Bulletin de la société géologique de France/1re série/Tome III/Séance du 19 novembre 1832

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Séance du 19 novembre 1832.


Présidence de M. Brongniart.

Après la lecture et l’adoption du procès-verbal de la dernière séance, M. le président proclame membres de la Société :

M. Albert Parolini, propriétaire à Bassano, province de Vienne, royaume Vénitien, présenté par MM. Brongniart et Boué.

M. Kleinschrodt, conseiller et attaché au ministère de l’intérieur à Munich, présenté par MM. Brongniart et Boué.

M. Partsch (Paul), sous-directeur du cabinet minéralogique de l’empereur, à Vienne, présenté par MM. Brongniart et Boué.

Les huit membres dont les noms suivent sont présentés par MM. Partsch et Boué :

M. De Rosthorn (François), propriétaire à Wolfsberg en Carinthie.

M. Zeune, directeur de l’Institut des aveugles et membre de plusieurs sociétés savantes, à Berlin.

M. le docteur Reichenbach, directeur des mines et usines de Blansko en Moravie.

M. Sadler, directeur du musée national de Pest, en Hongrie.

M. Wherle, professeur à Schemnitz, en Hongrie.

M. Zahlbruckner, secrétaire de Son Altesse l’archiduc Jean d’Autriche.

M. Riepl, professeur à l’Institut polytechnique de Vienne.

M. De Hauslab, capitaine au corps d’état-major des ingénieurs-géographes d’Autriche, à Vienne.

M. Mordret, ingénieur en chef des ponts-et-chaussées, à Évreux, présenté par MM. A. Passy et Élie de Beaumont.

La Société reçoit de la part de M. Deshayes :

A. Son ouvrage intitulé : Anatomie et monographie du genre Dentale. In-4°, 58 pag., 4 pm. Paris, 1825.

B. Ses Considérations générales sur les mollusques. In-8°, 308 pag., 2 tableaux. Paris, 1831.

M. le docteur Hibbert, présent à la séance, fait aussi hommage à la Société de son Histoire des volcans éteints du bassin de Neuwied, sur les bords du Rhin-Inférieur (History of the extinct Volcanos. etc.). In-8° de 261 pag., avec des cartes, des vues et des coupes. Edimbourg, 1832.

La Société reçoit en échange du Bulletin :

1° De la part de MM. de Leonhard et le docteur G. Bronn, le 1er et le 2e cahier, pour 1832, de leur Journal intitulé : Jahrbuch fur Minéralogie, Geognosie, Geologie. etc.

On y trouve un mémoire de M. de Meyer sur les blocs dans le Fichtelgebirge et la Bohême ; une description géognostique de Czorztyn et de ses environs. par le professeur Zeuschner ; sur le refroidissement et la pesanteur considérés comme forces agissantes lors de la formation du globe. par M. de Seckendorf ; sur les éruptions volcaniques dans la mer de Sicile en 1831, par M. Ch. Gemmallaro ; sur les fossiles jurassiques, par M. Wanger ; sur des pétrifications des Alpes, par M. Voltz ; sur les équisétacées, ulves et fucoïdes. par M. le comte de Sternberg ; sur des têtes de poissons, les Ptérodactyles et les Ammonites, par M. le comte Munster ; sur des cavernes à ossemens et les lignites, par M. Noggerath, etc. Dans le second cahier sont deux mémoires de M. le docteur Agassiz, l’un sur les poissons fossiles des dépôts tertiaires d’eau douce. et l’autre sur ceux du lias ; un mémoire sur les fossiles de la vallée de la Salza, en Salzbourg. par M. Bronn, mémoire qui est le complément du travail sur le même pays par feu M. Lill ; des notices sur l’état des mines d’or et d’argent au Pérou ; par M. de Althaus ; une note de M. Klipstein sur les rockers porphyriques de Bruchhauser, en Westphalie ; sur les os de Mammifères. par M. de Meyer ; la découverte de fossiles secondaires divers, empâtés dans le phonolite et le basalte, par M. d’Althaus ; une lettre de M. de Buch sur les Ammonites et Goniatites. etc. M. d’Althaus annonce la publication prochaine d’un ouvrage sur les puits artésiens et les instrumens du forage.

2° De la part de M. Loudon, les cahiers de juin, juillet et septembre du Magasin d’histoire naturelle. Le premier contient un mémoire sur les mines d’or des États-Unis. par M. R. Bakewell ; le second, des remarques sur la formation de la mer Morte et de ses environs. par M. J.-W. Draper ; le troisième, un article sur les volcans. par M. W.-M. Higgins, et des notices géologiques sur le Berwickshire, par M. Rob. Dund. Thompson.

3° De la part de l’Institution de Plymouth, le 1er volume de ses Transactions (Transactions of the Plymouth Institution). On y remarque une carte et un relevé géologique de quelques parties de la contrée prés de Plymouth, en particulier entre le Plym et le Tamar, par. M. J. Prideaux.

M. Deshayes présente des prospectus du cours libre de conchyliologie qu’il se propose de commencer prochainement.

La Société typographique de la Minerve de Padoue adresse des prospectus des nouvelles Annales des sciences pour le royaume Lombarde-Vénitien (Annali delle science. etc.), publication mensuelle, in-4o, qui a commencé en janvier 1832.

La Société reçoit aussi le prospectus d’un ouvrage intitulé : Histoire naturelle des trois règnes, pour l’instruction de toutes les classes de la société (Naturgeschichten der drei Reiche, etc.). par MM. G.-W. Bischoff, R. Blum, H.-G. Bronn, C.-C. de Leonhard et X.-S. Leuckart. Cet ouvrage, publié par livraisons, de 8 feuilles grand in-8o avec une planche in-4o, est divisé en cinq parties, savoir : une pour chaque règne, une pour l’histoire naturelle en général, et une pour la paléontologie. L’histoire naturelle en général ne comprendra qu’une livraison, et sera composée par M. Leuckart ; la minéralogie et la géologie auront chacune trois livraisons ; l’une sera l’ouvrage de M. le docteur Blum, et l’autre de M. de Leonhard ; les plantes occuperont dix livraisons, les animaux quatorze, et la botanique fossile et la paléonthologie quatre. Cest M. Bronn qui est chargé de ce dernier travail, ainsi que d’une dissertation sur la géogénie. Le prix de chaque livraison est de 1 fr. 25 c., et l’ouvrage sera achevé dans deux ans. Il paraît chez Schweizerbart, à Stuttgart.

M. le professeur Riepl adresse à la Société trois mémoires intitulés, l’un : Rapport sur les exploitations des dépôts aurifères, argentifères, cuprifères et plumbifères des valides de Moll et de la Drave, dans la Carinthie supérieure ; l’autre : Relations géologiques et mines du mont Rathausberg. dont les environs de Gastetn, avec une coupe ; et le troisième Mémoire sur les dépôts aurifères des Alpes autrichiennes.

Ces Mémoires seront lus à leur tour d’inscription.

M. Hausmann écrit qu’il s’occupe d’étudier la distribution géographique du calcaire tertiaire dans le Hanovre, dépôt beaucoup plus étendu qu’on ne le croyait. Il veut lier ses observations à celles que M. Schwarzenberg a faites dans la Hesse électorale. Cette formation est importante, en ce qu’elle renferme un dépôt ferrifère, et qu’elle comprend des masses quartzeuses fritées par l’action des éruptions basaltiques.

Il annonce que les manuscrits devant composer le troisième volume des écrits de la Société des amis de l’art des mines, à Gottingue, sont tout prêts à être imprimés.

M. Daubeny annonce que le rapport de la seconde assemblée des savans anglais à Oxford va paraître, et qu’il contiendra un mémoire de M. Conybeare sur la théorie des soulèvemens. Le traité de géologie de M. Buckland doit paraître incessamment. M. le docteur Gairdner d’Edimbourg, a publié un ouvrage sur les eaux minérales. M. le docteur Daubeny est chargé de faire la partie des volcans dans l’article Géologie de l’Encyclopédie métropolitaine, article composé par M. Phillips.

M. Weaver a été nommé directeur des mines du Mexique, exploitées par la compagnie anglo-américaine, et il est parti cet été pour sa destination.

M. Boué rend compte de la grande réunion annuelle des naturalistes, des médecins et autres savans allemands, qui a eu lieu à Vienne, du 18 au 30 septembre dernier.

On sait que la nation parlant l’allemand se trouve divisée en un grand nombre de gouvernemens très divers ; ce qui a donné lieu à l’établissement de beaucoup d’universités, d’académies et de villes intéressantes pour les savans. A côté de cette diffusion de la science et de cette instruction, si généralement répandue, on a toujours attribué à cet ordre de choses la faiblesse politique de l’Allemagne, les entraves de son commerce, et, en général, de tous ses rapports sociaux ; tandis que les hommes éclairés ont gémi de voir que dans chaque pays d’Allemagne les savans se trouvaient trop isolés de ceux de leurs confrères qui n’étaient pas soumis au même gouvernement. Si cet état de choses était moins sensible dans le nord ou dans le sud-ouest de l’Allemagne, considérés chacun à part, il y avait toujours eu trop peu de rapports entre les savans de l’Allemagne septentrionale et ceux de l’Allemagne méridionale, et surtout de l’empire autrichien. En science, comme en politique, il y avait, et il y a encore, des scissions très prononcées ; savoir : entre les deux grandes divisions des pays allemands du nord et du midi, puis entre l’Autriche et la Prusse, et enfin entre l’Autriche ou la Prusse et les pays, entre le Rhin et l’Elbe ou l’ancienne confédération du Rhin. Pour rapprocher tous les savans d’Allemagne, pour former un aréopage scientifique, et pour faire disparaître les préjugés, les antipathies, et pour donner ainsi une nouvelle impulsion aux sciences, ainsi que plus d’unité à leurs progrès, quelques savans conçurent, il y a dix ans, l’idée de réunir annuellement les médecins et les naturalistes d’Allemagne, tantôt dans un état, tantôt dans un autre.

Comme rédacteur de l’Isis et savant très connu, M. le professeur Oken se trouva à la tête de ce nouveau mouvement social, qui passa cependant bien vite des mains de la philosophie naturelle à celles de la science véritable.

Dans l’origine, l’institution devait être tout allemande ; on ne devait y parler qu’allemand ou latin ; mais bientôt on y lut aussi des mémoires en français ; et, en 1830, à Hambourg, un Anglais fut même nommé à une des présidences de section.

