Andler - Nietzsche, sa vie et sa pensée, I/Préface

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Bossard (I. Les Précurseurs de Nietzschep. 7-18).


PRÉFACE



Un livre sur Nietzsche commence légitimement par faire leur part aux précurseurs du nietzschéanisme. On ne peut comprendre la pensée de Nietzsche si l’on n’est familier d’abord avec la culture intellectuelle où elle s’alimente.

Nietzsche s’est fait gloire de tout ce qu’il a su apprendre. Choisir des maîtres, ç’a été pour lui un art de se donner à lui-même des aïeux. Il a dit avec orgueil :

Quand je parle de Platon, de Pascal, de Spinoza et de Gœthe, je sais que leur sang coule dans mes veines.

Il a souvent dressé l’arbre généalogique de la lignée dont il se prétendait l’héritier. Il n’a jamais voulu admettre la distinction établie par Michel-Ange entre l’art d’apprendre et le don naturel :

Qu’appelez vous don naturel, s’écriait-il, si ce n’est un fragment plus ancien d’apprentissage, une expérience, un dressage, une assimilation qui se sont faits peut-être à l’époque de nos pères, ou plus anciennement encore ?… Et puis, apprendre n’est-ce pas se donner à soi-même des dons naturels[1] ?

Règle de vie qu’on retrouverait toute pareille chez Gœthe à qui Nietzsche l’emprunte et en qui il l’a tant admirée. Les passages lui sont présents des Conversations avec Eckermann et des Maximes et réflexions où Gœthe vieillard multiplie les libations reconnaissantes à tous les devanciers où, il a puisé sa sagesse[2] :

Ce qui est original en nous, ajoutait Cœthe, se conserve et reprend vigueur surtout si nous ne perdons pas de vue nos grands ancêtres. Ce n’est pas seulement ce qui est né avec nous, mais ce que nous savons acquérir, qui nous appartient et fait partie intégrante de notre substance[3].

C’est donc déjà décrire Nietzsche que de décrire son ascendance spirituelle. Quand il n’aurait fait que renouveler l’expression de la pensée acquise dans la plus puissante mélodie qu’on ait entendue en prose allemande, il y aurait déjà nécessité à faire le relevé de tous les thèmes empruntés et variés par lui. Mais il y a plus. Ces voix connues que nous percevons en entrant sous l’ombrage bruissant des écrits de Nietzsche, ce sont les voix de ses guides. Il les a suivies, comme Sigfrid suit l’oiseau-prophète de la forêt. Il a été conduit par elles, par leurs conseils de prudence, d’audace et d’espérance jusqu’à l’endroit où, à son tour, il devait rencontrer l’ennemi, dont le fer de lance porte gravées les runes de la coutume, de la loi » de toutes les traditions vieilles. Son épée serait-elle forgée de morceaux anciens, seul, il avait le secret d’en faire une arme nouvelle. Et s’il a été mené par ces voix conductrices jusqu’au carrefour fatal, il lui a fallu abattre seul l’adversaire prédestiné. C’est là son œuvre propre, sa prouesse sans modèle :

Ohne Geheiss, — aus eigner Not, — mit der eignen Wehr, — die Tat, die nie ein Rat ihm riet[4].

Et il faudra savoir si, par-delà ce carrefour, il a su éveiller une Vérité qui n’avait jamais ouvert les yeux.

La philosophie de Nietzsche est construite comme s’il y avait eu dans tout le passé humain trois plans naturels et étagés que la pensée a gravis l’un après l’autre, et qu’il faut dépasser pour en atteindre un quatrième, d’un immense coup d’aile. Ces trois états de la pensée ne constituent pas une philosophie de l’histoire. Ils naissent du mouvement de la réflexion, qui ne dispose que d’une seule démarche pour arriver à la cohérence : c’est d’ébranler par le doute les croyances coutumières qui font le premier contenu du savoir, de la moralité et de la religion des hommes, et formulent leur première notion sur leurs relations entre eux et avec le monde ; puis, par une analyse sans cesse élargie, de chercher entre ces fragments dissociés une cohésion nouvelle qui s’appelle la raison.

