Œuvres (Ferrandière)/Fables/Fable 151

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Janet et Cotelle (Première partie : Fables — Seconde partie : Poésiesp. 162-163).

FABLE CLI.

LA CORNEILLE ET LA MÉSANGE.


Une mésange surannée,
Sentoit sa fin prochaine, avoit peur de la mort,
Trouvoit sa course très bornée,
De la corneille enfin elle envioit le sort.
Celle-ci, sa voisine, ainsi que son aînée,
Lui dit : hélas ! vous avez tort,
Consolez vous, ma bonne amie.

S’il n’existoit ni vautours ni milans,
Aucun de ces oiseaux méchans
Qui troublent le repos du bois, de la prairie,
J’appellerois un bien la longueur de la vie.
Mais en volant toujours trembler,
Au lieu qu’il plaît n’oser aller,
Contre serres, gros becs, n’oser même parler !
Convenez avec moi ma chère,
Qu’une si longue vie est un siècle d’ennuis :
Sans compter que l’on perd des parens, des amis,
Et que vieux on devient chagrin et solitaire ;
C’est vivre alors trop misérablement.
Ah ! ne regrettez point les dangers de la terre,
Il vaut mieux dans son nid mourir tranquillement.