Comme l’Académie des sciences de Paris, la Société ne tint d’abord que des séances générales ; mais les graves inconvéniens de cette marche se firent bientôt sentir. Les sciences sont devenues trop vastes pour qu’un seul homme puisse les embrasser toutes : une ou, plus rarement, quelques études spéciales absorbent maintenant une vie entière. Si l’on voulait donc avoir des assemblées intéressantes et suivies, si les lectures devaient être écoutées et les faits discutés avec fruit, il fallait séparer les savans en autant de sections particulières qu’il y avait de branches d’études spéciales. C’est ce qu’on a commencé à faire dès 1827, tout en conservant quelques séances solennelles pour des objets d’intérêt général et pour des discours de circonstance.

Conformément aux statuts arrêtés à Leipzig en 1822, la réunion annuelle des naturalistes et médecins de l’Allemagne s’est tenue alternativement dans le nord et le sud de l’Allemagne. Elle a eu lieu en 1822 à Leipzig, en 1823 à Halle, en 1824 à Wurzbourg, en 1825 à Francfort-sur-le-Mein, en 1826 à Dresde, en 1827 à Munich, en 1828 à Berlin, en 1829 à Heidelberg, en 1830 à Hambourg, et en 1832 à Vienne. Chaque année a vu augmenter le nombre des assistans. La réunion de 13 personnes a Leipzig, se trouva portée à 38 à Halle, à 37 à Wurzbourg, à 88 à Francfort, à 250 à Dresde, à 156 à Munich, à 458 à Berlin, à 273 à Heidelberg, et à 412 à Hambourg. On s’y est rendu de pays très éloignes ; les savans du nord et de la Russie ont surtout profité de ce moyen de se mettre en communication directe avec leurs confrères de l’Allemagne. Néanmoins aucune réunion n’avait encore été aussi nombreuse et aussi brillante que celle qui vient d’avoir lieu à Vienne.

Jusqu’alors les savans autrichiens n’avaient fréquenté qu’en petit nombre ces congrès scientifiques : mais en 1830, après avoir pris les ordres de l’empereur d’Autriche, MM. le baron de Jacquin et Littrow, chef de l’Observatoire de Vienne, se rendirent exprès à Hambourg, pour proposer Vienne comme le lieu de la réunion pour 1831.

Cette offre fut acceptée avec plaisir, parce que les Allemands et les Prussiens ne connaissent guère plus l’Autriche que les étrangers ; on était curieux de faire connaissance avec les savans autrichiens, autant que de voir la belle capitale de cet empire et ses nombreuses collections. Le règlement de la Société exige la présence de quelques personnes de la ville où doit se tenir la prochaine assemblée, afin qu’on puisse choisir d’avance un président, et un secrétaire pour faire les préparatifs de la réunion. En conséquence, on choisit pour président M. le baron de Jacquin, et pour secrétaire M. Littrow, chef de l’Observatoire de Vienne.

Le choléra exerçant ses ravages à Vienne en 1831, la réunion fut renvoyée à 1832.

Dès le 18 septembre, onze cents personnes s’étaient fait inscrire, comme voulant prendr, part à cette assemblée, savoir : quatre cent soixante-quatre savans proprement dits, et six cent trente-six amateurs des sciences naturelles ; mais les jours suivans le nombre total des membres fut porté à près de douze cents personnes, parmi lesquelles figurèrent environ cinq cents savans. Ces derniers se trouvaient répartis, d’après leur lieu de naissance, de la manière suivante : il n’y avait qu’une soixantaine de savans de l’Allemagne proprement dite et de la Prusse, savoir : 10 Bavarois, 5 Hanovriens, 2 Hessois, 6 Saxons, i Wurtembergeois, 1 Mecklembourgeois, 6 Hambourgeois, 2 Francfortois, 1 Brêmois et 26 Prussiens, y compris 2 de la Prusse rhénane, 1 de la Poméranie et 3 de l’ancienne Prusse ; deux cent soixante-douze naturalistes ou médecins des états allemands de l’Autriche, savoir : 239 de l’archiduché d’Autriche, 5 de Styrie, 1 du Tyrol, 2 du Salzbourg, 15 de la Bohème, 9 de la Moravie, et 1 de la Silésie ; soixante-deux savans des états autrichiens non compris dans la confédération germanique, savoir : 6 de la Gallicie, 33 de la Hongrie, 2 de la Transylvanie, 1 de la Croatie, 1 de la Carinthie, 1 de Carniole, 2 de l’Istrie, 2 de la Dalmatie, 4 du pays de Venise, 10 de la Lombardie ; enfin vingt-six savans de pays très divers, savoir : 4 de Cracovie, 1 de Varsovie, 1 de Saint-Pétersbourg, 1 de la Finlande, 4 d’Angleterre, 1 d’Écosse, 4 de France, 2 d’Espagne, 1 de la Suisse, 1 de Parme, 1 des États du pape, i de Naples. 1 de Constantinople, 1 du cap de Bonne-Espérance, 1 des États-Unis, et 1 de Montévideo.

La Société s’est divisée en cinq sections, savoir : section de médecine et de chirurgie, composée de 243 membres ; section d’anatomie et de zoologie, comptant 64 membres ; section de botanique, composée de 52 membres ; section de géographie, géologie et minéralogie, comptant 54 membres ; et section d’astronomie, de physique et de chimie, composée de 105 membres. Les savans se sont trouvés répartis, d’après leurs études spéciales, en 59 physiciens, 8 astronomes, 22 mathématiciens, 4 mécaniciens, 6 économistes, 47 chimistes, 10 pharmaciens, 11 naturalistes, 36 minéralogistes, 22 géologues, 5 géographes, 52 botanistes, 34 zoologues, 17 anatomistes, 25 physiologistes, 240 médecins. 37 chirurgiens, 7 oculistes, 8 accoucheurs, et 3 docteurs vétérinaires. Chaque section a élu ses présidens et ses secrétaires, et a tenu quatre à cinq séances de trois ou quatre heures chacune, tandis qu’il n’y a eu que trois séances générales de toute la Société[1].

La section de géologie a été présidé, par MM. de Buch et Mohs, et les secrétaires étaient MM. Partsch et de Waldauf ; la section de physique avait pour président M. Rose l’aîné, de Berlin, et pour secrétaires, MM. de Holger et Baumgartner ; le président de la section de botanique était M. Goeppert, et les secrétaires MM. Endlicher, Zahlbruckner et Fenzl ; le président de la section zoologique a souvent changé : c’étaient MM. Burdach, Froriep, Sachs, etc., et les secrétaires étaient MM Fitzinger et le professeur Czermak. Enfin la section de médecine a eu pour président M. Harless de Bonn, et pour secrétaires MM. Hermann et de Vivenotjun.

La première séance générale fut ouvert, par un discours du président, et par la lecture des statuts de la Société pour régler sa marche.

Les trois séances générales ont été occupées presque entièrement, par la lecture de mémoires, en allemand ou en latin, sur des objets relatifs à la médecine, à la botanique et à la zoologie générale. Il y a eu cependant un mémoire géologique sur les matières charbonneuses des terrains anciens de la haute Silésie. M. le professeur Glocker, de Breslau, y a reproduit l’idée que le diamant n’était que de la houille altérée. Le secrétaire, M. Littrow, a clos la réunion par une espèce de compliment d’adieu. Breslau a été choisi pour le point de réunion pour 1833 ; M. de Wendt a été nommé président, et M. le docteur Otto secrétaire.

La section de géologie et de géographie a été composée des cinquante-quatre personnes suivantes : MM.les professeurs Allioli, de Munich ; le docteur Baader ; le chambellan comte Beroldingen ; le professeur Bousdorf, de Finlande ; le baron de Buch ; le conseiller A. Burger ; le professeur Calmberg, de Hambourg ; le conseiller Aug. van Coeverden, de Coblentz ; le docteur Colebrooke, de Londres ; le comte Collercdo-Mansfeld ; Cristofori, de Milan ; le docteur ès-sciences Cseremitzky, de Pest ; le docteur Dietl ; le docteur Diesing ; le professeur Ens, de Troppau ; le professeur Glocker, de Breglau ; le docteur Gloisner, de Léopold ; le conseiller de Hammer ; le professeur de Hlulek, de Léopold ; Jameson Torrie, d’Édimbourg ; le lord Kery, de Londres ; Mackie, d’Oxford ; le chambellan comte Mailath ; le docteur Mandl ; le chambellan comte Marschall ; le docteur Michael ; le professeur Mohs ; le baron de Montbel ; Megerle de Muhlfeld, directeur du cabinet minéralogique de l’Empereur ; Partsch, sous-directeur du même cabinet ; le docteur Pohl, directeur du musée brasilien ; le comte G. Razoumovski ; le professeur Riepl ; le docteur Reichenbach, de Blansko en Moravie ; le professeur Gustave Rose, de Berlin ; François de Rosthorn, de Wolfsberg en Carinthie ; le conseiller de Schreibers, directeur du musée impérial d’histoire naturelle ; le professeur Scherer, le professeur Schuster, de Pest ; le comte G. Sternberg, de Prague ; le comte Michel Teleki, de Hongrie ; Trimmel, employé à la chancellerie d’état ; le conseiller de cour Waldauf de Waldenstein ; le professeur Wehrle, de Schemnitz ; Wimmer, ministre protestant, de Hongrie ; le docteur Zacherl, Zahlbruckner, secrétaire, particulier de l’archiduc Jean ; le pharmacien Zellner, de Pless en Silésie ; le professeur Zeune, de Berlin ; le professeur Zippe, de Prague ; et le professeur Zipser, de Neuzohl en Hongrie. Le choléra avait retenu malheureusement une quinzaine de géologues autrichiens bien connus.

La première séance fut ouvert, par M. François de Rosthorn, qui présenta sa belle carte détaillée de la partie de l’Illyrie comprise entre la grande route de Laibach à Gratz, et celle de Klagenfurt à Laibach. Au-delà de trente espèces de roches se trouvent indiquées sur cette carte, dont la base est la nouvelle carte routière de l’Illyrie et qui représente une contrée occupée en grande partie par des formations peu connues. Il y joignit deux grandes coupes, l’une de Klagenfurt à Laibach, et l’autre de la Drave à la Save par Windisch-Kappel. Elles donnent une idée exacte de la structure de la chaîne des Karawanken ou de la position des roches secondaires calcaires ou arénacées des Alpes méridionales relativement au sol intermédiaire, caractérisé, par les Trilobites, Spirifères, etc. M. de Rosthorn a mesuré lui-même toute la ligne qui parcourent ces sections naturelles, et pour plus de sûreté, il a fait répéter, cet été, les mesures barométrique, par un homme intelligent, et les a fait coloré, par un peintre paysagiste, M. Greisel, qu’il a constamment chez lui pour peindre des objets d’histoire naturelle.

