Astronomie populaire (Arago)/XXIX/01

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GIDE et J. BAUDRY (Tome 4p. 431-435).

CHAPITRE PREMIER

aspect de saturne — son mouvement par rapport au soleil


La planète Saturne a été connue de toute antiquité.

Saturne brille au firmament comme les étoiles de première grandeur. D’un éclat moyen, sa lumière ne présente jamais de traces de scintillation.

Le signe par lequel on le désigne, est l’image imparfaite d’une faux.

La lenteur du mouvement propre de cette planète à travers les constellations l’avait fait justement placer aux dernières limites de notre système, beaucoup plus loin que Mars et Jupiter.

Le nom qu’elle portait chez les Égyptiens signifiait apparent, expression dans laquelle on a prétendu voir une allusion à la propriété dont la planète jouit de se dégager plus rapidement des rayons du Soleil, à l’époque de ses conjonctions, que ne le font Mars et Jupiter. Mais il est douteux que cette dernière observation, liée à la lenteur du mouvement propre de Saturne, remonte à des temps aussi reculés que ceux où les peuples d’Égypte sentirent le besoin de désigner cette planète par un nom particulier.

Les Grecs donnaient aussi à Saturne le nom de Némésis, et ils y ajoutaient souvent l’épithète φαίνων, resplendissant. Quelques auteurs le désignent comme un soleil.

Les dénominations indiennes de cette planète sont ’sanaistchara, ’sani et ’sauri. Selon M. Bopp, le premier mot signifie qui se meut lentement, de ’sanais, lentement, et tschara, qui se meut. Le second mot signifie lent. ’Sauri est l’un des noms du dieu Wischnou.

Ce que nous aurons à dire du mouvement apparent de Saturne sera, à quelques modifications près dans les chiffres, la répétition presque textuelle des remarques que nous avons puisées dans les observations du déplacement de Jupiter.

Ainsi nous aurons à distinguer dans les positions de Saturne, comparées aux positions apparentes du Soleil, celles où la planète et l’astre radieux occupent à peu près la même région du ciel et passent tous les deux au méridien vers midi ; nous dirons alors que la planète est en conjonction. Le point de son orbite où Saturne est parvenu lorsqu’il passe au méridien à minuit, est celui qu’on nommera l’opposition. Les points situés à environ 90° du Soleil, époques où la planète passe au méridien à 6 heures du matin ou à 6 heures du soir, prendront le nom de quadratures.

Lorsque Saturne sortant de sa conjonction se lève quelque temps avant le Soleil, son mouvement rapporté aux étoiles est à son maximum et dirigé de l’occident à l’orient, ou direct. La distance des deux astres va néanmoins en augmentant, parce que le mouvement apparent du Soleil est plus considérable que le sien. Ensuite on voit ce mouvement se ralentir, puis s’arrêter pendant quelque temps : la planète alors stationnaire, et comparée à l’œil nu aux étoiles, pourrait être prise elle-même pour un de ces astres proprement dits.

À la station succède un mouvement rétrograde ou dirigé de l’orient à l’occident, dont le maximum a lieu le jour de l’opposition. Ce mouvement se ralentit ensuite jusqu’à une position où Saturne est de nouveau stationnaire.

Après la seconde station, la planète, toujours rapportée aux étoiles, reprend graduellement son mouvement direct jusqu’à la conjonction suivante, pour présenter l’année d’après la même série de phénomènes.

La planète devient stationnaire lorsqu’à l’orient ou à l’occident elle est distante du point d’opposition de 109°. L’arc de rétrogradation est d’environ et le temps employé par la planète à le parcourir est de 139 jours.

Le temps que met Saturne à parcourir tous les points de son orbite, à faire le tour entier du ciel, ou la durée de la révolution sidérale, est de 29 ans 5 mois 16 jours.

Le temps qui s’écoule entre deux conjonctions, ou la durée de la révolution synodique, est de 1 an 13 jours. Le mouvement direct de Saturne dure 239 jours, le mouvement rétrograde 139 jours.

Le mouvement de Saturne s’exécute dans une orbite elliptique dont le plan fait avec le plan de l’écliptique un angle de 2° 29′ 36″.

L’inclinaison de l’orbite de Saturne sur l’équateur terrestre est de 22° 38′ 44″.

Le périhélie, c’est-à-dire l’extrémité du grand axe de l’ellipse la plus voisine du Soleil, ne reste pas fixe dans le ciel : le grand axe a un mouvement direct en vertu duquel ce périhélie correspond successivement à différentes constellations.

L’excentricité de l’orbite de Saturne est de 0,056.

La distance moyenne de la planète au Soleil est de 9,539, la distance moyenne du Soleil à la Terre étant 1. La distance du périhélie est de 9,005, et celle de l’aphélie de 10,073.

La longitude du périhélie est de 89° 8′ 20″ ; celle du nœud ascendant, de 111° 56′ 7″ ; la longitude moyenne de l’époque (1er  janvier 1800) est de 123° 6′ 29″.

Ces éléments résultent, pour la plupart, des tables de Bouvard. Les autres sont des conséquences de la théorie des perturbations dont nous avons démontré la légitimité (liv. xxiii, chap. iv).

Saturne ne présente pas de phases sensibles, ce qui peut s’expliquer, sans lui supposer une lumière propre, par la distance considérable du Soleil à la planète. Des phénomènes dont nous parlerons dans le chapitre iii, prouveront que c’est au Soleil qu’il emprunte sa lumière.

Les quantités de chaleur et de lumière envoyées par le Soleil à la Terre étant 1, les quantités reçues à la surface de Saturne sont 0,011.

La masse de Saturne, rapportée à celle du Soleil prise pour unité, est de . Sa densité est de 1,09, celle de la Terre étant 1. La pesanteur à sa surface est 1,09, comparée à la pesanteur considérée à la surface de notre globe.