Cette démarche de la pensée a été découverte par les philosophes grecs. Les premiers, ils se sont avisés que ces mots primitifs qui résument notre savoir, notre moralité, notre religion, n’ont qu’un contenu, qui est l’usage, mêlé sans doute aux constatations expérimentales les plus anciennes. Ils ont soumis ces usages divers à un examen de dissociation qui est une immortelle leçon de critique. Puis, de la houle montante du doute, ils ont cru voir surgir, rayonnante comme Aphrodite, la Raison dont la seule apparition nous éblouit d’évidence.

Cette naissance de la Raison est toute l’histoire de la pensée grecque, mais le rythme de cette pensée fascine et meut la pensée humaine jusqu’à nos jours. La philosophie de Nietzsche nait de cette généralisation, que lui suggère une interprétation nouvelle de la vie et de la philosophie grecques.

Tous les peuples, en effet, s’en fient d’abord à la coutume pour reconnaître le vrai. Les croyances transmises sont une sorte de faits, plus résistants que les faits matériels, puisque personne n’ose y toucher. Loin que le doute s’y attache, ce sont elles qui guident les hommes dans toutes les incertitudes. Elles fournissent des désignations familières pour résumer et interpréter tout ce qui a été expérimenté. Elles prescrivent des règles minutieuses de conduite dans la famille, dans la tribu, dans la cité. Elles définissent les influences mystérieuses qui peuplent l’univers, et les rites par lesquels on s’en préserve. Ce premier plan de la pensée est le plan coutumier et prélogique.

Il n’y a pas de bonne raison pour amener les hommes à quitter cette façon coutumière de penser, en dehors du plus urgent besoin. Les sociétés vivent de préférence sur leurs idées les plus vieilles, éprouvées qu’elles sont par la durée et par un caractère sacré qui les immobilise. L’expérience pourtant, par ses cruelles leçons, les ébranle. Elle fournit un savoir nouveau. Le contact avec les hommes du dehors fait connaître d’autres normes morales. Un peuple s’est trouvé, le peuple grec, et, dans ce peuple, une cité surtout, Athènes, où le développement des institutions politiques et la pratique judiciaire ont créé tout un art de la discussion. On y connaissait trop de coutumes variées, trop de règles diverses du droit et de l’obligation, trop de cultes pour s’en tenir à une coutume unique. On apprit à faire un choix ; et le choix suppose le doute. On rapprocha les pensées diverses, éloignées jusque-là ; et le choc les brisa.

La sophistique grecque fut le premier effort agressif de la pensée pour se frayer un chemin jusqu’au réel à travers tous les préjugés de la tradition. Gorgias et Protagoras doutent du témoignage des sens. Hippias conteste le droit coutumier. Prodicus soupçonne que le divin n’est qu’un nom de l’utilité collective. Par ces philosophes, l’esprit humain s’élève à ce nouveau plan de la pensée, le scepticisme, où, la réflexion se meut toute pure, dans une liberté qui n’accepte plus aucune loi du dehors et ne cherche sa loi qu’en elle-même[5].

C’est assez dire que toute sophistique est provisoire. Toute discussion suppose accordés implicitement entre ceux qui discutent des principes communs au nom desquels on juge. Pas de victoire dans la joute des pensées, s’il n’y a pas d’arbitre ; et cet arbitre ne peut être que la raison. En chaque objet dont on dispute, il y a donc une essence rationnelle définissable ; et, quand elle est définie, la dispute se tait. La dialectique devient, avec Socrate et Platon, une méthode qui mène aux idées pures. Elle découvre en quelle mesure toutes choses participent à ces idées. Elle établit entre ces idées une hiérarchie qui, au-dessus de tous les dieux vulgaires, place un Dieu plus grand, l’idée du Bien.

Mais nous, qui connaissons ces idées immuables, n’est-il pas évident que nous prenons par à leur immutabilité ? Il y a donc, comme l’avaient enseigné les mystères orphiques, une région immatérielle où vivent les idées et les âmes, et d’où nos âmes sont descendues sans l’avoir oubliée. À ce seul souvenir, nous sommes encore saisis d’une émotion enivrante. La pensée humaine, depuis Platon, a pris pied dans le plan du rationalisme, c’est-à-dire dans une contrée où elle aperçoit ce qui est plus durable que toute donnée sensible.

