Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 14/Analise transcendante, article 6

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Solution du problème d’analise transcendante énoncé
à la page
 128 du présent volume, suivie de la
démonstration d’un théorème nouveau ;

Par M. Roche, capitaine d’artillerie de la marine,
ancien élève de l’école polytechnique.
≈≈≈≈≈≈≈≈≈

PROBLÈME. Quelle est la forme la plus générale des équations différentielles qui admettent une intégrale de la forme

dans laquelle et représentent des fonctions déterminées quelconques de la constante arbitraire  ?

Solution. En supposant tour à tour l’équation intégrale résolue par rapport à et on obtiendra des valeurs de cette forme

et seront des fonctions déterminées de et respectivement. En différentiant ces deux équations, et représentant, à l’ordinaire, par le coefficient différentiel de et par et les dérivées respectives de et on trouvera

équations qui, résolues, la première par rappoxt à et l’autre par rapport à donneront

et seront également des fonctions déterminées de et par suite

Mais et étant des fonctions déterminées de sont aussi fonctions l’une de l’autre, c’est-à-dire, qu’il doit exister entre elles une relation déterminée. En supposant donc cette relation exprimée par l’équation

et substituant, on obtiendra, pour l’équation différentielle demandée

(I)

Mais il est essentiel de remarquer que les fonctions et ne sauraient être indépendantes ; et rien n’est plus facile que d’assigner la relation qui doit exister entre elles. Si, en effet, on différentie les valeurs de et trouvées ci-dessus, on aura

et étant les dérivées respectives de et or, ces deux équations, divisées l’une par l’autre, donnent

ouc’est-à-dire,(II)

relation qu’on peut encore mettre sous cette forme

ou, en intégrant par parties,

[1]

Soit, par exemple, l’équation

dans laquelle on suppose

étant la constante arbitraire. En différentiant cette équation, il viendra

En mettant dans la proposée et sa différentielle pour et leurs valeurs en et éliminant ensuite entre les deux équations résultantes, on aura, toutes réductions faites,

équation qui peut être mise sous cette forme

et qui rentre ainsi dans la formule (I). De plus, on a ici

d’où

ce qui vérifie la relation (II).

Au moyen de ce qui précède, on peut aisément démontrer le théorème suivant :

THÉORÈME. Toute équation différentielle de la forme

qui admet une solution particulière, par là même, une intégrale de la forme

dans laquelle et sont des fonctions d’une même constante arbitraire.

Et réciproquement toute équation différentielle de la première forme, dont l’intégrale est de la seconde, admet par là même une solution particulière.

Démonstration. En effet, 1.o on sait que, pour obtenir la solution particulière d’une équation telle que

il faut ; après l’avoir différentiée, égaler séparément à zéro et le multiplicateur de et la partie qui en est indépendante. Or, si l’on désigne respectivement par et les dérivées du premier membre de cette équation, prises par rapport aux deux binômes considérés comme deux variables, sa différentielle sera

afin donc que cette équation admette une solution particulière, il faudra qu’on ait séparément

équations entre lesquelles éliminant le rapport de à on obtiendra

ouc’est-à-dire,

qui est précisément la relation (II), nécessaire pour que l’équation admette une intégrale de la forme

ce qui démontre déjà la première partie de la proposition.

2.o Réciproquement, soit

l’intégrale d’une équation différentielle, dans laquelle on suppose que et sont des fonctions d’une même constante pour avoir la solution particulière de son équation différentielle, il faudra, comme l’on sait, éliminer la constante entre cette équation et sa dérivée par rapport à cette lettre ; mais, en représentant par et les dérivées de son premier membre, prises par rapport à considérés comme deux variables la dérivée dont il s’agit sera

Si, au contraire, on différence la proposée par rapport à et on aura

d’où il suit que la différentielle de sa solution particulière sera le résultat de l’élimination de entre ces deux dernières. Or, on a vu par le problème précédent que cette différentielle était

avec la condition

or, en différentiant de nouveau l’équation différentielle obtenue, on parvient, comme nous l’avons déjà vu, à un résultat de la forme

or, si l’on substitue, dans cette dernière équation, pour sa valeur et pour sa valeur on obtiendra

équation qui peut être satisfaite en posant

ou

ce qui revient à dire que la différentielle

en y considérant comme une constante, est égale à zéro, ce qui est précisément le caractère des solutions particulières ; mais l’équation est aussi satisfaite en posant

d’où

ce qui donne, en intégrant,

équations dans lesquelles sont les constantes arbitraires, et qui donnent, par l’élimination de

Corollaire. Il résulte de là un moyen facile de ramener l’intégration d’une équation différentielle, dans laquelle ou est donnée en fonction de lorsqu’elle ne peut être résolue par rapport à cette lettre, à l’intégration d’une fonction d’une seule variable, jointe à l’élimination.

Soit, en effet, l’équation proposée

sera une fonction de et conséquemment de de sorte que l’intégration de cette équation donnera un résultat de la forme

dans lequel sera la constante arbitraire. En différentiant ces deux équations et éliminant entre leurs différentielles on obtiendra comme ci-dessus, l’équation de condition

et la fonction sera donnée par l’intégration de la fonction

Si, au contraire, l’équation proposée est

en posant

la fonction serait donnée, à l’inverse, par l’intégration de la fonction

Dans l’un et dans l’autre cas, les fonctions et étant connues, l’élimination de entre les deux équations

conduira à l’intégrale cherchée.[2]

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  1. Ce résultat avait déjà été obtenu par M. Woisard ; dans un mémoire qu’à raison de l’abondance des matières nous avons été contraint d’abréger en le publiant.
    J. D. G.
  2. M. Woisard, professeur aux écoles d’artillerie à Metz, a aussi donné une solution du problème qui, pour le fond, ne diffère pas de celle qu’on vient de lire.
    J. D. G.