liqueur séminale ; chez l’homme et chez les animaux qui ont des poils ; couleur blanche du sperme ; erreur d’Hérodote ; action du froid sur le sperme ; action de la chaleur ; sperme altéré sortant de la matrice ; expérience pour constater si le sperme est prolifique, ou s’il a perdu cette qualité ; erreur de Ctésias sur le sperme des éléphants.

§ 1[165]. Tous les animaux qui ont du sang éjaculent de la liqueur séminale ; on dira ailleurs en quoi et

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comment elle contribue à la génération. C’est l’homme qui en produit le plus, proportionnellement à la grandeur de son corps. Le sperme est visqueux dans les animaux qui ont des poils ; dans les autres, il n’a pas de viscosité. Pour tous, il est de couleur blanche ; et Hérodote se trompe quand il prétend que le sperme des Éthiopiens est de couleur noire.

§ 2[166]. Le sperme, à l’état sain, est blanc et épais au moment où il sort ; mais une fois émis, il devient clair et noir. Les grands froids ne le font pas geler ; mais alors, il devient tout à fait fluide comme de l’eau, par sa couleur et son épaisseur ; la chaleur le coagule et le fait épaissir. S’il reste quelque temps dans la matrice, il en sort plus épais ; et quelquefois même, il en sort tout sec et congloméré. Le sperme prolifique

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descend au fond de l’eau où on le met ; celui qui ne l’est pas se mêle au liquide.

§ 3[167]. Ctésias n’a écrit que des erreurs sur le sperme des éléphants.

FIN DU PREMIER VOLUME
  1. Il ne reste plus… Pour ce qui regarde les parties intérieures, et non pas pour terminer tout cet ouvrage. — Qui concourent à la génération. Aristote, comme on sait, a fait un traité spécial sur la génération ; cette fonction est d’une si haute importance, et elle est si essentielle, que les zoologistes ne sauraient y donner trop d’attention. Le traité spécial d’Aristote sur la génération est un monument qu’on ne saurait trop admirer, et où il a montré son génie dans toute sa puissance, son étendue et son exactitude ; voir l’édition et la traduction de MM. Aubert et Wimmer, Introduction, pp. 5 et suiv.; voir aussi l’édition et la traduction du Traité des Parties des animaux, par M. le docteur Frantzius, prêta ce, pp. 9 et suiv.
  2. Sont à l’intérieur. Observation très-simple : mais qui n’en est pas moins très-profonde. Voir le Traité de la Génération des animaux, liv. I, § 22, édit. et trad. Aubert et Wimmer. — Plus nombreuses. Que celles qu’offrent ces organes chez les femelles. — Ils sont intérieurs. C’est là une différence très-caractéristique. — Dans le bassin. Le mot de Bassin est peut-être encore la traduction la plus fidèle du mot grec ; le bassin signifie ici toute la portion du tronc comprise, par derrière, entre le haut des fesses et la partie du dos correspondante au diaphragme, à la hauteur des reins. — Dans le ventre. Cette indication est trop vague.
  3. Comme le sont les testicules. Par exemple, chez l’homme et chez quelques quadrupèdes — Urinent en avant… en arrière. La zoologie moderne ne paraît pas avoir tenu beaucoup de compte de cette différence, qui est pourtant considérable ; voir l’Anatomie comparée de M. Gegenbaur, p. 822, Organes urinaires des vertébrés.
  4. Pas une seule espèce de poissons n’a de testicules. C’est une erreur. Les poissons ont au contraire des testicules très-gros, qui se présentent sous forme de glandes appelées Laites. Le mâle en général passe sur les œufs qu’a pondus la femelle ; et il y répand sa laite ; Cuvier, Règne animal, tome II, p. 127. Il ne faut pas d’ailleurs s’étonner de l’erreur commise par Aristote : les organes génitaux mâles et femelles chez les poissons se ressemblent à tel point qu’il faut les ouvrir pour savoir si ce sont des ovaires ou des testicules. Les marques extérieures, distinctives du sexe, font le plus souvent défaut. Voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 800, trad. franc. — Les animaux qui ont des branchies. C’est-à-dire, les poissons. — Tout le genre serpent. Il serait plus exact de dire Reptile. Les serpents ont des testicules, contrairement à ce que croit Aristote ; ces testicules sont ordinairement fixés à la colonne vertébrale par un repli du mésentère ; voir l’Anatomie comparée de M. Gegenbaur, p. 833, trad. franc. Ils occupent une position correspondante à celle des ovaires ; voir aussi la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 896, trad. franc. — Les oiseaux ont bien des testicules. En général, les testicules des oiseaux se rapprochent de ceux des serpents ; ils sont situés sur la face antérieure des reins ; Zoologie descriptive de M. Claus, p. 954. — Le hérisson. Voir le Traité de la Génération des animaux, liv. III § 22, p. 60, édit. et trad. Aubert et Wimmer.
  5. Comme le dauphin. Voir le Traité de la Génération des animaux, liv. 1, § 7, p. 46. édit. et trad. Aubert et Wimmer, où les détails consignés ici se trouvent plus développés. Il y est dit pour le dauphin que les testicules « sont à l’extrémité du ventre » ; et Aristote renvoie dans ce passage à son Histoire des animaux, où il prétend avoir traité ces détails « plus exactement ». — Nous venons de dire. Dans les paragraphes qui précèdent. — À la partie postérieure du ventre. A partir de la partie la plus rapprochée de l’anus, et en allant vers la tête. — Dans les porcs. La zoologie moderne ne paraît pas avoir recueilli cette observation.
  6. Ainsi qu’on vient de le voir. Plus haut, § 4. — Quand on les presse. C’est là l’expérience qui de nos jours a donné lieu à une industrie nouvelle, appelée la Pisciculture. C’est en pressant la laite des mâles qu’on féconde artificiellement le frai des femelles. — De la semence de couleur blanche. Qu’on appelle aussi la Laite.
  7. C’est par l’anatomie. Il faut toujours remarquer ces recommandations et ces méthodes de la science antique ; la science contemporaine ne pourrait faire mieux. — Un peu plus loin. Voir plus loin, liv. V, ch. IV, sur l’accouplement des poissons.
  8. Dans le bassin, au-dessous du diaphragme. Cuvier, Règne animal, tome I, p. 309, dit en parlant des oiseaux d’une manière générale : « Les testicules sont situés à l’intérieur au-dessus des reins, et près du poumon » M. Claus, Zoologie descriptive, p. 954, trad. française dit à peu près la même chose : « Les deux testicules, ovales, arrondis, très-gonflés à l’époque de la reproduction, sont situés sur la face antérieure des reins ». — Du point de sortie de l’excrétion. Il ne s’agit pas ici de l’expulsion des excréments en général, mais de l’excrétion particulière de la liqueur séminale : ce sens est confirmé par ce qui suit. — La verge. En général, il n’y a pas de verge chez les oiseaux : « Dans la plupart des genres, dit Cuvier, loc. cit., l’accouplement se fait par la seule juxtaposition des anus » ; et M. Claus dit aussi. Zoologie descriptive, p. 934 : « En général, il n’existe pas traces d’organe d’accouplement ». On trouve facilement chez quelques grands oiseaux un petit mamelon qui représente l’ébauche d’un pénis ; cet organe est plus volumineux et mieux organise chez la plupart des struthionides, canards, oies, cygnes, hoccos, etc. id. ibid. — Quand l’accouplement va se faire. Et avant que l’accouplement ne se fasse. C’est un orgasme qui tombe très-vite.
  9. Au-dessous du ventre et des intestins, entre la grande veine. MM. Aubert et Wimmer trouvent avec raison que cette leçon, qui ne s’accorde pas avec les faits, est très-peu satisfaisante : ils proposent une correction qui matériellement est fort légère, et qui consisterait à dire : « au-dessous du ventre, dans l’intervalle des intestins et de la grande veine ». La description devient alors parfaitement exacte. — Les conduits sont fort apparents… parfois imperceptibles. Tout ceci atteste beaucoup d’observations anatomiques et physiologiques.
  10. Dans les oiseaux. Il semble que ce paragraphe ne fait que répéter ce qui vient d’être dit, puisque le précédent traite déjà des oiseaux comparés aux poissons. — Dans les perdrix. Buffon, tome XX, p. 289, remarque qu’Aristote n’a pu guère connaître que les perdrix rouges, les seules qui fussent communes en Grèce.
  11. Intérieurs. C’est la leçon proposée et adoptée par MM. Aubert et Wimmer, au lieu de la leçon ordinaire, qui n’a pas un sens aussi satisfaisant. Il est indispensable qu’il soit ici question de testicules intérieurs, par opposition aux testicules extérieurs, qui sont enveloppés tous les deux dans la peau des bourses.
  12. De l’aorte. Il s’agit de l’aorte abdominale, d’où partent, à la hauteur du milieu des reins, les deux petites artères spermatiques qui se dirigent à chacun des testicules ; c’est ce qu’Aristote appelle ici des conduits veineux. — Deux autres qui partent des reins. Ce sont les deux uretères, dont le calibre est beaucoup plus gros que celui des artères spermatiques ; mais les uretères vont à la vessie ; et non pas au testicule. — Ceux-là sont pleins de sang. Les uretères ne sont pleins que de l’urine, qu’ils conduisent du bassinet à la vessie. — Ceux qui partent de l’aorte n’en ont pas. Il semble que ce serait tout le contraire. — Un conduit, à la fois plus épais et plus nerveux. Ce ne peut être que le conduit déférent et le cordon spermatique ; mais ni l’un ni l’autre ne tapissent le fond du testicule, comme l’auteur semble le croire. — Dans chacun des deux. MM. Aubert et Wimmer croient devoir changer le texte pour le mettre plus en harmonie avec les faits, et ils disent : « A l’extrémité du testicule » ; j’ai cru devoir conserver la leçon ordinaire. — Se réunissent en un seul. Il s’agit sans doute des deux canaux déférents, qui, partant de chacun des testicules, forment le canal éjaculateur, en se réunissant avec le conduit, de la vésicule séminale.
  13. Sont entourés d’une même membrane. Il s’agit sans doute des cordons et des vaisseaux spermatiques. — Quand on ne divise pas cette membrane. Ceci prouve jusqu’à quel point Aristote poussait déjà l’exactitude des préparations anatomiques. — Une liqueur, qui est sanguinolente. Il est difficile de voir à quel fait Aristote peut rapporter ceci ; il semble en outre se contredire, puisque, dans le paragraphe précédent, il assure que les canaux allant de l’aorte aux testicules n’ont pas de sang. — La liqueur est de couleur… C’est exact.
  14. De la vessie, part un autre conduit. Ce ne peut être que le canal de l’urètre, qui, du col de la vessie, s’étend jusqu’à l’extrémité de la verge, à l’orifice du méat urinaire. Sa longueur peut aller jusqu’à 16 et 17 centimètres. — L’enveloppe de ce canal. Cette expression n’est pas tout à fait exacte. La verge recouvre le canal de l’urètre, plutôt qu’elle ne l’enveloppe.
  15. Sur le dessin ci-joint. Voir plus loin, § 22. Ceci mérite la plus grande attention, quelle que soit d’ailleurs l’exactitude plus ou moins complète de la figure que traçait Aristote. Mais ce qui est à admirer profondément, c’est qu’à l’anatomie déjà poussée fort loin par lui, il ait pensé à joindre des dessins explicatifs, pour ceux qui ne pouvaient avoir sous les yeux les préparations anatomiques. MM. Aubert et Wimmer ont donné, pour éclaircir ce passage, la figure indiquée par Aristote, en y mettant les lettres mêmes dont il se sert. On peut voir cette figure, p. 306, tome I, de leur excellent travail ; je ne crois pas devoir la reproduire à mon tour ; elle ne peut rien apprendre aux zoologistes modernes, et il me suffira d’avoir signalé la méthode d’Aristote, que les nôtres ne surpassent point. L’anatomie a fait sans doute de grands progrès, ainsi que la représentation graphique ; mais c’est le philosophe grec qui a pris l’initiative de ces observations et de ces reproductions : tout le reste n’a été que perfectionnements, et imitations de plus en plus développées et correctes.
  16. Quand on coupe… Suite d’observations aussi curieuses que les précédentes. — Les conduits se contractent. Ceci peut s’entendre des canaux déférents tout seuls ; mais dans l’ablation des testicules, il y a une foule d’autres vaisseaux rétractiles qui sont atteints en même temps : artères, veines, etc. La rétraction est générale, jusqu’à ce que la cicatrice soit complète. MM. Aubert et Wimmer regardent tout ce paragraphe comme apocryphe ; et ils pensent que ces remarques, mises d’abord à la marge, auront ensuite passé dans le texte. Ce n’est pas impossible ; mais ce n’est là qu’une conjecture. Sur la castration, voir plus loin, liv. IX, ch. XXXVI, § 6. — Un taureau qui venait d’être coupé. Le même fait est rapporté dans le Traité de la Génération des animaux, liv. I, ch. IV, § 11, p. 48, édit. et trad. Aubert et Wimmer. — Voilà quelle est l’organisation des testicules. Résumé sur les parties génitales des mâles. Tout le reste du chapitre sera consacré aux parties génitales des femelles.
  17. Qui ont des matrices. C’est qu’en effet tous les animaux n’en ont pas. — Dans les vivipares. Des uns par rapport aux autres, et en outre des vivipares, aux ovipares, qui n’offrent pas moins de différences entre eux. — Près des articulations. Le texte grec ne peut pas avoir un autre sens, et les manuscrits n’offrent pas de variantes. Ceci doit s’entendre des articulations postérieures du corps, et par exemple des articulations des cuisses, dans l’homme et dans les quadrupèdes ; mais on aurait pu choisir une expression plus précise. MM. Ailbert et Wimmer ont traduit comme s’il y avait « Des parties honteuses », au lieu de : « Des articulations ». La même expression est encore employée par Aristote, pour rendre la même idée, dans le Traité de la Génération des animaux, liv. I, ch. III, § 8, p. 46, édit. Aubert et Wimmer. Dans ce passage, il oppose les Articulations au Diaphragme ; et dès lors, il semble qu’on pourrait traduire les Articulations par les Membres, c’est-à-dire, les deux jambes. — Les matrices ont deux bords. Le mot de Matrice, que je suis obligé d’employer, n’est pas accepté par la zoologie moderne pour représenter l’ensemble des organes génitaux du sexe femelle. On distingue dans cet ensemble plusieurs parties qui semblent ici presque tout à fait confondues : les ovaires, les trompes de Fallope, l’utérus, le vagin, et la vulve. Aristote ne distingue guère, autant qu’on peut voir, que le dehors, Vulve et Vagin, et le dedans, l’Utérus. — Le point de départ est unique. Ceci ne se comprend pas bien ; et peut-être, au lieu de Point de départ, faudrait-il traduire Principe, le mot grec ayant les deux sens. — Matrice et utérus. Il paraît bien qu’ici le mot de Matrice représente la partie la plus extérieure, tandis que l’Utérus représente la partie la plus profonde. J’ai pris le mot d’Utérus pour justifier l’emploi du mot Frères utérins. Schneider croit que ceci est une interpolation. — La tige et l’orifice de la matrice. La science moderne a de tout autres distinctions ; l’utérus est proprement l’organe destiné à recevoir l’œuf fécondé et à conserver le fœtus ; sa structure est très-compliquée. La Vulve est la partie la plus externe, qui comprend elle-même beaucoup de parties subsidiaires. Au début, il était impossible de faire toutes ces distinctions, qui, même dans l’état actuel de la science, ne sont pas toutes définitives.
  18. En bas du diaphragme. Ou au-dessous du diaphragme. C’est une indication bien vague. Le fait est vrai d’ailleurs dans cette généralité, comme le prouvent les exemples qui suivent. — Ce qu’on appelle leurs petites cornes. Ce ne peut être que les trompes utérines, ou trompes de Fallope, et le pavillon de ces trompes, qui présente en effet beaucoup de flexuosités. — Une spirale qui s’enroule. J’ai développé un peu l’expression, pour rendre toute la force du mot grec. — Qui pondent des œufs au dehors. Ce sont à proprement parler les ovipares. — Près du diaphragme. Ou « sur le diaphragme ». — Placées au-dessous. Il paraît que ce détail sur les poissons n’est pas très-exact, parce que leurs œufs sont répandus dans presque toute la longueur de l’intestin. — Des matrices. J’ai cru devoir ajouter ces mots. — Comme du sable. Par exemple, chez les harengs, où les œufs sont en effet comme des grains de sable très-fin. — On peut les diviser… séparés. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis.
  19. La matrice des oiseaux. Voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 955. — La partie qui touche au diaphragme. On voit, par cette phrase, dans quel sens large Aristote prend le mot de Matrice, puisqu’il la fait remonter de l’extrémité du canal intestinal jusqu’au diaphragme. Ce n’est plus la matrice proprement dite, mais l’ovaire. — Dans les grands oiseaux… dans les petits oiseaux. Ce sont là des observations très-attentives et très-remarquables. — Sont moins visibles. Ainsi, dès le temps d’Aristote, on essayait de pousser ces analyses aussi loin qu’on le pouvait, sans le secours de microscope.
  20. La tige. On pourrait dire aussi, Canal. — Est unique. C’est-à-dire que cette tige est ronde et n’est pas séparée en deux parties, droite et gauche, comme dans les quadrupèdes vivipares. — Près du diaphragme. Ou « sur le diaphragme ».
  21. Les galéïdes. Je n’ai fait que transcrire le mot Grec, que la zoologie moderne a conservé aussi, pour une certaine famille de squales. J’ai mis entre parenthèses « chiens de mer », parce que c’est également le nom qu’on donne quelquefois à ces poissons. — Sélaciens. Voir plus haut, livre I, ch. IV, § 1 et ch. IX, § 5. — On sait qu’on donne… vivipare. MM. Aubert et Wimmer regardent cette phrase comme une interpolation. Cette conjecture n’est pas absolument nécessaire, et il est bien possible qu’Aristote lui-même ait voulu rappeler une définition des Sélaciens, poissons qui devaient être peu connus de son temps, et qui du nôtre ne sont pas encore connus très-généralement. J’ai conservé la leçon ordinaire. La définition d’ailleurs est exacte. — La matrice est composée… des œufs. Tout ce passage offre d’assez grandes difficultés, surtout à cause de la répétition qu’il contient. Schneider et Piccolos ont essayé de le restituer avec plus ou moins de succès ; mais je me suis borné à suivre la leçon dont se sont contentés MM. Aubert et Wimmer. Il ne semble pas que la science moderne ait appliqué une attention particulière à ces détails de l’organisation des Sélaciens. Cuvier dit seulement, Règne animal, tome I, p. 384, que « les femelles ont des « oviductes très-bien organisés, qui tiennent lieu de matrice, à ceux dont les petits éclosent dans le corps ». Voir aussi la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 815, qui expose les particularités très-importantes des phénomènes de la reproduction chez les Sélaciens. — Sortent tout vivants des œufs. Observation très-exacte, que la science moderne a recueillie et confirmée.
  22. Sur les figures tracées d’après l’anatomie. Voir plus haut, § 15, et la note qui est jointe au texte. Ces procédés de la science antique remontent aujourd’hui à plus de 2200 ans. Ceci doit nous donner à penser, et nous inspirer quelque modestie.