La première énigme déchiffrée par Nietzsche fut ce rythme de toute la pensée humaine révolue. Son ambition fut de remettre en branle, pour une œuvre nouvelle, cet effort immense d’analyse et de reconstruction. Le grand rival contre lequel lutte Nietzsche et qu’il prétend dépasser, c’est Platon. Ce qu’il veut fonder, c’est un platonisme nouveau exempt des tares qui, depuis Platon, ont vicié toute philosophie.




Le second secret de Nietzsche fut de découvrir que si tout le travail intellectuel du passé, après avoir dissocié les coutumes, avait toujours abouti à un rationalisme idéaliste, chacune de ces philosophies nouvelles, quand elle descendait dans le peuple, devenait à son tour préjugé opaque et paralysante coutume. C’est là un fait général de régression dont Nietzsche se flatte d’avoir été le premier observateur.

Combien de fois cette pétrification des idées a-t-elle eu lieu ? Tous les ouvrages de Nietzsche décriront cette histoire, et le Wille zur Macht la résume. Ça été un platonisme tardif, que le christianisme, établi par la négation passionnée de la morale, de la cité et des dieux antiques, approfondi par le mysticisme médiéval, systématisé par la scolastique aristotélicienne. Pourtant cette croyance, qui avait paru d’abord toute lumière et vie, extase et raison, n’a-t-elle pas trainé durant des siècles l’existence exsangue de ses dogmes desséchés ?

Platonisme encore, la philosophie moderne, éclose depuis Giordano Bruno, et la civilisation rationaliste qui la traduit. Elle a exigé un grand travail à la fois de scepticisme scientifique et immoraliste, les grandes découvertes maritimes, la cosmographie et les mathématiques nouvelles, toute une explosion sanglante de passions privées, civiles et religieuses d’abord en Italie. Puis la reconstruction se fit dans le rationalisme de Descartes, et par le style sévère de la vie et de l’art sous Louis XIV.

Mais ce rationalisme ne s’était-il pas figé à son tour dans les formes oppressives de l’État absolutiste, du catholicisme restauré, d’un luthéranisme qui défit tout l’acquis de la Renaissance ? N’a-t-il pas fallu un siècle de critique, la satire de Voltaire, le phénoménisme d’Hume, l’exégèse négative de Reimarus, la révolte passionnée du Sturm und Drang, le retour à l’antiquité, et, par dessus tout, le renouvellement de la Révolution française ? Un grand souffle platonicien passa, saisissant tous les arts, renouvelant la conduite de l’homme, fondant un cosmopolitisme républicain plus grand par son ambition que tous les rêves platoniciens de réforme panhellénique.

Platonisme enfin, la philosophie romantique. Elle acheva la critique du rationalisme. Elle prétendit, par Fichte, par Novalis, par Schleiermacher, atteindre sous l’écorce glacée des concepts le ruissellement intérieur qui se perçoit au fond de la conscience, et qui est notre personnalité vraie. Elle découvrit la vie mentale des collectivités. Car les grands faits sociaux, le langage, les coutumes morales, le droit, la religion, les formes d’art, qu’aucun individu n’invente, d’où naîtraient-ils, si ce n’est d’une Psyché sociale où plongent nos âmes pour y puiser leur vie ? Et ne faut-il pas dès lors, comme le croyait le Timée, aller jusqu’à admettre une « âme du monde » où se meuvent à la fois les âmes individuelles et les âmes des collectivités ? Ainsi la philosophie d’un Crenzer ou d’un Gœrres croyait avoir retrouvé l’enseignement du plus ancien sacerdoce oriental, celui des Perses ou des Égyptiens, par qui Pythagore et Platon sans doute avaient été initiés.

Mais, comme la régression luthérienne et absolutiste avait ramené un Moyen-Age mutilé, la régression contemporaine avait ramené un mauvais xviiie siècle. La philosophie des lumières ne put échapper au destin de descendre dans la vulgarité ; et nous baignons avec hébétude, selon Nietzsche, dans un faux déterminisme scientifique, dans un faux historisme, dans un humanitarisme débilitant. L’effort de Nietzsche fut de sauver d’abord la culture platonicienne des classiques et des romantiques. Il espéra qu’une Renaissance surgirait d’un Gœthéisme ravivé et approfondi par Schopenhauer et Richard Wagner.

