Acadie/Tome II/11

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Texte établi par Henri d’Arles, J.-A. K.-Laflamme (Tome 2p. 223-242).

CHAPITRE VINGT-DEUXIÈME



Lawrence devient Lieutenant Gouverneur. — Ses accusations contre les Acadiens. — Projet d’expulsion. — Les Lords du Commerce.


Nous nous sommes proposé, dans cet ouvrage, de relater de ])référence les faits défavorables aux Acadiens, — que ces faits soient réels ou supposés, — tels que nous les trouvons au volume des Archives. Telle a été notre méthode jusqu’ici, et telle elle sera. €e volume ayant été compilé dans le but évident d’en faire un arsenal de pièces écrasantes pour la mémoire de nos pères, l’on peut être sûr que l’essentiel en cette matière s’y rencontre, souvent à l’exclusion de ce qui pourrait le détruire ou l’atténuer[1].

La lettre suivante de Lawrence aux Lords du Commerce, sous la date du 1er  août 1754, est bien celle qui renferme les accusations les plus graves contre les Acadiens. Nous la reproduisons presque en entier, malgré sa longueur[2] :

« … Il m’est très agréable de voir la justesse du point de vue auquel se placent vos Seigneuries à l’égard des habitants Français ; car tout changement dans les affaires de ces derniers pourrait avoir les plus hautes conséquences pour l’avenir de cette province. Ces Français sont depuis longtemps l’objet de ma plus sérieuse attention ; et comme, dans l’exercice de mes fonctions, je me suis trouvé fréquemment en contact avec eux, j’ai donc pu me former de leur caractère et de leur situation une opinion que je prends la liberté d’exposer à vos Seigneuries ; je me permettrai d’y ajouter des suggestions au sujet des mesures qui me semblent les plus pratiques et les plus efficaces pour mettre fin aux multiples inconvénients qui ont résulté pour nous, depuis des années, de leur entêtement, de leurs tricheries, de leur partialité envers leurs compatriotes, de leur ingratitude en retour des grâces, des bontés et de la protection, qu’ils ont, en toute occasion, si largement reçues de la part du gouvernement de Sa Majesté.

« Vos Seigneuries savent pertinemment que les Acadiens ont toujours affecté la neutralité ; et comme l’on s’imaginait communément ici que la douceur du gouvernement anglais finirait par les attacher à nos intérêts, l’on n’a jamais usé à leur endroit de procédés violents. Mais il est de mon devoir de vous faire remarquer que cette bénignité n’a jamais produit le moindre bon effet ; tout au contraire, je crois que les Acadiens ont, à l’heure qu’il est, renoncé à la pensée de prêter le serment volontairement ; et un grand nombre d’entre eux sont présentement à Beauséjour, où ils travaillent pour le compte des Français à faire des digues dans cet établissement, dont je vous avais déjà signalé la création, sur le côté nord de la baie de Fundy : ces gens sont allés là, nonobstant le refus des passeports qu’ils avaient demandés. À l’excuse alléguée par eux qu’ils ne pouvaient trouver d’emploi chez les Anglais, ou leur fit savoir que tous ceux qui viendraient à Halifax y auraient du travail ; en réalité, je n’avais pas d’emploi à leur donner, mais je leur proposai de leur faire élargir le chemin qui mène vers Chibenaccadie (sic). Car je savais que si je pouvais réussir à les attirer ici, une bonne fois, leur voyage à Beauséjour serait à l’eau ; et il n’en eut pas résulté de frais pour le gouvernement, dans la certitude où j’étais qu’ils refuseraient d’accomplir le travail en question, par crainte de désobliger les Indiens. Comme ils ne se rendirent pas à mon appel, j’ai, avec l’assentiment du conseil, lancé une Proclamation leur commandant de retourner immédiatement sur leurs terres, sinon, qu’ils en subiraient les conséquences.

« Depuis longtemps, ils n’ont rien apporté à nos marchés ; d’autre part, ils ont fait tenir aux Français et aux Indiens toutes sortes de choses, ils les ont aidés de toutes façons en secours matériels et autres[3]. Tant qu’ils resteront sans prêter serment à Sa Majesté, (et ils ne le prêteront pas tant qu’ils n’y seront pas forcés,) et tant qu’ils auront parmi eux des prêtres français qui les poussent à la révolte[4]nous pouvons certes renoncer à tout espoir de les voir s’amender. Comme ils possèdent les terres les meilleures et les plus larges de la Province, la colonisation ne peut pas avancer ici tant qu’ils demeureront dans une pareille situation. Et, bien que je sois très éloigné de vouloir adopter cette mesure sans avoir l’approbation de vos Seigneuries, cependant, ma ferme opinion est que, si les Acadiens refusent de prêter serment, il vaudrait mieux alors qu’ils fussent partis[5] … »

Pourquoi donc ce changement de ton chez Lawrence, lorsque, quelques semaines auparavant, il invitait les Acadiens émigrés à rentrer dans le pays ? La raison en est bien simple, c’est que, ainsi que d’ailleurs son langage le laisse voir assez clairement, il venait de décider dans son esprit la déportation[6]. Jusque-là, il n’avait été que Président du Conseil, en attendant le retour de Hopson. Mais il devait savoir déjà que ce dernier ne reviendrait pas, et que sa nomination au poste de Lieutenant-Gouverneur était assurée. Elle fût officielle, en effet, quelques semaines après[7].

