Au Pays de Rennes/Canton de Liffré

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Hyacinthe Caillière (p. 212-228).


CANTON DE LIFFRÉ


Le chef-lieu de canton, à part sa mairie et son église neuve qui sont assez jolies, n’offre rien d’intéressant.

Les anciens manoirs du temps passé s’appelaient Le Feu et Chamfleury. Le premier est devenu une ferme, et le second a été transformé en une maison de campagne qui appartient au commandant Greset.

Une chapelle, appelée Notre-Dame-du-Feu, près du manoir de ce nom, a servi longtemps de cellier au fermier des religieuses de Saint-Georges de Rennes. On suppose que ce dut être un prieuré.

La forêt de Rennes est tout entière en Liffré. Celle de Liffré est en partie dans cette commune et le surplus dans le canton de Liffré et dans celui de Saint-Aubin du Cormier. La forêt de Sevailles est également en Liffré et sert en certains endroits de limite à la commune.

Il existait encore, il n’y a pas très longtemps, près de l’étang de Verrière aujourd’hui desséché, une motte féodale et les vestiges d’une enceinte provenant d’un ancien château. Cette résidence, disait-on, était autrefois le rendez-vous de chasse des anciens ducs de Bretagne.

De vastes étangs alimentent le haut fourneau de Sérigné, situé plus loin dans la commune de la Bouëxière.

Lorsqu’on va de la Bouëxière à Chevré on aperçoit, à droite, une tour carrée qui semble être du commencement du XVIe siècle. Elle dépendait — dit-on dans le pays, — d’un antique manoir qui s’appelait le Plessix-Anger et qui a été remplacé par une ferme qui porte le nom de métairie neuve.

Derrière cette métairie se trouve une vieille maison qui devait être une dépendance du Plessix-Anger. Elle renferme une immense cheminée de près de trois mètres de longueur qui a conservé quelques sculptures.

Un peu avant d’arriver à Chevré on trouve encore une autre gentilhommière convertie en ferme et appelée La Porte. Elle est datée de 1610 et est ornée d’une élégante tourelle.

Le village de Chevré — appelé ville de Gannes par les habitants sans qu’on sache pourquoi — est une des curiosités du département. On y trouve d’anciens hôtels délabrés, avec tourelles, datés de 1610, 1625 et 1643. Deux d’entre eux ont de ravissantes fenêtres avec de petits pilastres dans le style de la Renaissance.

Au nord-est est un vieux donjon croulant, encore perché sur le haut d’une butte couverte de broussailles et presque inaccessible. Enfin tout à côté est une chapelle du XIIIe siècle, pur style roman, dont le plafond en bois formant voûte a été refait au milieu du XVIIe siècle ainsi que l’indique une date de 1643. On y voit des peintures représentant les figures des évangélistes. Cette chapelle qui sert aujourd’hui de cellier a, dans un coin, les statues en bois de Saint-André, de la Vierge, de Sainte-Marguerite et d’un évêque.

Plusieurs plaques funéraires en faïence de Rennes existaient dans cette chapelle. Quelques-unes d’entre elles ont été enlevées et transportées au Musée archéologique de Rennes. On lit sur ces plaques :

Cy gist le cors de
N. H. Laurent LEMARCHANT,
seigneur de la Touche, décédé le 7 Décembre 1679.
Priez Dieu pour luy.

Cy gist le corps de damolle
Peronnelle-Angélique de la HERNERIE,
décédée le.... Avril 1681.
Priez Dieu pour elle.

En défonçant le sol, autour de l’église, on a trouvé des squelettes reposant dans des tombeaux en calcaire coquillier.

Sous la chaussée de l’étang de Chevré est un pont gothique à sept arches admirablement conservé. Il est extrêmement curieux et unique dans le pays.

On raconte à Chevré qu’il existe un souterrain partant du donjon, passant sous l’étang et s’en allant à Vitré par Saint-Aubin-du-Cormier.

On ajoute que la duchesse Anne, poursuivie par les Anglais, fit ferrer son cheval à rebours pour les dérouter. Malheureusement elle fut trahie par son palefrenier et ne dut son salut qu’au stratagème suivant : elle fit tuer, éventrer et vider un cheval, qui fut placé sur un haquet (sorte de charrette). Elle se cacha dans le corps de l’animal et passa ainsi au milieu de ses ennemis qui ne se doutèrent pas que la carcasse de cet animal renfermait la jolie bretonne.

Le sire de Cangé

À l’ouest du bourg de Dourdain, à un kilomètre environ, au fond d’une belle vallée, sur le bord de la route de Bourg-neuf à Mi-forêt, se dresse encore le manoir du Plessis-Pillet.

