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Au Pays de Rennes/Canton Sud-Est de Rennes

La bibliothèque libre.
Hyacinthe Caillière (p. 146-163).


CANTON SUD-EST DE RENNES.


Notre seconde promenade s’effectuera dans le canton Sud-Est de Rennes par la route de Paris jusqu’à Cesson pour revenir par Chantepie et St-Hélier.

En pénétrant dans le faubourg de Paris, on aperçoit, tout d’abord, à droite, les splendides bâtiments de l’imprimerie Oberthur, l’une des plus importantes de France.

Plus loin, sur le haut du tertre de Joué, aspecté en plein midi, c’est l’asile départemental d’aliénés de Saint-Méen qui contient près de 800 malades.

En 1852, lorsque le département d’Ille-et-Vilaine devint propriétaire de l’asile Saint-Méen, cet établissement ne se composait encore que des vieilles constructions érigées par son fondateur Guillaume Régnier.

Ce dernier, en 1617, acquit au lieu dit Tertre de Joué, près Rennes, un corps de logis, une petite cour, une grange, deux étables, un four, un puits, une pièce de terre, nommée pièce de la Vigne, contenant deux journaux environ, y compris un petit jardin, un courtil nommé courtil du Puits, la pièce de terre du Mitan, nommée la pièce de Dessous-Joué, contenant trois journaux et demi, et un pré, nommé le pré de Joué, contenant deux journaux de terre environ.

Tous ces héritages, francs de rente, relevaient de l’abbaye de Saint-Georges, à l’exception du pré de Joué qui relevait de Cucé, mais aussi franc de rente.

Il transforma la propriété en asile où les pèlerins qui s’en allaient prier sur la tombe de Saint-Méen étaient assurés de trouver un gîte et quelques ressources pour leur permettre d’arriver au terme de leur voyage.

Il fit bâtir la chapelle en 1653 et fonda ainsi cet établissement.

Il légua l’asile au chapelain qui fut obligé de recevoir les pauvres passants, attaqués du mal Saint-Méen (la pellagre), pendant une nuit seulement et de leur distribuer à chacun pour deux liards de pain et une chopine de cidre ou la valeur d’un sol, le tout à volonté des malades.

Le nombre des passants qui s’arrêtaient au Tertre de Joué atteignit 1 200 la première année et bientôt dépassa 5 000.

Telle fut l’origine de cet établissement, qui plus tard reçut le nom de Petit Saint-Méen, à cause de son voisinage avec le Grand Saint-Méen et qui constitue aujourd’hui une partie de l’asile départemental des aliénés d’Ille-et-Vilaine.

Il servit successivement de refuge aux lépreux, aux vénériens, voire même aux condamnés.

Quand il devint propriété départementale, on l’appropria tant bien que mal aux besoins de sa nouvelle destination.

Des acquisitions de terrains considérables ont été faites, des constructions monumentales ont été édifiées et, aujourd’hui, l’asile d’aliénés de Rennes est devenu un des beaux établissements de ce genre.

Plus loin, dans le faubourg, c’est la Piltière, autre asile tenu par les Petites sœurs des Pauvres, où les vieillards indigents des deux sexes viennent se reposer des fatigues d’une vie laborieuse en attendant le grand voyage.


BOURG DE CESSON

Enfin, en continuant vers Cesson, la vue est distraite par les nombreuses campagnes qui apparaissent de chaque côté de la route, tantôt au milieu de bouquets d’arbres, tantôt au bout de longues et belles avenues de chênes.

Le pont de Cesson, le dimanche et les jours de fête, est un but de promenade pour les habitants de Rennes qui s’abattent dans les auberges et les restaurants comme des volées de friquets, pour aller ensuite rêver ou courir dans les buttes de Pincepoche ou pêcher à la ligne sur les bords sinueux de la Vilaine.

Le bourg lui-même, éclairé par un gai rayon de soleil, se présente bien avec sa minoterie et les nombreux canards nageant dans la rivière ou faisant la sieste sur les verts pâtis derrière le moulin.