Pour préparer les Lords du Commerce à ses perfides desseins, il lui fallait bien leur montrer la conduite des Acadiens sous les plus sombres couleurs : la lettre que nous venons de lire est le résultat de ses efforts en ce sens. Comme, dans ces derniers quatre ans, la correspondance des Gouverneurs et les actes officiels ne portaient pas trace de la plus légère infraction aux ordres de l’autorité, dans toute l’étendue de la péninsule, il lui fallait donc changer de ton. Les accusations générales contenues dans la lettre susdite n’ont pas d’autre motif que la nécessité où se trouvait Lawrence, pour arriver à ses fins honteuses, de les justifier à tout prix. Or, ces accusations sont fausses ou grandement exagérées.

Nous examinerons plus tard, un à un, les divers griefs que formulera ce personnage. Pour l’instant, nous répondrons à ceux qu’il vient d’exprimer. Il accuse les Acadiens d’avoir entretenu des relations avec les Français, et de les avoir assistés en leur vendant leurs produits. Pareille chose avait dû se produire, en effet, au temps de Mascarène, alors qu’il n’y avait qu’un fort situé à l’extrémité de la province, et que, pratiquement, il n’y avait rien qui pût gêner les allées et venues hors de la frontière. Un gouvernement n’a aucun droit de se plaindre d’infractions semblables, s’il ne prend les mesures requises pour les empêcher. L’expérience démontre que ces infractions se répéteront, à proportion des occasions qui en seront offertes et de la diminution des risques qu’elles entraîneront, et cela sans préjudice de la loyauté et des vertus ordinaires d’un peuple. Si loyal et si soumis qu’on le suppose, l’appât du gain sera bien fort sur lui, et, à moins de rencontrer des entraves, il y cédera. Les Acadiens eussent été d’une perfection transcendante à la nature humaine, s’ils n’avaient quelquefois profité d’une situation qui favorisait leurs affaires. D’ailleurs, Mascarène ne se plaignit pas de ces relations commerciales qui avaient lieu en temps de paix ; au contraire, dans une de ses lettres, il disait avec beaucoup de sagesse qu’il fallait fermer les yeux sur ce trafic, parce que la garnison d’Annapolis ne pouvait consommer tous les produits des habitants, et que, si l’on restreignait le commerce, on paralyserait inévitablement les travaux agricoles ; que, d’ailleurs, ce commerce était profitable à tout le monde, puisqu’il amenait dans le pays l’argent des Français, lequel sans cela s’en irait au Canada ou ailleurs[8]. Lorsque survînt la guerre, en 1744, les Acadiens, comme nous l’avons vu, soit à la suggestion du gouverneur, ou peut-être spontanément, formèrent une association ayant pour but d’empêcher toutes relations de cette nature. Ils se chargèrent eux-mêmes, et contre leurs compatriotes, de la police du gouvernement ; la guerre finie, ceux qui étaient soupçonnés d’avoir enfreint cette prohibition furent arrêtés sur plainte portée par les membres de la dite association. C’était autant, sinon plus, qu’on eût ]m raisonnablement attendre des plus loyaux sujets.

Depuis qu’Halifax était fondé, que des forts avaient été érigés à Grand-Pré, à Piziquid et à Beaubassin, les autorités anglaises se trouvaient en mesure d’empêcher les échanges commerciaux ou autres entre les Français et les Acadiens : et il faut que les infractions qui ont échappé à la vigilance du pouvoir, depuis ce moment, n’aient pas été bien nombreuses, puisque le volume des Archives n’en mentionne pas une seule de déférée à la justice. Lawrence, croyons-le bien, n’eût pas été lent à ordonner une enquête et à sévir contre les coupables. Et quand il y aurait eu des infractions sur ce point, l’on ne pouvait guère les considérer que comme des vétilles ordinaires à tous les temps, à tous les lieux et à tous les peuples, relevant tout au plus des tribunaux, et, en tout cas, indignes de figurer comme argument dans un drame comme celui de la déportation.

