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À bout portant/À propos de sport

La bibliothèque libre.
Éditions du Devoir (p. 109-110).


À Propos de Sports

Je vais, avec votre permission, vous parler un peu de sport. Ne craignez ni le mot ni la chose. Le mot est d’origine française, il vient de « despor », de « desporter » qui veut dire : exercer ; la chose est des plus agréables et des plus salutaires.

Le dictionnaire la définit ainsi : « Culture, pratique de certaines occupations ayant le caractère d’un divertissement en même temps que celui d’un exercice de nature à développer à la fois la puissance physique de l’homme et certaines de ses qualités intellectuelles ».

Voilà qui est bien, mais qui n’est pas complet. Il faudrait ajouter à la définition : « Moyen sûr et commode pour les banquistes (fakers) d’exploiter leurs contemporains ».

Dans ce domaine, comme dans tous les autres, il y a une foule de gens dits « pratiques », qui réussissent à faire prévaloir leur principe du « biziness is biziness ».

Chez les Canadiens de langue française, ils font mousser le patriotisme en criant avec le plus pur accent du terroir : Allons, avec les « nôtres » ! Bravo les Canayens ! et toute la kyrielle.

Chez les Canadiens de langue anglaise, les mêmes faiseurs clament en cockney : Down with the Frenchmen ; w’will lick the pea soups ! etc.

Et les écus français et anglais tombent dans une seule tirelire.

On chuchote bien un peu partout : C’est une affaire arrangée ! C’est du bluff ! mais on n’en continue pas moins à les encourager.

Il serait pourtant si facile de tout jeter l’échafaudage à bas par une abstention en bloc.

J’avoue, cependant, qu’il est des spectacles où, même si nous sommes les tondus, il est très agréable de pouvoir dire : J’y étais.

Tout le premier, je donnerais bien cinquante sous pour voir une course de taureaux, à Maisonneuve.

Plus nous en aurons de ces aventures, mieux ce sera : nous finirons peut-être par ouvrir les yeux.