Enfin, il présenta deux magnifiques panoramas des Alpes ; l’un pris de la cime du Saualpe en Carinthie, donne exactement la hauteur variée, la configuration particulière, la constitution géologique, et la position des masses qui composent la chaîne secondaire méridionale des Alpes, savoir les Karawanken ; l’autre vue, prise d’une montagne élevée près de Gastein en Salzbourg, indique l’élévation, les formes, la structure et la conformation de la chaîne secondaire sur le versant nord des Alpes.

Ces ouvrages, qui peuvent servir de modèle pour l’exécution, seront envoyés en partie à la Société géologique de France, et l’auteur compte y joindre un mémoire explicatif. Quant à la carte, elle ne sera publiée que lorsque la gravure de la carte générale de l’Illyrie sera achevée au bureau topographique de l’état-major autrichien ; le tracé des montagnes est trop fautif sur toutes les cartes existantes pour pouvoir les prendre pour base d’une coloration géologique. Cette contrée ne sera donc géologiquement connue que dans un ou deux ans.

Comme secrétaire pour l’étranger, j’ai donné ensuite une idée de notre Société géologique, de ses statuts et de ses progrès. J’ai engagé les étrangers à s’associera nous, et leur ai développé les avantages de cette association. Mon appel a été entendu, ainsi qu’on le voit d’après le nombre des personnes présentées dans cette séance. J’ai exprimé le plaisir que nous aurions à nous réunir un jour avec les géologues allemands sur les bords du Rhin, et eux à leur tour m’ont chargé de vous témoigner combien ils désireraient une pareille réunion. Strasbourg, Stuttgart et Bonn s’offriront prochainement comme lieux propres pour ce congrès géologique.

Enfin M. de Buch présenta sa carte de l’île de Téneriffe.

La section se rendit, après la séance, chez M. de Schreibers pour y voir cinquante-sept dessins d’aérolithes et la collection d’aérolithes, probablement la plus complète qui existe, et on visita ensuite le cabinet de minéralogie de l’empereur, qui occupe le premier rang parmi les collections de ce genre.

La seconde séance fut ouvert, par M. le docteur Reichenhach, directeur des mines et usines de Blansko en Moravie. Il présenta la carte géologique du milieu de la Moravie, c’est-à-dire des contrées au N.-N.-O. et N.-N.-E de Brunn, et y joignit plusieurs coupes. Ce pays est occupé, par le gneiss, auquel succède la siénite, le grès pourpré intermédiaire ou old red sandstone. le calcaire de montagne avec beaucoup de polypiers, le grés houiller, le grès vert avec les argiles, et le fer hydraté, la craie grossière, quelquefois à Ammonites, etc., et le sol tertiaire supérieur. Il classe dans le grès houllier, non seulement les houillères de la Moravie occidentale, mais encore ce qu’on y avait appelé jusqu’ici grauwacke. Il mit sur la table une description volumineuse de cette partie de la Moravie ; manuscrit qu’il doit faire imprimer incessamment.

M. le comte Razoumovsky montra à la Société des impressions curieuses sur un calcaire argileux feuilleté du grès viennois ; ce sont des portions de zones circulaires en creux, et ressemblant à la trace de quelque animal de la classe des vers.

M. Zippe montra de nouvelles cristallisations de le parenthine, du plomb sulfaté, du zircon et de l’idocrase ; il ajouta que le plomb molybdaté indique faussement à Schemnitz, provient de Ruksberg dans le Bannat.

M. Waldauf de Waldenstein mit sous les yeux de la Société un immense atlas de cartes et de coupes concernant la Hongrie, la Gallicie et la Transylvanie, fruit des observations de notre confrère feu M. Lill. On y trouve une très petite carte générale de la Hongrie, une carte particulière des Carpathes septentrionales et orientales de la Gallicie, et une cinquantaine de coupes très bien faites. Ce travail est déposé dans les archives du conseil supérieur des mines.

Dans la troisième séance, la section de géologie se réunit à la section de botanique pour entendre la lecture d’un mémoire de M. le comte de Sternberg, sur les végétaux fossiles. Ce savant chercha à prouver, par des exemples, que les géologues doivent reconnaître l’âge de certains dépôts, afin d’aider le botaniste à déterminer à quelle classe de plantes appartiennent certaines impressions ou certaines pétrifications végétales, parce que la direction particulière donnée à l’étude de la botanique a fait trop négliger l’observation minutieuse des formes extérieures et de l’organisation intérieure de toutes les parties des végétaux qui nous sont seules conservées pétrifiées ou en impressions. Il faudrait poursuivre de pareilles recherches pour tous les genres connus de végétaux, et surtout pour les plantes équatoriales, avant de pouvoir espérer d’être exact dans les déterminations de la botanique fossile.

M. le comte de Sternberg fit voir ensuite diverses pétrifications végétales, telles qu’un tronc particulier de lépidodendron, divers fucoïdes et un morceau de marne du lias, entre les feuillets du quel s’était insinué et desséché l’Himantha alba. M. de Schlotheim aurait, d’après lui, méconnu le caractère de cette fausse pétrification, et l’aurait appelées fucoïdes crispus. Il mit sous les yeux de la Société une vingtaine de planches représentant des végétaux fossiles, surtout de la classe des algues marines, et un bon nombre d’éponges et d’alcyons divers dans la pierre lithographique de Solenhofen. Ces planches formeront un appendice, à sa Flore du monde primitif.

Après cette séance, la section se rendit au bureau topographique de l’état-major d’Autriche, où elle fut reçu, par M. le feld-maréchal-lieutenant comte Rotlikirch, par M. le major Skribanek, et par plusieurs autres officiers supérieurs, avec une grande prévenance et une rare modestie. On avait étalé à terre, dans de grandes salles, les originaux des relevés géographiques les plus récens, tant ceux qui avaient déjà été publiés sur des échelles réduites, que ceux qui devaient l’être incessamment. On y admira surtout la base des deux cartes de l’archiduché d’Autriche, celle des deux nouvelles cartes du Tyrol, et les relevés encore inédits de la Styrie, des provinces Illyriennes, des bords de l’Adriatique et de la chaîne des Carpathes ; relevés qui donnent aux montagnes une configuration très différente de celle qu’on trouve su.r toutes les cartes publiées jusqu’ici. On est occupé dans ce moment du relevé, de la Bohème et de la Moravie, L’on fut autant surpris de l’échelle immense de ces cartes (1 pouces viennois pour 400 toises, ou  ; de la grandeur naturelle), que d’y trouvée une représentation si fidèle et si vraiment géologique du terrain : des couleurs diverses y distinguent les cultures et ajoutent à l’effet. L’on sait que tous ces travaux géodésiques se lient à la confection, du cadastre pour toute la monarchie autrichienne. ouvrage commencé en 1813 et qu’il y a à cet effet à Vienne un institut lithographique et des ateliers de gravure. Peu de gouvernement font autant de dépenses que l’Autriche pour la levée de cartes exactes, et communiquent surtout avec autant de facilité les résultats obtenus.

Toutes les mesures trigonométriques de hauteurs qui ont servi de base pour les cartes d’Autriche, de Styrie, du Tyrol, de l’Istrie, des îles du golfe de Guarnero, de la Carinthie, de la Carmiole, y compris les cercles de Gorizia et de Trieste, ont été communiquées à M. le professeur Baumgartner, qui en a fait connaître une petit, partie en 1824 dans le Zeitschrift fur Pkysik. et qui vient d’en calculer environ trois mille, ce qui forme une brochure extraite du vol. X du même journal, et portant le titre de Trigonometrisch bestimmte Hohen von Oesterreich. etc. In-8° de 101 p. Vienne, 1832.

La quatrième séance fut honoré, par la présence du prince de Metternich, qui resta quatre heures avec nous, et se mêla avec beaucoup de tact à nos discussions géologiques. Un diplomate s’intéressant à la géologie peu, paraître singulier à celui qui ne sait pas que le prince de Melternich possède de grandes usines et de grandes terres dont il cherche à utiliser les richesses souterraines. D’ailleurs les mines forment un tel revenu pour le gouvernement ou pour la couronne, que la conversation des grands personnages en Autriche roule très souvent sur l’art des mines et la géologie.

J’ouvris la séance, par un mémoire sur la signification actuelle des mots de terrains primitifs et intermédiaires, et sur les groupes géologiques divers de l’Europe.

Ensuite M. Waldauf de Waldenstein exposa dans un discours les progrès que la géologie et l’art des mines avaient faits dans ces dix dernières années dans l’empire autrichien. Personne n’était mieux placé que lui pour un tel résumé, puisque sa place de secrétaire de cour au ministère des mines l’appelle à recevoir tous les documens nouveaux envoyé, par les ingénieurs des mines, et qu’il a provoqués lui-même ces envois.

Pour l’Italie, l’habile M. Maier a donné des notions nouvelles sur les mines de pyrites cuivreuses d’Agordo et les environs de ce bourg. L’on a acquis des connaissances plus positives sur le gisement bizarre du sel en Tyrol et dans le pays de Salzbourg, au moyen des recherches et des coupes de feu M. Lill de Lilienbach et de MM. le comte Breuner et Laier. M. Lill, ainsi que M. le professeur Riepl, se sont occupés du gîte de lignite de Hering en Tyrol. Sur les bandes de dépôts de cuivre argentifère en Tyrol, le conseil des mines a successivement reçu des renseignemens de MM. le conseiller Pansenberg, Maier, le comte Breuner, Stadler, conseiller à Hall, et Laier.

Les mines aurifères des montagnes schisteuses de Salzbourg ont été examinées avec soi, par M. le conseiller de gouvernement Schroll, le professeur Riepl et M. Russegger. (Voyez Zeitchrift f. Mathematikpour 1832, vol. I, cah. 2.)

MM. Mohs et Riepl ont donné des idées plus exactes sur l’étendue des bandes de fer spathique et hydraté dans les Alpes calcaires et schisteuses de la Styrie et de la Carinthie, et MM. Stadler, Laier, le comte Breuner, et François de Rosthorn, ont procuré encore d’autres renseignemens.

Pour l’Illyrie, les mines de mercure d’Idria ont fait le sujet d’abord d’un mémoire de M. le professeur Riepl (en 1822), puis d’un examen approfondi par une commission composée de MM. Stadler et le comte Breuner (en 1823). L’intérêt personnel et l’ignorance de quelques employés les avaient pousses en 1823 à faire craindre l’épuisement de ces mines. Il ne dut pas être difficile à la commission d’observer que le minerai y était en nids dans de véritables couches arquées, dont un, partie seulement avait été exploitée ; néanmoins il restait à savoir si la portion des couches non encore traversée était assez riche pour mériter d’être exploitée : or, d’après les dernières nouvelles reçues cet été, un retour de bonne fortune a répondu aux recherches ordonnée, par la commission. MM. Partsch et Riepl ont donné une idée générale de la Dalmatie.

