(Journal de l’École Polytechnique, Ve Cahier, t. II, prairial an VI.)
1. Considérons la fraction qu’on suppose moindre que l’unité, et réduite à sa plus simple expression, en sorte que les nombres et soient premiers entre eux. Si l’on demandait de transformer cette fraction en une autre dont le numérateur ou le dénominateur fût donné, il est clair que cela ne serait possible, à la rigueur, qu’autant que le nouveau numérateur ou dénominateur serait un multiple du numérateur ou dénominateur donné. Mais, si l’on veut se contenter d’une approximation, le Problème est toujours résoluble, et il s’agira de déterminer la nouvelle fraction, de manière qu’elle approche le plus qu’il est possible de la fraction donnée.
2. Ainsi, en désignant par cette nouvelle fraction, dans laquelle ou est supposé donné, le Problème consistera à déterminer ou en sorte que la différence entre les deux fractions et soit la plus petite qu’il est possible. Or cette différence est Il s’agira donc de déterminer ou de manière que le nombre devienne le plus petit ; et, pour cela, il est visible qu’il n’y aura qu’à prendre pour le quotient de divisé par ou pour le quotient de par alors la valeur de sera égale au reste de ces divisions, et sera par conséquent moindre que le diviseur.
3. Mais on doit observer ici que le reste d’une division peut être positif ou négatif, suivant qu’on prendra pour quotient le nombre qui, étant multiplié par le diviseur, sera immédiatement moindre ou plus grand que le dividende. Dans l’Arithmétique ordinaire, on fait toujours la division de manière que les restes soient positifs ; mais, dans la théorie générale des nombres, on peut employer également des restes positifs ou négatifs, et l’on peut même, par ce moyen, faire en sorte que le reste soit toujours moindre que la moitié du diviseur ; car il est évident que, si le reste positif est plus grand que cette moitié, en augmentant le quotient d’une unité, il faudra retrancher le diviseur du reste, ce qui donnera un reste négatif et moindre que la moitié du diviseur.
On peut, pour plus de simplicité, appeler division en dedans celle où le reste est positif, et division en dehors celle qui donne un reste négatif, parce qu’en effet, dans la première, le produit du quotient par le diviseur tombe en dedans du dividende, et que, dans la seconde, il tombe en dehors.
4. Soit donc en sorte que soit le reste de la division de par et le quotient, ou le reste de la division de par et le quotient, on aura
et par conséquent
On pourra donc traiter de la même manière la fraction dans laquelle est toujours nécessairement moindre que et la réduire à une autre fraction connue dont le numérateur ou le dénominateur soit donné, et qui approche le plus qu’il est possible de la même fraction.
On fera ainsi où sera le reste de la division de par et le quotient, si le dénominateur est donné ; et, si c’est le numérateur qui est donné, sera le reste de la division de par et le quotient.
On aura de cette manière
On pourra, si l’on veut, continuer de même, en faisant
et l’on aura
et ainsi de suite.
5. Nous remarquerons ici que, le nombre étant moindre que par l’hypothèse, les nombres suivants seront aussi moindres que puisque ce sont les restes de la division par D’où il est facile de conclure que les numérateurs ne pourront jamais être plus grands que leurs dénominateurs respectifs
Car, en considérant l’équation si on aura
donc mais étant il s’ensuit que sera nécessairement Si, au contraire, on aura
donc et de là mais, étant sera un nombre négatif ; donc on aura
donc étant sera nécessairement et par conséquent
On démontrera de la même manière, par l’équation
que l’on aura dans tous les cas
et ainsi de suite.
Lorsque les dénominateurs sont donnés, et qu’on détermine les numérateurs de manière que les restes des divisions de par soient positifs, alors il résulte de la démonstration précédente qu’on aura nécessairement
6. En substituant successivement les valeurs de on aura cette suite de transformées
où il faut remarquer, à l’égard des signes ambigus, que le premier est le même que celui du premier reste ; que le second doit être le produit de ceux des deux premiers restes ; que le troisième doit être le produit de ceux des trois premiers restes, et ainsi de suite.
Ces transformations ont l’avantage de réduire la fraction donnée à une suite de fractions décroissantes dont les numérateurs ou les dénominateurs soient donnés, et qui approchent le plus qu’il est possible de la fraction donnée.