Ce dut être jadis un superbe château à en juger par son air imposant, son grand portail assez bien conservé et ses immenses cheminées ornées de sculptures remarquables. Une grande pièce d’eau l’entourait de trois côtés, un large fossé achevait de le protéger et un pont-levis y donnait seul accès.

C’était, à l’époque de sa splendeur, la demeure des suzerains de la contrée. L’un de ces seigneurs, Jehan de Cangé, est resté célèbre dans le pays. Lorsqu’on parle de lui aux veillois de la Toussaint, il se trouve toujours de vieilles gens prêts à raconter son histoire. La voici telle qu’elle nous a été dite :

Yves de Cangé et sa femme Marguerite de la Teillais qui ont laissé longtemps après eux le souvenir de leur bonté et de leurs bienfaits n’eurent pas une existence heureuse. Au début de leur ménage ils désirèrent longtemps un enfant que le ciel semblait vouloir leur refuser. Après de nombreux voyages et pèlerinages leur vœu ne se réalisant pas, Yves alla consulter une sorcière de la forêt de Fougères appelée par les uns Margot et par les autres la Chatte-noire. Elle annonça au seigneur du Plessis-Pillet qu’avant un an il serait père, malheureusement pour lui, car ce fils tant souhaité ne causerait que du deul[1] à ses parents.

De retour chez lui le sire de Cangé apprit à sa femme la prédiction de la sorcière, se gardant bien de lui parler du malheur qui les menaçait.

Cette heureuse nouvelle remplit de joie tout le pays.

Quand la châtelaine ressentit les douleurs de l’enfantement, les vassaux vinrent, sans être commandés, battre les eaux de l’étang avec de grandes gaules pour faire taire les grenouilles. C’était alors l’usage d’empêcher les cris discordants de ces bêtes de parvenir jusqu’aux oreilles des grandes dames nouvellement accouchées.

Quel ne fut pas l’étonnement des paysans en entendant, malgré le bruit qu’ils faisaient, les grenouilles coasser plus fort que jamais et se laisser plutôt assommer que de cesser leur tapage. Ces braves gens n’avaient jamais ouï parler de choses semblables et s’en allèrent effrayés, redoutant un malheur.

Pendant ce temps Marguerite avait mis au monde un fils qu’on appela Jehan et dont le baptême fut l’objet de fêtes splendides. Les vassaux furent conviés à un festin servi dans la cour d’honneur du château. Une immense table, autour de laquelle tout le monde prit place, était couverte de quartiers de vaches, de veaux, de porcs qui répandaient une odeur appétissante qu’on sentait à plus d’une lieue.

Les hommes et les gars avaient quitté la bique[2] pour prendre la carmiole[3] et les hannes[4] de noces. Les ménagères étaient parées de leur plus belle Marie-Louise[5] fraîchement lavée et repassée. Les couturières avaient remplacé les œillets des compères[6] des filles à marier, resserré d’un point le cotillon de penille[7] et remis des filets neufs à la devantière[8].

Pendant que les gars callaient les tonniaux de cidre, les vieux mettaient les fossets[9] et faisaient des puettes[10].

Les filles armées de havets[11], retiraient des chaudières des morceaux de viande destinés à remplacer ceux qui disparaissaient dans la bouche des convives. On but et l’on mangea ainsi trois jours durant.

L’héritier du Plessis-Pillet annonça promptement ce qu’il devait être plus tard. Violent, emporté, disputeur, dépensier et buveur, il ne supportait aucune remontrance et devint, ce qu’avait annoncé la sorcière, un vaurien, la désolation de ses parents. Le chagrin abrégea les jours de ceux-ci qui s’en allèrent rejoindre leurs ancêtres sous les dalles de l’église de Dourdain.

Lorsque le jeune seigneur se vit seul à la tête de sa fortune, il ne songea qu’à se divertir en compagnie de mauvais sujets. Les jours et les nuits s’écoulèrent en orgies, en folles dépenses qui dépassèrent ses revenus et amenèrent bientôt sa ruine.

Les créanciers menacèrent de faire vendre les terres, le château, les chevaux, les chiens, et Jehan en proie à un sombre désespoir méditait le genre de mort qu’il allait choisir. Il gravit l’escalier de la plus haute tour du castel avec l’intention de se précipiter dans l’étang. Au moment d’accomplir son sinistre projet il aperçut devant lui un individu tenant une escarcelle entr’ouverte dans laquelle il plongeait les mains pour faire sonner les louis d’or.

Jehan releva vivement la tête, et en voyant cette fortune qui l’attirait, il s’écria :

− Qui es-tu ? et que veux-tu ?