Sur la Styrie, MM. les professeurs Riepl, Anker, l’archiduc Jean, Partsch et divers étrangers ont fourni des notions géologiques précieuses ; tandis que, pour l’Autriche, M.Partsch a continué les observations de M. C. Prévost et les miennes. MM. Teubner, Ritller, d’Oeynhausen et Lill se sont occupés successivement de la Moravie. MM. le comte Sternberg et Zippe ont donné beaucoup de renseignemens sur la Bohème, dont les lignites et les couches ferrifères avaient été signalé, par M. Riepl. M. Maier, conseiller des mines à Przibram, a envoyé des détails nouveaux sur les mines argentifères de Przibram et de Joachimsthal, sur le gîte du cobalt sulfuré, et les rapports de position des dépôts métallifères relativement aux filons, ou masses porphyriques ou granitiques.

M. Lill de Lilienbach a donné de beaux travaux sur toute la Gallicie et les Carpathes septentrionales, et en particulier des coupes nombreuses des mines de Wieliczka et de la plupart des mines salifères de ce pays. Ces notions corrigent ce que M. Schindler en avait dit.

Pour la Hongrie, depuis l’ouvrage de M. Beudant, M. le comte Breuner a donné des Mémoires intéressans sur les gîtes aurifères de Schemnitz et de Kremnitz ; les ingénieurs des nombreuses mines du Bannat et de la Transylvanie occidentale ont envoyé des cartes géologiques et des plans des mines. L’exploitation, et surtout le traitement métallurgique des minerais du Bannat paraissent avoir reçu des améliorations, et il y a, dit-on, parmi les employés des mines de ce pays des gens fort habiles.

La Transylvanie a été visité, par M. Partsch et par nous. Le conseil des mines. convaincu qu’il y avait encore bien des gîtes aurifères, ou en général métallifères, à découvrir dans la Hongrie, et surtout dans la Transylvanie, donna en 1826, à M. Parsch, la commission de dresser une carte géologique de la Transylvanie, et de lui donner surtout des notions précises sur l’étendue et la position des gîtes exploitables. L’on sait que ce pays est très difficile à examiner à cause des forêts, du petit nombre de routes praticables, et de la population trop disséminée ; l’exploitation régulière des mines, y est entravé, par des privilèges nationaux ou de localités.

M. Partsch a rempli consciencieusement sa commission de lever des cartes ; mais, n’étant pas accompagné de mineurs, et n’étant resté dans le pays qu’une année, j’ignore jusqu’à quel point il a pu remplir les vues tout-à-fait pratiques du conseil des mines. Si les notions géologiques sont nécessaires au mineur, et si les travaux de ce dernier sont très utiles au géologue, il faut ne pas confondre le but spécial de chacun d’eux, et faire empiéter l’un sur le domaine de l’autre.

Le géologue examine les affleuremens, le mineur fait des travaux souterrains, et ne les poursuit que lorsqu’ils sont profitables ; le géologue voit les choses trop en grand pour le mineur, et celui-ci trop en petit pour le géognoste ; de manière que ce n’est qu’en les associant ensemble qu’on peut exécuter des recherches exactes sur les richesses souterraines d’une contrée.

M. Waldauf mit sous les yeux de la Société des coupes géologiques que M. le comte Auguste Breuner a faites avec beaucoup d’exactitude dans la vallée du Zillerthal en Tyrol. Ce géologue y distingue deux bandes de calcaire intermédiaire en partie métallifère, le système arénacé et rouge des Alpes, et le système schisteux de transition. Au moment de la réunion, il était de nouveau, en sa qualité de conseiller des mines, en tournée d’inspection en Tyrol, et il était accompagné de M. Laier, directeur des mines de Raibel en Carinthie.

M. de Schreibers lut une notice sur un prétendu fer météorique des environs de Magdebourg, que M. de Stromeyer, de Goettingue, paraît avoir cru reconnaître pour tel. (Voyez Geottinger geleherte Anzeige pour 1832.) Cette grosse masse, acquise à grands frais, n’a ppoint présenté à M. Schreibers les caractères du fer météorique, mais ce n’est que du fer fondu, mêlé de pyrites cuivreuses, de cuivre et d’un peu d’argent, et en partie scoriacé ; ce n’est donc que quelque reste de fonderie.

M. le professeur Scherer donna des détails sur la chute de l’aérolithe tombé en 1808, du 15 au 25 juin, près de Kéres en Macédoine, et il discuta l’origine probable des aérolithes en général.

M. P. Partsch présenta quatre feuilles de sa grande carte géologique de l’archiduché d’Autriche. Il me chargea de communiquer, à cette occasion, à la Société les détails suivans sur cette entreprise :

« Les États de l’Autriche inférieure ayant nommé une commission pour l’exécution d’une topographie générale du pays, M. Paul Partsch fut chargé, dès 1823, de la partie géologique. Il fut convenu que ce savant lèverait non seulement la carte géologique de toute l’Autriche inférieure, mais encore celle d’une partie des provinces environnantes ; qu’il en ferait le texte d’un ouvrage géologique, et qu’il formerait une collection de roches et de fossiles de toutes ces contrées. Le Musée impérial rendant inutile l’établissement à Vienne d’un musée provincial, tel qu’il en existe dans les capitales de chaque province de la monarchie autrichienne, les États chargèrent M. Partsch de placer ses collections dans le Musée. Une somme de 3,000 fr. fut destinée pour payer les frais de voyage, et plus tard, en 1830, on y ajouta encore 1,500 fr. ; les frais d’envois et d’emballage restant à la charge du cabinet impérial d’histoire naturelle.

Un pareil travail n’aurait pas demandé dix ans, si M. Partsch avait pu y consacrer son temps ; mais, sous-directeur du cabinet impérial de minéralogie, il n’a pu voyager que pendant certaines époques où il lui a été accordé des congés, les employés du cabinet impérial ne jouissant pas de vacance.

De plus, en 1824, il fut chargé par le conseil des mines de faire un voyage en Dalmatie pour observer, de concert avec M. Riepl, le phénomène des détonations de l’île de Meleda, ce qui l’occupa presque tout l’été. En 1826, il reçut une nouvelle commission pour un voyage en Transylvanie, qui dura dix mois. En 1827, il ne put voyager, à cause du nouvel arrangement du cabinet minéralogique, d’après le système de M. Mohs ; en 1829, il ne put guère non plus s’occuper de géologie ; et le temps qu’il aurait pu employer en 1831 fut aussi consumé par l’arrangement complet de toute la collection des coquilles vivantes et fossiles et des roches. Ainsi jusqu’ici M. Partsch n’a pu consacrer que huit mois entiers à ce relevé géologique de l’Autriche, il a formé une collection de plusieurs milliers d’échantillons de roches et de fossiles, qui sont arrangés et étiquetés d’après leur gisement.

Il s’est décidé à enluminer géologiquement la belle carte, particulière de l’archiduché d’Autriche, qui est sur l’échelle de de la grandeur naturelle, ou d’un pouce viennois pour 2,000 toises viennoises, et dans laquelle le relief du terrain est très bien rendu. Cette carte est composée de dix-huit feuilles, qui comprennent, outre cela, des parties considérables de la Styrie, de la Hongrie, de la Moravie, de la Bohème et de l’Autriche supérieure. Ces dix-huit feuilles, de 14 pouces viennois de long et de 9 pouces viennois de haut, forment, avec une à feuille pour le titre, et la feuille de Styrie, comprenant Eisenerz, un carré oblong.

« L’auteur compte les publier par livraisons de deux à quatre feuilles. Les limites des formations seront portées sur les cartes. Comme chaque feuille coûte 1 fl. 40 kr. ou 4 fr. 35 c., la feuille colorié ne pourra revenir à moins de 3 fl. ou de 7 fr. 50 c. Cette année il en a achevé quatre feuilles, en commençant par les feuilles de Vienne et de Neustadt. Il y aura une feuille séparée explicative des couleurs. Quand la carte sera finie, l’auteur espère publier une carte générale, en employant la carte routière publiée aussi par l’état-major militaire d’Autriche, et qui est sur l’échelle de de la grandeur naturelle. On y adaptera un tracé bien fait de la configuration du pays.

« La carte particulière géologique de l’Autriche comprendra une surface de 654 milles carrés d’Autriche ; si l’on excepte la carte du pays de Nassau, par M. Stifft, ce sera la carte géologique qui aura été exécutée jusqu’ici sur la plus grande échelle. Plus tard, on verra s’y annexer les cartes de la Bohème, de la Moravie, et celle de la Styrie.

« Une description physique et géologique de l’Autriche, et de nombreux profils, seront publiés en même temps que cette carte. »

Après avoir donné une idée générale des terrains si variés du bassin de Vienne, M. Partsch mit sous les yeux de la Société un magnifique panorama de 8 à 9 pieds de longueur, représentant les environs de Vienne, ses montagnes diverses et ses plaines vues depuis la cime du mont Leopoldsberg, une des pointes extrêmes de la chaîne des Alpes, et à une lieue de Vienne. Il a fait exécuter par M. Wachtl ce panorama sous trois formes ; en noir, coloré comme un tableau, et coloré géologiquement ; le prix en noir est de 10 francs, et en couleur de 20 francs. Cette vue est particulièrement intéressante pour le géologue, parce qu’elle donne une idée exacte de la configuration d’une grande partie du bassin de Vienne.

M. Partsch montra enfin sa carte géologique de la Transylvanie, ouvrage qu’il ne veut publier qu’après y avoir fait un second voyage, et il y joignit deux cartes très détaillées, l’une des environs d’Offenbanya, et l’autre du pays entre le Marosch et l’Aranyosch, districts aurifères dont l’examen lui avait été particulièrement recommandé.

M. le professeur Riepl présenta sa carte géologique de la Bohème, auquel il a fait des additions et des corrections, et une carte géologique générale des Alpes de l’Autriche, surtout intéressante par le tracé des bandes de terrain ferrifère, cuprifère et aurifère.

M. le professeur Zippe montra sa carte géologique de la Bohème, qui est un ouvrage fort détaillé pour les portions septentrionales, méridionales et occidentales. Le sol méridional ancien de la Bohème présente sur une immense échelle l’enchevêtrement de masses allongées angulaires de gneiss dans de grands dépôts granitiques. La direction générale de toutes les couches anciennes de la Bohème est de l’O.-S.-O. À l’E.-N.-E. Le travail de M. Zippe sera prochainement publié.

