Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 14/Géométrie transcendante, article 1

La bibliothèque libre.

Séparateur

Démonstration de deux théorèmes de géométrie,
énoncés à la page
 248 du XIII.e volume des Annales ;

Par M. Ch. Sturm
≈≈≈≈≈≈≈≈≈

THÉORÈMES. Soit une lemniscate, lieu géométrique des pieds des perpendiculaires abaissées du centre d’une hyperbole équilatère dont les diamètres principaux sont égaux à sur les tangentes à la courbe. Sur l’axe transverse de cette hyperbole comme grand axe soit décrite une ellipse dont le petit axe soit égal à la distance entre ses foyers.

Désignons par l’excès fini de l’asymptote infinie de l’hyperbole, comptée du centre, sur le quart infini de cette courbe, c’est-à-dire, sur la moitié de l’une de ses branches, comptée de son sommet. Soient en outre le quart du périmètre de la lemniscate et le quart du périmètre de l’ellipse ; on aura

1.o 2.o

Démonstration. En représentant par et les deux demi-diamètres principaux d’une hyperbole, son équation est

(1)

l’équation de sa tangente en un point pris sur la courbe, est

(2)

équation dans laquelle et sont liées par la condition

(3)

L’équation de la perpendiculaire menée du centre sur cette tangente est

(4)

Son pied étant donné par le système des équations (2, 4), lesquelles et sont liées par la relation (3) ; il s’ensuit qu’en éliminant entre ces trois équations, l’équation résultante en et sera celle du lieu des pieds de toutes les perpendiculaires menées du centre de la courbe sur ces tangentes.

Or, on tire des équations (2 et 4)

valeurs qui, substituées dans l’équation (3), donnent pour celle du lieu cherché

c’est l’équation générale de la lemniscate.

Pour passer à son équation polaire, nous poserons

et cette équation polaire sera ainsi

Quant à l’hyperbole, en appelant son rayon vecteur répondant à l’angle son équation deviendra

Mais, dans le cas particulier qui nous occupe, et où il s’agit d’une hyperbole équilatère, on a en sorte que l’équation polaire de l’hyperbole devient simplement

(5)

et celle de la lemniscate

(6)

d’où résulte, entre les longueurs des rayons vecteurs correspondant des deux courbes l’équation de relation

On peut déduire de ces équations une construction simultanée des deux courbes.

Sur le demi-axe transverse (fig. 6) soit décrite une circonférence, à laquelle soit menée la tangente . Soient menées arbitrairement, par le centre, les deux droites faisant des angles égaux avec , et coupant le cercle en et . Soit pris l’arc , et soit portée la corde de en . Soit élevée à la perpendiculaire rencontrant la circonférence en et soit menée , coupant en . Si alors du point comme centre commun, et avec et pour rayon, on décrit deux cercles concentriques, le plus grand coupera nos arbitraires en quatre points , qui appartiendront à l’hyperbole, et le plus petit coupera ces mêmes droites en quatre autres points , qui appartiendront à la lemniscate.

En effet, 1.o en abaissant la perpendiculaire sur le diamètre, on aura

ou bien

c’est-à-dire,

ou

On aura, 2.o 

c’est-à-dire,

Si l’hyperbole était déjà tracée, la construction de la lemniscate deviendrait beaucoup plus facile ; étant le point où cette hyperbole serait coupée par l’arbitraire l’arc décrit du point comme centre, déterminerait le point de la droite déterminerait le point de la circonférence ; et enfin l’arc décrit encore du point comme centre, déterminerait le point de la lemniscate.

On tire des équations (5, 6)

en observant que, pour la dernière courbe, le rayon vecteur décroît lorsque augmente. Mais on sait que étant l’arc d’une courbe dont le rayon vecteur fait un angle avec l’axe, on a

donc, en représentant respectivement par les arcs de nos deux courbes, nous aurons

les arcs étant comptés à partir du sommet de l’hyperbole. Mais, à cause de la relation trouvée ci-dessus, on peut exprimer en et il vient ainsi

Remarquons présentement que l’excès de l’asymptote de l’hyperbole sur le quart de cette courbe n’est autre chose que ce que devient l’excès ou du rayon vecteur sur l’arc correspondant, compté depuis le sommet, lorsque ce rayon vecteur devient infini, ou, ce qui revient au même, lorsque d’où il suit qu’on doit avoir

Or, en remarquant que on voit que la quantité qui précède le signe s’évanouit aux deux limites, de sorte qu’on a simplement

On aura de même, pour le quart de la lemniscate,

en intervertissant donc l’ordre des limites, on trouvera

Concevons présentement que, sur l’axe transverse de notre hyperbole, comme petit axe, on décrive une ellipse dont le grand axe soit en représentant par l’abscisse de la courbe répondant à l’ordonnée son équation sera

d’où on tirera

en conséquence, l’arc d’ellipse qui a pour expression sera

et, pour avoir le quart du périmètre de la courbe, il faudra prendre cette intégrale entre les limites et représentant donc cette longueur par on aura

et par suite

Mais, si l’on conçoit une ellipse qui ait l’axe transverse de l’hyperbole pour grand axe, et dont le petit axe soit égal à la distance entre ses foyers, son équation sera

elle sera donc semblable à la précédente, et le rapport de leurs lignes homologues sera celui de à en représentant donc par le quart du périmètre de cette nouvelle courbe, on aura

et, par suite,

ce qui démontre déjà la première partie du théorème.

Présentement, dans la théorie des intégrales définies de la forme donnée par Euler[1], on rencontre l’équation suivante

en faisant donc on obtiendra

donc

deuxième partie du théorème[2].

Genève, le 15 avril 1823.

  1. Voyez le Traité des différences et des séries de M. Lacroix, dernière édition, page 426. On parviendrait également au but à l’aide des formules de la page 430 du même ouvrage, en y faisant

    Le même résultat se présente aussi à la page 413 de ce traité ; mais il nous a paru que la démonstration n’était point exacte.

    On sait que

    du moins en supposant entier et positif. Si donc l’on pose étant supposé positif, auquel cas les limites de seront les mêmes que celles de on aura

    d’où, en posant il viendra

    mais il faut observer que n’est point ici un nombre tout-à-fait arbitraire, à cause de l’équation dans laquelle et sont nécessairement des nombres positifs, et où est un nombre entier. Si, par exemple, pour obtenir le produit

    on voulait faire et il s’ensuivrait ou ce qu’on ne peut admettre ; il faut donc chercher ce produit par une autre voie.

  2. M. H. W. T. à qui on doit ces deux singuliers théorèmes en a donné une démonstration qui ne diffère guère de celle qu’on vient de lire qu’en ce que, dans ses calculs, il substitue l’angle au rayon vecteur.
    J. D. G.