« Fuis l’éden des anges déchus »

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Œuvres complètes : Les Chansons des rues et des boisOllendorf30 (p. 113).


IX


Fuis l’éden des anges déchus ;
Ami, prends garde aux belles filles ;
Redoute à Paris les fichus,
Redoute à Madrid les mantilles.

Tremble pour tes ailes, oiseau,
Et pour tes fils, marionnette.
Crains un peu l’œil de Calypso,
Et crains beaucoup l’œil de Jeannette.

Quand leur tendresse a commencé,
Notre servitude est prochaine.
Veux-tu savoir leur A B C ?
Ami, c’est Amour, Baiser, Chaîne.

Le soleil dore une prison,
Un rosier parfume une geôle,
Et c’est là, vois-tu, la façon
Dont une fille nous enjôle.

Pris, on a sa pensée au vent
Et dans l’âme une sombre lyre,
Et bien souvent on pleure avant
Qu’on ait eu le temps de sourire.

Viens dans les prés, le gai printemps
Fait frissonner les vastes chênes,
L’herbe rit, les bois sont contents,
Chantons ! oh ! les claires fontaines !


11 août 1859.