À tire-d’aile (Jacques Normand)/33

La bibliothèque libre.
Calmann Lévy, éditeur (p. 150-153).

XIII

NOCTURNE.


La lune au front pâle
Dans la nuit d’opale

Glissant,

À travers les branches
Par cascades blanches

Descend.


Le hamac voltige
Effleurant la tige

Des fleurs,

Où, perle irisée,
Brille la rosée

En pleurs.


Sur ta tête brune
Un rayon de lune

Changeant,

Voltige et scintille
Comme une mantille

D’argent.


Sur ta bouche rose,
Le zéphyr se pose

Joueur,

Et dans ton sourire
Voici que respire

Ton cœur.


Dors, ma souveraine !
Ta vie est sereine,

Tes jours

Sont tissés de soie
Et semés de joie

Toujours !


Sur tes seize années
Point de fleurs fanées !

Jamais

Tu n’as connu larmes,
Désespoirs, alarmes,

Regrets !


Dors, ma bien-aimée !
La nuit embaumée

Sans bruit,

Étendant ses voiles
Parsemés d’étoiles,

Reluit !


Dors, calme et suave !
Moi que fait esclave

L’amour,

Moi qui souffre et t’aime,
Sans espérer même

Un jour,


Rêveur, je balance,
Versant en silence

Des pleurs,

Le hamac qui vole
Frôlant la corolle

Des fleurs !