La paroisse de Cesson est antérieure au XIIe siècle, puisqu’on sait qu’à cette époque les bénédictins de Saint-Melaine de Rennes possédaient l’église et le prieuré des Forges.

On sait également qu’un de ses seigneurs, Raoul de Cesson, accompagna en Palestine le duc de Bretagne Pierre de Dreux, et se distingua par le courage et la valeur qu’il déploya contre les Sarrasins dans les combats qui signalèrent la seconde croisade de Saint-Louis.

L’église de Cesson, des XVe et XVIe siècles, a une fenêtre flamboyante ainsi que des portes ornées de voussures retombant sur des colonnettes.

On voyait à l’entrée du bourg, il y a quelques années, deux maisons curieuses, à portes ogivales, ornementées de feuillages et d’animaux dans le style fleuri du XVe siècle. L’une d’elles appelée maison de l’hôpital, est sans doute le dernier débris de l’hôpital fondé jadis par les Seigneurs de Cucé, et qui existait encore en 1679.

L’une de ces maisons a été démolie.

Cesson possédait aussi les restes d’un vieux pont de pierre qui, il y a une trentaine d’années, était composé de six arches inégales, datant du XIIIe ou du XIVe siècle. On l’appelait le pont des Romains, probablement à cause des trouvailles qui furent faites dans ses environs, à diverses époques, telles que : monnaies romaines, statuettes en terre cuite de Vénus Anadyomène, fragments de poteries, etc.

Ce pont de pierre vient d’être détruit.

C’est aussi sur le territoire de Cesson que l’on découvrit, en 1851, un magnifique torquès gaulois, ceinture en or massif, travaillée en forme de spirale, et faisant aujourd’hui partie des collections du musée de Cluny.

En 1724, cette paroisse comptait, en outre du bourg, douze villages ou hameaux qui s’appelaient Couësmes, Moucon, Vaux, Calendrou, la Valette, Sévigné, Jussé, la Salmondiére, Forges, Hentiveul, la Menouriais et Bray.

Les archives du département du Morbihan nous apprennent que la métairie de la Salmonnière, en Cesson (ne serait-ce pas plutôt la Salmondière ?) appartint, au XVIe siècle à la Chartreuse d’Auray. Voici dans quelles circonstances :

La Chartreuse, on ne l’ignore pas, avait succédé à la Collégiale de Saint-Michel-du-Champ, fondée par Jean IV, duc de Bretagne, en reconnaissance de la victoire gagnée par lui sur Charles de Blois, à Auray, le 29 septembre 1364. Elle était composée, en 1482, d’un doyen et de huit chapelains, et en 1791, d’un prieur et de douze religieux.

Or, en 1580, Jean Louvel, reçu à profession, accorda à chacun de ses nouveaux frères, pour eux et leurs successeurs à perpétuité, en reconnaissance des prières qu’il leur demandait : « Une livre de bonne huille d’olive pour la salade qui sera chacun an distribuée le premier jour d’Avril, et deux journées de jardinier pour dresser leurs jardins lorsqu’ils requerront. » je veux en outre, ajoute-t-il : « Estre basty en notre jardin une galerie de six piedz de large, et une estude au bout, qui contienne en longueur douze piedz et huict en largeur, et au-dessoulz de la dicte estude, ung cabinet de mesme grandeur, et par mesme moien réparer toutes les incommoditéz ; de notre celle (cellule) ».

Pour fournir à ces diverses dépenses, Jean Louvel abandonna à la Chartreuse la métairie de la Salmonnière, en la paroisse de Cesson, près Rennes.

Le chemin vicinal qui conduit de Cesson à Chantepie traverse la ligne du chemin de fer de Rennes à Paris.

Après le passage à niveau, à l’Ouest, se trouvent les buttes de Pincepoche, avec leurs belles carrières de schiste, leurs profonds ravins, leurs grands sapins ombreux. Au printemps, les primevères et les violettes font de cette campagne un endroit délicieux.

Du côté opposé aux buttes, à gauche de la route, se dressent les grands arbres de la Moniais, ravissante propriété appartenant à M. du Boisdulier.