« Depuis longtemps, ils n’ont rien apporté à nos marchés, » écrivait perfidement Lawrence. Nous disons « perfidement », car c’était à la date du 1er  août qu’il écrivait ceci aux Lords du Commerce. Or, à cette saison, les produits de la récolte précédente devaient en effet, et depuis longtemps, être écoulés ou consommés, et ceux de la récolte courante étaient encore sur pied. Cette accusation n’avait probablement pas d’autre fondement que celui-là ; mais pour l’homme en quête d’arguments en vue d’atteindre son but à tout prix, elle pouvait figurer avec avantage. Les Lords du Commerce seraient bien habiles s’ils saisissaient tous ses points d’invraisemblance, car elle en avait plusieurs. On ne doit pas supposer, en effet, que les Acadiens allaient, un à un, vendre leurs produits à Halifax, dont ils étaient séparés par de longues distances, et auquel les reliait un chemin à peine passable pour les piétons. Les échanges devaient nécessairement se faire par l’intermédiaire des commerçants, et par eau. Or, à cette époque, tous ceux qui avaient des établissements de commerce dans les centres acadiens étaient des anglais : Blin, Winnieth, jr., à Annapolis ; Rogers, à Cobequid ; Arbuckle, à Fort Lawrence ; Wyson et Manger à Pigiguit et à Grand-Pré. Manger avait un autre établissement à Halifax, et nous croyons que Blin, Donnell et Winniett en avaient également soit à Grand-Pré, soit à Fort Lawrence[9]. Ce devait donc être à eux que les Acadiens vendaient leurs produits, et par eux que ce commerce se faisait. Et, comme, avec Lawrence, les plus petites choses prenaient facilement la proportion des grandes, et les remplaçaient même, au besoin, il a consigné dans les documents des faits comme le suivant : « Leur désir (les Acadiens) de vendre leur grain à M. Dyson, et leur refus de le céder à M. Mauger, au même prix, semble bien extraordinaire[10]. »

En réalité, alors que les documents publics ne contiennent pas, que nous sachions, un seul cas spécifié, imputé nommément, à un ou à plusieurs d’entre les Acadiens, de rapports commerciaux avec les Français, en revanche, ils en mentionnent un bon nombre qui se rapportent à des marchands anglais, notamment à Arbuckle, et à Mauger, que Lawrence paraît avoir pris sous sa protection[11]. Et, quant à des accusations générales, s’appliquant à des anglais, l’on en trouvera aux pages 630, 638, 646 du volume des Archives. De celles-ci, nous ne citerons qu’une seule. Écrivant aux Lords du Commerce, le 27 novembre 1750, Cornwallis disait : « … J’ai la certitude que les colons de la Nouvelle Angleterre ont cette année porté quantité de dollars à Louisbourg… ils fournissent à Louisbourg tout ce qui lui est nécessaire, et ils trouvent tant de profits à exercer ce trafic qu’ils préfèrent de beaucoup se rendre là que de venir dans ce port[12] »

Nous devrions demander pardon an lecteur de l’entretenir de ces puérilités, mais nous sommes forcé de les discuter avec un grand sérieux, car la déportation n’a pas eu d’autres motifs plus solides que ceux-là ; et, si elle est justifiable, elle doit pouvoir s’appuyer sur les accusations de son auteur.

Dans cette lettre que nous examinons, Lawrence ne parle encore que timidement de son projet de déportation, car c’est bien de cela qu’il s’agit, malgré tout le soin qu’il prend de voiler sa pensée. Il se contente de soumettre humblement son opinion que, si les Acadiens, qui possèdent les plus belles terres de la province, refusent de prêter le serment, il vaudrait mieux qu’ils fussent éloignés, it would be much better that they were away ; cependant, il se garderait bien d’entreprendre une tâche semblable sans l’approbation de leurs Excellences. N’en doutons pas, la déportation est déjà virtuellement décidée ; les moyens et la date seuls restent à fixer. Il ne s’agit plus, pour Lawrence, que de préparer les Lords du Commerce à une adhésion ante factum, s’il le peut, ou à l’acceptation du fait, une fois qu’il sera consommé, quitte pour lui à aggraver l’état des choses par de fausses représentations. La lettre susdite est donc une entrée en matière, un jalon dans la voie qu’il s’est tracée. Il n’espère pas, d’un seul coup, amener ses chefs à une mesure aussi cruelle que le serait la déportation ; aussi reste-t-il encore dans l’indéfini : il vaudrait mieux que les Acadiens fussent partis, fussent éloignés ; et c’est avec la plus humble déférence qu’il soumet sa volonté à la leur : je me garderais bien d’entreprendre une pareille tâche sans avoir l’approbation de vos Excellences. Pour l’instant, Lawrence n’a en vue que d’indisposer les Seigneurs du Commerce contre les Acadiens. En revenant habilement à la charge, il arrivera à ses fins ; à force de renouveler la dose de ses accusations et de ses insinuations, la transition se fera insensiblement entre sa manière de voir et la leur. D’ailleurs, n’a-t-il pas en mains tout pouvoir ? Ne lui sera-t-il pas possible, par des mesures de rigueur, de provoquer les Acadiens à des actes qui le justifieront, lui, d’user envers eux d’un redoublement de sévérité ?

La pensée, ou plutôt le fond de la pensée de Lawrence, lorsqu’il disait qu’il vaudrait mieux que les Acadiens fussent partis, ne pouvait certainement être de les laisser aller rejoindre les Français de Beauséjour, puisque, dans le même temps, il lançait une proclamation obligeant ceux qui venaient de s’éloigner à revenir aussitôt sous des peines sévères. Il connaissait les recommandations pressantes et réitérées faites à ses prédécesseurs par les Seigneurs du Commerce, et se souvenait de celles qu’il avait reçues des mêmes personnages, quelques mois auparavant, priant d’éviter tout ce qui pourrait, en alarmant les Acadiens, provoquer leur départ. Les conséquences d’un départ libre devaient lui paraître trop désastreuses, ou du moins trop menaçantes, pour qu’il y ait songé un instant. Non, il s’agissait bien d’un départ forcé, pour des endroits par lui choisis, c’est-à-dire d’une déportation telle qu’il l’exécuta douze mois plus tard.