− Je suis Satan, et je t’offre treize fois ta charge d’or pour le prix de ton âme que je viendrai te réclamer dans dix ans. Signe de ton sang l’acte que voici et le marché sera conclu.

Le seigneur du Plessis-Pillet tremblait de tous ses membres, une sueur froide coulait sur son front, et il allait céder à la tentation quand il se souvint des recommandations que sa mère, en mourant, lui avait faites pour le salut de cette âme qu’on voulait lui acheter. Repoussant tout à coup le marché qu’il avait sous les yeux, il dit au diable : — Garde ton or, je ne signerai pas.

− À ta guise, répondit Satan, je vais aller offrir mes services à un seigneur de tes amis, qui, ruiné comme toi, ne refusera pas mes propositions et pourra ainsi non seulement recouvrer sa fortune mais encore acheter ton château et tes terres.

− Arrête, accorde-moi quinze ans de vie et le meilleur cheval de ton enfer pour me transporter où je voudrai.

− C’est convenu, ouvre-toi une veine et signe.

Jehan prit un poignard à sa ceinture, se fit au bras gauche une entaille d’où le sang jaillit avec abondance. Satan trempa lui-même la plume dans le sang et la tendit ensuite au sire de Cangé qui apposa son nom au pied du traité.

Le diable, après avoir plié soigneusement le parchemin, le cacha sous sa houppelande, puis ayant frappé trois fois de son pied fourchu les murs de la tour, une pierre se souleva et treize autres diables surgirent ployant sous des sacs d’or qu’ils déposèrent devant le sire de Cangé.

− Soupèse ces sacs, dit le malin esprit.

Jehan essaya, mais ne parvint pas à les changer de place.

− Tu le vois, ajouta le démon, je remplis fidèlement mes engagements. Au revoir, l’ami, dans quinze ans tu recevras ma visite.

Le sire de Cangé était en train de contempler ses richesses quand le hennissement d’un cheval se fit entendre dans la cour. Il descendit aussitôt et aperçut un superbe animal, noir comme l’ébène et richement harnaché. Les étriers étaient en or et la selle incrustée de pierres précieuses. Enfourchant aussitôt la bête et muni de l’escarcelle que le diable lui avait laissée, il se dirigea vers le pont-levis qui se baissa de lui-même à son approche. Dès qu’il fut hors du château le cheval releva fièrement la tête et lança feu et flammes par la bouche et les narines. Son cavalier, qui n’avait plus peur de rien, le conduisit avec une rapidité vertigineuse, chez tous ses créanciers qu’il paya sans vider complètement sa sacoche.

De retour chez lui Jehan songea à cacher son trésor. Ne le trouvant pas en sûreté dans sa demeure, il alla pendant neuf nuits le porter dans un trou qu’il avait creusé dans la lande de Clairay, à trois huchées du château.

Ses serviteurs entendant à chaque instant de la nuit le pont-levis se lever et s’abaisser, voulurent voir ce dont il s’agissait ; ils guettèrent leur maître et le suivirent jusque sur la lande où ils l’aperçurent enfouissant son or sous les bruyères et les ajoncs.

Quelques jours plus tard ces domestiques, dignes de leur maître, profitèrent de l’absence de Jehan pour s’en aller déterrer le trésor. Soudain le seigneur du Plessis-Pillet, monté sur sa cavale lançant des flammes, dispersa les voleurs à coups de cravache.

Le bruit se répandit bientôt qu’un immense trésor, gardé par le diable se trouvait sur la lande de Clairay.

Une bande de bandits, armés de faulx, de boucards[12], de hansards[13], de fourches à framboyer[14] se rendirent sur la lande avec l’intention de dérober l’or qui devait s’y trouver. Les mieux armés faisaient bonne garde pendant que les autres défonçaient la terre. Cette fois encore Jehan monté sur son grand cheval noir arriva au galop et culbuta guerriers et travailleurs.

Le sire de Cangé effectuait de lointains voyages. Chevauchant par monts et par vaux avec la rapidité de l’éclair, il visita le monde entier apportant et amassant dans son castel les curiosités des pays brûlés par le soleil et de ceux toujours couverts de neige.

Un dimanche matin en rentrant chez lui, ses gens lui apprirent que c’était à son tour de donner le pain béni à la messe du jour, mais qu’il n’y avait plus de pain blanc chez les boulangers du bourg de Dourdain.

− Quelle heure est-il ? demanda Jehan.

− La messe sonne avec les trois cloches, répondirent les domestiques et dans un quart d’heure elle sera commencée.