7. Si les dénominateurs sont supposés donnés et tous égaux entre eux, alors la série prend cette forme plus simple
et il est facile de voir que si l’on fait et qu’on prenne tous restes positifs, c’est-à-dire, qu’on fasse toutes les divisions en dedans comme
on le pratique dans l’Arithmétique, on aura la réduction connue de la fraction
en décimales, où les numérateurs
seront les caractères successifs de la fraction. En effet
sera le quotient de la division de
ou de
par
et
le reste ;
sera le quotient de la division de
ou
par
et
le reste, et ainsi de suite, ce qui revient à l’opération connue de la division en décimales.
Si l’on prenait pour les nombres on aurait la réduction de la fraction en fractions binaires, ternaires, duodécimales, etc.
8. Je remarque maintenant que, lorsque tous les dénominateurs sont donnés et égaux, les numérateurs doivent nécessairement revenir les mêmes et former une série périodique ; car, les restes étant tous moindres que le diviseur il arrivera nécessairement que, dans la suite des opérations, un des restes sera répété. Supposons, par exemple, que le reste soit égal au reste comme est le quotient et le reste de la division de par que de même est le quotient et le reste de la division de par il s’ensuit, à cause de et égaux à que l’on aura et et, par la même raison, et ainsi de suite ; de sorte que les quotients reviendront toujours à l’infini et formeront une suite périodique de deux termes. C’est ce qui a lieu, comme l’on sait, dans l’Arithmétique ordinaire, lorsqu’on réduit en décimales une fraction quelconque. La même chose aura lieu, par conséquent, dans tout autre système d’Arithmétique.
De là on peut conclure réciproquement que, si l’on a une série numérique quelconque de la forme
laquelle aille à l’infini, sans que les numérateurs qui doivent être tous forment une suite périodique, cette série ne pourra jamais représenter une fraction rationnelle.
9. Lorsque ce sont les numérateurs qui sont donnés, et qu’on cherche les dénominateurs par les conditions supposées, les nombres formeront nécessairement une suite décroissante. Car d’abord est par l’hypothèse ; ensuite étant le reste de la division de par sera moindre que de même, étant le reste de la division de par sera moindre que et ainsi de suite. D’où il suit que la suite des restes devra nécessairement se terminer par zéro ; et alors la série se terminera aussi, ce qui est évident par les formules du no 6.
Donc, réciproquement, si l’on a une série de la forme
où les numérateurs soient respectivement moindres que cette série, si elle va à l’infini, ne pourra jamais représenter une fraction rationnelle ; par conséquent elle représentera nécessairement une quantité numérique irrationnelle.
10. On sait qu’en nommant le nombre dont le logarithme hyperbolique est l’unité, on a généralement
donc, si ou étant un nombre quelconque entier, la série qui représente la valeur de sera de la forme dont il s’agit ; par conséquent le nombre sera nécessairement irrationnel.
On a aussi, comme l’on sait,
Donc, si l’on fait
ou
c’est-à-dire, si l’on prend l’arc
égal au rayon ou à une partie quelconque aliquote du rayon, les séries qui représenteront le sinus et le cosinus de cet arc auront les conditions dont il s’agit ; et, comme elles vont à l’infini, on en conclura que ces sinus ou cosinus ne pourront jamais être commensurables au rayon.
11. Considérons maintenant plus particulièrement le cas où les numérateurs sont donnés, et supposons que ces numérateurs soient tous égaux à l’unité, ce qui rend la forme de la série la plus simple et la plus convergente.
On fera donc, dans ce cas,
et l’on aura
où l’on observera, à l’égard des signes ambigus de la série, la règle du no 6.
Ainsi l’on prendra pour le quotient de la divisions de par pour le quotient de la division de par le reste de la division précédente pour le quotient de la division de par le reste de la division précédente, et ainsi de suite ; de sorte que dans ces opérations on comparera successivement tous les restes au même dividende ce qui rendra la suite des restes décroissante, et celle des quotients croissante, jusqu’à ce qu’on parvienne à un reste nul, ce qui terminera l’opération et la série.