Pour la période qui embrasse au moins les quatre dernières années, le seul acte d’insoumission réelle, de la part des Acadiens, que l’on relève dans le volume des Archives, se trouve mentionné en cette lettre de Lawrence. Trois cents d’entre eux, ainsi qu’il le dit, étaient allés à Beauséjour pour aider leurs compatriotes émigrés dans leurs travaux d’endiguement. Étaient-ils partis avec l’intention de ne plus revenir ! Il serait difficile de l’affirmer. Nous savons seulement, par Lawrence, qu’ils demandèrent la permission de partir, laquelle leur fut refusée. Il ne faut pas oublier que, cinq ans plus tôt, Cornwallis, à bout d’expédients, avait promis de donner, aussitôt que l’état du pays le permettrait, des passe-ports à tous ceux qui désireraient quitter la province. Si l’intention de ces trois cents Acadiens était de ne plus rentrer, il semble bien qu’ils avaient le droit de se prévaloir des promesses de Cornwallis, qu’elles eussent été sincères ou non, et de s’en aller, avec ou sans saufs-conduits. Si, au contraire, ces gens partaient avec l’intention de revenir, alors Lawrence pouvait être excusable de prendre contre eux les mesures convenables pour les obliger à réintégrer le territoire, et même les punir de cette désobéissance. Il est probable qu’un certain nombre d’entre eux partaient définitivement, et que les autres voulaient décider, Beauséjour même, s’ils reviendraient ou non. Les rigueurs croissantes, par lesquelles Lawrence signalait son administration, semaient déjà l’inquiétude parmi la population, et ce départ en était le résultat.

La saison propice aux travaux d’endiguement était très courte, et ces travaux étaient le premier effort sérieux pour procurer des terres à ceux qui avaient émigré au temps de Cornwallis. Ces réfugiés étaient des parents, des frères. L’on conçoit donc le désir que ressentaient les Acadiens, habitant de ce côté-ci de la frontière, d’aller aider leurs frères dans des travaux qui devaient les tirer de la misère et leur permettre de faire vivre leurs familles. Ceux qui venaient de se rendre à Beauséjour étaient exposés eux-mêmes d’un moment à l’autre à avoir à quitter la province, si le serment sans réserve était exigé. Ils seraient alors heureux, au cas où ils émigreraient pour de bon, de trouver des parents et des amis en état de les soulager à leur tour. L’assistance qu’ils venaient maintenant donner à leurs frères, ils pouvaient prévoir qu’elle leur serait rendue un jour, et peut-être bientôt.

Ils reçurent l’ordre de revenir sans tarder[13]. Nous avons lieu de croire que l’ordre fut promptement mis à exécution par ceux qui, étant partis avec l’intention de revenir, avaient laissé derrière eux leurs familles : sans quoi, les Archives feraient certainement mention de procédés de rigueur exercés envers les récalcitrants, leurs familles, leurs biens. Quand Lawrence donnait des ordres, il n’entendait pas badinage là-dessus, et les Acadiens ne le savaient que trop bien.

Nous croyons avoir établi que Lauwrence avait, dès lors, virtuellement décidé la déportation. La preuve, quoique déjà convaincante au point où elle en est, reste encore un peu vague. Un peu de patience est nécessaire pour suivre jusqu’au bout la chaîne de l’évidence, qui est fort longue. Toutefois, pas un anneau n’y manque,

La lettre de Lawrence, que nous venons de citer, n’est, à proprement parler, que la première maille, le chaînon initial de ces nombreux anneaux dont l’ensemble constitue ce Chapitre Perdu de l’Histoire. Notre preuve, forte par induction et par analyse, le sera également par des documents officiels ou incontestables[14].

— Cependant, avant d’aller plus loin, nous répondrons à une objection qui déjà se présente sans doute, à l’esprit du lecteur, à savoir : il est invraisemblable qu’un projet aussi inhumain que celui de la déportation ait pu être formé sans raison grave, c’est-à-dire par pure cruauté. Disons tout de suite que la déportation ne fut, dans la pensée de ses principaux auteurs, ni un acte qui pouvait se justifier, ni un acte de cruauté pure et simple, mais un moyen de s’enrichir avec le bétail et les terres des Acadiens. Et, sur ce point encore, nous espérons que, longtemps avant d’avoir atteint les dernières pages de cet ouvrage, le lecteur sera convaincu que nous ne faisons pas ici de la fantaisie historique. Nous anticiperons quelque peu sur les événements pour donner la réponse des Lords du Commerce à la lettre insidieuse de Lawrence[15] :