M. le prince de Metternich exprima le vœu que les géologues s’entendissent pour colorer leurs cartes aussi uniformément que possible. M. de Buch fut chargé de faire un rapport à ce sujet à la prochaine assemblée. En attendant, M. de Buch porte à la connaissance de la Société que certains principes généraux de coloration qu’il a adoptés seraient aussi employés par MM. Brochant, de Beaumont et Dufrénoy dans la carte géologique de France. Telles sont, par exemple, la coloration en jaune de tous les grès, la coloration en bleu de beaucoup de calcaires, la distinction de divers dépôts arénacés ou calcaires par des hachures ou des pointillés, etc.

M. de Metternich désira que les géologues autrichiens voulussent bien s’entendre avec les géologues français et allemands pour admettre au moins ces premières bases, qui épargneraient beaucoup de peines, et qui seraient pour la géologie ce que l’alphabet est pour la lecture.

M. le lieutenant-colonel de Prokesch prononça un discours fort curieux sur le labyrinthe de Crète et sa situation véritable ; il le place au-dessous de Cortina, et croit que c’était un lieu de sépulture creusé du temps d’une domination égyptienne. Il présenta ensuite des roches diverses de la Haute-Égypte, et annonça qu’il allait faire suivre incessamment son voyage dans la Haute-Égypte et en Syrie de celui dans l’île de Crète et l’Archipel.

M. le professeur Zeune exposa ses idées sur les causes de la fréquence des ouragans aux environs du cap Horn et dans les mers de Chine ; il croit devoir les attribuer au voisinage des pays volcanisés.

M. le professeur Glocker, de Breslau, donna des détails sur divers gîtes de minéraux dans la Silésie supérieure, entre Petersdorf et Grosneudorf, savoir : sur l’amianthe, variété de l’amphibole, en petits filets dans des filons de diorite, au milieu du micaschiste ; sur l’hyperstène dans de la diorite, sur la chrysoprase, sur les gemmes de la Moravie, qui comprennent le spinel, la topaze, la cymophane, le péridot, la tourmaline, le grenat, l’idocrase et le zircon.

M. le professeur Bonsdorf, de Finlande, montra des morceaux de granite sans mica et à cristaux de feldspath rouge entouré d’un nouveaux minéral lamelleux et composé de silicate d’alumine et de chaux. Celle substance se décompose plus vite que le feldspath, de manière qu’il se forme des rainures autour des cristaux, et que les blocs perdent ainsi petit à petit leur, parties angulaires ou bien se creusent au centre en ne conservant au contraire que des portions aiguës sur les côtés. Cette roche se trouve en blocs erratiques entre Abo et Raume, et entre Viborg et Friedrichsver, et elle forme la base de la statue gigantesque d’Alexandre à Pétersbourg.

Dans la cinquième séance, M. Baumgartner donna quelques détails sur le goniomètre horizontal à réflexion, dont se sert M. Mohs, et qu’il trouve plus maniable que celui qui est posé verticalement. La main se trouve ainsi placée au-dessous de l’instrument ou du cercle horizontal. et l’on peut mesurer aisément en avant et en arrière.

M. le professeur Anker, de Gratz, avait adressé à la Société des fragmens de trionyx et une mâchoire inférieure d’antracotherium trouvés à côté d’une couche de lignite de la mollasse de Schonegg près de Gratz. À cette occasion M. Partsch fit remarquer que les mêmes ossemens se trouvent dans le calcaire quaternaire du Leithagebirge.

M. Partsch montra ensuite le dessin de trois morceaux d’une mâchoire inférieure de deinotherium giganteum  ; ce sont les parties les plus complètes qu’on en ait trouvées jusqu’ici. On sait que c’est un genre établi, par M. Kaup d’après des ossemens conservés au musée de Darmstadt. M. Partsch fit voir la figure de la mâchoire restaurée de cet animal.

M. Partsch mit en même temps sous les yeux de la Société plusieurs planches in-4o représentant soit des ossemens, soit des coquilles fossiles de l’Autriche, et faisant partie d’un ouvrage général sur les pétrifications de l’Autriche, ouvrage dont il s’occupe maintenant. Pour4ui donner toute l’exactitude possible, il compte communiquer, avant la publication, toutes les planches et certains objets aux paléontologistes et conchyliologistes de Paris.

M. Gustave Rose donna quelques détails nouveaux sur l’identité du pyroxène et de l’amphibole, et sur certains gîtes de l’Oural en général. Dans cette dernière chaîne le fer oxidulé forme des masses coniques dans le diorite ; le cuivre natif, oxidulé, carbonaté et vert s’y trouve dans le calcaire grenu en contact avec les bandes dioritiques. Le platine et l’or sont dans des vallons entourés de sommités composées de diorite, roche qui y passe à la serpentine comme dans les Pyrénées. Dans l’Altaï et l’Oural il n’y a point de basalte ; cette roche ne se montre en Sibérie qu’à Irkutz.

M. Rose exposa ses observations sur l’association de l’albite et du feldspath labrador avec l’amphibole et l’ouralite ; le feldspath labrador ne s’associe pas avec ce dernier minéral, qu’il a retrouvé dans une roche de Transylvanie contenant du mica, dans une roche de l’Inde et dans le porphyre pyroxénique de la vallée de Fassa.

Le diopside et le baikalite offrent de petites surfaces de clivage de l’amphibole, qu’on voit surtout bien à la lumière.

M. Bousdorf présenta divcis nouveaux minéraux. L’un d’eux, appelé Gigantolite, en gros cristaux prismes à clivage distinct oblique à l’axe, est voisin du fahlunite, et provient des roches granitiques de Tamela en Finlande. Il est composé d’alumine, de chaux et de fer. Un autre minéral d’Origervi a été trouvé composé d’alumine, de silice et de soude. M. Bonsdorf montra de beaux échantillons de dichroïte, de gros cristaux de tantalite de Tamela, du paulite ou amphibole de Labrador, qui, associé avec l’albite, forme une superbe roche contenant vingt-six pour cent de fer, enfin une variété très remarquable de feldspath du Labrador, cristallisé, qui présente des bandes de diverses couleurs avant la forme des contours du cristal. Ce minéral a offert dans l’analyse les mêmes élémens que le feldspath, comme M. Nordenskiold l’a fait connaître dans les Ann. de Poggendor pour 1830.

M. le professeur Wherle, de Schemnitz, fit quelques remarques sur le passage du porphyre trachitique au perlite, et sur le nouveau minerai de tellure découvert (tellurbismuth) à Czernowicz près de Schemmitz.

Le 30 septembre, la section fit une excursion géologique au Leopoldsberg et au Kahlenberg. M. Baumgartner, professeur de physique à l’institut polytechnique, profita de cette promenade pour mesurer des hauteurs au moyen de son hypsomètre thermométrique perfectionné. La boule du thermomètre est plongée dans un bain de vapeur d’eau chaude et non pas dans l’eau chaude elle-même, pour éviter les erreurs provenant de l’inégale des couches aqueuses. Le thermomètre est rendu plus portable par une petite boule à l’extrémité et dans son milieu. Enfin le vase en fer blanc est double et est disposé de manière à ce que les vapeurs de l’eau chaude puissent circuler entre les deux parois, ce qui rend les indications thermométriques plus uniformes. La hauteur de la colonne mercurielle est observée au moyen d’un fil de soie et même d’un microscope adapté sur la caisse en bois dans laquelle on serre l’instrument.

Comme jusqu’à présent aucune société savante n’a été reçue avec plus de distinction dans aucun pays, je me permettrai de raconter brièvement les honneurs qu’on nous a faits, et qui sont en même temps un hommage rendu à tous les hommes scientifiques.

La police avait pris des mesures toutes particulières pour faciliter aux savans la visite de la capitale et de toutes ses curiosités. Les douaniers, à la frontière, avaient l’ordre de montrer les plus grands égards aux savans se rendant à Vienne ; et aux barrières de cette capitale, il y avait des instructions pour leur épargner les courses ordinaires à la police. Chaque étranger reçut gratis un exemplaire du Guide de Vienne. (In-8° de 345 p., avec un plan.)

La municipalité de la ville de Vienne a fait frapper une médaille en bronze en l’honneur de l’assemblée. Elle représente. d’un côté le dieu du Danube couronnant la sagesse, et de l’autre une couronne faite avec les feuilles et les fleurs d’une plante portant le nom de l’empereur, et au milieu un mot grec signifiant, soyez les bien venus.

Non contens d’honorer de leur présence les séances générales et particulières de la Société, plusieurs ministres d’état invitèrent la Société. Toute l’assemblée, ainsi que les dames des savans étrangers, se trouvèrent le 22 à une grande soirée chez le prince de Metternich, où son épouse et ses parens faisaient les honneurs aux dames étrangères, et où se trouvaient réunis, avec tout le corps diplomatique, beaucoup de hauts personnages.

Le 23, la municipalité de la ville de Baden (produit d’une élection libre de la bourgeoisie, comme toutes les municipalités en Autriche) invita tous les savans étrangers, avec leurs épouses, ainsi que les savans les plus distingués d’Autriche, à passer le dimanche dans leur ville. Une quarantaine de diligences et malles-postes transportèrent les savans, par ordre du gouvernement. Le directeur général des postes, M. d’Ottenfeld, fit accompagner le société par plusieurs officiers des postes en grande tenue. La Société fut accueillie gracieusement par les archiducs Charles et Antoine, dans leur palais ; puis elle fut s’asseoir à un superbe repas de trois cents couverts, présidé par M. Trost, bourgmestre de Baden. Le bassin où est l’origine des sources sulfureuse avait été élégamment illuminé. Un bel agenda reçut les signatures de tous les invités.

Le 25, l’empereur donna à toute la Société, indistinctement, une fête magnifique à son château de Laxenbourg. Quatre-vingt-dix diligences transportèrent la Société aux frais de l’empereur ; près d’une centaine d’équipages de cour, promenèrent la Société et les dames dans le parc ; le lac fut parcouru dans d’élégants bateaux ; enfin, la journée se termina par un dîner superbe servi dans une immense tente aux couleurs autrichiennes, blanches et rouges ; un orchestre faisait entendre une belle musique. Le grand-maître des cérémonies, comte de Wurmbrand, faisait les honneurs de la fête, à laquelle assistèrent aussi tous les ministres, et beaucoup de conseillers d’état.

Le 27, le comte Mittrowski, ministre de l’intérieur et de l’instruction publique, voulut honorer la Société par un dîner des plus somptueux offert à quarante des savans les plus distingués, et de pays très divers. Une médaille en argent fut distribuée à chacun d’eux, et le ministre, ainsi que M. le baron de Stifft, directeur des études médicales au conseil d’état, déployèrent beaucoup d’amabilité, et de zèle pour l’instruction et les sciences.