− J’ai grandement le temps d’aller en chercher à Rennes. Sellez mon cheval.

Il partit aussitôt et revint, en effet, avant l’office apportant six miches de trois livres.

Ennuyé de courir le monde, le seigneur du Plessis-Pillet resta dans le pays, recommença ses orgies et ses désordres, exaspérant ses voisins par ses insultes et ses bravades. Il fit si bien que la guerre lui fut déclarée.

On entendit bientôt la trompette des hommes d’armes et le hennissement des chevaux. C’était l’armée des seigneurs insultés accompagnés de leurs amis venant assaillir le château.

Cerné de tous côtés, Jehan, monté sur son cheval tenta, à la tête de ses gens, de faire une sortie, mais pour un ennemi mis hors de combat dix autres prenaient la place du mort. Force fut à l’assiégé, après avoir vu ses hommes succomber autour de lui, de rentrer dans sa demeure. Comme de coutume le pont-levis s’abaissa de lui-même pour le laisser rentrer et se releva aussitôt après.

L’infortuné seigneur, seul dans son château, réfléchissait au moyen d’échapper à ses ennemis lorsqu’il se rappela que son pacte avec le diable devait bientôt expirer. Comptant les mois et les jours il s’aperçut que les quinze années finissaient le lendemain. Abandonnant alors toute idée de fuite, il prit la résolution de s’ensevelir sous les ruines de sa forteresse. Amassant dans les caves et les salles basses tout le bois et les objets susceptibles d’être consumés, il y mit le feu, regrettant de ne pouvoir brûler avec lui le trésor de la lande, dont il restait encore une bonne partie.

Des quatre coins du château sortirent des tourbillons de fumée auxquels succédèrent les flammes. Au point du jour, quand les assiégeants qui avaient travaillé toute la nuit à combler les fossés, voulurent escalader les murs, ils reculèrent épouvantés et assistèrent en simples spectateurs à l’anéantissement de leurs espérances.

Des cris déchirants partirent du milieu du brasier quand le sire de Cangé succomba en livrant son âme au diable.

Il ne resta du Plessis-Pillet que le portail et la pierre sur laquelle fut signé le pacte du démon. Cette pierre se voit encore dans une des meurtrières du portail ; elle est marquée de trois taches rouges, larges gouttes de sang tombées de la plume de Satan.

Les habitants montrent aussi une tête, surmontée de deux cornes, sculptée dans la pierre et qui, disent-ils, rappelle la figure du démon.

La chemise que Jehan portait quand il se coupa la veine du bras, fut toute maculée de sang. Il paya une mère-mitaine[15] des environs pour aller la laver à la nuit noire et la battre pour faire disparaître la tache.

La malheureuse lavandière lave encore à l’heure présente, sans pouvoir enlever le sang de la chemise, et les gens assez braves pour passer à l’heure de minuit près du doué du château, entendent le battoué de la mère-mitaine.

Sur le haut de la lande de Clairay on aperçoit l’empreinte du pied d’un cheval. L’herbe ne croît pas à cette place et les pierres que l’on y dépose disparaissent la nuit suivante.

Enfin le trésor est toujours dans la lande, mais le diable le garde, il envoie, chaque fois qu’on essaye de l’enlever, le sire de Cangé, monté sur son grand cheval noir, pour chasser les personnes assez téméraires pour s’aventurer à fouiller la lande.

J’avais jusqu’ici écrit le nom du seigneur du Plessis-Pillet « Changé » lorsque le hasard m’a fait découvrir aux archives départementales d’Ille-et-Vilaine l’acte dont la teneur suit qui m’a appris l’orthographe véritable de ce nom.

« Le huictiéme jour du mois de janvier après midi mil sept-cent-sept, devant nous notaire du marquisat du Bordage au siège de Sérigné, ont comparu dame Catherine Boüan dame de Cangé, veuve et non séparée de biens de feu messire Charle Denyau chevallier seigneur de Cangé sy devant coner au parlement de bretagne renonsant et créantière en sa succession en privé non que comme caupsionne et mère de Charle Denyau chev. seig. de Chateaubourg et delle Anne-Charlotte-Jacquette Denyau damelle de Cangé tous deux héritiers soubz benefice d’inventaire du dit seigneur de Cangé leur père, lequel seigneur de Chateaubourg s’oblige à faire ratifier à son curateur, demeurants a présant a leur maison seigneuriale du Plessix en la paroisse de Dourdain, lesquels aux dits noms et qualités donnent par les présentes pouvoir et procure a (un blanc) retirer cheix monsieur le greffier des États de Bretagne pour eux et en leurs noms renonsis formellement à la qualité de compts aux honneurs et prorogations et comptes comme de fait ils renonsent pour d’Icell en avoir acte pour leurs services ainsi quil appartient de toute renoncion (renonciation) ce qu’ils ont aussy voulu juré puis tenir sans y contrevenir.

