Biographie nationale de Belgique/Tome 3/BUYCK, Jean

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BUYCK (Jean), amiral, né en Flandre au XIVe siècle. — En 1387, un grand nombre de navires de la Rochelle, chargés de douze à treize mille tonneaux de vins de Saintonge et du Poitou, firent voile en destination pour la Flandre. Le chevalier Messire Jean Buvck, marin expérimenté, amiral du duc de Bourgogne, reçut la mission d’escorter cette flotte marchande, montée en grande partie par des Flamands et des Zélandais. Dans les premiers jours de mars, on se trouvait près de l’embouchure de la Tamise; on s’y croyait à l’abri de tout danger, lorsque apparut une flotte anglaise, qui avait croisé, pendant l’hiver, des côtes de Cornouailles aux côtes de Normandie, en épiant les navires français. Cette flotte était commandée par les comtes d’Arundel, de Nottingham, de Devonshire et l’évêque de Norwich, le fameux Henri Spencer.

Buyck avait souvent combattu les Anglais; il comprit aussitôt que les vaisseaux ennemis chercheraient à prendre le vent pour l’attaquer avant la nuit; en effet, levant l’ancre, ils firent voile vers lui. Quoique décidé à éviter le combat, il arma ses arbalétiers et ordonna en même temps au pilote de hâter la marche de la flotte, afin que préparée à repousser les Anglais, elle pût essayer de se dérober à leur poursuite. Il ne pouvait espérer de lutter avec quelque avantage contre une flotte formidable, armée en guerre, alors qu’il n’avait sous ses ordres que des vaisseaux marchands. Ceux-ci firent force voiles et, toujours poursuivis par leurs ennemis, ils mirent le cap sur l’Écluse, où ils comptaient se réfugier. Mais les Anglais n’étant nullement disposés à lâcher une si riche proie, un combat devin, inévitable, Buyck l’accepta avec intrépidité, tout en sachant combien la lutte était inégale, car la flotte anglaise se composait de gros vaisseaux, montés par un grand nombre d’archers et plus de cinq cents hommes d’armes. Calme au milieu du danger, Buyck ranima le moral des hommes placés sous ses ordres : « Que craignez-vous de l’ennemi, leur dit-il, ne le connaissons-nous pas depuis longtemps pour l’avoir combattu et surtout pour l’avoir vaincu en mainte occasion? Ne vous rappelez-vous donc plus que je vous ai mené souvent à la victoire? Je suis toujours animé du même courage; je n’ai pas dégénéré; vous me verrez le même homme, le même chef; il ne s’agit que d’avoir la même confiance et de me soutenir avec la même énergie. C’est en agissant ainsi que nous pourrons tripler notre force pour combattre un ennemi supérieur en nombre, et courir la chance de le vaincre. Au reste, que nous le voulions ou non, il est impossible d’éviter la lutte avant d’avoir atteint le port. Puisqu’il le faut, combattons donc en héros : ce n’est que dans la victoire que nous pouvons trouver le salut. »

A peine avait-il dit, que le comte d’Arundel les attaqua avec ses gros vaisseaux. L’équipage belge, électrisé par son chef, sentit qu’il ne pouvait fléchir étant commandé par un tel héros; tous firent leur devoir. La lutte devint terrible; la nuit seule sépara les combattants, après un massacre inouï et alors que des deux côtés plusieurs navires eussent été coulés bas. On laissa tomber l’ancre près de l’Écluse, car Buyck, tout en combattant, avait réussi à y arriver. Dès la pointe du jour, on fit des efforts pour entrer au havre du Zwyn, ce qui ne fut possible que pour les navires d’un petit tonnage; quant aux autres, ils durent recommencer la lutte. Buyck la soutint avec un courage héroïque, mais enfin, écrasé par le nombre, il fut vaincu, après avoir perdu plus de sept cents hommes, massacrés dans l’action ou jetés par dessus bord. Parmi les captifs se trouva l’amiral Buyck. Ce fut sur le sol britannique qu’il mourut quelques années plus tard.

Aug. Vander. Meersch.

Vander Aa, Biographisch woordenboek. — Vossius, Historische jaarboeken, pp. 472-473. — Kervyn de Lettenhove, Histoire de Flandre, t. IV, pp, 64-66. — Van Bruyssel, Histoire de la marine, t. II.