La Moniais a été créée au milieu de carrières abandonnées, maintenant transformées en pièces d’eau, en coulées verdoyantes, en sentiers sinueux, en rochers escarpés au milieu desquels croissent de splendides rhododendrons, et des pins superbes qui donnent à ces lieux un charme tout particulier. Le jour, ces bosquets sont remplis d’oiseaux, notamment de pics, de sitelles, de roitelets couronnés, et le soir les ramiers et les merles y viennent chercher un abri pour la nuit.

Au sud de la Moniais, on rencontre le village important de la Menouriais, dans lequel existent encore quelques vieilles maisons à portes ogivales. L’une d’elles — nous a assuré la bonne femme qui l’habite — servit jadis de demeure à des religieuses qui s’occupaient de l’instruction des enfants.

Le géologue qui, dans ces parages, regarderait à ses pieds, ne tarderait pas à découvrir de très joli grès avec joues de quartz, et même du grès porphyrique très remarquable.

Si nous revenons prendre le chemin de Chantepie, nous côtoyons bientôt une mare surmontée d’un lavoir en bois, aux trois quarts détruit. Cette flaque d’eau, couverte d’une épaisse couche de lentilles (que les savants appellent des Lemnacées), entourée d’arbres et de buissons, présente un joli paysage qu’un peintre de passage à Rennes, a su habilement reproduire.

Un jour que j’étais assis au bord de cette mare, regardant les rats d’eau courir dans les joncs, je fus interpellé de la manière suivante par une vieille femme qui filait sa quenouille en gardant sa vache :

− Vous aussi, vous l’avez vue et entendue, sans doute ?

− Qui cela, ma bonne femme ?

− La malheureuse qui, chaque nuit, vient ici laver son drap de lit.

− Non, ma foi, mais je serais heureux de connaître son histoire.

Alors la vieille se fit prier, car les paysans n’aiment pas à causer quand on les interroge. Mais je lui parlai d’elle, je la questionnai sur ses enfants, sur ses chagrins — nous en avons tous, hélas ! — et je revins sur l’histoire de la mare que je finis enfin par lui faire raconter.

− Elle n’est ni longue ni gaie, me dit-elle, ainsi que vous allez en juger.

Il y avait dans ma jeunesse au bourg de Chantepie, une vieille avaricieuse qui faisait tant travailler son pauvre homme et le nourrissait si mal, que le malheureux mourut à la peine.

Quand il fallut l’ensevelir, elle le mit elle-même dans le drap usé, troué et sale dans lequel le défunt avait succombé.

L’enterrement fut vite fait et la vieille rentra chez elle pour se remettre à filer, ne voulant pas perdre de temps. Son unique passion consistait à économiser sur sa mangeaille et ses hardes quelques pièces de monnaie qu’elle ramassait dans un bas caché dans la paillasse de son lit.

Un soir très tard, qu’elle filait à sa fenêtre, au clair de la lune, pour ne pas brûler sa rousine, elle se mit à trembler de tous ses membres en regardant dans le cimetière situé sous sa fenêtre, car vous savez qu’à Chantepie le cimetière entoure l’église, et les maisons entourent le cimetière. Grand Dieu ! ce qu’elle avait sous les yeux était bien propre à l’effrayer : elle vit sortir de terre, à l’endroit où il avait été enterré, son bonhomme enveloppé dans son drap sale et troué qui se dirigeait vers son ancien gîte.

Elle n’eut pas la force de bouger, elle était quasiment paralysée. Un bruit de pas se fit entendre sur les marches de l’escalier, la porte s’ouvrit et un squelette s’approcha d’elle, qui se débarrassa de son drap et le lui jeta aux pieds.

« Méchante avaricieuse ! s’écria-t-il, voilà ton drap. Tes journées ne suffiront pas désormais pour le raccommoder, et tes nuits se passeront à le laver dans la mare de Cucé. »

Cela dit, il s’en retourna dans le cimetière se recoucher dans sa tombe.