  23. Le genre des serpents. Peut-être serait-il plus exact de dire : « des Reptiles. » D’ailleurs les variétés sont très-nombreuses, comme le remarque Cuvier après Aristote ; Règne animal, tome II, p. 4. — Les uns par rapport aux autres. La zoologie distingue actuellement quatre ordres de reptiles : les Chéloniens, les Sauriens, qui ont des pieds, les Ophidiens, qui n’en ont jamais, et les Batraciens. Mais il est probable qu’ici Aristote veut surtout parler des Ophidiens, ou serpents proprement dits. — À l’exception de la vipère. La vipère, comme son nom l’indique est bien vivipare (Vivipara, Vipara) ; mais elle n’est pas la seule à l’être ; et il y a des espèces de couleuvres qu’on peut rendre vivipares à volonté, en les soumettant à un certain régime. Voir Cuvier, loc. cit., et aussi, p. 87. Ainsi l’on ne peut pas dire d’une manière absolue que toutes les espèces de serpents sont ovipares. Ce qui distingue très-spécialement les Ophidiens, c’est de n’avoir jamais de pieds, tandis que les autres ordres de reptiles en ont quatre, ou deux. En général, les espèces venimeuses font des petits vivants, parce que leurs œufs éclosent avant d’avoir été pondus ; Cuvier, Règne animât, tome II, p. 87. — Beaucoup de celle des sélaciens. La science moderne rapproche à cet égard les serpents des oiseaux, bien plutôt que des sélaciens ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 896, trad. franc. — La matrice des serpents… On ne trouve ces détails dans aucun ouvrage moderne. — Sortent ensemble tout d’un coup. J’ai cru devoir développer un peu le texte, qui n’a qu’un seul mot ; ce mot exprime une idée de continuité et de simultanéité. Tous les œufs se tiennent en quelque sorte. En général, les femelles pondent un petit nombre d’œufs, qu’elles enfouissent dans la terre humide ; et elles ne paraissent plus s’occuper de ce qu’ils deviennent ; Zoologie descriptive de M. Claus, p. 897. Cuvier remarque qu’aucun reptile ne couve ses œufs, Règne animal, tome II, p. 3.
  24. Soit dans leur intérieur, soit au dehors. Cette distinction n’est pas aussi claire qu’on pourrait le croire ; et la science moderne ne paraît pas en avoir tenu autant de compte que la science antique. Aristote veut dire sans doute que, pour certains vivipares, les petits sont déjà vivants dans le sein de la mère avant d’en sortir, et que, pour certains autres, les petits, d’abord conçus dans des œufs intérieurs, ne sont vivants que quand ils sortent. C’est ce qui est expliqué un peu plus bas. D’ailleurs, Schneider regarde tout ce paragraphe comme apocryphe ; et MM. Aubert et Wimmer partagent son opinion. Il semble en effet qu’il contient bien des erreurs. — En haut du ventre. Ceci n’est pas exact, et c’est, au contraire, au bas du ventre que la matrice est placée chez ces vivipares, à moins que, par le Haut du ventre, on ne comprenne la partie Antérieure, opposée aux Lombes dans les ovipares, — Une partie de la matrice… en bas… au haut… Il faut appliquer ici les remarques qui viennent d’être faites sur le début du paragraphe. Le Haut est ce que nous appellerions le Bas ; et réciproquement, le Bas est le Haut pour nous. Ce peut être là un argument de plus pour croire que tout ce paragraphe est interpolé.
  25. Et qui n’ont pas de dents aux deux mâchoires. Ce sont les ruminants, en général. — Des cotylédons. Voir plus loin, liv. VII, ch. VII, §§ 3 et 5 ; voir aussi Traité de la Génération des animaux, liv. II, ch. Vu, §§ 114 et suiv. p. 194, édit. Aubert et Wimmer. Dans ce dernier passage, Aristote donne d’assez longs détails sur les Cotylédons, et il explique ce qu’il entend par là. Évidemment, les Cotylédons sont le Placenta, corps spongieux qui, pendant la gestation, est intermédiaire entre la mère et l’enfant. — Le rat. Schneider proposait de dire le Porc, et non le Rat, par un simple changement d’une seule lettre, tome III, p. 123 et tome IV, p. 321. — La matrice est toute unie. Et n’a pas de cotylédons. Sur le Placenta et son rôle, voir Buffon, tome XI, p. 270, Développement du fœtus.
  26. Telle est donc dans tous les animaux. Résumé non seulement de ce chapitre, mais de tout ce qui précède, à partir du début de ce traité. Il faut se rappeler qu’au liv. I, ch. I et suiv., l’auteur a distingué, dans l’organisation des animaux, les parties non similaires et les parties similaires. Il a étudié d’abord les premières ; il va maintenant étudier les autres avec autant de soin. Voir plus haut, liv. I, ch. 1er, § 9.
  27. La veine. J’ai conservé le singulier, que porte le texte ; mais on pourrait traduire aussi par le pluriel : « Les veines ». Il est bien connu d’ailleurs qu’au temps d’Aristote, on n’avait point encore constaté la distinction des artères et des veines. C’est là une observation qu’il ne faudra jamais perdre de vue, dans tout ce qui va suivre. — La lymphe et les fibres. Notre langue ne m’a pas offert d’équivalents meilleurs. Aristote s’arrêtera du reste très-peu à étudier les fibres et la lymphe. Voir plus haut, liv. I, ch. III, § 2, la définition qu’il en donne. — La chair. Voir plus haut, liv. I, ch. 1er, §§ 7 et suiv. — Les os… les arêtes… la graisse… le phlegme. Voir ici. ibid., §§ 8 et suiv. — La bile, jaune ou noire. MM. Aubert et Wimmer font remarquer qu’ici Aristote n’énumère pas le lait et la liqueur spermatique, dont il sera parlé plus loin assez longuement, tandis qu’il ne sera plus question de la bile jaune ou noire ; ils pencheraient donc à croire que la fin de cette phrase est encore une interpolation.
  28. Le principe de tout le reste. C’est en effet le sang qui, en se portant dans tous les organes, les nourrit, et qui, par là, entretient la vie. — Quelques-uns de ceux… Aristote ne cite que trois de ces auteurs, et il est singulier qu’il oublie Hippocrate, qui cependant s’était beaucoup occupé des veines et du sang. Il est vrai qu’Hippocrate n’avait pas fait une théorie générale sur la répartition des veines dans le corps, comme les trois auteurs dont Aristote va discuter les opinions.
  29. Sont difficiles à observer. Ce sens me semble le plus correct ; mais on a parfois compris ce passage un peu différemment, « … Tient à ce qu’ils ont mal observé ». Ce qui suit est plus conforme au sens que j’ai adopté. — Dans les animaux morts. Par opposition aux animaux vivants, dont il sera parlé un peu plus bas. — Et il en sort toujours en totalité. Ceci pourrait s’appliquer surtout aux animaux immolés dans les sacrifices. — Si ce n’est le cœur. A proprement dire, le cœur n’a pas plus de sang que le reste des organes ; mais le véritable rôle du cœur n’a été connu que beaucoup plus tard, bien que, dès le temps d’Aristote, on comprit très-bien l’importance supérieure de cet organe. — Est dans les veines. Nous ajouterions : « Et dans les artères ». Mais au point où en était la science grecque, les veines et les artères étaient confondues pour elle. — Sur les animaux vivants. La suite prouve qu’il ne s’agit pas des animaux en général, mais surtout de l’homme, le seul animal chez qui la transparence de la peau permet de suivre aisément la disposition des veines. — Et disséqués. Peut-être le mot du texte a-t-il un sens un peu plus général ; mais comme Aristote a beaucoup disséqué, ainsi que le prouvent cent passages de ses œuvres d’histoire naturelle, l’expression que j’emploie ici n’a rien d’improbable. — Sur des hommes très-maigres. Chez qui, par conséquent, tout le système veineux était plus apparent.
  30. Syennésis, médecin de Chypre. Syennésis n’est connu que par ce passage d’Aristote. Son système est de beaucoup le plus incomplet de tous. Voir sur lui, sur Diogène et sur Polybe, l’Hippocrate de Littré, tome IX, p. 163. A quelle époque au juste vivait Syennésis, c’est ce qu’il est impossible de savoir. Comme Aristote le nomme avant Diogène d’Apollonie, on pourrait croire que Syennésis est antérieur à ce dernier ; ce qui le reporterait au VIe siècle avant notre ère. — Les grosses veines. Il est probable que ceci désigne les plus grosses artères. — Elles partent de l’œil. On ne voit pas ce qui a pu donner prétexte à une telle théorie ; les faits ne s’y prêtent en rien. Il est probable néanmoins que ces erreurs, toutes manifestes qu’elles sont, reposaient sur quelques observations anatomiques. Au lieu de : « De l’œil près du sourcil », plusieurs manuscrits ont : « Du nombril vers les lombes ». La première leçon est préférable. MM. Aubert et Wimmer ont celle-là dans leur texte ; et la seconde, qui est certainement moins bonne, s’est glissée dans leur traduction. Il paraît probable que Syennésis commençait par les carotides, qui sont au cou, et dont les ramifications s’étendent à la tête, pour descendre ensuite aux poumons et de là au foie, aux reins, à la rate et au testicule. Mais cette description est de pure fantaisie ; et la réalité n’y répond en quoi que ce soit. Aussi Aristote s’y arrête-t-il le moins possible. Tout ce morceau de Syennésis se retrouve reproduit dans le Traité hippocratique de la Nature des Os, voir Littré, Hippocrate, tome IX, p. 175, qui est surtout consacré à l’étude des veines.
  31. Diogène d’Apollonie. C’est le philosophe bien connu ; Aristote en a parlé plusieurs fois ; et il semble l’avoir tenu en assez grande estime. Peut-être l’histoire de la philosophie n’a-t-elle pas suffisamment apprécié ses travaux de zoologie. C’est un honneur pour la philosophie d’avoir créé la science de l’histoire naturelle. — Par le ventre, le long de l’épine du dos. La description n’est pas très-exacte, et l’épine dorsale n’a plus rien à faire ici, du moment que l’on considère ces deux gros vaisseaux à l’origine de leur bifurcation ; mais par ce qui suit, on voit évidemment qu’il s’agit des artères iliaques primitives, qui se séparent de l’aorte descendante. — Dans chaque jambe. Ce sont les artères fémorales, tibiales et pédieuses. — En haut… Ce sont les carotides. — En traversant la gorge. Elles partent en effet de la crosse de l’aorte, pour se diriger par le cou vers la tête. — De ces deux grandes veines. Il est clair qu’ici les artères et les veines sont confondues, et que Diogène ne distingue pas entre les vaisseaux qui partent du cœur et ceux qui s’y rendent ; mais il est certain que tout le système vasculaire du corps humain a pour origine ces deux ordres de vaisseaux. — Partant de la grosse veine… C’est en partie la répétition de ce qui vient d’être dit. — Se rendent au cœur. Comme on vient de le dire, les unes se rendent en effet au cœur ; mais les autres en partent. — En longeant l’épine dorsale. L’aorte et la veine-cave longent toutes deux la colonne vertébrale.
  32. D’autres, placées un peu plus haut. Ce sont les troncs brachio-céphaliques, les artères brachiales, la veine-cave supérieure, les sous-clavières, les veines du bras, etc. — À celle des mains qui est de son côté. C’est assez exact, sauf qu’il n’est pas fait distinction entre les deux systèmes, artériel et veineux. — La splénique… l’hépatique. Ceci serait tout à fait inexact, si on le prenait au pied de la lettre ; et il serait assez difficile de voir ce qui a pu donner naissance à ces erreurs. Les vaisseaux du foie (hépatique) sont l’artère hépatique, la veine-porte, les vaisseaux lymphatiques, et les canaux biliaires. Les vaisseaux de la rate (splénique) sont l’artère splénique, la veine splénique, et les vaisseaux lymphatiques. Diogène parle comme si, à la rate et au foie, il n’y avait qu’un vaisseau, unique, artère ou veine ; mais l’artère ou la veine dont il parle (hépatique ou splénique) ne concerne pas directement la rate ou le foie. Ce sont toujours des vaisseaux des bras, dont l’un est à droite comme le foie, et l’autre à gauche comme la rate. — Les extrémités de chacune se divisent. Les mêmes confusions se poursuivent. — L’une allant au grand doigt. Ce sont les artères et les veines brachiales, qui se ramifient dans les doigts et les mains. Les expressions dont se sert ici le texte, peuvent s’appliquer également aux mains et aux pieds. Peut-être par le grand doigt, faut-il entendre le gros orteil aussi bien que le pouce de la main ; et par le Poignet, le Tarse aussi bien que le Carpe. Mais la fin du § indique qu’il s’agit plutôt de la main, et il est surtout question des pieds dans le § qui suit.
  33. D’autres rameaux plus ténus… Cette généralité est vraie, puisque les artères et les veines se ramifient à l’infini. — De la veine droite dans le foie. Les artères rénales viennent à angle droit des parties latérales de l’aorte. — De la veine gauche dans la rate. Il est exact que la rate est à gauche sous l’hypocondre ; mais les deux reins ne sont ni à droite ni à gauche, puisque l’un des deux est à gauche et l’autre à droite, recevant l’un et l’autre les ramifications de l’aorte. — Celles qui vont aux jambes. Ceci est en partie la répétition de ce qui vient d’être dit ; mais c’est d’ailleurs assez exact, quoique les artères iliaques primitives et les veines iliaques primitives se divisent, non pas vers l’attache des cuisses, mais pas mal plus haut, un peu au-dessous des reins. — Derrière la cuisse. Les artères postérieures de la cuisse et de la jambe sont en effet plus fortes que les artères antérieures. — Vont par le genou dans la jambe et dans le pied. Ces détails sont exacts dans leur ensemble. — (Ou cou-de-pied). J’ai ajouté cette sorte de paraphrase ; et l’auteur a bien soin de dire que c’est le tarse « du pied ». — (Ou orteils). J’ai ajouté également ces mots.
  34. Celles qui se rendent dans la tête par la gorge. Ce sont évidemment les carotides primitives, internes et externes, avec toutes leurs ramifications, s’étendant à toutes les parties de la tête. — Il se ramifie un grand nombre de veines. C’est vrai ; mais c’est bien général. — Aboutissent à l’oreille. Il s’agit des artères auriculaires postérieures, qui se divisent chacune en plusieurs branches. Par Droite et Gauche, il ne faut pas entendre ici la droite et la gauche de la tête, mais la direction des artères et des veines, se dirigeant de droite à gauche, ou de gauche à droite.
  35. Dans chaque côté du cou. Il y a de chaque côté du cou une carotide. Les carotides sont accompagnées d’une foule de veines, qui se ramifient en tous sens ; mais il n’y a pas de veines qui le suivent plus spécialement dans leur trajet, à moins que ce ne soit la veine jugulaire, externe et interne. — La plupart des veines qui descendent de la tête. Ce serait plutôt celles qui montent dans la tête. — Viennent s’y réunir. Ce serait alors des veines qui rapporteraient le sang de la tête au cou ; mais on ne voit pas bien de quelles veines il est question dans ce passage. C’est peut-être la veine temporale superficielle. — Qui passent sous l’omoplate. Ce sont le tronc brachio-céphalique, l’artère brachiale, qui se ramifie jusqu’à la main ; ce sont aussi les veines des mains, les veines sous-clavières et toutes celles qui aboutissent à la veine-cave supérieure, pour aller jusqu’au cœur. — Splénique… hépatique. Voir un peu plus haut, § 6. — Et qu’on ouvre. C’est de la thérapeutique et de la médecine ; ce n’est plus de l’histoire naturelle et de l’anatomie. Le texte est un peu plus précis, et il dit exactement : « ceux qui soignent » les malades, c’est-à-dire, les médecins. Il ne paraît pas qu’Hippocrate ait recommandé ces sortes de saignées ; voir l’édition et la traduction de M. E. Littré, Table alphabétique, article SAIGNEE. Il semble d’ailleurs, d’après ce passage, que la splénique et l’hépatique de Diogène d’Apollonie sont bien des veines et non pas des artères, puisqu’on peut les ouvrir pour tirer du sang dans les maladies.
  36. Se rendent sous les mamelles. C’est sans doute l’artère mammaire, l’artère axillaire, et numérale. Cette dernière s’étend, de la partie inférieure de l’aisselle, au niveau du grand pectoral. — Dans les testicules, en passant par la moelle épinière. Ceci ne peut s’entendre que de l’aorte et de la veine-cave inférieure, avec toutes leurs ramifications. — D’autres encore, placées sous la peau. Il n’y a rien là de particulier pour ces vaisseaux, puisque tous les vaisseaux du corps sont nécessairement placés sous la peau ; mais sans doute Diogène veut dire que ceux-là sont plus profonds que les autres. — Aux reins. Ce sont les artères rénales, qui vont directement de l’aorte à chaque rein. — Aboutissent aux testicules. Ce sont évidemment les uretères, qui, partant des reins, aboutissent à l’appareil génito-urinaire dans les deux sexes, et conduisent l’urine du bassinet à la vessie. — On leur donne le nom de veines spermatiques. MM. Aubert et Wimmer pensent avec raison que ce petit membre de phrase serait mieux placé après : « A la matrice chez les femmes ».
  37. . Le sang le plus épais. C’est peut-être du sang artériel que Diogène d’Apollonie entend parler.
  38. Syennésis et Diogène. Aristote réunit ici ces deux zoologistes ; mais il n’est pas possible de les confondre à aucun degré. Le système de Syennésis est à peu près informe. Celui de Diogène, quoique rempli encore d’erreurs et d’obscurités, est cependant très-supérieur. Il atteste des observations étendues, si ce n’est fort exactes ; et c’est un effort puissant pour chercher à pénétrer la vérité. — Polybe. C’est sûrement le gendre d’Hippocrate ; voir l’édition et la traduction de M. E. Littré, tome LX p. 346 et tome IX, p. 420 ; voir aussi dans ce même volume, p. 163, l’opinion de M. E. Littré sur les trois anatomistes que nomme Aristote.
  39. Quatre paires de veines. Il est évident que ce système tient beaucoup moins de compte de la réalité que celui de Diogène, bien qu’il lui soit postérieur en date ; les observations ont été moins attentives, et Polybe y a mis plus d’imagination qu’il ne faut, et beaucoup plus que son prédécesseur. — Une première paire. D’après cette expression de Paire, on peut supposer que Polybe avait entrevu la distinction des artères et des veines, les unes accompagnant toujours les autres, sans se confondre avec elles. Mais on ne comprend pas à quoi peut se rapporter cette première paire, descendant du derrière de la tête jusque dans les jambes. Il y a de nombreux vaisseaux qui suivent ce trajet ; mais deux vaisseaux latéraux, et en quelque sorte parallèles l’un à l’autre, n’existent pas. On en peut dire autant des trois paires suivantes, qui ne répondent pas davantage à des réalités. — On se fait saigner aux jarrets. Ceci semble indiquer le médecin.
  40. 4. — Appelées jugulaires. Ce sont sans doute les carotides et les veines jugulaires ; mais ces vaisseaux ne sont pas appareillés entre eux, comme Polybe le suppose. — C’est là encore ce qui fait. Voir la note sur le paragraphe précédent ; c’est encore probablement le médecin qui parle.
  41. La troisième paire de veines. Cette troisième paire n’est pas plus réelle que les deux premières ; mais puisqu’elle se dirige dans le poumon, il est à croire qu’il s’agit, en partie du moins, des artères bronchiques et de la veine-cave supérieure. — Toutes les deux aboutissent également à l’anus. Il n’y a rien dans la réalité qui corresponde à cette description.