« … Vous ayant fait part de nos appréhensions d’une guerre de la part des Sauvages, et vous ayant indiqué d’une façon générale les mesures à prendre au cas où cet événement se produirait, cela nous amène à réfléchir à ce que vous nous dites concernant l’état de la province dans ses rapports avec les habitants français : la présence de ces derniers, de concert avec les hostilités commises par les Indiens, — voilà l’obstacle qui jusqu’ici a entravé la colonisation du pays ; et vous remarquez à bon droit que cet obstacle subsistera tant que les Français posséderont des places fortes et des établissements à Beauséjour, à Baie Verte et à St -Jean. Et encore que nous ne puissions pas nous former un jugement ni émettre une opinion définitive, au sujet des mesures qu’il pourra être nécessaire d’adopter à l’égard de ces habitants, avant que nous n’ayons soumis le cas, dans toute sa plénitude, à Sa Majesté, et reçu ses directions en l’espèce, cependant, il peut n’être pas inutile d’indiquer une ligne de conduite provisoire à tenir en la matière, jusqu’à ce que le bon plaisir de Sa Majesté nous soit connu.

« Nous espérions que la bonté que l’on avait montrée à cette population, en lui accordant le libre exercice de sa religion et la tranquille possession de ses terres, aurait pour effet de gagner graduellement son amitié et ses grâces et de la détacher de son affection pour les Français ; mais nous sommes chagrins de constater au contraire que cette douceur de procédés a produit si peu de résultats, que ces gens ont toujours la même attitude à l’égard des Français et à notre égard, qu’ils avaient avant l’établissement de la province, à tel point qu’ils continuent de donner à leurs compatriotes travail et provisions, qu’ils s’entendent avec eux et nous cachent les desseins qu’ils foraient ensemble.

« La proclamation que vous avez lancée, pour rappeler les habitants des districts des Mines et de Piziquid qui étaient allés travailler aux digues que les Français sont à faire construire à Beau Séjour, et le plan que vous aviez conçu d’employer ces habitants à Halifax, nous paraissent être des mesures sensées et prudentes ; et nous eussions été heureux d’apprendre que ces mesures avaient eu l’effet désiré ; mais, dans l’état actuel de la province, l’on ne pouvait guère s’attendre à ce qu’il en pût être ainsi.

« Il est certain que, par le traité d’Utrecht, le fait pour eux de devenir sujets britanniques (et nous estimons qu’ils ne le peuvent devenir qu’en prêtant le serment qui est requis des sujets) est basé sur la condition expresse de leur séjour après une année écoulée ; et par conséquent, et c’est là une question bien digne d’attention, — nous pouvons nous demander jusqu’à quel point ils peuvent être traités comme sujets sans avoir prêté le dit serment, et si le refus par eux de le prêter ne constituerait pas une raison suffisante pour invalider leurs titres de propriété ; cette question, cependant, nous ne pouvons prendre sur nous de la trancher radicalement, mais nous souhaiterions de vous voir consulter là-dessus le juge-en-chef, et prendre son avis, — lequel pourrait servir de base à toute mesure que l’on croirait sage d’appliquer dans l’avenir à tous les habitants en général.

« Quant à ceux du district de Chignecto, {Beaubassin), qui sont actuellement chez les Français de Beauséjour, si le juge-en-chef était d’avis qu’en refusant de prendre le serment sans réserve, ou en désertant leurs établissements pour se joindre aux Français, ils avaient perdu leurs droits de propriété, nous souhaiterions que des mesures convenables fussent prises pour faire mettre à exécution et sanctionner par la loi cette perte de leurs titres, de façon que vous soyez mis à même de concéder leurs terres aux personnes désireuses de s’y établir ; car si, dans l’état présent des choses, un établissement pouvait se fonder là, il serait d’une grande utilité ; et, comme M. Shirley, dans une lettre au comte fax, a laissé entendre qu’il était probable que l’on put avoir un nombre considérable de colons de Nouvelle Angleterre prêta à aller se fixer dans ces régions, vous feriez bien de le consulter là-dessus. Mais il nous semble que toute idée d’implanter une colonie britannique en cet endroit serait absurde, à moins de supposer que les forts français de Beauséjour, Baie Verte, etc., ont été détruits, les Indiens délogés de leurs campements, et les Français forcés de se réfugier, comme dans un dernier asile, dans l’île du cap Breton, à St-Jean et au Canada[16]. »


Lawrence avait dû s’attendre à quelque chose de plus : son but, semer des préjugés dans l’esprit des Lords du Commerce, les indisposer contre les Acadiens, était atteint tout de même ; mais il avait pu espérer que leur réponse renfermerait quelque déclaration qui l’avancerait plus sensiblement vers l’objet qu’il avait en vue. Au lieu de cela, sa proie. position, « il vaudrait mieux qu’ils fussent partis », — était référée à Sa Majesté, ou plutôt éludée. Les Lords ne pouvaient, en convenance, exprimer leurs doutes au sujet des accusations portées par Lawrence ; mais la différence entre son langage et celui de Hopson, à si court intervalle, dût les frapper, et le ton de leur lettre semble l’indiquer. Dans tout cela, ils ne se départent pas de leur calme ni de leur sagesse habituelle. Ils paraissent craindre, de la part du gouverneur, des mesures arbitraires ; ils l’engagent à procéder régulièrement ; à consulter le juge-en-chef sur l’effet d’un refus du serment quant à la validité des titres de propriétés de ceux qui résident dans la province, et même de ceux qui l’ont quittée. Pour ces derniers, si le juge-en-chef est d’opinion que leur départ a entraîné la perte de leurs droits, il faudra prendre contre eux des mesures légales de confiscation.