Sa première déception fut de voir que Gœthe ne pouvant convenir au préjugé populaire, déjà Schopenhauer et Wagner s’y accommodaient trop. Alors, pour redresser la tradition classique et romantique gauchissante, il fit appel à la grande lignée des sceptiques français de la morale qui, de Montaigne à Stendhal, avaient cherché la vie sous la convention factice. Un grand historien suisse, Jacob Burckhardt, la prolongeait ; et de la jeune philosophie des États-Unis avec Emerson. se levait le mirage d’un romantisme vierge, épuré par le scepticisme de Montaigne.

Arrivé à pied d’œuvre, avec tous ceux-là, Nietzsche les congédie, non par ingratitude, mais avec mélancolie. Car il lui reste à accomplir seul sa tâche propre et qui est, dans sa pensée, de fonder la première philosophie contemporaine. Résolu à défricher le sol à jamais de tout foisonnement de platonisme, il en extirpe notamment la souche la plus souterraine et résistante, la croyance chrétienne. Sous les préjugés figés de la religion, de la morale, de la politique, de métaphysique, il prétend retrouver le secret de la vie naturelle et sociale. C’est un cri du cœur chez lui que cet aphorisme :

Les hommes dogmatiques, tels que Dante et Platon, sont ceux que je sens de tous les plus éloignés de moi : Et peut-être ont-ils par là plus d’attrait pour moi que les autres[6].

Ces dogmatiques s’abritent dans de factices et fragiles constructions d’idées qu’ils croient éternelles. Nietzsche prétend nous enseigner à vivre dans le réel mouvant. Il conçoit un phénoménisme idéaliste nouveau, qui retracera le contour exact et le serpentement de la vie, sans lui assigner de direction, mais en lui donnant un sens déposé en elle par notre jugement et par notre émotion.

Nietzsche a abordé sa tâche avec une humilité orgueilleuse, avec une joie extatique et angoissée. Il a parcouru l’histoire entière des philosophies, des littératures, des sciences, des croyances, des civilisations. L’historien de sa pensée est tenu de relire après lui les livres qu’il a lus[7] ; et comment n’être pas saisi de désespoir parfois devant l’étendue de cette recherche et devant la variété de savoir qu’elle exige ?

Le présent volume introductif ne veut pas dénombrer tous les matériaux dont Nietzsche a tiré parti. Sa biographie intellectuelle précisera l’heure où il les utilise et les litiges où il est engagé contre les hommes. Il faut distinguer entre les renseignements qu’il prend de toutes mains pour s’instruire, et les pensées qui lui servent de principe constructif. Les premiers sont utiles à le mieux connaître ; les secondes seules le font comprendre. Le nietzschéanisme se préparait par une longue incubation dans l’esprit de ses devanciers. On va décrire ici comment le système, avant d’être né, vivait en des esprits dont la pensée a passé en Nietzsche comme par une transfusion de sang spirituel.

Description pleine de risques ; car ces chantantes voix des pensées étrangères, dont il a fait son concert intérieur, se font entendre à tour de rôle : elles s’entremêlent, se taisent et reprennent. J’ai essayé de marquer ces recommencements, ces silences, ces simultanéités. De là le plan de ce volume. Il a fallu parler de Montaigne, de Pascal, de La Rochefoucauld, de Chamfort, longtemps après avoir parlé des Allemands du xviiie et du xixe siècles. L’influence de Burckhardt et d’Emerson se perçoit très tard, quand déjà la voix des moralistes français s’est fondue dans la grande orchestration générale du système.

Pour abréger cette étude, on a compté sur l’expérience et le sentiment vivant du lecteur. De certains thèmes, empruntés aux auteurs les plus grands, à Gœthe ou à Schiller, il a paru suffisant de les indiquer en accords brefs, pour les faire aussitôt reconnaître. Ailleurs, il a fallu une analyse plus minutieuse. Cette trame de « filigrane d’or », qui, selon le plus grand des Nietzsche-forscher, Carl-Albrecht Bernoulli, rattache Nietzsche à la pensée française, je l’ai suivie avec plaisir parce qu’elle n’avait jamais été mise à nu. Et si, dans ce volume, comme dans ceux qui suivront, j’insiste sur l’ « helvétisation » de Nietzsche, c’est que, avouée par lui, elle m’a paru plus profonde qu’on ne l’a jamais décrite.