  42. Enfin, les quatrièmes. Cette quatrième paire n’est pas plus réelle que les trois précédentes. MM. Aubert et Wimmer conjecturent que Polybe aura étudié la distribution des vaisseaux, dans le corps humain, sur des personnes maigres, bien plutôt que sur des dissections. Cette hypothèse est vraisemblable ; et ceci mettrait Polybe au-dessous de Diogène d’Apollonie, qui a certainement fait des observations anatomiques. MM. Aubert et Wimmer ont, à la fin de leur second volume, donné trois dessins, pour faire mieux comprendre au lecteur les systèmes de Diogène, de Polybe et d’Aristote. — Au membre honteux. C’est la traduction littérale de l’expression grecque ; je l’ai conservée, parce qu’elle peut s’appliquer également aux deux sexes. Ce morceau de Polybe est reproduit textuellement dans le Traité hippocratique de la Nature des os ; voir Littré, édit. et trad. d’Hippocrate, tome IX, p. 174. Dans ce dernier texte, le morceau de Polybe est plus long et plus complet. Polybe avait fait un ouvrage sur la Nature de l’homme, d’où ce morceau est sans doute extrait. Voir Littré, ibid., tome I, p. 346.
  43. Que d’autres ont émises. Les citations qui précèdent sont un témoignage de plus contre l’injustice de Bacon, accusant Aristote d’avoir étouffé la gloire de ses devanciers, au profit de la sienne. Sans Aristote, qu’aurions-nous su des théories de Syennésis, de Diogène d’Apollonie et de Polybe ? D’ailleurs, sa propre théorie est tellement supérieure aux leurs qu’il n’a rien à craindre de la comparaison ; mais elle n’était peut-être pas aussi neuve qu’il semble le croire. Elle est déjà dans le Timée de Platon ; voir la traduction de M. Cousin, p. 198. Aristote a oublié de nommer son maître. — Qui étudient la nature. On peut comprendre qu’il s’agit spécialement des philosophes Ioniens ; mais on peut croire aussi que la remarque est générale. — De la tête et du cerveau. Aristote est bien plus dans le vrai, en faisant partir tous les vaisseaux du cœur. — Plus haut. Voir plus haut, ch. II, § 3. — Qu’on étouffe. Probablement, c’était le procédé d’études qu’adoptait Aristote, afin de retrouver le sang des animaux dans les veines, et pour qu’il ne s’en écoulât pas tout entier, « comme d’un vase qui se vide ». Voir plus haut, ch. II, § 3.
  44. Précisément la nature des veines. Sans doute, le système d’Aristote n’est pas non plus la vérité, et il est encore bien loin de la découverte de la circulation du sang, réservée au XVIIe siècle de notre ère. Mais ce système, tout erroné qu’il est, est néanmoins infiniment supérieur aux précédents ; et en faisant partir tous les vaisseaux du cœur, il est beaucoup plus réel qu’aucun d’eux. C’est une justice que MM. Aubert et Wimmer rendent aussi au zoologiste grec. Voir M. E. Littré, Hippocrate, tome I, p. 220. — Deux veines près du rachis. Il est clair qu’il s’agit de l’aorte et de la veine-cave, supérieure et inférieure, quoique la distinction des veines et des artères ne fût pas alors connue. — La plus grosse des deux est en avant. C’est l’aorte, qui est en effet devant la veine-cave. — On rappelle parfois l’aorte. Il paraît donc que ce n’était pas encore une expression généralement reçue, du temps d’Aristote. Voir aussi le Timée de Platon, trad. de M. Cousin, p. 213. — En partant du cœur. Aujourd’hui même, on ne peut faire partir que du cœur la série entière des vaisseaux sanguins, artères qui en partent, ou veines qui y retournent.
  45. Ce qui le prouve. La démonstration peut être regardée comme fort solide ; la continuité des veines ou des artères ne s’interrompt pas, dans un sens ou dans l’autre. — En être une partie. Ceci est moins correct ; et la constitution du cœur n’a aucun rapport avec celle des vaisseaux sanguins. — Surtout de la veine qui est en avant. C’est de l’aorte qu’il s’agit, et qui en effet est la plus grosse. — Au-dessus et au-dessous. C’est exact. — Et qu’au milieu c’est le cœur. Ce n’est pas précisément le milieu ; mais dans la circulation entière, le cœur est le centre où tout aboutit, et d’où part tout le courant.
  46. Des cavités internes. Ceci est encore exact dans cette généralité. Seulement, Aristote ne distingue que trois de ces cavités, tandis qu’il convient d’en distinguer quatre : les deux oreillettes et les deux ventricules. — On distingue aisément les trois. On voit qu’Aristote avait disséqué le cœur avec beaucoup de soin ; et il est étonnant qu’il n’y ait distingué que trois cavités, au lieu de quatre. Du reste, il avait bien fait d’essayer ses observations les plus complètes sur les plus grands animaux.
  47. Un peu plus haut. Voir livre I, ch. XIV, § 1. — La plus grande est à droite. C’est l’oreillette droite du cœur. — Tout à fait en haut du cœur. C’est bien la position de l’oreillette gauche, aussi bien que celle de la droite. — La plus petite est à gauche. C’est sans doute l’oreillette gauche, qui est en effet plus petite que l’oreillette droite. — Les deux réunies. MM. Aubert et Wimmer proposent une petite variante, qui ne change que très-peu le sens, mais qui n’a rien de nécessaire.
  48. Toutes les trois s’ouvrent dans le poumon. On sait que c’est une erreur. Les cavités du cœur ne communiquent pas avec le poumon. En sortant du ventricule droit, le sang passe par l’artère pulmonaire ; et se partageant ensuite en deux colonnes, il pénètre à droite et à gauche dans les deux poumons, où il est mis en contact avec l’air pour redevenir sang artériel ; il est ramené par les quatre veines pulmonaires dans l’oreillette gauche, qui le transmet au ventricule ; et le ventricule le chasse dans l’aorte. Il n’est donc pas exact de dire que le cœur communique avec le poumon ; mais il est vrai que des vaisseaux, partant du cœur, se rendent aux poumons ; et voilà comment Aristote peut être en partie justifié. — La petitesse des conduits. Tous les vaisseaux dont on vient de parler sont au contraire assez gros. — Pour une seule. C’est peut-être l’aorte, ou peut-être aussi l’artère pulmonaire. — La grande veine. C’est sans doute la veine-cave supérieure. Mais loin de partir du cœur, elle y aboutit. Il est vrai qu’à première vue, ces deux directions peuvent se confondre, et qu’à moins de connaître la vraie circulation du sang, on ne voit que les attaches des vaisseaux sans savoir, au juste, dans quel sens ils vont. — Elle redevient veine. C’est la leçon adoptée par Camus et par MM. Aubert et Wimmer, et que justifie ce qui suit. D’ailleurs, la description n’est pas exacte, comme on peut le voir ; et il n’y a pas de vaisseau qui traverse le cœur. — Une sorte d’étang, J’ai conservé, autant que je l’ai pu, la force de l’expression grecque ; on aurait pu traduire aussi : Où le « sang est stagnant ». — L’aorte part de la cavité moyenne. En réalité, l’aorte part du ventricule gauche ; après s’être infléchie, elle se place près de la colonne vertébrale, la suit dans son cours jusqu’à l’abdomen, où elle se divise en deux branches, qui vont dans les jambes. — De la même manière. Que la grande veine, ou veine-cave supérieure. — Avec le cœur. J’ai ajouté ces mots, dont le sens me semble implicitement compris dans l’expression du texte. — La veine traverse le cœur. Ceci n’est pas exact ; Aristote a pris les cavités des oreillettes et des ventricules pour la continuation de la veine-cave. — Dans l’aorte, à partir du cœur. Ceci ne se comprend pas bien ; et tous les efforts qu’on a faits pour améliorer ce passage ont été inutiles. J’ai suivi le texte donné par MM. Aubert et Wimmer ; mais eux-mêmes ne l’ont pas suivi dans leur traduction, où il est dit que « c’est l’aorte seule « qui part du cœur ». Il est bien difficile de savoir précisément ce qu’Aristote a voulu dire. — De plus, la grande veine… MM. Aubert et Wimmer remarquent avec raison que cette observation consignée par Aristote, sur l’épaisseur diverse des vaisseaux sanguins est un grand pas de fait pour la distinction des artères et des veines. Les parois des artères sont formées de trois tuniques les unes sur les autres, avec des vaisseaux et des nerfs qui leur sont propres. Les veines ont quatre tuniques, dont la dernière externe est tout à fait semblable à la tunique externe des artères. La tunique interne est également pareille à celle des artères. Cette ressemblance du tissu des artères et du tissu des veines peut servir à expliquer et à excuser bien des erreurs. — Nerveuse, ou Musculeuse ; car en grec c’est le même mot. A mesure que les vaisseaux sanguins, artères ou veines, sont plus éloignés du cœur, leurs ramifications deviennent de plus en plus ténues ; et en ce sens, l’observation d’Aristote est fort exacte.
  49. Une portion de la grande veine. MM. Aubert et Wimmer pensent qu’il s’agit de la veine pulmonaire ; c’est peut-être plutôt, comme nous disons en France, l’artère pulmonaire, qui charrie le sang noir du ventricule droit aux deux poumons ; elle se porte du ventricule en haut et à gauche ; et après avoir croisé l’aorte, elle se divise en deux troncs, droit et gauche, qui vont aux poumons et s’y ramifient à l’infini. — Et au point de rencontre de l’aorte. L’artère pulmonaire embrasse l’aorte ; et c’est là sans doute ce qu’Aristote aura observé. — Qui ne se divise pas et qui est très-grosse. Il est vrai que d’abord l’artère pulmonaire ne se divise pas et qu’elle est fort grosse, quoique l’étant moins que l’aorte ; mais, après un court trajet de 35 à 40 millimètres, elle se divise pour aller aux deux poumons. — Il sort deux rameaux. Il semble que ceci contredit ce qui précède sur la grande veine « qui ne se divise pas ». — Et l’autre au rachis et à la dernière vertèbre du cou. Il n’est pas nécessaire d’insister sur les erreurs évidentes qui sont commises ici. — Au rachis. Ce ne peut être que la veine-cave. — À la dernière vertèbre du cou. C’est la carotide double, à droite et à gauche. — Elle se rend à chacune des bronches. Ici encore l’erreur est manifeste. La grande veine, comme Aristote l’appelle, ne se rend pas des poumons aux bronches. Le vaisseau qui se rend au poumon, en passant près des bronches, c’est l’artère pulmonaire, qui se ramifie et se perd dans le poumon. Puis, les veines du poumon ramènent le sang à l’oreillette gauche. Mais encore une fois, l’anatomie de toutes ces parties est si délicate et si obscure qu’il n’y a pas à s’étonner qu’on n’ait pas, du premier coup, pu constater les faits. — A chaque orifice. On ne voit pas clairement ce dont il s’agit ; ce sont peut-être les cellules de chaque poumon. — Une seule portion… C’est une description assez exacte de l’intérieur du poumon, tapissé partout d’artérioles et de veinules.
  50. On ne peut plus voir. Il a été constaté par les anatomistes modernes que les derniers canalicules du poumon ont de 1 à 3 dixièmes de millimètre, en diamètre. On comprend comment en présence de cette extrême ténuité, les premiers observateurs ont dû renoncer à pouvoir distinguer les choses ; mais, comme le dit Aristote d’une manière générale, toute l’étendue du poumon est pleine de sang. Il ne savait pas sans doute le pourquoi ; mais c’était déjà beaucoup d’avoir reconnu le fait.
  51. De la grande veine. Le texte dit simplement : « De la veine ». Il ne semble pas que la grande veine, la veine-cave, ait rien à faire ici. La trachée-artère vient du larynx, et se divise sous la crosse de l’aorte en deux branches, l’une sous l’aorte qui va au poumon droit, l’autre devant l’aorte qui va au poumon gauche. Ces divisions de l’aorte sont les Bronches ; l’anatomie moderne leur a conservé le nom grec. — La veine qui se ramifie à la vertèbre du col. Il est difficile de savoir s’il s’agit des artères carotides et des sous-clavières, droites et gauches ; mais, « Cette veine qui revient de nouveau à la colonne dorsale » ne peut guère être que l’aorte ou l’œsophage, qui suivent en effet le rachis pendant un certain trajet. — L’artère, qui des reins monte au col. Homère ne se flattait pas sans doute d’être exact en anatomie ; mais il portait son génie dans ces détails, aussi bien que dans tout le reste. Cette artère dont il parle ne peut être que l’aorte, qui se ramifie aux deux reins, qui se prolonge presque jusqu’au cou en remontant, de même qu’elle descend fort au-dessous des reins, jusqu’aux iliaques primitives. Le vers de l’Iliade se trouve chant XIII, V. 547 ; c’est Antiloque qui frappe Thoon. — De cette veine, partent des veinules. Ce sont sans doute les artères intercostales, allant en effet de l’aorte aux côtes, à droite et à gauche. — À la vertèbre qui est au-dessus des reins. Il s’agit peut-être des artères diaphragmatiques, qui se ramifient à peu près à cette hauteur, un peu au-dessus des reins, du tronc cœliaque et de l’artère mésentérique supérieure.
  52. Partant de la grande veine. Il serait plus régulier de dire : Partant de l’aorte ; mais dans cette complication infinie de vaisseaux de tout genre, qu’a accumulés la nature, il n’y a pas à s’étonner que les premières observations aient été insuffisantes. Il faut au contraire admirer ce qu’Aristote avait déjà pu faire.
  53. De la veine qui part du cœur. Est-ce de l’aorte, avec ses ramifications supérieures, qu’Aristote entend parler ? Ou bien, est-ce de la veine-cave supérieure, qui ne part pas du cœur, mais qui s’y rend par l’oreillette droite ? C’est ce qu’il est difficile de savoir. — La veine entière se divise. Ce sont sans doute les artères naissant de la crosse de l’aorte, tronc branchio-céphalique, artères carotides, artères brachiales. — Dans les bras. C’est précisément l’artère brachiale, ou peut-être aussi les veines brachiales, qui, des doigts et des mains, reviennent, par les épaules et le haut du tronc, au cœur par la veine-cave supérieure. — Les jugulaires. Dans l’anatomie actuelle, les veines jugulaires sont au nombre de trois, Externe, Antérieure et Interne ; elles sont situées à la partie latérale et inférieure du cou, et à sa partie antérieure, avec des branches collatérales, et recevant le sang de l’intérieur du crâne, de la face et du cou. MM. Aubert et Wimmer pensent qu’il s’agit de la veine-cave, se divisant dans les deux veines innomées. — Elles suivent l’artère du poumon. Ce ne peut être que la carotide de l’un et de l’autre côté, ou peut-être la trachée-artère. — Quand elles sont comprimées du dehors. C’est la strangulation ; mais c’est surtout la compression des carotides, et non pas celle des jugulaires, qui amène la syncope, et, par suite, la mort.
  54. Et en enveloppant la trachée-artère, ou plus exactement peut-être : « En laissant la trachée-artère entre elles. » — Ces veines se rendent aux oreilles. Ce sont les carotides, qui, de la crosse de l’aorte, montent jusqu’aux oreilles, et, de là, jusqu’à la tête. — Ce point. On ne saurait dire bien précisément quel est ce point. — Quatre autres veines. Ceci n’est pas exact ; il y a beaucoup plus de quatre veines dans ces régions ; et il n’y en a pas quatre qui se distinguent de toutes les autres. — Descend par le cou et l’épaule. Ce sont, ou les carotides, ou les jugulaires. — La première ramification de la grande veine. C’est, ou l’artère, ou la veine brachiale. — Vers le pli du bras. On ne voit pas bien pourquoi on a désigné plus particulièrement ici cette partie du bras. — Aux mains et aux doigts. A partir de l’artère humérale, une foule d’artères plus ou moins grosses se répartissent dans le bras, l’avant-bras, la main et les doigts ; artère collatérale interne, artère radiale, artère radio-palmaire, artères collatérales des doigts, etc., etc. — Se rend au cerveau. Ce sont les ramifications des carotides primitives, jusqu’aux branches terminales de la temporale, au sommet de la tête. Puis, comme Aristote parle un peu plus bas des méninges, il s’agit aussi des artères et des veines qui pénètrent dans la masse encéphalique. — La méninge. C’est le nom collectif donné aux trois membranes qui enveloppent tout l’appareil cérébro-spinal, ou encéphalo-rachidien, la dure-mère, l’arachnoïde et la pie-mère.
  55. N’a point de sang. C’est exact dans une certaine mesure ; mais il est inexact que pas une veine, petite ou grande, ne se rende dans le cerveau. Ce qui est vrai, c’est que les vaisseaux sanguins ne pénètrent pas profondément dans la substance de l’encéphale, ni dans ses lobes ; mais le cerveau a ses artères et ses veines très-nombreuses : artères carotide interne, cérébrale antérieure, choroïdienne, vertébrale, spinale, tronc basilaire, cérébelleuse, etc., etc. ; veines, sinus de la dure-mère, grande veine cérébrale interne, veine du corps strié, choroïdienne, cérébrale latérale et inférieure, ophtalmique, méningée, etc., etc. — Entourent circulairement la tête… aux organes des sens. Tous ces détails sont assez exacts. — Excessivement déliés. Et c’est là ce qui fait qu’il est très-difficile de faire toutes ces préparations anatomiques.
  56. Appelée l’aorte. L’aorte est la plus grosse des artères ; elle est accompagnée de la veine-cave supérieure et inférieure. La veine-cave supérieure réunit en un seul tronc toutes les veines de la tête et des membres supérieurs ; elle arrive à l’oreillette droite du cœur et correspond à la partie supérieure de l’aorte thoracique ; la veine-cave inférieure suit également l’aorte, jusqu’à ce qu’elle se sépare comme elle, et à la même hauteur, en veines iliaques primitives. La concomitance décrite par Aristote est donc exacte ; mais les ramifications de l’aorte ne sont pas beaucoup moins nombreuses que celle de la veine-cave, ainsi qu’il le dit. — En beaucoup plus petit nombre. Ou « beaucoup plus petits »; ce qui n’est pas plus conforme aux faits, selon un sens ou selon l’autre.