À partir de ce moment, la veuve passa ses journées à boucher les trous du drap qui se déchirait la nuit sous le battoué de la lavandière. Elle mourut un an après, le soir même de l’anniversaire de la visite de son défunt homme ; mais elle revient ici toutes les nuits laver le linceul du mort.

Les habitants du village de la Menouriais l’ont entendue bien souvent, et moi aussi, ajouta la vieille en soupirant, et en faisant le signe de la croix.


Église et cimetière de Chantepie

En continuant vers Chantepie on arrive promptement à la grille du château de Cucé.

Le fief de Cucé, important dès le XIIe siècle, était alors possédé par une famille de ce nom. Plus tard, il eut pour seigneurs les Montbourcher, les Bourgneuf qui, en 1644, le firent ériger en châtellenie, les Boisgelin, en 1681, puis les Cahideuc du Bois de la Motte.

En 1859 mourut le dernier descendant des seigneurs de Cucé, le comte du Bois de la Motte, laissant une immense fortune et dix neuf héritiers collatéraux. Cucé fut alors vendu comme les autres biens et on fit argent de ces beaux arbres séculaires si connus des promeneurs de Rennes.

C’est après cette dévastation que M. Conan, comte de Saint-Luc se rendit adjudicataire du château et de son parc de 52 hectares entièrement clos d’un mur qui a près d’une lieue de tour.

Le château actuel, qui avait été construit par le cardinal Raymond de Boisgelin, archevêque de Tours, tombait en ruines. M. de Saint-Luc le restaura complètement.

C’est un bâtiment, à caractère monumental, orné de trois pavillons, dont l’ensemble rappelle, dans des proportions à tous égards plus modestes, le château des Tuileries. Devant l’esplanade s’étend aujourd’hui une prairie de huit hectares agrémentée de massifs habilement disposés. Quant à l’ancienne futaie, qui couvrait le reste du parc, elle a fait place à de riches cultures.

Depuis plusieurs années le domaine de Cucé appartient à M. Langlois.

Presque en face Cucé, de l’autre côté de la route, apparaît le petit manoir de Hallouvry qui a conservé son antique chapelle. Il a été possédé, en 1782, par Godefroy Berthelot du Plessix, notaire des États de Bretagne, et plus tard par Morice du Lérain. Hallouvry est aujourd’hui la propriété du Grand Séminaire de Rennes.

Encore quelques pas et nous sommes à Chantepie (de cantu picœ).

Cette paroisse est antérieure au XIIIe siècle. L’église du XVe siècle, possède deux fenêtres et une porte du style ogival flamboyant.

Comme Cesson, Chantepie a sa maison de l’hôpital, seul vestige de l’établissement charitable fondé en 1698, et en faveur duquel Louis XIV accorda des lettres patentes, le 25 Mars 1701.

En 1790, l’hôpital de Chantepie était tenu et administré, selon la volonté du fondateur, René Couasnon, par deux filles de la campagne, qui étaient en même temps chargées de faire l’école aux petites filles de la paroisse.

En quittant Chantepie, nous entrons pour ainsi dire dans un faubourg de Rennes. De modestes campagnes, des auberges, et quelques petits castels délabrés, convertis en fermes, sont alignés des deux côtés de la route jusqu’à Saint-Hélier.

C’est près de Saint-Hélier, le long du nouveau cimetière de Rennes, que se trouve le champ de la Carrée plus connu à Rennes sous le nom de Roque-Mignon.

On lit dans un manuscrit de la bibliothèque de la ville, qui a pour titre « Journal d’un bourgeois de Rennes au XVIIe siècle » le passage suivant :

« Le mercredi 8 Octobre 1662, il a été faict mourir deux hommes sur le Pré-botté, l’un desquels estait un jeune homme aagé de 19 à 20 ans qui avait tué son père, et fut rompu vif de plus de vingt coups et puis jetté vif dans un feu ; et l’austre était leur vallet qui, pour avoir aidé à tuer son maître fut aussi rompu de quelques coups vif et puis son corps porté à la Carrée ».