Nous avons, dans cette lettre, un modèle de toutes celles qui furent adressées aux gouverneurs de l’Acadie. Nous n’avons recherché que la vérité historique, distribuant l’éloge ou le blâme, sans nous demander qui pouvait en profiter ou en souffrir. Cependant, comme il nous est toujours plus agréable d’avoir à louer, nous sommes heureux de reconnaître que les Lords du Commerce ne se départirent jamais gravement[17] de cette conduite sage et réservée, ou si rarement[18] que, dans l’ensemble, si nous tenons compte des circonstances, de la pression exercée, des fausses représentations mises en œuvre, leur attitude échappe à tout blâme sévère[19]. Nous ne doutons pas un instant que leur manière d’agir envers les Acadiens, sur la question du serment, n’eût été tout autre, s’ils eussent été au fait des circonstances que nous avons racontées, concernant les empêchements mis au départ de ces derniers par Nicholson, Vetch, Armstrong et Philipps. Ces empêchements ne sont jamais, et pour cause, mentionnés dans les lettres de ces gouverneurs : ceux-ci, en effet, n’eussent pu en parler sans se condamner eux-mêmes. Pour porter un jugement équitable sur la conduite des Lords du Commerce, il ne faut pas perdre de vue ce fait important.

Cette lettre semble prouver, en outre, que lorsque Cornwallis mettait les Acadiens devant la cruelle alternative de prêter serment, ou de partir sans rien emporter de leurs biens mobiliers, il devait outrepasser ses pouvoirs, puisque nous voyons ici que les Lords du Commerce entretenaient des doutes même sur les droits du gouvernement à confisquer les immeubles de ceux qui avaient choisi l’alternative de quitter la province.



  1. Cette dernière phrase, qui se trouve pourtant bien dans le MS. original, — fol. 435, — ne figure pas dans la traduction anglaise, Cf. vol. I, p. 355.
  2. Cf. Akins, N. S. D. P. 212-3-4. Extract from a letter of Gov. Lawrence to Lords of Trade. Halifax, August 1st 1754. Le paragraphe par lequel s’ouvre cet extrait de lettre est extrêmement important. Richard en avait d’abord cité une partie, qu’il biffa ensuite — MS. original — fol. 436 — ; nous le donnons en entier. Cf. Can. Arch. (1894). 256. B. T. N. S. vol. 15. D’après la copie de cette lettre qui est aux Archives, l’on voit que Lawrence commençait par remercier les Lords de l’approbation qu’ils lui avaient donnée ; il répondait à la lettre que ceux-ci lui avaient envoyée, sous la date du 4 avril, et dans laquelle, entr’autre choses, il y avait ceci : « Ils (les Lords) regrettent d’apprendre les disputes qu’il y a parmi les Acadiens ; le seul titre de propriété que ces derniers peuvent avoir sur leurs terres dépend de leur prestation du serment d’allégeance. Difficulté de recourir à une action judiciaire pour le règlement de leurs difficultés. Danger qu’il y a de les voir partir et aller renforcer les établissements français. » — Les Lords sont tellement contents de l’administration de Lawrence, en particulier de son attitude dans l’affaire des colons de Lunenburg, ils endossent tellement ses vues sur tous les points qu’ils finissent par lui dire qu’ils l’ont « proposé au poste de Lieutenant-Gouverneur, avec le salaire que cette fonction comporte ». Ibid. B. T. N. S vol. 36, p. 15.

    N’est-il pas évident que les Lords du Commerce ne reconnaissent aux Acadiens aucun status légal ni aucun droit de propriété foncière, tant qu’ils n’auront pas prêté serment d’allégeance absolue ? Nous avons cité longuement, dans notre précédent chapitre, cette lettre des Lords, du 4 avril 1754. Il était bon d’en rappeler les points essentiels.

  3. Le texte anglais porte : whom they have always assisted with provisions, quarters, and intelligence, — ce qui est intraduisible littéralement.
  4. And have incendiary French Priest among them.
  5. And tho’I would be very for from attempting such a step without your Lordship’s approbation, yet I cannot help being of opinion that it would be very much better, if they refuse the oaths, that they were away.
  6. Voici une réflexion qui a sa place toute marquée ici : « … dans la vie en société qui est presque toute dominée et mue par la parole, les hommes ont commencé de rendre possible un événement, fût-ce un crime, dès la minute où ils en ont énoncé l’idée. »

    M. Henri Vaugeois, dans ce chef-d’œuvre Enquête sur la Monarchie. de M. Charles Maurras. P. 175. (Paris, Nouv. Libr, Nation. — 1916.)