  57. Au-dessus du cœur. Dans ce qui précède, il a bien été question quelquefois des vaisseaux qui sont au-dessous du cœur ; mais en général, il a été surtout parlé de ceux qui sont dans la partie supérieure du corps. Aristote prend le cœur pour point de séparation ; l’anatomie moderne a pris avec plus de raison le diaphragme comme limite, et elle distingue les veines sus-diaphragmatiques et les veines sous-diaphragmatiques : les unes se réunissant en la veine cave-supérieure ; les autres, en la veine cave inférieure. C’est de celle-là qu’il sera surtout traité dans la suite de ce chapitre. — Directement. Le mot du texte est assez équivoque ; et on pourrait le traduire aussi bien par « librement », comme le font MM. Aubert et Wimmer ; ou comme je l’ai fait avec Camus. — Elle se rattache à l’aorte et au rachis. Ceci n’est pas très-exact ; et les veines du rachis forment tout un système particulier, qui n’a pas de rapport à l’aorte ni à la veine-cave. — Il en part. Le texte ne dit pas plus clairement si c’est de l’aorte, ou du rachis, qu’il s’agit. Évidemment « cette veine courte et large « qui traverse le foie », est l’artère hépatique du tronc cœliaque, naissant de l’aorte abdominale. Elle se jette dans le foie, au niveau du sillon transverse. Seulement son calibre n’est peut-être pas aussi gros que le suppose Aristote ; et il semble assez petit par rapport au volume du foie. — De la veine qui traverse le foie. On ne voit pas bien à quel vaisseau ceci peut se rapporter. — Sortent deux rameaux. Ceci est encore moins exact ; et il y a dans ce passage beaucoup de confusion et d’erreur. — Aboutit au diaphragme. Les seuls vaisseaux qui traversent le diaphragme sont ici l’aorte, la veine-cave inférieure et l’œsophage. Peut-être s’agit-il aussi de la veine-porte qui se divise en deux branches, pour se distribuer dans le foie ; mais elle n’a pas de rameau qui remonte par l’aisselle dans le bras. Les vaisseaux qui vont dans les bras sont les artères du tronc brachio-céphalique, et les artères brachiales, avec toutes les veines des bras, qui viennent se rejoindre à la veine-cave supérieure. Mais tous ces vaisseaux sont dans le bras gauche aussi bien que dans le bras droit. — Les médecins. Voir Hippocrate, édit. Littré, tome II, p. 400, du Régime dans les maladies aiguës, Appendice. Pour certaines douleurs de foie, Hippocrate ordonne la saignée.
  58. Se rend à la rate. Ce détail encore est inexact. De la grande veine ou veine-cave inférieure, il ne vient pas de vaisseau à la rate ; mais elle reçoit une grosse artère, la splénique ; la veine splénique aussi est considérable. L’artère splénique est la plus volumineuse des branches du tronc cœliaque ; quant à la veine splénique, qui est très-grosse, elle correspond à l’artère splénique ; elle part de la rate, et elle contribue, avec la veine mésentérique, inférieure et supérieure, à former la veine-porte ventrale, qui se divise aux deux lobes du foie. — Se rend en montant dans le bras gauche. Aristote confond ici bien des choses, et cela se conçoit de reste, à une époque qui ne pouvait rien savoir encore de la distinction des artères et des veines. — Est bien celle qui traverse le foie. Détail anatomique inexact.
  59. Partant de la grande veine. On ne voit pas bien à quels vaisseaux peut se rapporter cette description. S’il s’agit du tronc cœliaque et de ses divisions, on ne peut pas dire que les artères qui le composent « partent de la grande veine ». Elles partent plutôt de l’artère mésentérique supérieure, et même de l’aorte abdominale. — L’une à l’épiploon. C’est sans doute l’artère gastro-épiploïque, gauche et droite. — L’autre, à ce qu’on appelle le Pancréas. C’est l’artère pancréatico-duodénale, et aussi l’artère splénique. Par la forme de langage que prend ici Aristote, il semble que, de son temps, le mot de Pancréas était assez nouveau ; l’anatomie moderne l’a conservé. Le Pancréas est une grosse glande, analogue aux glandes salivaires. C’est une sorte de grappe aplatie, couchée transversalement sur la colonne vertébrale ; il est divisé en deux portions. Il est placé horizontalement, entre l’extrémité pylorique de l’estomac et le duodénum. On ne sait pas bien encore quelles sont ses fonctions. Le nom de Pancréas paraît d’ailleurs assez mal choisi, quand on regarde quelle en est l’étymologie. — Qui traversent le mésentère. Le mésentère proprement dit est un très-fort repli du péritoine, en avant de la colonne vertébrale. Il y a plusieurs espèces de mésentères, qui vont des parois abdominales aux organes, pour y porter des vaisseaux et des nerfs. Les épiploons, autres replis du péritoine, vont d’un organe à un autre ; on en distingue plusieurs, comme pour les mésentères. — À une grosse veine. C’est sans doute la veine cave inférieure. — Beaucoup d’autres veines. C’est une indication bien vague ; et l’anatomie moderne a poussé l’analyse beaucoup plus loin.
  60. Jusqu’aux reins. C’est-à-dire, jusqu’à la hauteur des reins. En effet, à cette hauteur du tronc, les artères rénales se séparent de l’aorte, pour se diriger à droite et à gauche dans chacun des reins ; mais c’est un peu plus bas que l’aorte se divise en artères iliaques primitives, l’une pour la jambe droite, l’autre pour la jambe gauche. — Sous forme de Lambda. Ceci est surtout applicable à l’aorte, dont les divisions iliaques primitives représentent assez bien la figure de la lettre grecque. — La grosse veine est un peu plus en arrière. Ceci est très-exact. — L’aorte se soude… L’expression grecque a cette force. D’ailleurs, ce qu’Aristote dit ici de l’aorte est d’une exactitude étonnante. Ainsi l’aorte, en sortant du cœur, où son origine est le ventricule gauche, est rapprochée de la partie antérieure de la poitrine ; puis après s’être infléchie en crosse, elle se place le long de la colonne vertébrale, et elle en suit les courbures. A sa crosse, elle a un calibre beaucoup plus fort que dans le reste de son étendue. Ce calibre reste à peu près le même dans toute la partie thoracique ; mais une fois qu’elle a traversé le diaphragme, elle fournit des branches très-volumineuses, et ses dimensions se réduisent de plus en plus jusqu’à sa partie inférieure. Aristote a vu tout cela avec une précision extraordinaire ; et l’on doit penser que ses préparations anatomiques étaient faites avec autant de soin que les nôtres, si ce n’est avec autant de résultats. — D’être un nerf. Ceci est une erreur en ce sens que l’aorte et ses ramifications les plus ténues restent toujours des vaisseaux.
  61. Qui vont au mésentère. Ce sont les artères mésentériques, supérieure et inférieure, un peu au-dessous du tronc cœliaque et du pancréas. — Il n’y a pas de veine. Ceci semble en contradiction avec ce qui a été dit plus haut, §§ 1, 2 et 3. Ceci d’ailleurs peut être jusqu’à certain point conforme aux faits ; ce n’est pas de l’aorte directement que partent les artères hépatique et splénique ; c’est du tronc cœliaque, l’une allant à droite au foie, en passant sous l’extrémité pylorique de l’estomac ; l’autre, allant à gauche jusqu’à la rate, où elle se ramifie, en se détachant de l’artère épiploo-gastrique gauche. Voir aussi le § suivant.
  62. Aorte et grande-veine. J’ai ajouté ces mots, pour plus de clarté. — Se rendent à chacune des hanches. L’aorte, à égale distance à peu près de la hauteur des reins et de la vessie, se sépare en deux troncs moins gros qu’elle, mais considérables encore, les artères iliaques primitives, qui se ramifient elles-mêmes en internes et en externes. Quant à la veine cave inférieure, elle se divise aussi en deux branches, iliaques primitives, à peu près à la même hauteur que l’aorte. — Elles s’insèrent à l’os. Ceci n’est pas très-exact ; mais peut-être faut-il comprendre simplement qu’elles « contournent l’os ». — Se rendent dans les reins. Ce sont les artères rénales, qui partent de l’aorte, un peu au-dessous du tronc cœliaque et de l’artère mésentérique supérieure. Les veines rénales sont très-volumineuses, et elles se rendent du rein à la veine cave inférieure ; elles reçoivent les veines capsulaires inférieures, et des vaisseaux venant du tissu adipeux qui entoure le rein.
  63. Deux autres canaux. Ce sont les artères spermatiques, qui partent de l’aorte, à la hauteur des reins à peu près, et qui se dirigent non pas à la vessie, mais de chaque côté de la vessie. — Ils sont forts. Ceci n’est peut-être pas très-exact, si l’on compare ces vaisseaux à l’aorte et aux uretères. — Viennent du fond des reins. Ce sont les uretères. Toute cette fin du paragraphe jusqu’à : « Se ramifient sur la hanche », semble à MM. Aubert et Wimmer une, interpolation, qui, de la marge, sera passée dans le texte. Cette conjecture paraît très-probable ; cette fin contient en effet des répétitions et des contradictions qui troublent l’ordre des pensées. — Entre les nerfs. Quelques éditeurs ont cru qu’au lieu de « nerfs », il fallait lire « reins ». La différence n’est représentée en grec que par une seule lettre. — Leurs extrémités… Il semble que l’ordre des pensées reprend ici, et fait suite à ce qui est dit plus haut : « Partant de l’aorte, se dirigent à la vessie ».
  64. Qui, de la grande veine… C’est une erreur ; les veines utero-ovariques, formées par celles des ovaires, des trompes et des ligaments, se jettent dans la veine cave inférieure, ou dans la veine rénale, comme s’y jettent aussi les veines testiculaires. Dans l’état de grossesse, ces veines prennent un développement considérable. — De très-grosses qui viennent de l’aorte. De l’aorte abdominale, se détachent en effet d’assez grosses artères, qui se ramifient à la matrice, sans parler de l’artère ombilicale, l’artère utérine, l’artère vaginale, les artères vésicales, etc., etc. — Il en sort beaucoup d’autres. Ce sont toutes les artères et toutes les veines qui se distribuent, sans discontinuité, depuis les artères et les veines iliaques primitives, jusqu’au bout des pieds et des orteils, les unes descendant, les autres remontant. — Vont, l’une de gauche à droite. Il est difficile de voir à quoi ceci se rapporte. — Dans la région du jarret. Evidemment, il s’agit de l’artère fémorale et de l’artère poplitée ; mais, comme les détails précédents, ceux-ci sont trop vagues pour qu’on puisse découvrir à quelles réalités anatomiques ils s’appliquent.
  65. On doit voir clairement. Résumé de tout ce qui précède depuis le ch. II. — Leur point de départ. Aristote a très-bien vu, et le premier sans doute que ce point de départ est le cœur. — Quant aux autres veines. Aristote s’est surtout occupé de l’aorte et de la veine cave, qu’il appelle Grande veine ; mais il n’a pas distingué les artères et les veines. — On ne peut pas toujours les observer. On voit par ceci que l’observation est la seule méthode qu’Aristote ait prétendu suivre ; il n’a pas toujours bien observé ; mais qui pourrait se flatter de ne s’être jamais trompé ? Néanmoins il a trouvé la vraie route, et la science n’a eu qu’à l’y suivre. — Les plus grands. Parce que l’observation y est plus facile et plus sûre. — De se rendre compte des choses. Les motifs qui en sont allégués ici sont de toute évidence. — Dans la vase qui les comble. La comparaison est fort juste ; mais il faut remarquer ce procédé de style, qui est très-rare dans Aristote. — Ce sont des fibres. Il aurait mieux valu dire que les ramifications des vaisseaux deviennent si ténues qu’on ne peut plus y distinguer le sang, et qu’elles se réduisent à de simples filets. — La grande veine. Si par la grande veine, on doit entendre la veine cave, ceci ne serait pas exact ; mais Aristote veut dire sans doute que, même dans les plus petits animaux, il y a toujours un vaisseau plus grand que tous les autres. — Pour toute cette théorie d’Aristote sur les veines, voir le Traité des Parties des animaux, liv. III, ch. IV, édit. et trad. Frantzius, pp. 134 et suiv. ; édit. Langkavel, pp. 69 et suiv. Le système des vaisseaux sanguins y est exposé mieux encore qu’il ne l’est ici. Voir aussi la discussion de E. Littré, Hippocrate, tome I, Introduction, pp. 218 et suiv.
  66. Les nerfs dans les animaux. De même que sous le nom commun de Veines, Aristote a confondu les veines proprement dites et les artères, de même ici il confondra les nerfs proprement dits et les muscles, sous le nom commun de nerfs. Ceci veut dire que, de son temps, l’analyse ne faisait que de commencer, et qu’elle n’avait pas été poussée assez loin. — Les nerfs partent aussi du cœur. Il n’est pas besoin de remarquer que ceci est une complète erreur ; les muscles n’ont pas une origine unique, comme les vaisseaux sanguins. Ils sont indépendants les uns des autres. — Dans sa plus grande cavité. Voir plus haut, liv. I, ch. XIV, § 3. La plus grande cavité du cœur paraît être, d’après Aristote, l’oreillette droite. — Une veine nerveuse. C’est la traduction exacte de l’expression grecque ; mais on voit sans peine combien l’idée est fausse. — De la nature des nerfs. Ce qui est vrai, c’est que les dernières artérioles sont tellement ténues qu’on peut les prendre pour de simples filets, comme les nerfs les plus minces. — Ne sont plus creuses. Au contraire, elles sont creuses certainement, puisqu’elles ont encore du sang ; mais le calibre en est excessivement petit. — La même possibilité de se tendre. Les artères sont formées de trois tuniques superposées, qui sont très-élastiques, surtout la tunique moyenne. De là vient la rétractilité si vive des artères. Les veines ont quatre tuniques ; leurs parois sont beaucoup plus extensibles que celles des artères ; voir Cuvier, Leçons d’anatomie comparée, tome VI, p. 227.
  67. Aux esquisses des peintres. La comparaison ne semble pas très-frappante. Aristote a voulu dire sans doute que le trajet des veines à la surface du corps, n’est pas plus marqué que ne l’est l’esquisse d’un dessin ébauché. On retrouve la même expression dans le Traité de la Génération des animaux, liv. II, § 88, p. 180, édit. et trad. Aubert et Wimmer ; voir aussi une comparaison analogue dans le Traité des Parties des animaux, liv. II, ch. IX, §5, p. 41, édit. Langkavel. — La même place que les chairs. Ceci est peu exact.
  68. Dans les membres, ou articulations. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte ; mais il a les deux sens que j’ai indiqués. — S’ils étaient continus. Répétition du paragraphe précédent. — Celle de qui dépend l’action du saut. J’ai dû prendre cette longue périphrase pour rendre la force de l’expression grecque. Aristote veut dire que les muscles les plus forts sont ceux qui servent à sauter. — Le jarret. Il s’agit de la région postérieure profonde de la jambe et du muscle poplité. — Un autre nerf double. Le tendon. Aristote entend par là sans doute les muscles jumeaux et le soléaire. Les premiers s’insèrent sur le condyle extérieur du fémur, en descendant jusqu’au tendon d’Achille et au calcanéum. Le soléaire s’insère à la tête du péroné, au-dessous des jumeaux, et va, par deux aponévroses, se perdre sur le tendon d’Achille. Ce tendon lui-même est à la partie inférieure et postérieure de la jambe ; il est volumineux et s’insère à la partie postérieure du calcanéum. — L’extenseur. Il me semble que c’est la traduction exacte du mot grec ; il s’agit très-probablement du deltoïde, situé à la partie supérieure et externe du bras. — À l’articulation des os…. sont reliés par des nerfs. C’est la partie de l’anatomie que les modernes ont appelée l’Arthrologie, et parfois aussi la Syndesmologie, les cartilages, les ligaments, les membranes synoviales. Les articulations sont très-nombreuses, à cause de la diversité même des mouvements.
  69. Une quantité de nerfs. Sous ce nom général, Aristote réunit une foule de choses que, depuis lui, les anatomistes modernes ont séparées et distinguées avec soin. — Si ce n’est pour la tête. Les os de la tête (crâne) sont reliés entre eux tout autrement que le reste des os. Le crâne est une boîte osseuse composée de huit os : quatre impairs et quatre pairs, tous juxtaposés entre eux sans ligaments comme les autres os, et reliés seulement par des sutures. — Le nerf…. se diviser en long. Ceci s’applique aux muscles et aux nerfs, qui n’étaient pas distingués à l’époque où écrit Aristote. — Il peut s’allonger beaucoup. Ce sont surtout les muscles qui sont composés d’éléments contractiles ; il faut qu’ils puissent se raccourcir et s’allonger, pour que les mouvements, qu’ils doivent faciliter, soient possibles, dans la vie de relation et dans la vie organique. Les nerfs sont des cordons blancs, allant toujours en ligne droite, sans flexuosités comme les artères, et cylindriques dans toute leur longueur. Le muscle se divise en long, parce qu’il est composé de fibres parallèles, réunies entre elles par du tissu cellulaire ; ce sont ces fibrilles qui sont essentiellement contractiles. — Autour des nerfs. Il semble qu’il s’agit ici de l’humeur synoviale, qui facilite le jeu des os sur lesquels les muscles s’attachent ; mais Aristote pousse l’analyse trop peu loin pour qu’on puisse bien reconnaître ce qu’il veut dire. Le liquide que sécrète la membrane synoviale, est, d’après les anatomistes modernes (voir le Traité d’anatomie descriptive de M. A. Jamain, p. 128), filant, onctueux, semblable à du blanc d’œuf. C’est sans doute de ce liquide qu’Aristote veut parler ; et alors les « nerfs » seraient plutôt les muscles ; mais encore une fois, Aristote confond toujours les uns et les autres. — La veine peut être brûlée, etc. Ceci ne se comprend pas bien, non plus que ce qui suit sur « le nerf qui ne reprend jamais ». Mais ces détails, obscurs et inexacts comme ils le sont, attestent néanmoins des expériences et des observations fort curieuses. On sait de reste que les nerfs reprennent après avoir été coupés.
  70. L’engourdissement…. où il n’y a pas de nerfs. Si le mot de « Nerf » doit être pris ici dans son véritable sens, ce passage semblerait prouver qu’Aristote était sur la voie de la grande découverte de la sensibilité des nerfs. Mais il est possible aussi que ce passage signifie simplement que, là où il n’y a pas de muscle, il n’y a pas de mouvement dans le corps. Le double sens que j’indique résulte toujours de la confusion des muscles et des nerfs. — Où il y a le plus de nerfs, ou de muscles. En effet, les muscles et les nerfs du bras, de la main, du pied, de l’omoplate, des côtes, sont très-nombreux, sans l’être beaucoup plus qu’ailleurs ; mais ils y sont peut-être plus apparents.
  71. Ont aussi des nerfs. Ou « Des muscles ». — Les nerfs les plus apparents. Il est clair qu’ici il est question des muscles proprement dits, puisqu’il s’agit du mouvement des nageoires dans les poissons.
  72. Sont placées au milieu. La suite de cette phrase prouve que MM. Aubert et Wimmer ont raison de ne penser ici qu’à une position matérielle. Les fibres « allant des veines aux nerfs et des nerfs aux veines » sont nécessairement placées entre les uns et les autres. Ce passage ne veut donc pas dire, comme l’ont cru quelques traducteurs, que la nature des fibres est intermédiaire entre celle des nerfs et celle des veines. — De la lymphe. On serait autorisé à croire qu’il s’agit des vaisseaux lymphatiques, qui portent aux veines la lymphe et le chyle. La description exacte de ces vaisseaux est une des conquêtes les plus récentes de la science moderne.
  73. Une autre espèce de fibres. Aristote revient sur ce genre de fibres du sang dans le Traité des Parties des animaux, liv. II, ch. IV, p. 30, édit. Langkavel, où il reproduit presque tous les détails qu’il donne ici. D’ailleurs le fait qu’il signale est exact ; et le sang privé de ses fibres ne se coagule pas. — Du chevreuil. Le nom grec de Dorcas paraît à Cuvier (Règne animal, tome I, p. 266, note) répondre à celui de Chevreuil : j’ai cru cependant devoir adopter ce nom de Chevreuil pour traduire le mot de Prox, qui est dans le texte. Voir le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, p. 67, qui identifient le Prox avec le cervus capreolus, chevreuil, en allemand Reh. — Du bubale. On ne sait pas au juste quel est cet animal ; on croit que c’est une espèce d’antilope. D’autres ont cru aussi pouvoir l’assimiler au buffle ; voir MM. Aubert et Wiramer, loc. cit., p. 65. Cuvier, Règne animal, tome I, p. 269, range le Bubale des Anciens parmi les Antilopes. Aristote parle encore du Bubale, avec le Dorcas, dans le Traité des Parties des animaux, liv. III, ch. II, p. 63, édit. Langkavel.