Si l’on fait toutes les divisions en dedans comme à l’ordinaire (3), les restes auront tous le signe négatif, et par conséquent les signes de la série seront alternativement positifs et négatifs (6). Pour que la série n’ait que des termes positifs, il faudra que les divisions successives soient toutes en dehors, pour que les restes dans les formules ci-dessus, soient tous affectés du signe
Au reste, si l’on voulait avoir la série la plus convergente qu’il est possible, il faudrait faire chaque division en dedans ou en dehors, suitvant qu’elle donnera le reste le plus petit (3).
12. Comme cette manière de convertir une fraction en série est peu connue, et peut être utile dans beaucoup de cas, nous allons l’éclaircir par quelques exemples.
Soit la fraction voici l’opération entière, dans laquelle je ferai toutes les divisions en dedans
On voit que les restes sont et les quotients de sorte que l’on aura cette série alternative,
Prenons la fraction qui exprime le rapport de la circonférence au diamètre, et qui est, en décimales,
En faisant la même opération sur la fraction
et faisant les divisions en dedans ou en dehors, suivant qu’il sera nécessaire pour que chaque reste soit moindre que la moitié du précédent, on trouvera les quotients et l’on aura pour le rapport dont il s’agit la série très-convergente
Les deux premiers termes réunis donnent la proportion connue d’Archimède et, en y ajoutant le troisième, on a la proportion de Metius
13. Dans les problèmes précédents, il a été question de réduire une fraction donnée à d’autres fractions dont les numérateurs ou les dénominateurs étaient donnés ; mais on peut chercher simplement à réduire une fraction à d’autres fractions exprimées en moindres termes, et qui soient les plus approchantes qu’il est possible de la fraction donnée. Comme ce Problème est un des plus intéressants de l’Arithmétique, soit par les artifices qu’il demande, soit par les usages dont il est susceptible, nous allons en donner ici une solution déduite des mêmes principes.
14. Suivant les formules du no 4, nous avons cette transformation
où Or, lorsque et sont indéterminées, et qu’on
cherche à les déterminer de manière que la fraction
approche le plus qu’il est possible de la fraction donnée
les nombres
et
étant moindres respectivement que les nombres
et
il est clair qu’il faudra donner à
la plus petite valeur possible, c’est-à-dire, faire
égal à l’unité positive ou négative, puisque
emporterait l’égalité des deux fractions, et rendrait
Il s’agira donc de prendre et de manière que l’on ait
on aura alors cette transformation
où il faudra prendre le signe supérieur ou l’inférieur, suivant qu’on voudra que la fraction donnée soit plus grande ou moindre que la nouvelle faction
15. Mais il faut s’assurer d’abord qu’il peut toujours exister deux nombres tels que l’on ait Mettons cette équation sous la forme il est visible que la question se réduira à trouver un nombre moindre que lequel rende le nombre divisible par Or, si l’on substitue dans successivement pour tous les nombres jusqu’à et qu’on divise chaque résultat par on aura des restes tous moindres que et tous différents entre eux ; car, s’il pouvait y avoir deux restes égaux, soient et les deux nombres qui donneront le même reste ; alors la différence sera nécessairement divisible par mais et sont premiers entre eux, et est un nombre moindre que puisque et sont moindres que donc, cette différence ne pouvant être divisible par il s’ensuit que les deux restes ne sauraient être égaux ; donc le zéro se trouvera nécessairement parmi les restes ; par conséquent il y aura toujours un nombre moindre que qui, substitué pour dans rendra ce dernier nombre divisible par Ce même nombre pourra donc être pris pour et le quotient de la division de par sera la valeur correspondante de laquelle sera par conséquent moindre que
On voit aussi, par cette démonstration, qu’il ne peut y avoir qu’une seule valeur de et une de moindres que et qui satisfassent à l’équation Car soient et deux valeurs de et deux valeurs de on aura donc
donc, retranchantl’une de ces équations de l’autre, on aura
équation qui ne saurait subsister en nombres entiers, puisque et sont premiers entre eux, et que et sont des nombres moindres que et
On pourra donc toujours trouver les nombres et qui doivent satisfaire à l’équation proposée, en essayant successivement les nombres moindres que ou pour ou mais nous donnerons ci-après des méthodes directes pour cet objet.
