Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 13/Géométrie des courbes et surfaces, article 2

La bibliothèque libre.

QUESTIONS RÉSOLUES.

Rectification de l’énoncé du problème de géométrie
proposé à la page
 321 du XII.e volume des Annales
et traité à la page
 115 du présent volume,
et solution complète de ce problème ;

Par M. W. H. Talbot.
≈≈≈≈≈≈≈≈≈
Extrait d’une lettre au Rédacteur des Annales.
 
 

Lorsque je vous parlai, Monsieur, à mon passage à Montpellier, d’une courbe qui résolvait, à la fois, le problème de la trisection de l’angle et celui de la duplication du cube, si j’eusse prévu que vous en proposeriez la recherche à vos lecteurs, j’aurais tâché de mieux m’en rappeler les propriétés caractéristiques. Ma mémoire m’a évidemment mal servi. M. Pagani Michel a complètement raison en tous points ; et je demande bien sincèrement pardon à tous et à lui de mon inadvertance. Je vais tâcher de la réparer de mon mieux, en consignant ici le véritable énoncé du problème et en montrant quelle est la courbe qui le résout.

Le problème doit être énoncé comme il suit :

PROBLÈME. Un axe fixe et un pôle fixe sur la direction de cet axe étant donnés sur un plan, quelle est la courbe qui jouit de cette double propriété ? 1.o que son rayon vecteur est constamment proportionnel au cube de la perpendiculaire abaissée du pôle sur la direction de la tangente à son extrémité, 2.o que l’angle de ce rayon vecteur avec l’axe est constamment triple de celui que fait la perpendiculaire avec la même droite.

Le problème est encore ici plus que déterminé, comme dans le premier énoncé, et chacune des deux conditions suffit à elle seule pour faire obtenir l’équation différentielle de la courbe dont il s’agit ; mais ces conditions ne sont plus incompatibles ; et elles se trouvent l’une et l’autre satisfaites par la courbe enveloppe de l’espace parcouru par l’un des côtés d’un angle droit dont le sommet décrit une hyperbole équilatère, tandis que son autre côté passe constamment par le centre de la courbe.

Soit en effet un des points de cette enveloppe, rapportée aux axes de l’hyperbole, dont nous supposons la longueur commune et soit le point correspondant de cette dernière courbe ; nous aurons d’abord

(1)

De plus, la droite qui joindra nos deux points, tangente à la courbe cherchée au point aura pour équation

(2)

Enfin, il faudra exprimer que le point demeure le même lorsque le point varie infiniment peu, en parcourant l’hyperbole, ce qui donnera

d’où on conclura, par élimination,

(3)

L’équation de la courbe cherchée sera donc le résultat de l’élimination de et entre les équations (1, 2, 3).

Pour y procéder commodément, et développer, chemin faisant, les propriétés de cette courbe qui font le sujet du problème, éliminons d’abord, tour-à-tour, et entre les équations (2, 3) ; en ayant égard à l’équation (1), on aura ainsi

En divisant ces deux équations l’une par l’autre, on a

(5)

Or en désignant par l’origine ou pôle, par la direction de l’axe des par le point de la courbe cherchée et par le point correspondant de l’hyperbole on aura

au moyen de quoi l’équation (5) deviendra

donc, en premier lieu, l’angle est constamment triple de l’angle comme l’exige la question.

En prenant la somme des quarrés des mêmes équation (4), on trouve

(6)

ou encore

mais

donc

ainsi les cubes des perpendiculaires sur les tangentes sont constamment proportionnels aux rayons vecteurs des points de contact.

Sans aller donc plus avant, nous voilà assurés que notre courbe remplit à la fois les deux conditions du problème.

En supposant donc la courbe tracée, et désignant par le point où elle coupe l’axe lequel point est un sommet commun à cette courbe et à l’hyperbole, si l’on veut 1.o résoudre le problème de la trisection de l’angle, on mènera un rayon vecteur faisant avec l’axe un angle égal à l’angle donné et se terminant à la courbe en abaissant ensuite la perpendiculaire sur la tangente en ce point, l’angle sera l’angle cherché, tiers de l’angle donné

2.o Veut-on résoudre le problème de la duplication du cube ? du point comme centre, et d’un rayon égal à l’arête de cube donné, on décrira un cercle. On mènera à ce cercle et à la courbe une tangente commune touchant cette dernière en On cherchera ensuite un point de la même courbe, tel qu’on ait et menant la tangente en ce nouveau point la perpendiculaire sur sa direction, cette perpendiculaire sera l’arête du cube cherché, double en volume de celui dont l’arête est

On voit au surplus, par cette construction, qu’il serait tout aussi facile de trouver un cube dont le volume fût au volume de celui dont l’arête est dans tel rapport on voudrait. Il ne s’agirait en effet, pour cela, que de faire varier le rapport de à Poursuivons présentement la recherche de l’équation de notre courbe. L’équation (6) donne

en rapprochant de celle-ci l’équation (1) qui est

et prenant successivement leur somme et leur différence, on aura

retranchant successivement la seconde du triple de la première et le triple de la seconde de la première, il viendra, en divisant par

ces deux dernières, divisées l’une par l’autre, donnent

(9)

et les équations (7), divisées anssi l’une par l’autre, donnent, par l’extraction de la racine carrée,

(10)

mais l’équation (5) peut être mise sons cette forme

substituant donc les valeurs (9, 10), nous aurons finalement pour l’équation de la courbe cherchée

équation qui est exactement l’équation (2) de M. Pagani Michel (pag. 119) en y changeant simplement en Il est donc certain que la dernière des conditions du problème emporte aussi la première.

Cette courbe, dont l’équation polaire peut être amenée à la forme très-simple

jouit de plusieurs autres propriétés géométriques et mécaniques fort curieuses. Si j’en trouve le loisir, j’en ferai, Monsieur, le sujet d’un petit mémoire que j’aurai l’honneur de vous adresser[1].

Agréez, etc.

Florence, le 11 octobre 1822.

  1. Nous croyons devoir rappeler, à cette occasion, qu’une parabole, accompagnée de sa développée, jouit également de la propriété de pouvoir résoudre à la fois le problème de la duplication du cube et celui de la trisection de l’angle (Annales, tom. IX, pag. 204, et tom. X, pag. 242).
    J. D. G.