  7. Cf. Can. Arch. (1894) Aug. 6. 1754. Whitehall. Lords of Trade to the King. « Transmit proposed commission to Lawrence, to be Lieut.-Governor of Nova Scotia. » B. T. N. S, vol. 36. P. 53 « Commission follows. » P. 54. « The order passed the same day. H. 248. B. T. N. S. vol. 15. Ibid. October 14. Halifax. Lawrence to Lords of Trade. « His commission as Lieut.-Governor received.  » H. 263. B. T. N. S. vol. 15. — À cet endroit, le MS. original — fol 438 — porte la note suivante, au bas de la page :

    "Philip H. Smith, qui dans son ouvrage — Acadia — A lost Chapter in American History — fait preuve de tant d’impartialité et de pénétration, dit de cette lettre (de Lawrence) et des suivantes : «  The reader cannot fail to note the change in the tone of the letter sent to the Home Government relative to the French Neutrals. Lawrence proved himself the sort of ruler that was needed to carry out the harsh measure of the déportation ». (Preliminary to Expulsion. P. 175.) Et ici, une réflexion s’impose : Si vraiment la déportation n’avait pas été voulue, ou du moins volontairement et sciemment consentie par les autorités de la métropole, et par le Roi lui-même, comment expliquer que l’on eût confié le poste de lieutenant gouverneur, c’est-à-dire en fait le commandement suprême à ce Lawrence, dont les lettres faisaient assez voir pourtant que c’était là l’idée fixe, — déporter les Acadiens ? Pourquoi, si l’on ne partageait pas ses vues, ne pas briser dans la main de cet homme un pouvoir dont on prévoyait qu’il allait abuser ? Ou du moins, pourquoi ne lui a-t-on pas signifié carrément que sa nomination n’impliquait pas approbation de sa politique sur ce point essentiel, mais qu’au contraire on ne lui accordait une plus grande autorité que pour qu’il procédât avec plus de prudence et de justice ? — Or, les documents officiels ne contiennent rien de pareil. Bien loin de là. Car, au fur et à mesure que Lawrence développe et mûrit son plan fatal, il monte en grade, et c’est-à-dire qu’on l’élève dans la hiérarchie, et qu’on le met mieux en mesure d’exécuter ce qu’il a conçu. Et quand le crime aura été perpétré, et la race acadienne semée aux quatre vents de l’exil, ]’auteur de ce forfait sera nommé Gouverneur de la Province.

    Je le demande à tout homme de sens : s’il n’y a pas eu complicité entre Lawrence et le gouvernement de la Métropole, la « carrière » de cet homme demeure une énigme. Est-ce de la sorte que procèdent les grands pouvoirs à l’égard des instruments qui les compromettent ou les déshonorent, ou qui outrepassent leur mandat ? A-t-on jamais eu l’habitude, en aucun pays du monde, de combler d’honneur l’ambassadeur ou le représentant qui est infidèle à sa mission, on s’arroge des droits qui vont à l’encontre de l’autorité qui l’a délégué ? Surtout quand ces abus de pouvoir auront eu pour effet de fouler aux pieds les lois de l’humanité ?

  8. Cf. N. 8. D. Akins. P. 114. et les divers chapitres de notre tome premier qui traitent de l’administration de Mascarène.
  9. « Alain, Nicolas Gauthier, Joseph LeBis avaient fermé leurs établissements pendant la guerre ; et nous ne croyons pas qu’à cette époque il restât un seul marchand acadien dans toute la péninsule. » — Note du MS. original — fol. 445.
  10. « Their desiring to sell their grain to Mr. Dysou and refusing it to Mr. Mauger for the same money appears very extraordinary. » Explanations of the Corn Act so far as relates to the French Inhabitants. — Commission and order Book of 1754. P. 53. Sec. part. Cf. Akins. N. S. D. P. 220.
  11. « Mauger devint membre de la chambre des Communes en 1763. Murdoch mentionne comme faisant affaires à Ivouisourg avec les Français : W. Blin, Barber, S. Butler, Jenkins, Breed, Lord, Turner, Clarke, Aubin, Green, Dyke, tous de la Nouvelle Angleterre. » " Note du MS. original, — fol. 445. — Sur Mauger, cf. note au bas de la page 646 de Akins. — Murdoch. vol. II ch. XV.
  12. Nova Scotia Doc. Akins. P. 630.
  13. « At a council… on fryday (sic) the 21st day of June 1754… The Président also acquainted the council that notwithstanding the French inhabitants of Annapolis, Minas and Piziquid had been refused liberty to go and work for the French who have established themselves at Beaubassin, yet many of the said inhabitants had presumed to go there to the number of three or four hundred… The Council having taken the same into mature considération, did advice that « proclamation should be forthwith issued, ordering the said inhabitants to return, as they shall answer the contrary at their péril, and that the deputies should be ordered to report the names of all those who were gone to BeauSéjour to work as aforesaid. »

    Chas. Lawrence.