16. Au reste, lorsqu’on aura trouvé deux valeurs de et de qui satisferont à l’équation il n’y aura qu’à prendre et l’on aura ainsi il suffira toujours de trouver des valeurs de et qui satisfassent à l’équation proposée, en prenant le signe ambigu positivement ou négativement à volonté.
On voit aussi par là qu’il est toujours possible de donner à ou des valeurs plus grandes ou plus petites que ou car il est visible que, si est sera Or la fraction approche d’autant plus de la fraction soit en plus, soit en moins, que le dénominateur est plus grand, puisque leur différence est abstraction faite du signe ; donc, si l’on prend cette différence sera la plus petite et
17. L’équation à laquelle doivent satisfaire les nombres et fait voir de plus :
1o Que ces nombres seront nécessairement premiers entre eux, en sorte que la fraction sera déjà réduite à ses moindres termes ; car s’ils avaient un diviseur autre que l’unité, il faudrait qu’il divisât aussi le second membre de l’équation, ce qui ne se peut ;
2o Qu’il est impossible qu’entre les deux fractions et il tombe aucune autre fraction, à moins qu’elle n’ait un dénominateur plus grand que car supposons qu’il existe une fraction comme dont la valeur puisse tomber entre celles de ces deux fractions, et dont le dénominateur soit il faudra donc que la différence entre les deux fractions et soit moindre que la différence entre les fractions et mais la première de ces différences est et la seconde est Or il est clair que le nombre ne peut pas être moindre que l’unité ; et, comme par l’hypothèse, il s’ensuit, au contraire, que la première différence sera toujours nécessairement plus grande que la seconde.
18. Si la fraction est encore exprimée en termes trop grands, on pourra la rabaisser de la même manière, puisque les nombres et a sont aussi premiers entre eux.
On cherchera donc deux autres nombres et moindres respectivement que et qui satisfassent à l’équation et l’on aura
De la même manière, si l’on cherche encore d’autres nombres et moindres que et et qui soient tels que l’on ait on aura aussi
et ainsi de suite.
Ces nouvelles fractions seront aussi réduites à leurs moindres termes, et seront exprimées en termes toujours plus petits ; de manière qu’entre deux fractions consécutives de la série il ne pourra tomber aucune fraction dont le dénominateur serait entre les dénominateurs de ces deux fractions (17). D’où il s’ensuit que cette série de fractions contiendra toutes les fractions qui, étant successivement exprimées en termes moindres que la fraction approcheront plus de celle-ci que ne pourrait faire toute autre fraction qui ne serait pas exprimée en plus grands termes.
19. Supposons que les nombres soient pris de manière que les signes supérieurs ou les signes inférieurs aient constamment lieu dans les équations
on aura, en conservant la même loi des signes, les approximations
qui sont, comme l’on voit, alternativement en plus et en moins.
Si l’on substitue successivement les valeurs de on aura
Or, comme les nombres sont supposés aller en diminuant, il est clair qu’on aura Donc on aura, en vertu des formules précédentes,
les signes supérieurs répondant aux signes supérieurs de ces formules, et les inférieurs aux inférieurs.
D’où je conclus que, si l’on suppose
en conservant toujours les signes supérieurs ou les inférieurs, les nombres entiers seront nécessairement tous positifs, et il est clair qu’on aura
20. Cela posé, si l’on ajoute ensemble les deux équations
on aura
Or, la fraction étant réduite a ses moindres termes, la fraction ne peut lui être égale, à moins que le numérateur et le dénominateur ne soient équimultiples de et On aura donc nécessairement, en prenant pour un nombre entier indéterminé,
Or, devant être et il est clair qu’on ne pourra prendre pour et que les restes des divisions de par et de par et sera alors le quotient commun de ces divisions. Ainsi, connaissant les deux premières fractions on pourra trouver de cette manière la troisième De même, les équations
étant ajoutées ensemble, donnent
d’où l’on tirera, de la même manière,
étant un nombre quelconque entier.
On aura ainsi et, comme doit être et il s’ensuit que et ne pourront être que les restes des divisions de par et de par et que sera leur quotient commun.
On tirera pareillement des deux équations
ces deux formules
étant un nombre entier indéterminé ; et, comme
et
doivent être respectivement moindres que
et
on en conclura qu’ils ne pourront être que les restes des divisions de
par
et de
par
et que
sera leur quotient commun.