J’ai cru faire œuvre d’historien sans être atteint de la « maladie historique ». Nietzsche n’avait-il pas appelé d’un vœu puissant l’époque où son autorité grandissante le ferait commenter comme un classique ? Or ces temps sont venus.

Les événements ont retardé de six années la publication de ce livre. Il commençait de s’imprimer au moment où se livrait sur la Marne en 1914, la bataille qui, plus sûrement que Valmy, a ouvert une ère nouvelle. Une grande prévision de Nietzsche s’est réalisée dans ce mois de septembre tragique et libérateur.

Nietzsche pleurait sur la folie d’une Europe « qui versait à flots le sang européen, comme les Grecs versaient à flots le sang grec, sacrifiant presque toujours les hommes de la culture la plus haute »[8]. Il savait la responsabilité allemande dans le danger permanent qui, par la militarisation généralisée de l’Europe, pesait sur l’humanité ; et la provocante devise de « l’Allemagne au-dessus de tout », il l’avait déclarée « le moi de ralliement le plus dénué de sens qu’il y ait jamais eu au monde »[9].

C’est pourquoi ce livre est dédié à la mémoire des jeunes germanisants français devant qui il a été médité. Ils ont, en donnant leur vie pour leur pays, sauvé cette civilisation européenne où ils avaient toujours cru que l’Allemagne de Gœthe, de Beethoven et de Nietzsche saurait retrouver sa place[10].

  1. Nietzsche, Morgenröthe, § 540 (W., IV, p. 346).
  2. Goethe, Gespräche mit Eckermann, 12 mai 1825 ; 16 décembre 1828. Geschichte der Farbenlehre. Ed. du Centenaire, 1905, t. XL, p. 143 ; Maximen und Reflexionen. Ibid., t. XXXIX, p. 110.
  3. Maximen. Ibid., t. XXXVIII. p. 278.
  4. Richard Wagner, Die Walküre, acte I, sc. 2 (Ges. Schriften, VI, p. 41).
  5. Cette pensée de Nietzsche sur les sophistes n’est fixée qu’à l’époque du Wille zur Macht, § 429 (W., XV, p. 457). Dans son premier enseignement, Nietzsche, par malheur, a suivi l’interprétation de Grote, pour lequel les sophistes représentent la culture intellectuelle régulière et orthodoxe des Athéniens, tandis que Socrate et Platon auraient été les révoltés. On verra plus tard comment ce changement d’attitude a modifié aussi la pensée de Nietzsche sur Socrate.
  6. Nietzsche, Fragments posthumes de 1882-1883 (W., XIII, p. 55).
  7. La besogne est facilitée non seulement par les citations qui abondent dans les œuvres et dans la correspondance de Nietzsche, mais par deux modestes et très utiles instruments : 1o Le catalogue de la Bibliothèque de Nietzsche, conservé au Nietzsche-Archiv de Weimar, et publié par Mme Foerster-Nietzsche sous le titre de Friedrich Nietzsches Bibliothek dans Bücher und Wege zu Büchern, par Arthur Berthold, 1900 ; — 2o La liste des livres empruntés par Nietzsche à la Bibliothèque de Bâle (1869-1879), publiée par M. Albert Lévy, professeur à l’Université de Strasbourg, en appendice à sa thèse complémentaire sur Stirner et Nietzsche, 1904.
  8. Nietzsche, Menschliches, Allzumenschliches, I, § 442 (W., II, p. 328).
  9. Fragments posthumes de 1882-1888, § 867 (W., XIII, p. 350).
  10. Nous citons Nietzsche d’après la grande édition des Gesammelte Werke in-8o, parue chez Naumann, à Leipzig, en dix-neuf volumes (1899-1913) et dont la pagination coïncide avec l’édition in-12o (1899-1904), à laquelle manquent toutefois les trois volumes des Philologica. J’ai cité la pagination en la faisant précéder de la sigle W. Chacune de mes références renvoie cependant d’abord aux numéros des paragraphes, afin d’être vérifiable aussi dans la Taschenausgabe en onze volumes (1910-1913), et dans toutes les traductions étrangères.