Le 29, le prince de Metternich, qui avait désiré particulièrement cette réunion et avait montré son goût pour le savoir véritable, offrit aussi un diner très splendide à environ quatre-vingt savans. Toutes les délicatesses imaginables et de belles symphonies augmentèrent la somptuosité de ces dîners.

Outre ces fêtes, les sections de la Société reçurent isolément des invitations chez plusieurs riches particuliers, amis des sciences, ou chez des savans.

Ainsi, associée à quelques physiciens, la section de géologie fut invitée, au nombre de soixante personnes, à déjeuner, le 30 septembre, chez M. le baron de Leithner, directeur de la fabrique impériale de produits chimiques à Nussdorf, à une demi-lieue de Vienne. On gravit ensuite le mont Léopoldsberg, en passant en revue les divers dépôts tertiaires du bassin viennois (l’argile subapennine, les sables avec les grès, le calcaire à cérites, et le calcaire quaternaire ou à coraux), en étudiant aussi les variétés du grès viennois à fucoïdes et son calcaire ruiniforme. De la cime du Léopoldsberg, on compara avec la nature le panorama que M. Partsch a fait exécuter, et ce savant nom détailla la géologie du bassin viennois. Ensuite on se rendit par le mont Kalenherg à Grinzing, ou un tiers de la Société dîna chez un riche amateur des sciences, M. de Ratschitzburg, tandis que les autres furent répartis chez M. le baron de Leithner, chez le vice-président de Hauer et chez M. le conseiller de gouvernement Scholz, à Heiligenstadt. La soirée s’acheva ensemble chez ce dernier savant, directeur de la fabrique impériale de porcelaine.

Enfin, l’archiduc Jean d’Autriche, qui par des convenances pariiculFères et trop de modestie n’avait pas voulu prendre part directement à nos travaux, se fit présenter ceux d’entre nous qui l’intéressaient le plus. M. Partsch lui remit le bulletin de la Société géologique de France, et, comme un des secrétaires de la Société, j’eus l’avantage de juge, par moi-même des connaissances géologiques de ce prince. Vivant en simple particulier à ses mines et usines de Vordernberg en Styrie, il s’intéresse doublement à la géologie, comme chef du génie militaire, et comme mineur. Je me flatte qu’il voudra bien s’associer à nos travaux.

Cet exposé sommaire devrait suffire pour donner une idée plus juste de l’état des sciences, des savans, et des vues du gouvernement en Autriche. Néanmoins, pour dissiper encore davantage les préjugés, je me permettrai d’offrir le petit nombre d’observations que j’ai pu faire en parcourant presque toutes les provinces de la monarchie autrichienne. J’énumèrerai tous les progrès que l’Autriche me paraît avoir faits sous le rapport des sciences, de l’instruction, et des parties de l’économie publique qui en dépendent d’une manière plus ou moins directe. Pour ne pas trop sortir des limites de la science qui nous réunit, je ne ferai que récapituler les objets dont je m’occupe, et je m’arrêterai sur ceux qui sont véritablement géologiques.

Je commencerai par dire tout ce que je sais sur les voies de communication dans l’empire d’Autriche, savoir : sur les canaux. la canalisation des rivières. les chemins de fer et les routes.

La Hongrie se prêterait aisément à un grand système de canalisation, mais une constitution vicieuse y empêche toutes les entreprises de ce genre.

Dans ces dernières années on a travaillé à rendre navigable la Thaya en Moravie et l’on soigne toujours beaucoup le cours des rivières des montagnes, pour le flottage du bois.

Il est question de prolonger le chemin de fer qui joint la Moldau au Danube à Lintz, de cette dernière ville jusque dans le bassin de la Mur, en le faisant passer à travers la chaîne septentrionale des Alpes, au moyen de la profonde vallée de l’Enz. Cette dernière s’étend du Danube, par Hieflau, jusqu’à Lietzen, d’où une autre échancrure met la vallée de l’Enz en communication avec celle de la Mur. Un autre chemin de fer irait de Vienne à Trieste par les plaines de la Hongrie et de la Croatie, et, par la vallée de la Kulpa, il viendrait joindre celui de la vallée de la Mur, et pourrait même se prolonger dans le bassin de la Drave.

Vu le bas prix du fer, les chemins de fer se multiplieront rapidement en Autriche. En effet, celui qui réunit le Danube à la Moldau, et qui a 40 lieues de longueur, n’a coûte que 1,700,000 florins ou 4,250,000 fr., parce qu’en Autriche le quintal de fer en barre ne revient pas même, aux maîtres de forges, à 4 florins (10 fr.), et ils le vendent à 6 flor. ou 6 flor. 30 kr. (15 fr. ou 16 fr. 25 c.), c’est-à-dire plus du double meilleur marché qu’en France.

Je passe en revue tout ce que je sais sur les grandes routes dans chaque province. Sous le règne de l’empereur actuel, ont été ouvertes à grands frais une quantité de belles voies de communication. J’observe en particulier que les Alpes autrichiennes sont traversées en entier par sept grandes routes, savoir : de Vienne à Trieste par Gratz, de Vienne à Venise par Klagenfurt, de Saint-Polten à Agram et Carlstadt, de Lintz à Trieste et Fiume, de Salzbourg à Trieste, d’Insbruck à Mantoue, et de Fussen à Mila, par le mont Stelvio. Les travaux exécutés au mont-Stelvio et le long du lac de Lecco, placent cette route parmi les ouvrages les plus hardis, c’est le point le plus élevé qu’atteignent jusqu’ici les routes de voiture en Europe[2]. Dans les détails sur chacune de ces routes, je fais mention du projet de percer le mont Léobel en Carinthie, à 800 pieds sous sa cime ; la route passerait par une galerie longue de 600 toises, et qui coûterait, dit-on, 200,000 fr. Une huitième route n’est achevée qu’en partie, et irait de Kufstein en Tyrol à Venise ; la partie entre Bellune et Brunecken vient d’être achevée, et a montré l’utilité des connaissances géologiques, pour les constructeurs de routes, car une portion de la route creusée dans le gypse secondaire s’est écroulée.

Pour l’établissement de ces huit routes, on a utilisé les vallées transversales des Alpes, tandis qu’on a lié leurs extrémités par d’autres chaussées au pied des Alpes, et leur milieu dans deux points surtout, au moyen des grandes vallées longitudinales qui séparent, sur les deux revers des Alpes, le terrain schisteux des chaînes secondaires et calcaires. C’est la position de la route de Vienne à Feldkirk dans le Vorarlberg, par Bruck, et celle de Warasdin en Croatie à Glurns en Tyrol, par Klagenfurt.

La chaîne calcaire septentrionale des Alpes est traversée en Autriche par treize grandes routes, dont six sont doubles sur une partie de leur cours, et dont sept forment les extrémités des routes précédentes. Dans la chaîne calcaire méridionale, j’en compte quatorze, dont plusieurs sont nouvelles.

On vient d’achever, cet automne, une nouvelle route à travers les montagnes de Wellebit, entre la Dalmatie et la Croatie.

M. Boué met sous les yeux de la Société une carte des Alpes autrichiennes et des plaines qui sont à leur pied, sur laquelle il a indiqué, par diverses teintes, les routes transversales et longitudinales dont il vient de parler, ainsi que les chemins de fer projetés.

En considérant sur une carte le tracé de toutes ces routes, au pied et au milieu des Alpes, on voit qu’elles forment une suite de parallélogrammes plus ou moins réguliers, dont les côtés plus ou moins larges sont formés par les routes ou fentes transversales, et les côtés plus courts par les routes, situées dans les vallées longitudinales. Très rarement l’on trouve des routes établies sur les diagonales de ces parallélogrammes, comme par exemple dans le Tyrol méridional. Dans la partie orientale, le tracé des routes longitudinales dévie de la direction, pour se porter soit vers le nord, soit vers le sud ; ce qui provient de la bifurcation que les Alpes éprouvent dans ces contrées. La position des routes transversales nous paraît fort intéressante en ce qu’elles n’occupent pas seulement les vallées transversales des deux chaînes calcaires, mais qu’elles passent en outre sur les points les plus bas de la chaîne centrale. Ce fait ne tendrait-il pas à démontrer que les cols de cette dernière ne sont restés si bas, que parce qu’ils étaient placés dans la direction d’immenses crevasses produites par des forces qui ont pu fendiller toute la chaîne calcaire, sans avoir eu assez d’intensité pour produire un effet aussi intense sur la chaîne primaire, ou bien en y occasionant des affaissemens locaux. Les chemins vicinaux ne sont point tout-à-fait négligés dans certaines provinces, ils sont même bons en Autriche. Comme chaque province a sa direction des ponts-et-chaussées, les municipalités ou les seigneuries ont beaucoup de facilités pour ces sortes de travaux ; En Styrie j’ai été bien étonné de trouver dans la vallée sauvage et reculée de Turrach une route vicinale comparable aux meilleures routes d’Angleterre. Comme dans ce dernier pays les routes s’afferment et s’entretiennent par des péages. Pour diminuer les frais d’entretien des routes, on a adopté le système des roues larges. pour les voitures de roulage, et on a diminué les péages pour ce genre de roues afin d’en accélérer, l’adoption générale.

Les ponts en pierre sont rares en Autriche, le bois y étant à bon marché. Des ponts en chaînes de fer existent à Vienne et en Bohème. Les ponts volans sur le Danube ont été améliorés et remplacés, çà et là, par des ponts de bateaux. On parle de construire un pont fixe à Pest. Des bateaux à vapeur naviguent sur le Danube jusqu’à Orchova en Walachie, sur l’Adriatique et sur les quatre lacs au pied des Alpes italiennes.

Pour les progrès de l’agriculture, je me contente d’indiquer des défrichemens considérables, le grand dessèchement du Hansag en Hongrie, entrepris par l’archiduc Charles, les plantations de conifères sur des bruyères à sol caillouteux ; l’introduction de plusieurs cultures nouvelles, par des Sociétés ou des propriétaires, des améliorations dans la fabrication des vins, des distributions annuelles de prix pour encourager les agriculteurs, des courses de chevaux ayant lieu à Pest, à Vienne et près de Bruck sur la Leitha, enfin des expositions publiques d’horticulture. à Vienne et à Prague.

Il y a en Autriche plusieurs instituts agricoles et forestiers. Les deux principales académies de ce genre sont à Schemnitz en Hongrie et à Maria Brunn, près de Vienne.

Des écoles agricoles existent à Prague, Leitmeritz, Olmutz, Brunn, Lemberg, Vienne, Linz, Gratz, Klagenfurth, Laibach, etc. L’agriculture étant la base de la prospérité publique, en Autriche plus qu’ailleurs, on tâche d’imposer le paysan le moins possible, et de faire supporter plutôt les taxes aux industriels et aux habitans des villes, au moyen des octrois.