Et ainsi de suite.
21. Nous venons de trouver les formules
Si l’on substitue ces valeurs dans les expressions des nombres du no 19, il viendra, à cause de en ôtant l’ambiguïté des signes qui affectent tous les termes,
formules qui font voir que les nombres vont nécessairement en augmentant, tandis que les nombres et vont en diminuant.
Ces formules peuvent aussi servir à déterminer directement la valeur de ces nombres lorsque les coefficients seront connus ; et ces mêmes nombres serviront à exprimer d’une manière simple les différences des fractions et de la fraction (19).
22. Maintenant, comme les nombres ainsi que les nombres , doivent aller en diminuant, il est évident que par la continuation des mêmes opérations on parviendra à des termes nuls.
Supposons donc, par exemple, qu’on ait alors l’équation (19) deviendra donc il faudra prendre le signe supérieur et faire
Donc l’équation du même numéro deviendra, en prenant le signe supérieur, savoir,
Ensuite l’équation qui là précède, donnera donc, puisque est pour que soit positif, il faudra faire et l’on aura
23. Ayant ainsi les valeurs des deux derniers termes de la série on pourra trouver les valeurs de tous les précédents, ainsi que celles des nombres par les formules du no 21,
En effet, ayant trouvé et on aura mais doit être par l’équation donc, devant être il est visible que ne pourra être que le reste de la division de par et en sera le quotient ; ainsi l’on aura
Ensuite l’équation fait voir de même (à cause que doit être par l’équation qui précède, ) que ne peut être que le reste de la division de par et que en sera le quotient.
Pareillement l’équation dans laquelle doit être en vertu de l’équation qui précède, fait voir que ne peut être que le reste de la division de par et que en sera le quotient.
Enfin l’équation donnera et l’équation donnera la valeur de
24. Les nombres étant ainsi connus, on pourra trouver directement les nombres et par le moyen des formules du no 21.
En effet ces formules donnent
et, comme on a trouvé (22) on aura, en remontant successivement, les valeurs de et
Mais on peut faire toutes ces opérations à la fois, comme on le voit par l’Exemple suivant.
25. Soit proposée la fraction en sorte que l’on ait et on disposera le calcul ainsi
Les deux premières équations sont toujours et Pour en déduire la troisième, on cherche combien est contenu en ici c’est une fois, et l’on met à côté de la seconde équation ; ensuite on ajoute cette équation, multipliée par le même nombre à la précédente, et l’on aura la troisième équation On cherche de nouveau combien le nombre est contenu dans le précédent c’est fois ; ainsi l’on met à côté de cette équation, et le produit de cette équation par ajouté à la précédente, donnera la suivante et ainsi de suite.
On voit d’abord, par ce procédé, que les nombres de la troisième colonne sont les restes, et ceux de la quatrième les quotients des différentes divisions qui ont lieu dans l’opération connue pour chercher le plus grand commun diviseur des deux premiers nombres de la troisième colonne ; de sorte que, ces nombres étant supposés premiers entre eux, il s’ensuit qu’on doit nécessairement parvenir à un reste égal à l’unité, ce qui donnera sur-le-champ une équation de la forme ainsi, on aura nécessairement de cette manière une solution de cette équation, et par conséquent des valeurs convenables de et d’où l’on pourrait tirer successivement celles de et de par la méthode du no 20.
26. Mais, en rapprochant ces opérations de celles auxquelles notre analyse nous a conduits ci-dessus (23), il est facile de voir que les coefficients de dans la première colonne sont tous les nombres et les coefficients de dans la seconde colonne sont les nombres correspondants ces nombres étant disposés à rebours ; en sorte que les premiers et soient les avant-derniers, savoir, et
On doit voir en même temps que les nombres qui forment la troisième colonne sont les nombres disposés aussi à rebours et pris alternativement en plus et en moins, de manière qu’on aura
Enfin les nombres de la quatrième colonne seront les nombres pris également à rebours ; en sorte que l’on aura
Ainsi l’on aura tout de suite les fractions les plus approchantes de la fraction donnée, et conçues en termes toujours plus petits, en supposant la troisième colonne nulle et prenant successivement pour les valeurs qui résultent de cette supposition.