Fait et consenty à la maison du Plessix aud. Dourdain avec le sing de la dite dame de Cangé, du dit seigneur de Châteaubourg, de ladite damoiselle de Cangé aucy la notre

Catherine Boüan.      Anne de Nyau.
Charle-Jacques de Nyau.

« Au Xe siècle, dit M. de la Borderie, le territoire de la paroisse de Livré était un domaine des comtes de Rennes, au centre duquel s’élevait une église dédiée à la Vierge ; mais comme beaucoup d’autres cantons de notre province dévastés par les invasions normandes, ce domaine était devenu un désert. Pour y ranimer la vie sociale et religieuse, Geoffroy Ier, comte de Rennes et duc de Bretagne (de 992 à 1008), voulut y appeler des moines et le donna à Robert, abbé de Saint-Florent. »

Telle fut l’origine de Notre-Dame de Livré, l’un des plus anciens prieurés bénédictins fondés en Bretagne par l’abbaye de Saint-Florent de Saumur.

Comme le prieuré de Gahard, celui de Livré relevait directement du pape, sans dépendre d’aucun évêque.

Le dimanche de la Quasimodo avait lieu à Livré le jeu de la quintaine : Tous les nouveaux mariés devaient, ce jour-là, comparaître devant le prieur et lui donner « un baiser et une chanson » ; ils devaient aussi courir en frappant la quintaine.

Les moines de Livré possédaient aussi, au village de Saint-Mauron, une chapelle qui se voit encore aujourd’hui dans la cour d’une métairie qui en a conservé le nom.

Au XVIe siècle les bénédictins cédèrent le prieuré de Livré aux jésuites de Rennes qui le possédaient encore à l’époque de la Révolution.

Le logis prioral existe encore au nord de l’église du bourg. Il est aujourd’hui converti en ferme. On remarque dans une de ses salles une vaste baie romane, maintenant bouchée ; on y voit aussi des chambres peintes en rouge, des cheminées à colonnes et quelques autres vestiges témoignant de l’ancienne importance du monastère.

La commune d’Ercé-près-Liffré a, sur son territoire, le château du Bordage, habité par la mère de M. Yves Guyot, ex-ministre des Travaux publics.

De cet ancien manoir qui fut jadis la propriété de René de Montbourcher, garde des sceaux d’Arthur II, il ne reste, — à côté de constructions modernes, que quelques pans de murailles tombant en ruines.

On voit à la mairie d’Ercé un drapeau de la première révolution ; il fut trouvé en 1815. La hampe était, à cette époque, surmontée d’un bonnet phrygien qui, plus tard fut remplacé par un coq gaulois. Cette relique a pu être conservée jusqu’à nos jours et les habitants de cette commune sont fiers de la posséder.

De très belles fêtes eurent lieu à Ercé, le dimanche 27 juillet 1890, à l’occasion de l’inauguration, sur la place du bourg, d’une statue de la République offerte par le ministre des Travaux publics.

Les belles ruines de l’ancienne abbaye de Saint-Sulpice-la-disparaissent, elles aussi, chaque jour :

Les derniers murs de l’église abbatiale s’écroulent, et les sculptures de l’ancienne chapelle du XVe siècle s’effacent sous l’action du temps.

Encore quelques années et les derniers vestiges de la puissante abbaye qui eut pour abbesses des princesses ne laisseront plus aucune trace.

Le poète Gérard de Nerval dans son roman « Le Marquis de Fayolle » a placé quelques scènes de l’époque de la Révolution à Saint-Sulpice-la-Forêt. Il a su, en y mêlant l’amour, les rendre palpitantes d’intérêt. Il est surprenant que ce superbe roman soit aussi peu connu.


  1. Chagrin.
  2. Vêtement de peau de chèvre ou de mouton.
  3. Paletot serrant la taille.
  4. Pantalon.
  5. Coiffe en tulle brodé.
  6. Sorte de corset.
  7. Jupe en laine cardée et en fil.
  8. Tablier.
  9. Espèce de clef pour tirer le cidre.
  10. Petit trou pour donner de l’air au tonneau quand on tire le cidre.
  11. Grande fourchette en fer à deux branches.
  12. Instrument qui sert à couper le marc de pommes dans les pressoirs.
  13. Outil pour hacher les guérets.
  14. Fourche pour vider le fumier des étables.
  15. Sage-femme.