Quant à ce qui regarde l’exploitation des mines, et l’emploi plus profitable des richesses souterraines, cette partie a reçu de très grandes améliorations depuis une quinzaines d’années. Comme le gouvernement autrichien est celui de l’Europe qui fait exploiter à son compte le plus de mines, il est fort intéressé à en faire ouvrir de nouvelles, à mieux exploiter les anciennes, à former de meilleurs mineurs et de bons métallurgistes.

L’importance des mines, dans la monarchie autrichienne, est prouvé, par le tableau suivant de leurs produits en 1829.

quintaux.
Or 4,584 marks Zinc 1,860
Argent 85,189 Antimoine 3,510
Cuivre 42,219 quint. Alun 26,099
Mercure 2,815 Sulfate de cuivre 258
Fer brut 1,549,529 Sulfate de fer 33,703
Fer fondu 137,727 Cobalt 61
Étain 682 Arsenic 605
Minerai de plomb 16,810 Manganèse oxidé 772
Plomb 108,091 Soufre 14,143
Litharge 21,758 Charbon de terre 3,191,927
Galamine 7,606 Graphite 2,426


Dans les vallées des Alpes autrichiennes on produit annuellement 160,000 quintaux d’acier excellent, et il y a de plus deux fabriques d’acier de cémentation et trois d’acier fondu.

Le conseil supérieur des mines de Vienne est composé d’un président, le prince de Lobkowitz ; d’un vice-président, le comte Szecsen ; de six conseillers, de six secrétaires, de six sous-secrétaires ou concipistes, et de beaucoup d’employés de bureau. Ce conseil juge en dernière instance toutes les affaires relatives aux mines, soit des particuliers, soit du gouvernement.

La direction des mines est divisée, d’après les provinces et les objets particuliers ; ainsi il y a un bureau pour tout ce qui a rapport à la jurisprudence des mines, un bureau pour ce qui regarde la monnaie, un bureau pour la vente des produits des mines, etc.

Plusieurs genres de mines ont été affranchis de la redevance qu’on payait jadis à l’État ; dans ce cas sont celles du charbon de terres ; d’autres redevances ont été baissées.

Des commissions d’ingénieurs et de savans isolés ont été envoyées à diverses époques, par le conseil supérieur des mines, dans presque tous les districts d’exploitation. Ces commission ont non seulement procuré des idées plus exactes sur les gites métallifères et leur étendue ; mais elles ont servi encore quelquefois à bonifier l’exploitation en faisant modifier le personnel des employés.

Depuis que M. Maier est directeur des mines du Przybram, en Bohème, elles donnent annuellement 20,000 marks d’argent. Parmi les ouvrages qui demandent le plus de persévérance on doit citer le percement d’une grande galerie d’écoulement commencée à Schemnitz en 1786. Cet ouvrage gigantesque coûte annuellement 120,000 florins (300,000 fr.) et doit rendre plus productives ces mines d’argent et d’or.

Les exploitations appartenant à des sociétés ou des particuliers se sont aussi accrues ou modifiées, ces dernières années, en Autriche. Cette augmentation a surtout été sensible pour les mines de minerai de fer, très divers, soit en Bohème, soit en Styrie et en Carinthie. Pour utiliser des forêts immenses dont le bois pourissait sur place faute d’emploi et de moyen d’exportation, on à exploité le fer, et établi de grandes usines sur les terres de plusieurs grands seigneurs, comme sur celles du prince de Metternich en Bohème, de feu l’archiduc Rodolphe en Silésie, du prince de Schwarzenberg, etc. On a aussi repris d’anciennes mines de mercure et de plomb en Carinthie (mines de la Kuschna appartenant au comte Ecker). Dans le même pays, des gîtes très riches de charbon de terre ont été mis en exploitation, et utilisés pour le pouddlage du fer, comme par exemple, par MM. de Rosthorn, de Wolfsberg, qui sont à la tête d’une compagnie d’actionnaires créée dans ce but et ayant un capital d’un million de francs. En Bohème, l’exploitation des houilles anciennes a reçu des développemens, en même temps que les gîtes si abondans de fer oxidulé et hydraté ont été utilisés sur un plus grand nombre de points.

Les hommes éclairés du conseil supérieur des mines ont compris depuis long-temps que, pour donner une nouvelle impulsion à l’industrie des mines et des usines, il fallait perfectionner l’école des ingénieurs des mines et des mineurs. Or cette école se trouve malheureusement située à Schemnitz en Hongrie, localité où il faudrait de grands frais pour procurer aux élèves toutes les ressources littéraires et scientifiques qu’exigerait leur éducation. Au moyen de ses exploitations et de ses grands laboratoires métallurgiques, Schemnitz peut être une utile école d’application, mais non pas pour donner à l’élève les bases de la science des mineurs et des métallurgistes. On avait pensé que cette partie des études devait avoir lieu dans une plus grande ville, et on avait cru que Vienne, et en particulier l’ École polytechnique de cette capitale, offraient les conditions les plus favorables, pour remplir ce but. Néanmoins, quoiqu’il y ait plus de dix ans qu’on soit dans ces idées, et quoique M. Riepl ait formé dans l’Institut polytechnique une collection superbe de minéraux et de roches d’étude appropriée aux mineurs, l’école des mines n’a pas été changée, parce qu’on a craint d’offenser les Hongrois, qui trouvent n’avoir déjà que trop peu d’académies de hautes études. On s’est contenté de remonter un peu le personnel des professeurs de Schemnitz, et de faire quelque chose pour leurs collections, leur laboratoire chimique et leur bibliothèque. Il serait bien à souhaiter que cet état de choses ne durât pas plus long-temps, ou qu’on envoyât du moins un plus grand nombre de savans professeurs dans cette académie, jadis célèbre.

Le conseil supérieur des mines, comprenant toute l’importance de la géologie pour utiliser les richesses du sol, a commencé à former dans ses archives un dépôt de cartes géologiques. On y trouve déjà réunies la carte géologique de la Bohème, par M. Riepl, celle de la Gallicie, par M. Lill, celle de la Transylvanie, dressé, par moi en 1826, celle plus détaillée de M. Partsch, celle de la Hongrie, par M. Beudant, celle de la Moravie, par MM Teubner et Rittler, et celle de la Styrie. L’archiduc Jean a fait dessiner exprès une belle carte de Styrie, par M. de Hauslab, capitaine au corps des ingénieurs géographes, et cette carte, lithographiée, a été colorié, par MM. Anker, Partsch, Zahlbruckner et de Rosthorn. Le ministre à la tête du département des mines a fait faire une réduction de cette carte, et il a bien voulu m’en promettre un exemplaire, que je vous présenterai incessamment.

Outre ces cartes générales, le conseil des mines possède une foule de cartes locales et de coupes, savoir : la carte des environs d’Offenbanya, en Transylvanie, par M. Partsch ; les cartes de toutes les mines du Bannat que j’ai eu la faculté de publier dans le Journal de géologie (1831), et dans mon tableau sur l’Allemagne (1829) ; de grandes coupes des mines de la Gallicie, par M. Lill, des coupes des mines de Przybram et de Joachimsthal en Bohème, par M. Maier, des cartes et des coupes sur les mines de sel, de lignite et de plomb du Salzbourg et du Tyrol, par MM. Lill, Breuner, Riepl, Laier, etc. Enfin, pour rendre tous les documens encore plus utiles à l’avancement de l’art des mines, il a été résolu qu’il serait publié, au nom du conseil des mines, et par un comité, nommé ad hoc. un Recueil ou des Annales des mines, avec des planches et de belles cartes. M. le prince de Metternich a hautement parlé en faveur de cette nouvelle publication, et veut, par sa protection spéciale, qu’elle fasse honneur à l’Autriche, et avance les sciences géologiques. Après avoir parlé des mines, je passe à l’instruction publique, en renvoyant pour l’état de L’instruction primaire à un excellent rapport de M. le docteur Springer ; rapport inséré dans une publication semi périodique faite par une commission des états de l’Autriche inférieure, et accompagnée d’une carte semblable à celle que M. Dupin a coloriée pour la France. Il y a une loi qui oblige chaque famille d’envoyer les enfans à l’école pour leur apprendre au moins à lire, écrire et chiffrer. Dans les montagnes il y a, vu la dissémination des habitans, des maîtres ambulans ; dans les villes il y a des écoles du dimanche.

Chaque école primaire est sous le contrôle d’un inspecteur ; un inspecteur supérieur en surveille plusieurs, et présente annuellement le résultat de son inspection à la préfecture de la province. La préfecture (Kreisamt) en réfère au Gubernium ou gouvernement de l’état provincial, près duquel chaque grande division de la province est représenté, par un référendaire pour les études.

De là ces rapports vont à la commission centrale des études (Studienhofcommission), au ministère de l’intérieur et de l’instruction publique à Vienne, qui présente ses conclusions au conseil d’État, dans lequel M. le baron de Stifft est le référendaire supérieur des études. C’est ainsi qu’annuellement l’empereur prend une idée de l’état de l’instruction publique.

Une organisation semblable règle aussi les rapports du gouvernement avec la police médicale, les mines et le commerce.

La police médicale de l’Autriche peut servir de modèle ; elle doit beaucoup à M. le baron de Stifft.

En Autriche et dans le Salzbourg, sur 244,382 enfans capables d’aller aux écoles, 231,792 les fréquentent ; en Tyrol, sur 105,260 enfans d’âge d’aller aux écoles, 99,463 les fréquentent ; en Moravie et Silésie, sur 250,749, 230,563 y vont ; en Bohème, sur 470,207, 426,115 y vont ; en Dalmatie, sur 2,249, 1,460 y vont ; en Styrie, Carinthie, Carniole et Illyrie, sur 221,210, seulement 98,150 y vont ; en Gallicie, sur 444,044 à peine 51,129 y vont.

L’instruction de la Gallicie et de la Hongrie est donc bien différente de celle de tout le reste de l’empire ; les Hongrois veulent absolument nationaliser leur langue, et former de vingt peuplades une seule nation ; en conséquence, une foule d’écoles primaires hongroises ont été établies récemment.

On s’occupe maintenant de l’établissement d’écoles normales provinciales, et d’écoles pour les arts et métiers. Il existe déjà des écoles du dernier genre à Brody et Lomberg, en Gallicie, à Trieste, à Brescia, à Reichenberg et Slan en Bohème.