    {N. S. Doc. — Akins, p. 212. — Murdoch, vol. I, ch. XVII, p. 238.)

  14. Elle devra l’être bien davantage. Si probante que soit une induction, la preuve par le document authentique comporte une autorité autrement considérable : celle-ci ne se discute plus ; ce n’est pas une affaire de raisonnement, mais un témoignage matériel dont l’évidence s’impose. Aussi, aurions-nous préféré que l’auteur mît ici : « notre preuve, forte par induction et par analyse, va recevoir, des documents officiels, une telle confirmation qu’il ne sera pas permis de la rejeter. »
  15. Extract from a Letter of Lord of Trade & Plantations to Gov. Lawrence. Whitehall. Oct. 29 1754.— N. S. D. Akins. P. 235-6-7. — Can. Arch. (1894,) N. S : Oct. 29 1754. B. T. N. S. vol. 36. P. 59. — Nous donnons de cette lettre extrêmement importante, tout l’extrait qui se trouve dans Akins.
  16. Notre opinion, au sujet de cette lettre des Lords du Commerce, diffère radicalement du commentaire bienveillant que l’auteur d’Acadie va en donner ici. Pour nous, cette lettre est au moins aussi insidieuse que celle de Lawrence, à laquelle elle répondait ; le gouverneur n’a pas eu besoin de la lire entre les lignes pour découvrir qu’elle lui laissait le champ libre. Bien plus, elle contenait tout un programme qui s’harmonisait parfaitement avec toutes les intentions, toutes les arrière-pensées de Lauwrence, et qui même allait au delà, si possible. Ce personnage pouvait s’en féliciter. Ou nous sommes désespérément aveugle, ou il faut voir dans ce document non seulement une approbation des vues exprimées par ce personnage, mais encore une incitation à marcher de l’avant dans une politique qui allait aboutir à la déportation. Nous prions le lecteur d’en peser tous les termes, de la méditer. Il jugera ensuite si l’interprétation qu’en fait Richard en dégage le sens obvie et naturel, et si ce dernier a raison de nous la présenter comme une fin de non recevoir opposée au plan du gouverneur. Les Lords savaient bien ce qu’ils disaient quand ils referaient, pro forma, Lawrence au chief-justice. Ce juge-en-chef était Jonathan Belcher, nommé par eux à ce poste le 21 juin 1754. (Cf. Can. Arch. (1894) 21 June, Whitehall. Lords of Trade to the King. Send warrant appointing Belcher chief-justice. B. T. N. S. vol. 36. P. 51. — August 6. Whitehall. Lords of Trade to the Ring. « Transmit warrant, to appoint Jonathan Belelier, jr., one of he Council of Nova scotia. » B. T. N. S. vol. 36. P. 56.) — Ce Belcher était leur créature, il partait muni de leurs instructions, et la suite fera bien voir que Lawrence et lui s’entendront « comme larrons en foire » pour exécuter la déportation et se partager les dépouilles de leurs victimes. Jonathan Belcher était le second fils de Jonathan Belchcr, gouv. du Mass. Il prit ses diplômes à Harvard (Cambridge) et se destina au barreau. Il alla compléter ses études en Angleterre où il devînt membre de la société Middle Temple. Fut nommé en 1754 juge-en-chef de la Nouvelle-Écosse. Dès son entrée en fonctions, il insista auprès du gouvernement sur la nécessité de convoquer une assemblée de représentants, étant d’opinion que le gouverneur en conseil, de par la commission et les Instructions de sa charge, ne possédait pas l’autorité de passer des ordonnances pour lever des taxes. Les délibérations premières de la Législature, qui forment la base des statuts de la Nouvelle-Écosse, sont en œuvre. Belcher devint Président du Conseil et administra la Province, à la mort de Lawrence en 1760. Il mourût à Halifax en 1776. — C’est le 21 octobre 1754 que Jonahan Belcher prêta serment d’office comme juge-en-chef. (Cr. Murdoch, vol. 2, ch. XVIII, p. 250. Akina. P. 315. — Coll. of N. S. H. vol. XII, P. 31-34). Nous aurons l’occasion de revoir ce Jonathan Belcher.
  17. Cet adverbe, qui vient plus qu’à point, a été ajouté a pris coup, et entre les lignes, dans le MS. original, fol. 452. L’édition anglaise, vol. I, p. 366, porte : « the Lords of Trade hardly ever swerved from this wise and prudent course. » Un point, c’est tout. Une autre phrase commence, « If we take into account the circumstances of time and place, etc  » "., tandis que, dans l’original, la phrase se continue. Ce sont là autant de nuances sensibles dans la pensée.
  18. Après si rarement, le MS. portait : et si peu, qui a été biffé.
  19. Dans le M S. — fol. 453, — après « fausses représentations mises en œuvre », il y a : nous pouvons déclarer leur conduite à l’abri de tout blâme sévère, « et souvent digne d’éloges ». — Ce dernier membre de phrase a été biffé. Le texte anglais le porte cependant : « their conduct certainly deserves no severe censure and is often praiseworthy. »