Marie, enfin quitte l’ouvrage,
Voici l’étoile du berger.
— Ma mère, un enfant du village
Languit captif chez l’étranger :
Pris sur mer, loin de sa patrie,
Il s’est rendu, mais le dernier.
File, file, pauvre Marie,
Pour secourir le prisonnier ;
File, file, pauvre Marie,
File, file pour le prisonnier.
Tu le veux, ma lampe s’allume.
Eh quoi ! ma fille, encor des pleurs !
— D’ennui, ma mère, il se consume ;
L’Anglais insulte à ses malheurs.
Tout jeune, Adrien m’a chérie ;
Il égayait notre foyer.
File, file, pauvre Marie,
Pour secourir le prisonnier ;
File, file, pauvre Marie,
File, file pour le prisonnier.
Pour lui je filerais moi-même,
Mon enfant ; mais j’ai tant vieilli !
— Envoyez à celui que j’aime
Tout le gain par moi recueilli.
Rose à sa noce en vain me prie :
Dieu ! j’entends le ménétrier !
File, file, pauvre Marie,
Pour secourir le prisonnier ;
File, file, pauvre Marie,
File, file pour le prisonnier.
Plus près du feu file, ma chère ;
La nuit vient refroidir le temps.
— Adrien, m’a-t-on dit, ma mère,
Gémit dans des cachots flottants.
On repousse la main flétrie
Qu’il étend vers un pain grossier.
File, file, pauvre Marie,
Pour secourir le prisonnier ;
File, file, pauvre Marie,
File, file pour le prisonnier.
Ma fille, j’ai naguère encore
Rêvé qu’il était ton époux.
Même avant la trentième aurore
Mes rêves s’accomplissent tous.
— Quoi ! l’herbe à peine refleurie
Verra le retour du guerrier !
File, file, pauvre Marie,
Pour secourir le prisonnier ;
File, file, pauvre Marie,
File, file pour le prisonnier.
|