Dans le cas de l’Exemple précédent, où la fraction donnée est les fractions convergentes seront donc
et les équations font voir que l’erreur de la première de ces fractions est en excès, celle de la seconde en défaut, et ainsi de suite.
Si l’on voulait avoir une première fraction en défaut, on prendrait (16) la fraction savoir et, si l’on voulait de même avoir une seconde fraction en excès, on prendrait la fraction savoir et ainsi des autres.
27. Au reste, si l’on met les formules du no 21 sous la forme
on aura, par la substitution successive,
de sorte que, comme les deux derniers termes de la série sont égaux à et (22), il s’ensuit que la fraction se trouvera ainsi réduite à une fraction continue, dont les dénominateurs successifs seront les nombres pris à rebours, et par conséquent les nombres mêmes de la cinquième colonne dans la Table du no 25.
Ainsi la fraction de l’Exemple de ce numéro se réduit à cette fraction continue
et cette fraction, étant coupée successivement au premier dénominateur, au second, au troisième, etc., donne les mêmes fractions convergentes
28. C’est par le moyen des fractions continues qu’on a coutume de résoudre le Problème des fractions les plus convergentes vers une fraction donnée. On commence par réduire cette fraction en fraction continue, en faisant sur le numérateur et le dénominateur l’opération connue pour trouver le plus grand commun diviseur, et prenant les quotients de ces divisions successives pour les dénominateurs de la fraction continue ensuite on en déduit les fractions convergentes par des formules semblables à celles du no 24. La fraction traitée de cette manière, donne les quotients et l’on en forme immédiatement cette suite de fractions,
dont chacune est composée des deux précédentes, en prenant pour numérateur la somme du numérateur précédent, multiplié par le nombre de la série des quotients qui est placé au-dessus, et du numérateur qui précède celui-ci ; et de même, pour dénominateur, la somme du dénominateur précédent, multiplié par le même nombre, et du dénominateur qui précède ce dernier.
29. Mais on peut déduire de nos formules un autre procédé pour parvenir directement à une quelconque des fractions convergentes par le moyen d’une seule série. Pour cela, je considère les équations du no 21 sous cette forme,
et j’observe que les valeurs de et dépendent des quantités comme celles de et dépendent des quantités et celles de et dépendent de ce qui est évident par la forme même de ces équations. D’un autre côté, si l’on considère la série des nombres et qu’on y ajoute au commencement les deux nombres et on a, par les formules du no 21,
or on a vu (22) que les deux derniers termes de cette série sont nécessairement les nombres et donc, si dans ces formules on change les nombres en les deux derniers termes de la série seront et de sorte que l’on aura immédiatement la première fraction convergente par les deux derniers termes de la série
et, par la même raison, on aura la seconde fraction convergente en prenant pour et les deux derniers termes de la série
et ainsi de suite ; les nombres étant les dénominateurs de la fraction continue, pris à rebours, c’est-à-dire à commencer par le dernier.
30. Ainsi, ayant trouvé pour la fraction cette suite de quotients ou de dénominateurs on pourra former les séries suivantes :
où chaque terme est composé du terme précédent multiplié par le nombre qui est au-dessus, et de celui qui le précède ; et l’on voit que la première série redonne les deux termes de la fraction proposée, que la seconde donne les deux termes de la première fraction convergente que la troisième série donne les termes de la seconde fraction convergente et ainsi de suite. Les nombres placés au-dessus des termes de ces séries sont, comme l’on voit, les dénominateurs de la fraction continue, écrits par ordre à commencer du dernier, ou de l’avant-dernier, ou du second avant le dernier, etc.
31. Nous avons considéré le Problème de la réduction des fractions à d’autres plus simples, d’une manière générale, et nous avons dérivé d’un même principe la théorie des fractions décimales, considérée dans un système quelconque de numération ; la théorie d’une autre espèce de fractions peu connues, que feu Lambert a, je crois, proposées le premier, et qui ont l’avantage singulier de former des suites plus convergentes qu’aucune série géométrique ; enfin la théorie des fractions continues, qui avait toujours été traitée jusqu’ici d’une manière isolée. Le seul objet de cet écrit a été de montrer comment ces différentes théories pouvaient être rapprochées et présentées sous un même point de vue.