  74. Comme celui du lièvre. Je ne sais pas si les zoologistes modernes ont essayé de renouveler ces comparaisons, qui ne manquent pas d’intérêt. — Comme celle du lait. Du lait non caillé, où la crème est mêlée au petit-lait.
  75. . Que celui des moutons. Suite des comparaisons précédentes. Il est évident qu’Aristote avait fait beaucoup d’observations sur le sang des différents animaux. La science moderne en a fait surtout sur le sang de l’homme ; mais elle s’est moins occupée du sang des animaux ; voir Cuvier, Leçons d’anatomie comparée, tome VI, pp. 38 et suivantes, 2e édition.
  76. Les veines, les nerfs et les fibres. Résumé des quatre deniers chapitres, II, III, IV et V.
  77. Tous les os dans les animaux. Les mêmes explications sur le rôle des os et du rachis se retrouvent, encore plus nettement exposées, dans le Traité des Parties des animaux, liv. II, ch. IX, édit. Langkavel, pp. 40 et suiv. La rédaction est souvent identique. — Ils se relient les uns aux autres. L’ensemble des os constitue le squelette, et ils tiennent les uns aux autres par des ligaments. Le nombre des os varie selon l’âge, parce que tantôt ils ne sont pas encore formés, ou que tantôt ils se soudent. Dans l’homme, les anatomistes les plus exacts en comptent 208, dont 34 impairs et le reste pairs ; mais selon qu’on admet dans le compte les os sésamoïdes et les os wormiens, le chiffre est différent. — Il n’y a point d’os qui soit isolé. Ceci n’est pas tout à fait exact. La rotule est un os qu’on peut considérer comme isolé et sésamoïde ; elle se développe vers la troisième année, dans l’épaisseur du ligament antérieur de la cuisse. — Le point de départ est le rachis. C’est encore par la colonne vertébrale que les anatomistes modernes commencent l’ostéologie, pour remonter à la tête et redescendre au thorax et aux membres inférieurs.
  78. Le rachis se compose de vertèbres. Le nombre des vertèbres varie selon les animaux qui en ont ; mais le rôle des vertèbres est toujours considérable ; et c’est sur cet organe qu’on a fondé la classe des vertébrés, à laquelle appartiennent les animaux les plus parfaits. — Aux hanches et au siège. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte ; et j’ai cru devoir en prendre deux dans notre langue, pour le rendre dans toute sa force. — Sont percées. C’est ce qu’on appelle le trou vertébral ; la succession des trous vertébraux forme le canal rachidien. — Il s’appelle le crâne. Dans la tête, on distingue le crâne proprement dit, et la face.
  79. Comme dans le chien. Ceci est inexact ; mais dans le chien, les sutures sont moins apparentes, et voilà comment les premiers observateurs ont pu ne pas les voir. — Comme dans l’homme. Le crâne humain se compose de huit os, dont quatre sont impairs, et quatre sont pairs ; ces derniers sont les pariétaux et les frontaux. — La femme n’a-t-elle qu’une suture circulaire. Ceci est une erreur, venant sans doute de ce que souvent les différentes parties du crâne se soudent tellement qu’on ne peut plus les distinguer. — Tandis que l’homme en a trois. Coronale, sagittale, et lambdoïde ou occipito-pariétale. — Une tête d’homme sans suture. Ceci n’est pas impossible. Non pas qu’il n’y eût jamais eu de sutures dans ces têtes ; mais les sutures avaient disparu, et les os s’étaient soudés. Voir tout ceci plus haut, livre I, ch. VII, § 3. — Mais de six. En fait, la tête a huit os ; la boîte osseuse du crâne se compose du frontal, de l’occipital, du sphénoïde, de l’ethmoïde, de deux pariétaux et de deux temporaux. Il est probable que c’est le sphénoïde et l’ethmoïde, qui, à cause de leur position à la base du crâne, auront échappé à l’attention d’Aristote, malgré leur forme singulière et si remarquable. — Qui sont vers les oreilles. Ce sont les temporaux, qui sont en effet un peu plus petits. Voir le Traité des Parties des animaux, livre II, ch. VII, p. 35, édit. Langkavel, sur le cerveau, et sur les sutures, p. 38.
  80. Qui forment les mâchoires. Les os maxillaires supérieurs. — Dans tous les animaux. Ainsi que le supposent MM. Aubert et Wimmer, ceci semble bien une interpolation, venue sans doute d’une remarque marginale. C’est la répétition d’une phrase qu’on trouve plus haut livre I, ch. IX, § 2, où elle est très-bien placée, tandis qu’ici elle est tout à fait hors de place. — Les dents, espèce d’os. Dans la science moderne, les dents ne font plus partie des os ; Aristote ne paraît pas non plus les prendre pour des os véritables. — N’est pas percée… est percée. Il s’agit du petit canal qui est creusé dans la racine de la dent ; et c’est par là que passent les vaisseaux et les nerfs dentaires, qui font que les dents ont une telle sensibilité. — Qu’on ne puisse pas tailler. C’est peut-être exagéré ; mais il est certain que la matière des dents ne permet guère qu’on puisse en tirer parti comme des autres os. Des trois parties qui composent la dent, émail, ivoire et cément, l’émail est très-dur mais très-fragile, et il n’est un peu épais qu’au sommet de la dent ; l’ivoire est un peu moins dur que l’émail, et il est traversé par de petits tubes qui s’ouvrent dans la cavité centrale de la dent ; enfin, le cément est moins serré encore que l’ivoire, bien que sa composition se rapproche beaucoup de celle des dents ; voir l’Anatomie descriptive de M. Jamain, p. 77. On comprend qu’une matière comme celle-là ne puisse pas se travailler comme les os, dont le tissu est très-dense, et dont la partie inorganique est très-dure. Cette dernière partie forme plus des deux tiers de l’os.
  81. L’os qui supporte la tête. C’est le sens que je donne, avec Camus, au mot du texte qui ne se trouve que dans ce seul passage ; il s’agit sans doute des deux premières vertèbres cervicales, l’atlas et l’axis ; mais on ne comprend pas qu’Aristote ait pu rattacher les clavicules à l’épine dorsale ; la clavicule ne s’articule qu’avec le sternum, et l’omoplate ; aussi MM. Aubert et Wimmer supposent-ils quelque altération dans ce passage. — Les côtes. Ceci est exact. Les côtes s’articulent sur les vertèbres et sur le sternum, pour former la cavité thoracique. Aristote peut très-bien le faire partir du rachis, tant pour les sept vraies côtes que pour les cinq fausses côtes, de chaque côté, vingt-quatre en tout. — Quelques côtes se rejoignent à elle. Ce sont les vraies côtes, qui vont de l’épine au sternum. — D’autres ne s’y rejoignent pas. Ce sont les fausses côtes, qui ne se rejoignent qu’aux vraies et ne vont pas jusqu’au sternum. — Autour de la région du ventre. Ceci veut dire, ou qu’il n’y a pas d’os circulaire autour du corps, ou simplement que le ventre n’est pas recouvert par un os. Cette observation, prise dans sa généralité, est exacte. — Les os qui sont dans les épaules. Les omoplates forment, avec les clavicules, la charpente de l’épaule ; elles s’articulent avec la clavicule, et l’humérus du bras. — Les os des bras. L’expression est bien vague ; mais les os du bras sont d’abord : l’humérus pour le bras proprement dit ; puis, le cubitus, en dedans ; et le radius, en dehors, pour l’avant-bras. — Les os de la main. Ici encore, l’expression est bien large. Les trois parties de la main, carpe, métacarpe et doigts, contiennent des os nombreux et très-différents ; huit dans le carpe ; cinq dans le métacarpe, et quatorze dans les phalanges, le pouce n’en ayant que deux au lieu de trois. Il y aurait en outre les sésamoïdes, au pouce et au métacarpe ; mais d’ordinaire on ne les compte pas.
  82. En bas de l’épine. Aristote semble comprendre dans l’épine le sacrum et le coccyx, sans les distinguer. — Après la hanche. Le sens du mot grec n’est pas bien déterminé ; il peut signifier le siège aussi bien que la hanche : mais il ne faut pas attendre, dans ces premières investigations de la science, une exactitude que nous n’avons pas encore complètement aujourd’hui. — La cavité cotyloïde. Le texte dit simplement Cotylédon. La cavité cotyloïde reçoit la tête du fémur, et c’est là sans doute ce qui l’aura signalée à l’attention d’Aristote, dans les deux os iliaques qui forment le bassin. — Les Côlènes. J’ai conservé le mot grec, comme l’ont fait plusieurs traducteurs ; le texte explique bien ce qu’on doit entendre par là ; les os des cuisses et des jambes sont le fémur, le tibia et le péroné. — Et dans les chevilles… qui ont une cheville. MM. Aubert et Wimmer mettent cette phrase entre crochets, pour indiquer qu’ils la regardent comme une interpolation ; il semble bien en effet que c’en est une, et « les ergots » de certains oiseaux n’ont rien à faire ici. — Viennent, à la suite, les os des pieds. Ceci est la suite naturelle de ce qui vient d’être dit sur les Côlènes ; après les os des jambes, il est tout simple de traiter des os des pieds. Mais Aristote n’essaie pas plus de compter les os des pieds qu’il n’a compté ceux de la main. Chez l’homme, il y a 14 os du tarse dans les deux jambes, 10 du métatarse et 28 des phalanges ; en tout 52.
  83. Les vivipares… Ceci est très-exact ; et dans les animaux supérieurs, vertébrés, mammifères, etc., on retrouve en général la plupart des os de l’homme, ou leurs équivalents.
  84. Ont de la moelle. C’est là encore une des considérations dont s’occupe la science moderne ; la moelle est en général contenue dans la cavité des os longs ; celle qu’on rencontre dans les os courts est un peu différente, moins rouge et moins consistante. Il est remarquable qu’Aristote ne la décrive pas. La moelle jaune n’est presque que de la graisse, tandis que la moelle rouge est surtout de l’eau. — Le lion par exemple. Les détails consignés ici prouvent qu’Aristote avait disséqué des lions. D’ailleurs, les mêmes observations sur les os du lion sont répétées dans le Traité des Parties des animaux, livre II, ch. VI, p. 72, édit. Frantzius, et ch. IX, p. 86. Dans ce dernier passage, la répétition est presque identique. Il ne paraît pas que les os du lion soient les seuls à être aussi durs. Voir ce qui en est dit plus loin, ch. XV, § 3.
  85. . Le dauphin a également des os ; mais il n’a pas d’épine. Sur le dauphin ordinaire (Delphinus delphis), qui est celui des Anciens, voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 287. — Comme ceux des oiseaux. Voir le Traité des Parties des animaux, livre II, ch. IX, p. 86, édit. Frantzius, où Aristote remarque que les os des oiseaux sont généralement plus faibles. — Correspondantes et identiques par analogie. Voir plus haut, livre II, ch. I, §§ 4 et suivants. C’est l’unité de plan qu’Aristote a reconnue le premier, et qu’il a étudiée dans presque toute la série animale. — Une épine cartilagineuse. C’est là ce qui les a fait nommer Chondroptérygiehs par la zoologie moderne ; le squelette de ces poissons est essentiellement cartilagineux ; il ne s’y forme point de fibres osseuses. — Les sélaciens. Ce sont des Chondroptérygiens à branchies fixes, formant le deuxième ordre de cette classe. Il y en a deux genres principaux, les squales et les raies ; leur épine est divisée en vertèbres. Voir Cuvier, Règne animal, tome II, pp. 383 et 385, et aussi la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 812, trad. franc. — Où les ovipares. Il y a en effet dans ces poissons des espèces qui sont vivipares, et d’autres ovipares. — Une arête, qui reproduit le rachis. Le rapprochement est très-naturel ; c’est Aristote qui l’a fait le premier.
  86. Une organisation propre aux poissons. La remarque est exacte ; mais il aurait été possible de préciser davantage les espèces de poissons qui sont organisées ainsi. — Qui traversent la chair, et qui contribuent à la maintenir. — Le serpent est à peu près comme les poissons. La comparaison est juste ; mais elle est bien vague, puisque les espèces des serpents sont très-nombreuses, ainsi que celles des poissons. La colonne vertébrale des serpents est parfaitement caractérisée, et ce n’est pas une arête. — Dans les quadrupèdes ovipares. Crocodiles, lézards. — Plus semblable à l’arête. C’est la petitesse même des animaux qui fait que leurs vertèbres sont moins distinctes. — Tous les animaux qui ont du sang. Ce sont les deux principales classes d’animaux qu’ait distinguées Aristote. — De la nature de l’os. Chez les animaux supérieurs. — Ou de l’arête. Chez les animaux qui sont plus bas dans l’échelle de l’organisation.
  87. Quant aux autres espèces d’os. J’ai suivi la correction proposée et adoptée par MM. Aubert et Wimmer ; elle semble indispensable ; la leçon ordinaire est : « Quant aux autres parties des os »… Évidemment cette leçon est fautive, quoique donnée par tous les manuscrits. — Les os Côlènes. Voir plus haut, § 6. — Des différences de plus et de moins. Voir plus haut, liv. I, ch. I, § 7.
  88. Telle est donc dans les animaux. — Résumé de tout ce chapitre. Les observations d’Aristote sur les os sont en général exactes ; mais elles peuvent paraître trop peu nombreuses, si on les compare à l’ensemble de celles qu’a recueillies la science moderne ; voir Cuvier, Leçons d’anatomie comparée, tome I, p. 116 et suiv., 2° édit., où tous les détails nécessaires sont réunis ; et aussi le Manuel d’anatomie comparée de M. Gegenbaur, pp. 560 et suiv., trad. franc.
  89. Le cartilage. Tout ce chapitre sur le cartilage se retrouve à peu près mot pour mot dans le Traité des Parties des animaux, liv. II, ch. IX, p. 86, édit. Frantzius, et p. 43, édit. Langkavel. Les cartilages figurent surtout dans les articulations ; ils sont temporaires ou permanents ; ils sont si adhérents à l’os qu’ils semblent faire corps avec lui ; ils varient d’épaisseur et sont en général blancs et lisses ; quelques-uns ne sont presque que des fibres, et on les appelle Fibro-cartilages. Il faut bien distinguer les cartilages des ligaments. — De même que l’os. C’est un premier rapprochement ; un second, c’est l’absence de moelle, signalée dans le paragraphe suivant.
  90. Ne sont jamais percés. Ce caractère du cartilage est très-exact ; et en effet toute perforation eût absolument changé la nature du cartilage. — Dans les sélaciens, où l’épine est cartilagineuse. Dans le Traité des Parties des animaux, liv. II, ch. IX, p. 83, §11, édit. Langkavel, il est dit seulement que les sélaciens ont de la moelle dans leur épine cartilagineuse, qui tient lieu d’os. — Ceux qui sont larges. Il s’agit sans doute des raies. — Et contenant un liquide. J’ai adopté la correction de MM. Aubert et Wimmer, qui consiste à substituer un singulier à un pluriel, bien que l’on pût conserver aussi la leçon ordinaire.
  91. Des cartilages aux oreilles, au nez. Les cartilages du nez et de l’oreille sont précisément des fibro-cartilages, parce que la substance cartilagineuse y est mêlée à du tissu fibreux. — À certaines extrémités de leurs os. Ce sont les cartilages proprement dits, qui se rapprochent tellement des os que, dans bien des cas, ils ne semblent qu’en être des prolongements ; voir l’Anatomie descriptive de M. A. Jamain, p. 126.
  92. De la même nature que les os. Le texte est un peu moins précis ; mais le sens ne peut être douteux. — Les ongles, les soles, les griffes. C’est peut-être encore le mot de notre langue qui rend le mieux celui du texte, bien que ce dernier ait un sens plus étendu. On pourrait encore traduire : « les pinces » ; ou a les sabots ». Il ne paraît pas que la science moderne ait donné à ces parties diverses autant d’attention qu’Aristote ; c’est à peine si, à la suite des os, elle parle des formations épidermiques analogues aux os ; voir l’Anatomie comparée de M. Claus, p. 547, et les leçons d’Anatomie comparée de Cuvier, tome II. — Se plier et se fendre. Ces distinctions sont parfaitement exactes, et elles sont très-claires.
  93. La couleur. Ce caractère est encore très-distinctif, et la remarque vaut la peine d’être recueillie. Ces détails importants semblent avoir été négligés par les zoologistes modernes. Ils sont reproduits à peu près textuellement dans le Traité de la Génération des animaux, liv. II, ch. VI, p. 192, édit. et trad. Aubert et Wimmer. Sur les rapports de couleur entre la peau et les cheveux, voir ce même Traité, liv. V, p. 388, id. — Les sabots. Même remarque que plus haut.
  94. Les dents… de la couleur des os. Ce rapprochement est exact et curieux. Aristote est sans doute le premier qui l’ait fait. — Les Éthiopiens. Ce mot n’avait pas, dans l’Antiquité, le sens assez restreint qu’il peut avoir pour nous ; il signifiait la race noire en général. — Les ongles sont noirs. Ceci est surtout remarquable chez les nègres. Sur les dents, voir plus haut, liv. II, ch. III, § 12.
  95. Sont creuses. Observation très-exacte en ce qui concerne les ruminants. — Pleines et solides. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte. — Il n’y a que le cerf. MM. Aubert et Wimraer font avec raison observer qu’Aristote a très-bien connu la différence des cornes en général et du bois des cerfs. — Pleines dans toute leur longueur. C’est exact. Buffon a consacré une étude très-attentive au bois des cerfs ; voir l’Histoire naturelle, article Cerf, tome XIV, pp. 372 et suiv., édit. de 1830. — À moins qu’il n’ait été coupé. Buffon fait une observation analogue. — Plus tard. Voir plus loin, liv. IX, ch. XXXVII, § 5.
  96. Les cornes tiennent plutôt à la peau. Cette observation paraît exacte ; mais je ne sais pas si elle est admise par la science moderne. — On voit en Phrygie. Il ne paraît pas que ce fait soit parfaitement exact ; du moins, on ne l’a pas vérifié depuis Aristote ; il est certain que, si les cornes du bœuf, par exemple, étaient mobiles, elles ne rempliraient pas leur fonction naturelle, qui est de contribuer à la défense de la bête. — La Phrygie était bornée à l’ouest par la Mysie, la Lydie et la Carie, au sud par la Lycie, à l’Est par la Lycaonie et au nord par la Bithynie ; c’étaient là ses limites sous l’Empire Romain ; mais elles ont beaucoup varié. La Phrygie a été successivement conquise par Crésus, par les Perses, par Alexandre et ses successeurs. Au temps d’Aristote, elle était connue beaucoup plus que de nos jours.