On lit aussi dans le cartulaire de l’abbaye de Saint-Georges-de-Rennes :

« En 1665 l’abbaye de Saint-Georges avait encore dans ses attributions le droit de fourches patibulaires à quatre pilliers et paux qui étaient placés : en un caroil près le gué de Boon, dans un champ situé un peu au-dessus de la ferme de la Bouquinais, à gauche en allant vers Chantepie. Ce champ formait l’angle de la route de Rennes à la Guerche et d’un chemin se dirigeant vers les terres. Il portait le nom de champ de la Carrée. »

Ce champ de la Carrée, comme on le voit, a été pendant de longs siècles le cimetière des condamnés à la pendaison. Il n’est donc pas étonnant qu’il soit encore rempli d’os humains.

Si en 1665 il était affecté aux fourches patibulaires des religieuses de Saint-Georges de Rennes, et si on y faisait passer de vie à trépas les condamnés à mort, plus tard, c’est-à-dire à la fin du siècle dernier, on y exposait les pendus exécutés sur la place des Lices et en d’autres lieux.

Un criminel ayant été pendu dans la petite ville de Bain fut amené à dos de cheval dans le champ de la Carrée. Lorsque le cadavre traversa le faubourg de la Magdeleine, tous les enfants l’accompagnèrent au-delà de Saint-Hélier pour assister à l’opération de Roque-Mignon.

L’origine de la paroisse de Saint-Hélier est fort ancienne :

En 1030, le duc de Bretagne Alain III fit don des moulins de Saint-Hélier au monastère de Saint-Georges, dont sa sœur Adèle était abbesse.

Vers l’an 1080, Guillaume, fils de Geffroy, comte de Rennes, voulant éviter les anathèmes lancés contre les laïques qui retenaient par hérédité les biens ecclésiastiques, donna aux religieuses de Saint-Georges, à l’occasion de l’entrée de sa fille dans ce monastère, une portion de la dîme de la paroisse de Saint-Hélier.

Raoul et Jean, frères du donateur, approuvèrent cette donation dont se rendirent caution Guillaume et Even de Montgermont.

En 1261, un recteur de Talensac fit don par testament aux desservants de l’église Saint-Pierre et du couvent de Saint-Melaine, des revenus provenant des vignes des Landelles près Quineleu dans la paroisse de Saint-Hélier.

En 1665, les religieuses de Saint-Georges jouissaient d’un fief appelé bailliage de Saint-Hélier et s’étendant en cette paroisse et celles de Cesson et de Chantepie ; elles levaient en outre les dîmes de Saint-Hélier dont elles abandonnaient la moitié au recteur.

En 1790, les dîmes de Saint-Hélier appartenaient encore à l’abbaye de Saint-Georges et au chapitre de Rennes.

La fabrique de Saint-Hélier possède un intéressant livre de paroisse rédigé par les recteurs de 1609 à 1790. Il fait connaître qu’en 1609 on célébrait très solennellement les fêtes de Pâques pour lesquelles le pape Paul V avait accordé des indulgences. Les paroisses voisines se rendaient processionnellement à Saint-Hélier le lundi de Pâques.

En 1610, on jonchait l’église de paille aux fêtes de Noël et de la Toussaint parce qu’elle restait ouverte toute la nuit. À cette époque on faisait de longues processions, allant, en 1620, le lundi de la Pentecôte à Notre-Dame de la Rivière en Domloup ; en 1625 à Saint-Roch de Moucon en Cesson, et à la Motte Bruslon en Saint-Laurent. Les enfants de la paroisse allaient à la fin de l’année chanter des Noëls en quêtant pour l’église.

Le vicomte de Rennes était seigneur supérieur, fondateur et prééminencier de l’église de Saint-Hélier, mais le seigneur de Baud y avait un banc à queue vis-à-vis l’autel de l’Ange gardien et ses armoiries dans la vitre voisine.

Une parcelle de la vraie croix fut donnée à Saint-Hélier en 1783.

Il ne reste aucun vestige de l’église primitive de Saint-Hélier. L’édifice actuel est une construction des XV et XVIe siècles. Son plan consiste en une nef à chevet droit accompagnée de deux transepts et d’un seul collatéral au Nord. Cette église fut restaurée vers 1830 et l’on érigea, à cette époque, un gracieux clocher que le mauvais état de l’église, vient de faire abattre.

