Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 13/Géométrie des courbes et surfaces, article 1

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Solution du problème de géométrie proposé à la pag. 321
du XII.e volume des Annales ;

Par M. Pagani Michel, ingénieur à Genève.
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PROBLÈME. On demande l’équation d’une courbe telle que, si de l’origine on mène un rayon vecteur quelconque et une perpendiculaire à la tangente à son extrémité, 1.o le cube construit sur le rayon vecteur soit double en volume du cube construit sur la perpendiculaire à la tangente ; 2.o que l’angle formé par la perpendiculaire avec l’axe des soit le tiers de l’angle formé par le rayon vecteur avec la même droite ?

Solution. Ce problème est évidemment un problème plus que déterminé, non pas de ceux qui renferment seulement quelques conditions superflues, mais bien de ceux dans lesquels les conditions sont incompatibles. Soient, en effet, l’origine, la direction de l’axe des un quelconque des points de la courbe cherchée, et le pied de la perpendiculaire abaissée de sur la tangente en ce point. Puisque le rapport du cube de à celui de est donné, le rapport de ces deux droites est aussi donné ; le triangle rectangle est donc donné d’espèce ; l’angle de ce triangle est donc donné ; mais cet angle doit être les deux tiers de et le double de donc ces derniers sont aussi donnés ; donc les directions et sont tout-à-fait fixes et déterminées ; donc tous les points de la courbe cherchée devraient être sur la droite cette courbe devrait donc se confondre avec cette droite, ce qui est impossible, puisqu’alors ses tangentes ne pourraient être perpendiculaires à la direction

On ne peut donc résoudre le problème qu’en faisant tour-à-tour abstraction de chacune des deux conditions ; et c’est aussi ce que nous allons faire successivement ; nous montrerons ensuite que les deux courbes obtenues sont essentiellement différentes.

I. Nous venons de voir qu’en exigeant seulement que le cube construit sur soit le double du cube construit sur l’angle est tout-à-fait déterminé ; l’angle l’est donc aussi ; la question revient donc alors simplement à trouver une courbe dans laquelle les rayons vecteurs fassent un angle constant avec la tangente à leur extrémité.

Soit la tangente tabulaire de cet angle, et soit fait, suivant l’usage, l’angle que fait avec l’axe des étant \frac{y}{x}, nous devrons avoir

ou

équation dont l’intégrale est

C’est l’équation d’une spirale logarithmique, comme l’on pouvait bien s’y attendre[1].

Dans le cas particulier qui nous occupe, on a

mais

donc

de sorte que l’équation de la courbe sera

(1)

est une constante arbitraire.

II. Supposons, en second lieu, qu’on ne veuille avoir égard qu’à la seconde condition seulement ; il faudra qu’on ait

d’où

mais on a,

donc

cette équation donne d’abord la solution particulière mais il est clair qu’elle ne saurait convenir à la question qui nous occupe.

En éliminant entre dite et sa différentielle, il vient, toutes réductions faites

ce qui donne, en intégrant,

étant la constante arbitraire. Mais nous avons

ce qui donne, en multipliant,

prenant donc la somme des quarrés des valeurs de et il viendra, en réduisant,

d’où

ce qui donne

substituant cette valeur dans l’équation

et changeant la constante en il vient

(2)

III. En passant, pour plus de simplicité, aux coordonnées polaires, les équations (1 et 2) deviennent

(1)

(2)

étant le rayon vecteur et l’angle qu’il fait avec l’axe des

On voit, à cause des constantes arbitraires et qu’il y a une infinité de courbes qui résolvent le premier des deux problèmes, sans résoudre le second, et une infinité de courbes qui résolvent le second sans résoudre le premier.

Afin donc que le problème pût être résolu tel qu’il a été proposé, il faudrait que dans les deux séries de courbes il se trouvât une ou plusieurs courbes communes ; c’est-à-dire, qu’il faudrait que, par une détermination convenable des constantes et on pût amener les équations (1 et 2) à être identiquement les mêmes : or, c’est une chose évidemment impossible, puisque la première de ces équations est toujours transcendante quel que soit et la seconde toujours algébrique quel que soit Le problème, tel qu’il a été proposé, ne saurait donc être résolu, comme nous l’avons d’ailleurs déjà prouvé dès le début.

Genève, le 4 juin 1822.

  1. Voyez la page 136 du VIII.e volume du présent recueil.