  97. Et tous ceux qui ont des pieds ont aussi des doigts. Camus et MM. Aubert et Wimmer pensent, non sans raison, que cette phrase est une interpolation. — Il n’y a d’exception que pour l’éléphant. Ceci n’est pas exact ; et l’éléphant a ses ongles attachés sur le bord d’une espèce de sabot. Ces ongles sont même le seul indice qui annonce au dehors les doigts de la bête ; ses doigts, au nombre de cinq, étant « tellement encroûtés dans la peau calleuse qui entoure le pied, qu’ils n’apparaissent pas bien a qu’ils soient très complets sur le squelette » ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 237. — Tout droits… recourbés. C’est un caractère distinct et assez frappant, que la science moderne n’a pas considéré et qui mérite de n’être pas négligé.
  98. Des poils et de leurs analogues. Toute cette étude sur les poils dans l’espèce animale tout entière, est peut-être encore la plus complète que présente la science ; du moins, je ne connais dans la zoologie contemporaine rien d’aussi étendu sur ce sujet. Voir l’Anatomie descriptive de M. Claus, p. 550, Formations épidermiques. Cuvier n’a pas touché cette matière dans ses Leçons d’anatomie comparée, qui, il est vrai, sont restées incomplètes. — De lamelles écailleuses. Le sens du mot grec n’est pas bien déterminé ; il s’agit sans doute des écailles des lézards, qui ont des pieds et qui sont ovipares ; voir plus haut, liv. I, ch. VI, § 5, où la même expression est employée. — Des œufs grenus. C’est, à ce qu’il me semble, la traduction littérale du mot du texte. — Parmi les poissons… n’en a point du tout. Toute cette phrase, qui interrompt le cours des pensées, paraît être une interpolation. De plus, ce passage semble contredire ce qui est dit plus loin de l’œuf des congres, liv. VI, ch. XVI, § 12. — L’anguille n’en a point du tout. La zoologie moderne n’est pas encore fixée sur ce point ; il règne toujours une grande obscurité sur la reproduction de ces poissons. Quelques naturalistes croient avoir découvert des ovaires chez l’anguille. D’ailleurs, l’anguille, le congre et la murène forment bien une espèce à part, et ces trois poissons se ressemblent beaucoup ; voir Cuvier, Règne animal, tome II, p. 348, Malacoptérygiens apodes, et anguilliformes ; voir aussi la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 834, Physostomes apodes.
  99. L’épaisseur ou la légèreté. Après l’interpolation, la pensée reprend son cours. Cette même question de la nature des poils est exposée avec plus de développements qu’ici dans le Traité de la Génération des animaux, liv. V, ch. III, §§ 35 et suiv., édit. et trad. de MM. Aubert et Wimmer, p. 372. — De la nature de la peau, id, ibid., §40, p. 374. — Le poil est plus rude. Tous ces détails sont exacts. — Plus enfoncées et plus humides. Comme les aisselles. Par « plus humides », il faut sans doute entendre les places du corps où la transpiration est plus facile et plus abondante. — À écailles ou à lamelles écailleuses. La langue grecque a ici des nuances que la nôtre ne possède pas ; j’ai dû répéter presque les mêmes mots.
  100. Plus rude s’ils sont bien nourris. Je ne sais pas si cette observation est bien exacte pour tous les animaux en général ; il semble qu’il en est tout le contraire pour certains animaux domestiques, et que le poil des chiens et des chevaux s’adoucit d’autant plus qu’ils sont mieux nourris. — Selon les contrées. Le climat est peut-être la principale influence sur ces changements. — Dans les climats chauds. C’est généralement exact. — Tout droits. Par opposition à Frisés et Crépus ; car d’une manière spéciale, les poils, pour se tenir droits, doivent nécessairement être plus durs que les poils qui sont couchés. — Sont rudes et durs. Comme les cheveux des nègres.
  101. Permet de les fendre. C’est ce qu’on peut voir, même sur les cheveux de l’homme. — Les hérissons de terre. Voir plus haut, liv. I, ch. VI, § 7 ; et aussi Traité de la Génération des animaux, liv. V, ch. III, § 35, p. 372, édit. et trad. Aubert et Wimmer.
  102. L’homme a la peau plus mince. Observation qui paraît exacte, et qu’Aristote est le seul à avoir faite. — Une humeur visqueuse. Nous pouvons l’observer assez facilement sur nous-mêmes, et particulièrement à la commissure de nos ongles des mains avec la peau qui les entoure. — Où elle sert à faire de la colle. On fait en effet de la colle-forte avec les rognures de cuir et certaines parties de l’animal. — Dans certains pays. MM. Aubert et Wimmer mettent cette phrase entre parenthèses comme suspecte ; je suis de leur avis, bien que cette addition concorde assez avec ce qui précède.
  103. La peau est par elle-même insensible. Au premier coup d’œil, ceci semble tout à fait inexact, et la peau paraît au contraire être le sens du toucher, et par conséquent d’une sensibilité extrême. Cependant on peut avec des instruments très-tranchants se couper l’épiderme, sans plus le sentir que quand on se coupe les ongles. C’est là sans doute ce qu’Aristote aura voulu dire en parlant de la peau prise « en elle-même ». Le siège de la sensibilité serait, pour lui, dans la chair et non dans la peau. — Et surtout la peau de la tête. Ceci ne paraît pas très-exact ; et la peau de la tête, sans être très-sensible, n’est pas insensible cependant. Dans le Traité des Parties des animaux, Aristote revient à cette particularité de la tête, qui n’est pas charnue, liv. II, ch. X, § 40, p. 92, édit. et trad. Frantzius. — Elle ne reprend point. Ceci semble tout à fait inexact ; mais il est possible que la vraie pensée d’Aristote ne soit pas ici très-bien comprise ; il aura voulu dire sans doute que, dans ces parties de la peau, la cicatrice laisse toujours une lacune qui les déforme ; et cette observation semble vraie en ce qui regarde la paupière.
  104. La peau est continue. On ne peut pas même dire qu’elle cesse de l’être là où elle laisse passage à des ouvertures naturelles. — À la bouche et aux ongles. Là non plus la peau ne cesse pas d’être continue ; mais elle contourne ces ouvertures et ces parties du corps. — Plus haut. Voir plus haut, liv. I, ch. VI, § 7 et liv. II, ch. II, §§ 2 et suiv.
  105. Quand l’animal devient vieux. L’action de l’âge n’est pas moins puissante que celle du climat, sur le poil des animaux. — Blanchissent avec l’âge. C’est une observation que tout le monde peut faire. — Excepté dans le cheval. Le changement dans le cheval est encore bien moins évident que chez l’homme. Voir le Traité de la Génération des animaux, liv. V, § 64, p. 386, édit. et trad. Aubert et Wimmer. Voir Buffon, tome XIV, p. 37, édit. de 1830. — Par le bout. Cette observation paraît exacte. — Les cheveux gris. C’est le sens que me semble avoir l’expression grecque. — Comme on le prétend quelquefois. Il est difficile de savoir à qui Aristote veut faire allusion. Dans le Traité de la Génération des animaux, liv. V, § 60, p. 384, édit. et trad. Aubert et Wimmer, Aristote essaie d’expliquer d’où vient cette dessiccation. Il y donne plus de détails qu’ici, sur le grisonnement et la blancheur des cheveux. — Efflorescence. C’est la traduction littérale du mot grec, qu’on trouve aussi dans Hippocrate, Prorrhetique, liv. II, p. 74, édit. et trad. Littré. — La lèpre blanche. Voir Hippocrate, id., ibid., et aussi le Traité de la Génération des animaux, liv. V, ch. IV, § 57, édit. et trad. Aubert et Wimmer. — Ils repoussent noirs après la guérison. La même observation se retrouve dans le Traité de la Génération des animaux, liv. V, § 61, p. 384, édit. et trad. Aubert et Wimmer.
  106. Les tempes qui grisonnent les premières. Voir le Traité de la Génération des animaux, id., ibid. — Le devant de la tête… les parties sexuelles. Tous ces faits sont exacts.
  107. En naissant… avec l’âge. Autre distinction aussi importante que les précédentes, et dont la science moderne ne paraît pas s’être inquiétée. — L’homme est le seul… Je ne sais pas si cette observation a été confirmée ; mais peut-être n’a-t-on pas pu observer les animaux d’assez près. — Ceux du menton. La barbe apparaît, en effet, après tous les autres poils. — Est égal. Les parties sont au nombre de trois de part et d’autre ; et c’est là sans doute tout ce qu’Aristote a voulu dire.
  108. Les poils de la tête. J’ai gardé cette expression, au lieu de celle de Cheveux, pour rester plus près du texte, et aussi parce qu’il s’agit ici des poils en général. — Ce ne sont d’ailleurs que les cheveux de devant. Ici, ma traduction a pu revenir à l’expression naturelle et ordinaire. — Jamais. C’est peut-être trop dire ; mais il est vrai que la calvitie absolue de la tête entière est fort rare. — Calvitie. C’est le mot propre et générique ; notre langue n’a pas de mot spécial pour la chute des sourcils, comme pour celle des cheveux ; et voilà comment j’ai dû conserver le mot d’« Anaphalantiasis », pour lequel nous n’avons pas d’équivalent. — Des rapports sexuels. Cette observation paraît fort exacte ; et la calvitie prématurée tient le plus souvent à l’abus des plaisirs du sexe. — L’eunuque. Les Grecs connaissaient les eunuques par les nations étrangères ; par eux-mêmes, ils n’ont jamais songé, ce semble, à cette horrible mutilation. Hippocrate fait la même remarque sur les eunuques, Aphorismes, VIe section. § 28, p. 570, édit. et trad. E. Littré. — Excepté ceux des parties sexuelles. Voir la même observation dans le Traité de la Génération des animaux, liv. V, § 35, p. 380, édit. et trad. Auttert et Wimmer : comparer aussi tout ce passage avec ce qui est dit ici concernant les poils, et la calvitie, chez les hommes et les femmes, sur les eunuques, etc., j§ 50 à 56.
  109. N’a pas de poils au menton. J’ai dû conserver autant que possible la tournure grecque. — Quand leurs mois viennent à cesser. Ceci est exact en général ; mais on voit cependant quelques jeunes filles fort bien portantes avoir, outre la moustache assez prononcée, quelques poils au menton. — Les prêtresses de Carie… Ainsi que le pensent MM. Aubert et Wimmer, il est très-probable qu’Aristote emprunte cette tradition sur la barbe des prêtresses de Carie à Hérodote, liv. I, ch. CLXXV et liv. VIII, chap. CIV, pp. 58, et 412, édit. Firmin-Didot. Ces prêtresses étaient chez les Pedasiens, peuplade des environs d’Halicarnasse. Lorsqu’un malheur quelconque menaçait les Pédasiens ou leurs voisins, il poussait une longue barbe à leurs prêtresses : et ce phénomène étrange s’était, dit-on, produit deux ou trois fois — Les autres poils. Les poils autres que la barbe. — En quantité moindre. Ceci n’est peut-être pas très-exact ; car, en général, les femmes ont des cheveux plus abondants que les hommes. — Qui poussent avec l’âge. En opposition avec les poils qui paraissent dès la naissance. — Lorsqu’en même temps. J’ai adopté la leçon admise par MM. Aubert et Wimmer.
  110. Autres que ceux-là. Sans doute, ceux-là se rapporte aux poils des parties sexuelles. — Ceux de la tête. Tout ceci ne concerne évidemment que l’espèce humaine. — Les plus fins poussent davantage. Cette observation paraît exacte. — Les sourcils deviennent si épais. Le fait est exact en général ; mais l’explication qu’en donne Aristote ne l’est pas. — À la jointure des os. MM. Aubert et Wimmer remarquent avec raison qu’il n’y a pas à cette place de suture entre les os. L’os frontal, en effet, occupe à lui seul toute cette partie de la tête ; et bien qu’il soit en rapport avec une douzaine d’os différents, il est continu et n’offre aucune des sutures qu’Aristote suppose gratuitement. Tout au plus, voit-on sur le frontal une trace légère de la division primitive de l’os en deux parties perpendiculaires. — Les cils des paupières…. les poils qu’on arrache… ne repoussent plus. Détails curieux, dont la science moderne ne paraît pas s’être occupée. Il n’est pas exact d’ailleurs que les cils ne croissent pas.
  111. Une humeur gluante. Observation très-exacte. — Ils peuvent enlever les petits objets. Expérience ingénieuse et fort simple. Voir l’Anatomie comparée de M. Gegenbaur, p. 552, tr. franc.
  112. Sur la peau de la langue. Voir une observation analogue sur la langue du bélier, plus loin, liv. VI, ch. XIX, § 5 ; et aussi, Traité de la Génération des animaux, liv. V, § 75, p. 390, édit. et trad. Aubert et Wimmer, où Aristote examine longuement les rapports des poils et de la peau, relativement à la couleur, et aussi à la couleur de la langue dans quelques animaux. — À la lèvre. La langue grecque n’a pas de mot spécial pour signifier la Moustache. — Ce sont les mâchoires ou les joues. Même remarque pour les Favoris. — Ceux dont le menton est imberbe. Cette observation, qui appartient sans doute en propre à Aristote, est très-juste ; et parfois ce sont les hommes les plus vigoureux qui sont imberbes.
  113. Dans certaines maladies…. dans les ongles. Tous les détails donnés dans ce paragraphe paraissent à MM. Aubert et Wimmer n’être pas exacts ; je ne sais pas si leur critique est bien fondée ; ce qui est certain, c’est que très-souvent les poils grandissent étonnamment après la mort. — Dans les consomptions. Le terme grec est aussi vague que celui-ci ; peut-être s’agit-il des maladies de poitrine. — Et deviennent plus durs. Cet effet est incontestable pour la vieillesse. — Qui abusent des plaisirs sexuels. Ceci encore est fort exact. — Les gens sujets aux varices. Je ne sais pas si la science moderne a rien observé sur ce rapport des varices à la calvitie.
  114. . Le poil ne pousse pas. Cette explication physiologique paraît exacte ; le poil pousse par en bas ; et cela se conçoit bien, puisqu’il a une racine. — Les écailles des poissons. Voir plus haut, § 1 ; les écailles dans les poissons remplacent la peau, et presque toutes les formations épidermiques ; voilà comment Aristote est amené à s’en occuper ici. — Deviennent plus longs. Sous-entendu : « Avec l’âge », comme le prouve ce qui précède, et ce qui suit. — Comme aussi les becs des oiseaux. Quelquefois même le bec se recourbe tellement que l’oiseau ne peut plus l’ouvrir.
  115. Comme les oiseaux. Peut-être ceci est-il exact pour la couleur ; mais les oiseaux n’en marquent pas moins les signes de la vieillesse, en perdant leur vivacité et leurs formes. — Excepter la grue. Dans le Traité de la Génération des animaux, liv. V, ch. V. § 65, p. 386, édit. et trad. Aubert et Wimmer, Aristote répète que les grues deviennent plus noires en vieillissant, et il explique pourquoi. Il paraît que l’observation est assez exacte. — On voit quelquefois. Cette traduction ne contredit pas la leçon proposée par Schneider et adoptée par MM. Aubert et Wimmer ; cette correction rend la phrase plus régulière grammaticalement ; mais elle ne change rien au sens. — D’une couleur uniforme. Dans le Traité de la Génération des animaux, liv. V, p. 388, il est expliqué que par là on doit entendre les oiseaux dont l’espèce entière n’a qu’une seule et même couleur ; voir aussi id., ibid. p. 392. édit. et trad. Aubert et Wimmer. Aristote s’étend sur la couleur des animaux, dans ce traité, beaucoup plus qu’il ne le fait ici, où en quelque sorte il se résume. — Comme le corbeau… Je ne sais si la science moderne a confirmé ces observations. — Passer au noir. Observation très-curieuse et qui paraît fort exacte. — Changent si bien de couleur, avec les saisons. Même remarque.
  116. Avec la couleur des eaux. L’influence de la boisson est incontestable ; mais elle ne va pas aussi loin qu’Aristote semble le croire, soit d’après des faits qu’il aurait observés lui-même, soit d’après les faits que la tradition lui aurait transmis. — Ils deviennent blancs. MM. Aubert et Wimmer ont adopté une leçon qui limite ces changements au bétail, aux moutons. La leçon ordinaire, qui est plus large, me semble préférable. — S’étend jusque sur les portées. J’ai conservé avec tous les manuscrits et toutes les éditions cette phrase que MM. Aubert et Wimmer proposent de supprimer comme faisant double emploi avec ce qui suit. — Que les moutons. Le texte est moins précis ; mais la suite, où il est question des agneaux, prouve bien que ce passage se rapporte à une espèce particulière. — Dans la Chalcidique de Thrace. Cette contrée est un peu au nord-ouest de l’Eubée, au fond du golfe Thermaïque ; on y trouve Potidée, Olynthe et Stagire, patrie d’Aristote. On ne sait à quel fleuve de ce pays se rapporte le surnom de Froid. Voir la planche IV de l’atlas de Kiepert. — Assyritis. J’ai conservé l’orthographe que donnent tous les manuscrits ; mais il est bien probable qu’il s’agit de l’Astyritis, comme l’ont corrigé quelques éditeurs. L’Astyritis est le territoire d’Astyra, comme l’Antandrie, mentionnée un peu plus bas, est le territoire d’Antandros, ces deux villes étant l’une et l’autre à l’extrémité du golfe d’Adramytte. Alors, il faudrait déplacer Astyritis du texte et le rapprocher d’Antandrie, comme l’a fait M. Pikkolos, que MM. Aubert et Wimmer ne semblent pas désapprouver ; voir Strabon, liv. XIII, ch. I, Troade, p. 519, édit. Firmin-Didot. — Des moutons blancs…. des moutons noirs. Selon Strabon, liv. X, ch. I, § 14, p. 386, édit. Firmin-Didot, c’étaient deux fleuves de l’Eubée, le Cérée et le Nélée, qui produisaient cet effet sur le bétail. Strabon rapporte aussi des effets non moins merveilleux de deux fleuves, aux environs de Sybaris : l’un, le Crathis, qui changeait la couleur des cheveux des hommes qui buvaient de ses eaux ; l’autre avait une action non moins étonnante sur les chevaux, liv. VI, Italie, ch. I, § 13, p. 219, édit. Firmin-Didot. — Homère l’appelle le Xanthe. Homère dit seulement que les dieux appellent Xanthe le fleuve que les hommes appellent le Scamandre, Iliade, chant XX, vers 74.
  117. N’a de poils à l’intérieur. Observation curieuse et qu’Aristote est le seul à avoir faite. — Des extrémités. Il faut sous-entendre : « Des membres ». — En dessus… en dessous, des mains, par exemple, et des pattes. — Le lièvre seul…. Aristote répète la même chose, Traité de la Génération des animaux, liv. IV, § 94, p. 334, édit. et trad. Aubert et Wimmer. Le fait est exact pour le lièvre et le lapin. — Le rat de mer, le cétacé. Il est difficile de savoir de quel animal Aristote veut parler.
  118. Comme on l’a vu. Plus haut, § 17. — Mais elles tombent. Ceci n’est peut-être pas très-exact ; et les plumes ne tombent pas après qu’elles ont été coupées. — Est sans divisions. C’est une distinction très-caractéristique entre les ailes des diverses espèces d’insectes. — L’aiguillon ne repousse pas…. et dans ce cas, elle meurt. Ce sont là des faits certains et bien connus de la zoologie moderne.