Dans le portail occidental, on remarque un élégant échantillon des formes architectoniques de la fin du XVe siècle.

À l’intérieur est une chaire en bois sculpté à deux rampes. Ce travail de menuiserie, dans le style ogival fleuri est l’œuvre de


ÉGLISE SAINT-HÉLIER
M. Hérault qui a également orné le chœur de fort jolies stalles à baldaquins. Le fond de la chaire est décoré d’une image de Saint-Michel finement peinte dans le style bysantin par M. Doussault.

Quelques tableaux décorent l’église : Une copie du Christ mort, de Jordaëns, dont l’original peint sur bois existe au Musée de Rennes. Ce tableau est un don de M. Jan, artiste peintre, ancien Directeur du Musée de notre ville.

Une copie de la Vierge et de l’enfant Jésus, due au pinceau de M. Dangin-Lubin qui fut reçu à l’Académie royale de peinture le 4 Août 1651.

Les stations du chemin de croix, œuvre des plus médiocres, sont de Rousseau-Lagrave, artiste lyrique qui a laissé comme ténor une certaine réputation.

Jeune homme, il fut à Rennes le protégé de l’évêque Godefroy Saint-Marc qui avait un plaisir extrême à l’entendre chanter parmi les élèves de la Maîtrise de la Cathédrale.

Après s’être livré à la peinture du paysage, il entra dans un couvent de trappistes qu’il quitta bientôt pour entrer au Théâtre. Il débuta, à Rennes, dans la Favorite, où il eut un très grand succès. Nos pères ne tarissaient pas d’éloges lorsqu’ils s’entretenaient du talent de Rousseau-Lagrave.

Il eut également du succès à Bordeaux et ensuite à Paris à l’Opéra.

Il est mort en mer dans le naufrage d’un navire qui avait à son bord une troupe de comédiens se rendant à la Nouvelle-Orléans. Il avait à peine trente ans.

À l’emplacement du Calvaire actuel de Saint-Hélier il existait encore vers la fin du XVIIIe siècle une chapelle dite de l’Ecce Homo, oratoire cher à la dévotion populaire. On y transportait suivant un usage ancien les cercueils des défunts de la campagne avoisinante en attendant la cérémonie des obsèques à l’église Saint-Hélier.

Au sud de la rue Saint-Hélier se trouve la communauté des filles de la Sainte Vierge, ordre religieux fondé à la fin du XVIIe siècle par Anne-Marie Budes.

Pendant la Révolution cette communauté fut transformée en filature. On y annexa plus tard un dépôt de mendicité dans lequel on retenait les prostituées que la police y envoyait. Ce ne fut qu’en 1825 que quelques-unes des religieuses expulsées le 17 Novembre 1792 rachetèrent leur ancienne maison qui reprit alors sa destination primitive.

À l’entrée de la rue Saint-Hélier, du côté nord, est la prison militaire ainsi que le conseil de guerre du 10e corps d’armée. Ces divers établissements ont été construits dans l’emplacement occupé jadis par la maison centrale de détention qui, elle-même, avait remplacé le Petit Séminaire fondé en 1708 par l’évêque de Rennes de Lavardin.

En 1560, cette propriété qui bordait le chemin du moulin de Saint-Hélier appartenait à un nommé Mennemier Escoufflard et portait alors le nom de Bouzillé.

Elle servait de lieu de réunion aux protestants de la réforme. Ce nom de Bouzillé fut également donné à la ruelle qui se trouvait vis-à-vis et qui rectifiée et élargie porte le nom de rue de Châtillon.

Enfin un évêque irlandais, Kirivan proscrit par Cromwell, mourut en odeur de sainteté, le samedi 27 Août 1661, dans une maison appartenant au sieur de Betigneul Lebreton, rue Saint-Hélier. Le lundi suivant son corps fut inhumé dans l’église neuve Saint-Thomas des pères Jésuites, rue Saint-Germain, aujourd’hui église Toussaints.