  119. Des membranes. C’est une vue profonde qu’a eue Aristote, de distinguer les membranes de toutes les autres parties de l’organisation animale ; voir Cuvier, Règne animal, introduction, p. 22. La membrane est un des trois éléments organiques des animaux, avec la fibre musculaire et la matière médullaire. Sous le nom d’Histologie, l’étude des membranes tient une place considérable dans la science contemporaine. — À une peau serrée et mince. Cette définition est la première sans doute qu’on a essayé de donner de la membrane. — Mais c’est une autre nature. Par les qualités propres à la membrane, qui ne peut ni se déchirer ni se distendre. — Pour chaque os. Il est probable qu’Aristote comprend ici, sous le nom général de membrane, bien des éléments qu’on a plus tard séparés les uns des autres : cartilages, fibres cartilagineuses, ligaments, membranes synoviales, etc. — Aisément. J’ai ajouté ce mot ; le texte dit précisément : « invisibles », ou peut-être aussi : « indistinctes ».
  120. Les deux membranes qui enveloppent le cerveau. Il y a trois membranes du cerveau, ou méninges, et non, deux : la dure-mère, l’arachnoïde, et la pie-mère. — Celle qui est près de l’os. C’est sans doute la dure-mère, qui est en effet une membrane fibreuse, très-résistante, et qui est l’enveloppe la plus externe de l’axe cérébro-spinal. C’est elle aussi qui est la plus proche de l’os, qui forme le crâne ; voir plus haut, liv. I, ch. XIII, § 2. — Que celle qui enveloppe l’encéphale. C’est l’arachnoïde qu’Aristote confond avec la pie-mère, qui est la plus interne des trois membranes du cerveau. Chacune de ces trois membranes se divisent en Crânienne et en Rachidienne. La dure-mère est essentiellement fibreuse ; l’arachnoïde est séreuse ; et la pie-mère est surtout vasculaire. C’est par elle que passent tous les vaisseaux qui se rendent au cerveau. Voir sur le rôle des membranes le Traité des Parties des animaux, liv. III, ch. II, p. 89, édit. Langkavel. — Celle du cœur. Voir id., ibid. C’est le péricarde, qui enveloppe le cœur et l’origine des gros vaisseaux ; le péricarde est une sorte de sac fibro-séreux. Il n’est pas probable qu’Aristote ait connu la membrane qui tapisse les cavités du cœur, l’endocarde. — Réduite à elle seule. Il me semble que c’est le sens qu’a l’expression grecque, qui d’ailleurs n’est pas très-claire. — Les os dépouillés de leurs membranes. Ou plutôt : « Du périoste ».
  121. L’épiploon est également une membrane. Les épiploons ne sont que des replis du péritoine, membrane séreuse qui tapisse les parois de l’abdomen. Le grand épiploon qu’Aristote désigne sans doute ici, est flottant, par l’une de ses extrémités, et il va de la grande courbure de l’estomac à celle du côlon ; le petit épiploon s’appelle aussi, à cause de sa position, gastro-hépatique ; il y a encore l’épiploon gastro-splénique. Le nom de tous les épiploons leur vient de ce qu’ils semblent en quelque sorte flotter devant les viscères. — On trouve l’épiploon. Probablement, le grand épiploon. — Haut et bas. J’ai ajouté ces mots. — Présente une sorte de suture. C’est sans doute l’orifice pylorique de l’estomac, allant au duodénum. — Du grand estomac. L’auteur veut sans doute parler du premier des estomacs qu’ont les ruminants ; c’est à celui-là que s’attache l’épiploon ; voir plus haut, liv. II, ch. XII §§ 9 et suivants.
  122. La vessie… une sorte de membrane. La nature de la vessie est exactement exprimée par Aristote ; la science moderne voit encore dans la vessie une cavité musculo — membraneuse, servant de réservoir à l’urine. — Puisqu’elle peut se distendre. On a remarqué que la vessie a une capacité plus grande chez les personnes qui, comme les femmes, ont l’habitude de conserver longtemps leur urine. — La tortue est seule à en avoir. Voir plus haut, liv. II, ch. XII, § i. — Si ce n’est à l’origine même de l’uretère. Je ne sais pas si la science moderne a confirmé cette observation. D’ailleurs, Aristote lui-même remarque que les cas sont extrêmement rares. — Des concrétions sèches. La phrase du texte n’est pas très-correcte ; mais le sens n’est pas douteux ; c’est la maladie de la pierre. Les Anciens, même avant Hippocrate, essayaient déjà de pratiquer la taille ; il l’a défendue. — De vrais coquillages. — C’est parfaitement exact. Sur les plaies de la vessie, voir Hippocrate, des Maladies, liv. Ier, tome VI, p. 156, édit. et trad. E. Littré.
  123. On le voit donc. Résumé général de tous les chapitres antérieurs de ce livre, depuis le chapitre II jusqu’à la fin du présent chapitre.
  124. La chair. Aristote comprend sous le nom de Chair plus de choses sans doute que n’en comprend la science contemporaine. Pour Cuvier, la chair est surtout la fibre charnue ou musculaire, composée elle-même de filaments et d’une substance particulière appelée Fibrine. — Dans les animaux qui ont du sang. C’est en effet le fluide nourricier ou le sang, qui contient la fibrine et la gélatine qui forment la chair ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, pp. 22 et suiv. — Ce que l’arête est à l’os. L’arête dans les poissons correspond aux os dans les quadrupèdes ordinaires. — La matière charnue. L’expression du texte est aussi vague ; peut-être faudrait-il traduire : « L’analogue de la chair ».
  125. Est divisible en tout sens. Ce caractère est très-distinctif. — Les nerfs et les veines. Il faut entendre aussi les artères et les muscles, qu’Aristote ne distingue pas des veines et des nerfs. — Elle fond en veines et en fibres. C’est-à-dire qu’on ne voit plus que des fibres et des veines, et que tout le tissu cellulaire a dis-paru. — La graisse. Voir le chapitre suivant.
  126. Ont les veines plus petites. Ou du moins, les veines sont moins apparentes. — Et le sang plus rouge. Je ne sais pas si cette observation est acceptée par la science moderne, non plus que celles qui suivent. — Le sang est plus noir. Même remarque ; comme au temps d’Aristote, on ne distinguait pas le sang artériel du sang veineux, il était possible de confondre la couleur de l’un et de l’autre, dans les animaux aussi bien que dans l’homme. — Le ventre, également. Le terme dont se sert le texte est plus vague que celui de Ventre, puisqu’il signifie essentiellement une Cavité. — Deviennent charnus et gras. Il n’y a qu’un mot dans le texte. La zoologie moderne ne paraît pas s’être préoccupée de ces détails autant qu’Aristote. Voir Cuvier, Leçons d’Anatomie comparée, IIe leçon, p. 103, 2e édit., de la Fibre musculaire.
  127. La graisse et le suif diffèrent. Les différences indiquées ici sont très-réelles ; mais la zoologie ne paraît pas en avoir plus tard tenu beaucoup de compte ; elles devaient frapper les premiers observateurs. — Tout à fait cassant. Le suif se durcit et devient assez solide pour casser, en se refroidissant ; voir Cuvier, Règne animal, tome I. p. 256, sur la nature du suif. — Et ne se coagule pas. Je ne sais pas si ceci est bien exact ; et les faits dont nous pouvons nous assurer à chaque instant semblent prouver que la graisse se coagule aussi. — Les bouillons faits… Le texte n’est pas tout à fait aussi précis. — Avec des animaux gras. Ce sont plus particulièrement des Pachydermes. — Des animaux à suif. Le mouton peut être qualifié ainsi ; mais la chèvre ne semble pas avoir autant de suif. Voir Buffon, qui adopte complètement cette définition de la graisse et du suif, qu’il emprunte évidemment à Aristote, tome I, p. 248, Œuvres complètes, in-12, édit. de 1752 à 1805.
  128. Où se produisent le suif et la graisse. Le texte n’est pas aussi formel ; mais j’ai cru devoir le développer davantage pour plus de clarté. — L’extrémité des chairs. Ceci veut dire que le suif se place à la partie de la chair la plus voisine de la peau. — L’épiploon. Voir plus haut, ch. II, § 3. Il s’agit sans doute du grand épiploon. — Qui ont les deux rangées de dents. Ce sont les quadrupèdes ordinaires. — Qui n’ont pas ces deux rangées. Ce sont les ruminants, qui en général ont beaucoup de suif.
  129. . On en tire de l’huile. Comme c’est du foie des sélaciens qu’il est ici question, MM. Aubert et Wimmer en concluent que les Grecs ont connu l’huile de foie de morue. Il est peu probable cependant que, si cette découverte utile avait été faite dans l’Antiquité, on l’eût laissé perdre. — Moins gras, en graisse. Cette tautologie est dans le texte. — Le suif des poissons est graisseux. Il ne paraît pas que depuis Aristote on ait continué ce genre d’observations, bien qu’on ait fait la chimie des animaux.
  130. Tantôt répandue dans la chair… C’est ce qu’on peut voir aisément sur les volailles qu’on mange. — L’épiploon. Sans doute, le grand épiploon. — Comme l’anguille. C’est en effet un des poissons les plus gras, parmi ceux qu’on mange. — La région du ventre. Ou « de l’estomac ». L’observation est très-juste. Chez les hommes, c’est ce qu’on appelle : Prendre du ventre. — Qui font peu de mouvement. Les « Animaux » comprennent aussi les hommes, qui grossissent à ne rien faire.
  131. . La cervelle est gluante. Le mot du texte me semble avoir ce sens plutôt que tout autre, bien qu’en général on le traduise par Graisseux ; mais ici ce ne serait qu’une répétition que l’auteur ne paraît pas avoir voulu faire, puisqu’il prend deux expressions différentes. — Gluante… sèche. Ces observations ont été vérifiées et acceptées par la science moderne. Dans la région des reins. Tous ces faits ont dû être constatés sur les animaux domestiques, où il est facile de les observer. — Le moins chargé dégraisse. MM. Aubert et Wimmer affirment que le fait est exact, tout au moins pour le lapin. — Vers le milieu… C’est probablement du Bassinet qu’Aristote veut parler. Voir le Traité des Parties des animaux, liv. III, ch. IX, p. 160, édit. Frantzius, sur la graisse des reins. Aristote y répète en partie ce qu’il dit ici sur le suif des moutons et sur leurs maladies. — Un excès de nourriture.. Cette explication est fort probable. — Près de Léontium. La ville de Léontium était en Sicile au nord-ouest de Syracuse, à une petite distance. Ses plaines étaient célèbres par leur fécondité extraordinaire, surtout en blé. Léontium était la patrie de Gorgias.
  132. . Il y a de la graisse… Ceci correspond tout à fait à une théorie analogue du Traité du Sens et des choses sensibles, ch. II, § 7, p. 32 de ma traduction ; et c’est par là qu’Aristote explique que les yeux ne gèlent jamais. Aussi, ai-je adopté la correction fort heureuse que MM. Aubert et Wimmer ont faite de ce passage. La théorie peut être fausse ; mais l’auteur reste conséquent avec lui-même. La leçon ordinaire n’est pas acceptable.
  133. . Sont moins féconds. Voir la même observation dans le Traité des Parties des animaux, liv. II, ch. V, p. 70, édit. Frantzius. Cette infécondité, pour cause d’excès de graisse, est signalée particulièrement chez les hommes et les femmes, Traité de la Génération des animaux, liv. I, p. 94, édit. et trad. Aubert et Wimmer. — Avec les années… Chacun de nous peut vérifier l’exactitude de cette observation.
  134. Ce qu’il en est du sang. Voir plus haut ce qui a été dit déjà sur le cœur et le sang, liv. I, ch. XIV, et liv. II, ch. II. Voir aussi la Dissertation sur la composition de l’Histoire des Animaux. — Tardivement et après coup. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte. — Profondément altérés. L’expression grecque est peut-être un peu plus forte ; et elle comprend aussi l’idée de la mort et de la destruction. — Qu’on appelle les veines. Voir plus haut les chapitres II, III et IV sur le sang, le cœur et les veines. — Dans le cœur tout seul. Voir plus haut liv. I, ch. XIV, § 8, et Traité des Parties des animaux, liv. III, ch. IV, p. 134, édit. et trad. Frantzius.
  135. Le sang n’est sensible quand on le touche. Voir la même pensée dans le Traité des Parties des animaux, liv. II, ch. III, p. 66, édit. et trad. Frantzius, et liv. III, ch. X, p. 136, id., ibid. Il est assez difficile de comprendre comment il est possible de toucher le sang et de savoir par là s’il est sensible ; on le comprend pour les excrétions intestinales, pour le cerveau et la moelle ; mais pour un liquide tel que le sang, on ne voit pas comment l’expérience pourrait être faite. Sur l’insensibilité du cerveau, voir le Traité des Parties des animaux, liv. II, ch. X, p. 90, édit. et trad. Frantzius. — Quand on les touche. Ou peut-être : « Quand ils sont touchés » par quelque corps étranger. — Partout où l’on coupe la chair. Fait certain et très-facile à observer. — La chair ne soit viciée. Le texte se sert ici du même mot que dans le paragraphe précédent.
  136. Douceâtre. C’est le sens du mot grec, et la saveur réelle du sang ; voir le Traité des Parties des animaux, liv. IV, ch. II, édit. et trad. Frantzius. — Il est plus noir. On sait que, du temps d’Aristote, la science n’avait pas distingué le sang veineux et le sang artériel ; elle attribuait à une maladie la couleur plus foncée d’une partie du sang dans certains cas. — Soit naturellement. Par suite d’une constitution originairement vicieuse.
  137. Chaud et liquide. Voir le Traité des Parties des animaux, livre II, ch. II, p. 58, édit. et trad. Frantzius, sur la chaleur propre du sang, comparée à celle de l’eau et de l’huile. — Il se coagule. C’est ce qu’on peut voir aisément par le sang humain. — Le cerf et le daim. La même assertion se retrouve dans le Traité des Parties des animaux, livre II, ch. IV, p. 66, édit. et trad. Frantzius. Aristote attribue ce phénomène à la nature aqueuse et froide du sang chez les daims et les cerfs. — Le sang du taureau qui se coagule le plus rapidement. La science moderne n’a pas ratifié cette observation.
  138. Ont plus de sang. Je ne sais si l’observation est exacte : et la quantité relative du sang est assez difficile à mesurer. Toute cette phrase du texte est d’ailleurs assez embarrassée. — Ni trop de sang comme ceux qui boivent avec excès. La quantité du sang peut être augmentée par l’excès du liquide absorbé ; mais c’est surtout la qualité du sang qui est changée ; il devient beaucoup plus aqueux ; et par suite, moins nutritif. — Ils l’ont pur. La physiologie comparée ne semble pas, de notre temps, s’être occupée de ces phénomènes. — Qui avoisinent les os. Le phénomène que signale Aristote, en supposant qu’il soit exact, tiendrait sans doute à ce que, dans ces parties, la circulation est moins facile que partout ailleurs.
  139. C’est l’homme… le taureau et l’âne. Observations curieuses, mais dont l’exactitude serait sans doute à vérifier. — Dans les parties basses… Même remarque. Dans le Traité des Parties des animaux, livre II, ch. II, p. 54, édit. et trad. Frantzius, Aristote revient sur ces différences du sang, dans les parties hautes et basses du corps.
  140. Au même instant dans toutes les parties du corps. Ceci n’est pas tout à fait exact ; et l’on voit, à la réflexion, que ce ne peut pas l’être ; car il faut nécessairement qu’un certain temps s’écoule entre le départ du sang sortant du cœur par l’aorte, et son arrivée aux divers membres ; par exemple, au poignet, où d’ordinaire on tâte le pouls. On a, dans ces derniers temps, essayé de mesurer cet intervalle ; et on l’a trouvé d’une fraction de seconde assez petite ; mais les Anciens ne pouvaient pas faire ces observations, qui aujourd’hui même sont excessivement délicates et peu sûres. — Il est le seul liquide. Ceci est très-juste. MM. Aubert et Wimmer proposent une correction que je n’ai pas cru devoir admettre, et qu’eux-mêmes n’ont pas reproduite dans leur traduction. La leçon ordinaire me paraît la seule vraie. — D’abord dans le cœur. Ceci semble se rapporter à des observations sur le fœtus et aux premiers instants de la vie intra-utérine. Voir dans le Traité des Parties des animaux, livre III, p. 134, édit. et trad. Frantzius, un passage très — remarquable sur le rôle du cœur pendant la vie, et sur ses fonctions dès les premiers instants de l’existence. Il paraît clairement d’après ce passage que toutes ces théories d’Aristote s’appuyaient sur des dissections. — Avant même que le reste du corps.. Le cœur n’est pas la première partie du corps qui apparaisse dans le fœtus ; voir Buffon, Développement du fœtus, tome XI, p. 262, édit. de 1830.
  141. Est trop liquide. C’est bien souvent l’extrême liquidité du sang qui cause la maladie, si fréquente de nos jours, qu’on appelle l’anémie. — Une sueur sanguinolente. Le fait n’est pas absolument rare ; mais c’est toujours l’indice d’un cas morbide. — Et en l’isolant. C’est-à-dire en divisant la masse entière du sang, qu’on a tiré en plusieurs petites parties.
  142. Le sang n’en sort pas aussi complètement. Il ne paraît pas que cette observation soit exacte, bien qu’elle ne soit pas très-difficile à faire. — Par la coction. On ne comprend pas bien ce que l’auteur a voulu dire ici. — La graisse vient du sang. Sans doute ; mais dans le corps tout vient du sang, en un certain sens, puisque c’est le sang qui nourrit le corps tout entier. — Quand le sang est malade. C’est la traduction littérale du texte ; mais le fait n’est peut-être pas très-exact ; le saignement de nez n’est pas une maladie du sang, proprement dite, non plus que les hémorroïdes ou les varices. Ce serait plutôt une maladie ou une affection des vaisseaux sanguins.
  143. Des femelles… des mâles. J’ai conservé l’expression toute générale du texte ; quelques traducteurs ont plus particulièrement appliqué ceci à l’espèce humaine, aux hommes et aux femmes. — Il est plus épais et plus noir. Il ne semble pas que cette différence soit réelle ; mais il est possible que les climats aient une influence décisive, et qu’en Grèce les choses ne soient pas tout à fait ce qu’elles sont dans nos contrées. — De tous les animaux femelles. Ceci confirme la remarque faite au début de ce paragraphe. — Dans un état morbide. L’expression n’est peut-être pas assez précise. Le sang n’est pas malade lui-même ; mais, par une cause ou par une autre, il sort en trop grande abondance. — Le nom de perte. Le texte dit précisément : « Flux » ; voir le Traité de la Génération des animaux, livre I, §§ 72-75, et livre IV, § 20, édit. et trad. Aubert et Wimmer, où Aristote donne des explications plus développées sur le flux mensuel de la femme, pp. 98 et 290.
  144. Les femmes… Il peut y avoir quelque vérité dans ces observations à certains égards ; mais, pour les varices particulièrement, les femmes en ont, surtout pendant le temps des grossesses. Certaines professions, où les femmes doivent se tenir fréquemment debout, leur donnent aussi des varices.
  145. Selon les âges. Les observations suivantes sont en général fort exactes, et très-curieuses. — Même quand on le prend à la surface du corps. Cette traduction n’est peut-être pas très-sûre, parce qu’on ne voit pas clairement ce que l’auteur a voulu dire. — Ce phénomène ne se produit pas. C’est-à-dire que le sang ne se coagule pas aussi vite chez les jeunes gens. — La lymphe… en sérosité. MM. Aubert et Wimmer croient que cette phrase est une glose, qui, de la marge, sera passée dans le texte. Il est à remarquer qu’Aristote n’a rien dit de la théorie de son maître sur le sang ; voir le Timée de Platon, trad. de M. V. Cousin, p. 220.
  146. Un de ces liquides. Le mot de Liquide appliqué à la moelle n’est pas exact, parce qu’elle a trop de consistance pour qu’on puisse la regarder comme liquide, au même titre que le sang ou la lymphe. — Renfermés dans des vaisseaux. C’est un fait d’observation générale ; et c’est peut-être là ce qui aura déterminé Aristote à prendre la moelle pour un liquide, attendu qu’elle est renfermée dans le vaisseau des os, comme le sang l’est dans le vaisseau des veines. C’est ce rapprochement qui l’aura trompé. — Les autres liquides… intestins. MM. Aubert et Wimmer prennent cette phrase pour une interpolation ; et cette conjecture est très-probable.
  147. Tout à fait de la nature du sang. Ceci est exagéré ; mais il est vrai que, chez les sujets jeunes, la moelle n’a pas les mêmes caractères que chez les sujets vieux. — La moelle devient de la graisse. La science moderne ne paraît pas avoir poursuivi ces recherches sur la moelle. C’est à peine si Cuvier l’a mentionnée dans ses Leçons d’Anatomie comparée, leçon II, p. 116, 2e édit.
  148. Il n’y a pas de moelle dans tous les os. L’observation est exacte dans cette généralité ; mais l’analyse pouvait être poussée plus loin ; on pouvait essayer de déterminer les os qu’ont ou qui n’ont pas de moelle. — Les os du lion. Déjà il a été question du lion, plus haut, ch. VII, § 8. — Antérieurement. Id., ibid. — Les os du cochon… L’observation paraît exacte ; et elle était plus facile à faire sur un animal domestique que sur un animal sauvage, comme le lion ; voir le Traité des Parties des animaux, liv. II, ch. VIII p. 72, édit. et trad. Frantzius, où ces sujets sont exposés et développés de nouveau.
  149. Sont presque toujours de naissance. Aristote aurait pu indiquer à quels fluides il applique la restriction ; mais l’observation générale n’en est pas moins juste ; et il y a dans le corps de l’animal des fluides qui y existent dès le moment de la naissance, et d’autres qui n’apparaissent que plus tard. — Celui qui est sécrété séparément. Le mot du texte n’est pas d’un sens très-clair ; mais on doit très-probablement comprendre que le lait, par opposition à la laite des poissons, peut être extrait de l’animal dès qu’il s’y est produit. — Mais la liqueur séminale. Il est certain que la laite chez les poissons ne se présente pas sous forme de fluide, comme chez quelques autres animaux ; mais elle joue le rôle fécondant de cette liqueur, bien qu’elle ait une autre forme. Voir le Traité de la Génération des animaux, liv. I, § 14, p. 52, édit. et trad. Aubert et Wimmer. Dans ce dernier passage, le mot que je rends par Laite n’est pas le même qu’ici.
  150. Dans les mamelles. Ce caractère est assez important pour qu’il ait servi de base à la classification zoologique ; il forme toute La classe des Mammifères. — Soit qu’ils produisent leurs petits… Cette distinction entre les vivipares a été établie par Aristote, qui y revient souvent ; le petit peut être déjà vivant dans le sein de la mère avant la naissance ; ou bien, il peut ne recevoir la vie qu’au moment où il en sort. Tel est le cas de la vipère, par exemple. La suite du paragraphe prouve bien que c’est là le sens de ce passage. — Au phoque. MM. Aubert et Wimmer remarquent d’après M. Meyer (Zoologie d’Aristote) que c’est la seule fois qu’Aristote classe le phoque parmi les cétacés ; et ils accepteraient un changement de texte qui mettrait le phoque à part du dauphin et de la baleine. Le phoque est rangé parmi les mammifères carnassiers amphibies, tandis que la baleine et le dauphin sont effectivement des cétacés ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 166 pour le phoque, et pp. 281 et suiv., pour les cétacés. — Ont aussi des mamelles et du lait. C’est ce qui les a fait classer aussi parmi les mammifères, tout éloignés qu’ils sont des mammifères les plus ordinaires par leurs formes, et surtout par l’élément où ils vivent.
  151. Toutes les espèces de lait. Ceci montre qu’Aristote avait fait bien des observations et bien des comparaisons, pour arriver à ces généralités. — Le sérum, ou petit-lait. Il n’y a qu’un mot dans le texte. — Et qui a du corps. Il n’y a que ce seul mot dans le texte ; la traduction est littérale. — Le caséum, le fromage. Il n’y a également qu’un seul mot dans le texte. — Les laits plus épais. Tous ces faits sont très-exacts. — Qui n’ont pas les deux rangées de dents. Ce sont les ruminants, qui n’ont pas d’incisives à la mâchoire supérieure, celles de la mâchoire inférieure étant en général au nombre de huit ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 254. — Ne se coagule pas, non plus que la graisse. Ce membre de phrase pourrait bien être une interpolation. Voir plus haut, ch. XIII, § 1. — Le plus léger de tous… La physiologie moderne a généralement accepté ces données, qui sont fondées sur des observations exactes. — Le lait de l’âne. J’ai conservé, dans tout ce passage, les formules du texte, bien qu’il fût plus exact de dire Chamelle, Jument, Anesse. — Du bœuf. Même remarque ; il faudrait dire Vache. — Qui coagule. Ou, qui fait cailler. — C’est le feu. MM. Aubert et Wimmer font observer qu’il vaudrait mieux dire : « la chaleur », plutôt que le feu.
  152. En général… Ceci est fort exact ; et les exceptions indiquées ne le sont pas moins. — Le premier. C’est-à-dire : Dans les premiers temps où le lait s’est produit, il n’est pas très-bon. — Plus tard. Il est évident que ces mots ne peuvent pas se rapporter à ce qui précède, comme l’ont cru quelques traducteurs. — Les femmes aient conçu. Le texte n’est pas aussi précis. Ceci se rapporte aux femmes qui ont eu déjà des enfants, et qui plus tard, sans même être enceintes, ont du lait de nouveau. — Un peu de lait. En l’absence de la grossesse, le lait est moins abondant. — Quelques femmes, quoique vieilles. Le fait est exact, quoique assez rare ; peut-être l’était-il moins sous le climat de la Grèce.
  153. Du mont Oeta. Au sud de la Thessalie et du Sperchius, au nord-ouest de Thèbes. — Avec des orties. Je crois que cette coutume subsiste encore en plus d’une contrée. — Est mêlé de sang. Par suite de l’irritation extrême qu’aura causée le frottement des orties.
  154. Que dans l’homme. J’ai conservé la formule du texte. — Il y a pourtant quelques exceptions. Même dans l’espèce humaine. Les dictionnaires de médecine citent quelques-uns de ces cas tout exceptionnels, et des allaitements d’enfants faits par des hommes. — A Lemnos. île de la mer Egée, entre le mont Athos et l’Hellespont. Le fait que rapporte ici Aristote, sans doute d’après la tradition, paraît exact, d’après quelques observations modernes.
  155. Comme des présages. Ainsi qu’on regardait comme un présage la barbe qui poussait aux prêtresses de Carie ; voir plus haut, ch. X, § 12. A cet égard, les Anciens étaient encore bien plus superstitieux que nous. — Qui, après la puberté… C’est à cette époque que se produit le plus ordinairement ce singulier phénomène ; mais on l’observe aussi plus tard. — Quand un enfant les tette. Le texte n’est pas aussi précis. § 8. Une certaine graisse. Evidemment, c’est le beurre qu’Aristote veut désigner ici. — En Sicile. Les pâturages de Sicile étaient en général renommés pour leur fertilité. — Trop gras. Avec MM. Aubert et Wimmer, j’adopte cette leçon qui est préférable à la leçon ordinaire, bien qu’elle ne s’appuie pas sur les manuscrits. Elle résulte à peu près uniquement du changement d’une seule lettre.
  156. Ces animaux ont plus de lait. Il s’agit des animaux domestiques ; et selon les individus, le rendement est plus ou moins considérable. — Pour cet usage. C’est-à-dire pour la conservation. — De brebis et de chèvre ; et ensuite…. de vache. La pratique peut montrer tous les jours que cette classification des laits, sous le rapport de la conservation des fromages, est exacte. — Les fromages de Phrygie. Il paraît que ces fromages devaient avoir une valeur particulière, pour qu’on les connût si bien en Grèce, à une aussi grande distance. La Phrygie, dont les limites ont beaucoup varié selon les époques, était à l’ouest de l’Asie-Mineure, et elle correspondait à une partie occidentale de l’Arménie actuelle. Outre ses fromages, elle était connue de la Grèce par ses musiciens ; et la musique grecque lui avait emprunté un de ses modes. — De lait de jument et de lait d’ânesse. Je ne sais pas si cet usage s’est conservé dans le pays, — Il y a plus d’éléments de fromage. Ceci est fort exact ; et il paraît, d’après des recherches récentes, que la proportion indiquée ici de 19 à 30 est très-juste. M. Gorup-Besanez, cité par MM. Aubert et Wimmer (Chimie physiologique, p. 417), a trouvé que le lait de chèvre contenait 33 de caséine, tandis que le lait de vache en a 48. La proportionnalité est la mairie. — D’une amphore. La capacité de l’amphore a varié beaucoup ; il n’importe guère ici de savoir précisément ce qu’elle était, puisqu’il ne s’agit que d’une proportion. — D’une obole. Le prix de l’obole a varié également ; il correspondait à 15 ou 20 de nos centimes.
  157. Tantôt. Voir le début du paragraphe précédent. — Qui ont plus de deux mamelles. Les chiennes, par exemple, les truies, etc. — Aucun d’eux… de fromage. Tous ces détails sont exacts, et ils étaient fort curieux pour les premiers observateurs.
  158. Le suc du figuier. Je ne crois pas que, dans nos pays, on emploie encore ce moyen de faire railler le lait, comme on le faisait en Grèce. C’est surtout de la présure qu’on se sert. Du reste, les détails que donne Aristote sur l’emploi pratique du suc de figuier, sont intéressants. — La présure est déjà une sorte de lait. La présure se trouve en effet dans la caillette, ou quatrième estomac des ruminants et particulièrement du veau. — Ce lait a été cuit. Ou, si l’on veut, « a fermenté ». MM. Aubert et Wimmer contestent avec raison que la présure soit déjà du lait ; selon eux, c’est au contraire le lait absorbé par les jeunes animaux qui se change en présure. Il n’y a pas grande différence de part et d’autre, et l’explication d’Aristote semble fort correcte. Au fond, il ne distingue pas absolument la présure et le lait ; la présure commence par être du lait, avant de devenir ce qu’elle doit être, pour servir à faire cailler le lait. De là sans doute, le nom de Caillette donné au quatrième estomac des ruminants ; voir le Traité de la Génération des animaux, liv. II, § 61, p. 164, édit. et trad. Aubert et Wimmer, et le Traité des Parties des animaux, liv. III, ch. XV, p. 176, édit. et trad. Frantzius.
  159. Tous les ruminants ont de la présure. C’est surtout de la présure du veau qu’on se sert pour faire cailler le lait. Tant que le petit ruminant tette, la caillette est le plus grand de ses estomacs ; c’est ensuite la panse, ou le premier estomac, qui devient le plus grand, quand l’animal en arrive à manger de l’herbe. — Plus on garde la présure, meilleure elle est. Le Dictionnaire de l’Académie française, article Présure, cite cette phrase entière, évidemment empruntée à ce passage d’Aristote. — C’est surtout la vieille présure. Ceci semble n’être qu’une interpolation, jusqu’à la fin du paragraphe. — La meilleure des présures… Est-ce pour arrêter le flux du ventre, ou pour faire cailler le lait, c’est ce qu’on ne voit pas très-clairement. Je ne sais pas si la présure du lièvre a toutes les qualités qu’on lui prête ici. C’est de la muqueuse de l’estomac des ruminants qu’on tire aujourd’hui la Pepsine, que la médecine donne dans les maux d’estomac. Voir Pline (liv. XI. ch. XCVI, édit. et trad. E. Littré, p. 465), qui a répété presque mot pour mot tous ces détails d’après Aristote. Dans le chapitre XCVII, Pline ajoute de curieux renseignements sur les fromages, de diverses contrées, les plus estimés de son temps.
  160. Dans le Phase. Ou plutôt sur les bords du Phase, puisque le Phase est un fleuve, qui se jette dans le Pont-Euxin ; il porte aujourd’hui le nom turc de Pasch, ou Rioni. Le Phasis est célèbre par l’expédition des Argonautes, qui ont rapporté le faisan de ce pays en Europe. Le Phasis se jette dans la mer Noire, aux environs de Poti et de Redout-Kalé, après avoir traversé l’ancienne Colchide. — De petites vaches… Chez nous aussi les petites vaches bretonnes fournissent beaucoup de lait. — Une amphore et demie de lait. Il est difficile de savoir ce que représentait une amphore au temps d’Aristote ; une vache qui donne de douze à quinze litres est aujourd’hui regardée comme une très-bonne vache ; et c’est en effet un rendement énorme. C’était peut-être celui des grandes vaches de l’Épire. L’amphore était à peu près de dix litres ; ainsi l’amphore et demie en représente quinze. — Il faut se tenir debout. Ceci donne une idée de la grosseur de ces vaches. Voir plus loin, liv. VIII, ch. IX, § 4. — En Épire. L’Épire est située au nord-ouest de la Grèce ; et elle s’étendait de la Thessalie jusqu’à la mer Ionienne ou Adriatique. — Les chiens y sont énormes. Ce sont les chiens appelés Molosses. Je ne saurais dire si la faune de l’Épire est encore de nos jours ce qu’elle était au temps d’Aristote ; c’est probable,
  161. Du nom même du roi Pyrrhus. Ce roi est le fils d’Achille, Néoptolème, devenu roi d’Épire ; il y a eu plusieurs rois d’Épire portant le même nom.
  162. L’herbe médique. Voir plus loin, liv. VIII, ch. X, § 2, où il est encore question de l’herbe médique, dont la première coupe n’est pas bonne pour la nourriture des chevaux, des ânes et des mulets. Ceci ne dit pas précisément ce qu’était l’herbe médique, quoiqu’on voie bien que ce devait être un fourrage, sainfoin, trèfle, luzerne, etc. — Le cytise. Espèce de plantes légumineuses, où l’on compte des arbrisseaux, et même des arbres, à fleurs odorantes. — Les vesces. Ou les fèves, peut-être. — Elles mettent bas plus difficilement. Toutes ces observations sont très curieuses, et elles annoncent beaucoup d’attention au régime des animaux domestiques. — Est très-abondante. J’ai adopté la leçon de MM. Aubert et Wimmer, qui s’appuie sur plusieurs manuscrits, et qui est très-satisfaisante. — Certains fourrages flatueux. Voir plus loin, liv. VIII, ch. IX, § 1, sur l’usage des flatueux pour l’engraissement des bœufs. — À la petite chèvre au-dessous d’un an. Le nom grec donné à cette chèvre est Chimère ; j’ai dû, pour être clair, paraphraser ce mot.
  163. La mamelle tend à baisser. Il est bien probable que cette observation est exacte ; mais je ne sais pas si elle a été vérifiée. — Qu’ils restent sans porter. C’est sans doute en empêchant les vaches de s’approcher du mâle, qu’en Épire on avait obtenu ces fortes et puissantes races de bestiaux ; voir plus loin, liv. VIII, ch. IX, § 4. — Ont tout ce qu’il leur faut. Le texte n’est pas plus précis. — De l’année. J’ai ajouté ces mots. — Les ruminants. L’ordre des ruminants, le huitième ordre des mammifères, comprend le chameau, les chevrotains, les cerfs, les ruminants à cornes creuses, antilopes, chèvres, moutons, bœufs, etc. Voir Cuvier, Règne animal, tome I, pp. 254 et suivantes.
  164. Les vaches de Torone. La ville de Torone, en Macédoine, était sur le bord de la mer, à l’extrémité de la presqu’île Sithonienne, et elle donnait son nom au golfe Toronaique, au fond duquel était Olynthe. Il est évident qu’ici Aristote parle de pays qu’il connaissait personnellement. — Chez les femmes. Je ne sais pas si la science moderne a sanctionné toutes ces observations, qui d’ailleurs sont assez faciles à faire. — Le lait des brunes est plus sain. On peut croire que ceci est vrai, quoique, parmi les hommes, les blonds ne soient pas moins robustes que les bruns. — Est plus salutaire aux enfants. Parce que l’autre est trop nourrissant. Voir Buffon, de l’Enfance, tome XI, pp. 339 et 350, édit. de 1830.
  165. Tous les animaux qui ont du sang. Il faut comprendre, par là, tous les animaux qui ont du sang rouge. — On dira ailleurs. La question est étudiée tout au long dans le Traité de la Génération des animaux, liv. II, §§ 14 et suiv. p. 134, édit. et trad. Aubert et Wimmer, et aussi § 60, p. 164. — Dans les animaux qui ont des poils. C’est là une généralité fort importante ; je ne sais pas si la science moderne l’accepte. — Hérodote. C’est par rapport aux Indiens qu’Hérodote signale cette particularité ; il ajoute qu’il en est de même des Ethiopiens, liv. III, ch. CI, p. 166, édit. Firmin-Didot.
  166. Le sperme, à l’état sain… Toutes ces explications attestent des observations physiologiques très-attentives, bien qu’on puisse en révoquer en doute la parfaite exactitude sur certains points. — Noir. Il est difficile de comprendre ce que l’auteur a voulu dire ; et il ne se peut guère que, dans aucune condition, la liqueur séminale prenne une couleur noire. — Les grands froids… la chaleur… Ce sont autant d’observations curieuses, que la science moderne ne paraît pas avoir recommencées. — Tout sec et congloméré. Même remarque. — Le sperme prolifique… Il est clair que ceci indique une suite d’expériences ; mais les détails que donne Aristote sont trop concis pour qu’on puisse voir jusqu’où ces expériences avaient été poussées, et ce qu’elles étaient.
  167. Ctésias n’a écrit que des erreurs. Aristote est revenu plus au long sur ces erreurs de Ctésias, dans le Traité de la Génération des animaux, liv. II, § 31, p. 146, édit. et trad. Aubert et Wimmer. Il y revient aussi sur l’assertion d’Hérodote concernant la liqueur séminale des Éthiopiens ; et il étudie plus longuement qu’ici la nature et les propriétés du sperme. Ctésias prétendait que le sperme des éléphants devenait, en séchant, aussi dur que de l’ambre ; Aristote nie absolument le fait. MM. Aubert et Wimmer, croient que ce fait peut n’être pas impossible. Pour Ctésias, voir ce qui nous reste de lui, dans ses Fragments, p. 88, à la suite de l’édition d’Hérodote, édit. Firmin-Didot. On fera bien, pour ce livre comme pour les précédents, d’avoir sans cesse sous les yeux les ouvrages de notre grand Cuvier, le Règne animal et son Anatomie comparée. En rapprochant le naturaliste moderne du naturaliste grec, on sera d’autant plus frappé de tout ce qu’Aristote savait déjà, et de tout ce qu’il avait observé et découvert, dès le IVe siècle avant notre ère.