J’entre dans quelques détails sur les hautes études, le nombre des universités et celui toujours croissant des étudians. L’on sait qu’en 1826 les anciennes universités de Gratz et d’Insbruck ont été rétablies de manière qu’il y en à neuf, savoir à Vienne, Prague, Olmutz, Lemberg, Pest, Gratz, Insbruck, Padoue et Pavie ; ainsi, à l’exception de l’Illyrie et la Transylvanie, chaque état d’Autriche à une université, et il y a des académies de hautes études tant dans tous les états qui n’ont pas d’universités que dans quelques uns des autres, tels que la Hongrie.

Les professeurs sont nommés d’après des concours écrits, et par un conseil supérieur établi à Vienne, et ils sont rétribués par l’État, comme en France.

Il serait à désirer qu’on cessât de charger certains professeurs de plusieurs cours sur divers objets ; cet usage ancien ne répond plus au développement actuel des sciences.

Je donne ensuite une idée de l’Institut polytechnique dont l’empereur prit l’idée en 1815 au Conservatoire des arts et métiers à Paris, et où l’on enseigne toutes les sciences théoriques et pratiques, ce sont en quelque sorte les cours du Conservatoire réunis ceux du Collège de France qui ont rapport aux sciences mathématiques, physiques et naturelles. L’établissement de l’Institut polytechnique a coûté plus d’un million de florins ou 2,500,000 f., et ses dépenses annuelles actuelles s’élèvent à 56,000 florins.

Il y a à Prague un institut semblable à celui de Vienne ; sa fondation remonte à 1811, mais il a été amélioré plus récemment. Le directeur de l’établissement de Vienne est M. Prechtl, et les professeurs distingués qui y sont attachés publient leurs observations et des découvertes faites à l’étranger, dans un journal intitulé Jahrbuch des polytechnischen Institut, et formant déjà au-delà de vingt volumes.

Dans ces Annales on trouve la liste de tous les privilèges accordés pour de nouvelles inventions ou des importations utiles ; on peut se faire ainsi une idée des progrès de l’industrie en Autriche.

Les fonderies de fer se sont fort perfectionnées ; et les principales sont à Horzowitz, Nischburg, Neujoachimsthal, Shirow et Plast en Bohème, à Blansko et Friedland en Moravie, à Mariazell et Saint-Stephan en Styrie, etc.

Dès 1830, l’archiduc Rudolphe consacra une somme de 600,000 fr. à faire introduire, par M. le professeur Riepl, dans les usines, prés de Mahrish-Ostrau, le pouddlage d’acier par la houille. En 1831, MM. les frères Rosthorn, de Wolfsberg, employèrent ce nouveau procédé sidérotechnique dans leurs usines. D’autres personnes ont suivi leur exemple.

D’après ce procédé, le quintal viennois de fer en barre ne revient, pris à Wolfsberg, qu’à 7 fr. et demi ; de manière que ce fer pourra entrer eb concurrence avec celui d’Angleterre, ce qui activera l’exportation.

Divers procédés anglais ont été introduits dans les fabriques d’acier et d’instrumens en acier et en fer, dont la bonne qualité favorise toujours l’exportation.

La préparation de la litharge , du minium et de la grenaille, a reçu des améliorations, et l’exportation en est augmentée. Il en est de même de la fabrication du fer batut et du laiton. La fabrique de MM. de Rosthorn, à Od, donne des plaques et du fil de laiton excellens.

L’acide sulfurique concentré est produit dans le cercle de Pilsen en Bohème, au prix de 8 florins le quintal.

M. Previllier a, à Neukirchen, une fabrique d’excellentes vis de bois.

Les fabriques de porcelaines, de draps, de toiles, de pianos et la verrerie. ont fait des progrès. Les mécaniques des manufactures de soieries et de coton ont été perfectionnées, et le filage du coton à augmenté.

Des raffineries de sucre de betterave ont été établie, par M. le comte Colloredo-Mansfeld, etc. La fabrication des instrumens d’optique et de mathématiques a gagné.

De grandes expositions publiques de produits industriels ont eu lieu pour favoriser le développement de l’industrie. L’abolition des maîtrises a été maintenue dans les provinces qui ont été momentanément sous le régime français, tandis qu’on est occupé à substituer insensiblement ailleurs le système des patentes à celui des maîtrises. Tous les ouvrages et les fournitures pour le gouvernement sont concédés au moyen d’enchères publiques. L’état des postes a été extrèmement amélioré, des malle-postes élégantes ont été ajoutées aux diligences, les départs ont été multipliés, et de petites postes locales ont été établies comme à Vienne. Enfin plusieurs Sociétés d’assurances contre l’incendie et la grêle. ainsi que des caisses d’épargnes pour les pauvres. ont été formées dans divers états.

Les sciences naturelles étant cultivée, par plusieurs membres de la famille impériale, et la botanique et la minéralogie même par l’empereur, elles devaient naturellement avoir leur part dans les sacrifices fait, par le gouvernement pour les sciences en général. Aussi dès 1817 il fut question d’établir un musée d’histoire naturelle dans la capitale de chaque province. de manière que bientôt la monarchie possédât un moyen d’instruction que n’ont pas la plupart des pays. Avoir la prétention de doter chaque province d’un musée complet, cela aurait été folie ; il fut donc résolu de rassembler surtout dans la capitale de chaque état les produits naturels de la province, plus ses antiquités et ses chroniques.

Ce qu’il y eut de plus admirable dans cette nouvelle impulsion donnée aux sciences naturelles, c’est que ces musées, maintenant si intéressans, n’ont point été garnis seulement par les dons du gouvernement, mais que la presque totalité des objets qu’ils contiennent sont des présens fait, par des particuliers, soit grands seigneurs, soit simples savans, ou par les états provinciaux. Le gouvernement en général n’a fait que favoriser ces établissemens, il a interposé ses bons offices pour le local, et leur a remis quelques petites sommes ; mais l’entretien a lieu au moyen de souscriptions volontaires ou d’actions. À trois de ces musées provinciaux fut liée la publication d’un ouvrage scientifique et historique, ce sont les musées de Prague, de Gratz et d’Insbruck.

Dans tous, la minéralogie, la géologie et la paléouthologie tiennent une grande place, parce qu’on peut bien plus aisément compléter de pareilles collections que celles de quelques unes des autres branches de l’histoire naturelle. Le musée de Prague, fondé en 1818, est maintenant l’un des plus beaux, grâce aux largesses d’un grand nombre de membres des états, de nobles, de savans et d’amis des sciences. Cent quarante personnes soutiennent cet établissement au moyen d’actions ; la fortune de la Société s’élève à 117,320 fr., et il est administré par M. le comte Sternberg, comme président ; le prince Rodolphe Kinsky, le comte George Buquoy, le comte Jean Kolowrat-Krakowsky, le comte Jos. Thun, le chevalier Tr. de Gerstner, les professeurs Max. Millauer, Jos. Steinmann et l’abbé Benedict Pfeifer. Les conservateurs des collections sont M. Ch. Presl, pour l, partie zoologique et botanique, et M. Fr. Zippe, pour les collections minéralogique et paléonthologique.

Ces dernières renferment toutes les plantes fossiles recueillies et décrite, par M. le comte Sternberg ; un très grand nombre des pétrifications de toute l’Allemagne, une collection géologique, ainsi que des suites géographiques de roches de la Bohème. De plus, M. Zippe a eu la patience de composer probablement la plus riche collection de modèles de cristaux qui existe ; ils sont en gypse verni, et sont au nombre de 5,000.

La bibliothèque contient aussi beaucoup d’ouvrages précieux.

Le musée de Gratz a été fondé en 1819, et fait partie du Johanneum ; superbe et utile établissement qui comprend en outre une bibliothèque, une collection de médailles et d’antiquités, une collection technologique, une société de lecture, un très beau jardin botanique, divers cours publics sur les sciences naturelles, physiques et mécaniques, et la publication d’un journal scientifique. C’est l’archiduc Jean qui en est le fondateur, et qui favorise avec un intérêt tout particulier tous ses développemens ; MM. le comte Ignace d’Attems, l’abbé Louis de Rein et le chevalier Ferdinand de Thinnfeld en sont les curateurs.

Le cabinet minéralogique, sous l’inspection de M. Anker, est fort complet ; les roches et un bon nombre de fossiles de Styrie s’y trouvent convenablement placés, et on vient encore d’y ajouter deux salles nouvelles.

Le musée national de Pest a été organisé en 1818, quoique, dès 1802, le comte François de Szechenyi eût fait don à cet effet de ses collections de livres et de curiosités. Dès 1822, cet établissement avait un capital de 2,751,459 fr., placé en grande partie dans les fonds publics, et provenant des dons faits par des nobles, et des sommes assignées par la diète. Devant contenir les richesses naturelles d’un grand état, il occupe un vaste bâtiment, et est fort riche en minéraux ou suites de roches de divers lieux de la Hongrie, en ossemens des bords de la Thiess, et des cavernes calcaires près de Belenyes, en herbiers et en diverses parties zoologiques ; M. Sadler en est le directeur.

Le musée d’Insbruck ou Ferdinandeum est une annexe de la bibliothèque de la ville, et est intéressant par ses productions et ses fossiles indigènes, recueillis surtout par M. Pfaundler ; mais cette collection est incomplète. Une publication scientifique annuelle est attachée à cet établissement, qui a été fondé en 1821 sur le modèle du Johanneum.

Les autres musées provinciaux sont ceux de Brunn, de Troppau, de Laibach, de Trieste, de Milan, de Padoue et Pavie. Celui de Brunn ne s’est pas accru en proportion des autres, parce que le ministre de l’intérieur n’a pas encore pu obtenir la translation de l’académie du siège épiscopal d’Olmutz à Brunn, ce qui aurait donné au musée plus de gens propres à l’augmenter ; malgré cela, il y a des ossemens et des suites de fossiles tertiaires intéressans.

Celui de Laibach vient d’être agrandi, et contient des ossemens, et la collection minéralogique de feu M. b baron de Zoïs ; on est occupé à l’arranger entièrement à neuf.

Le musée de Trieste se distingue comme le précédent par beaucoup d’os fossiles des cavernes de la Carniole. Quant à celui de Milan, qui est assez vaste, il renferme la belle collection d’ossemens tertiaires, et celle des coquilles fossiles de feu M. Cortesi, d’après laquelle M. Brocchi a composé son ouvrage.

Les musées de Pavie et de Padoue sont établis pour l’usage des professeurs de l’Université, et offrent quelques beaux morceaux. Néanmoins, en général, le gouvernement devrait stimuler davantage le zèle des savans italiens, pour augmenter les collections publiques ; ainsi il pourrait enrichir le musée de Padoue de la collection de fossiles et de poissons de M. Castellini ; MM. de Cristofori et Jan pourraient fournir beaucoup au musée de Milan, etc.

Il n’y a donc, dans la monarchie autrichienne, que deux états, savoir, la Gallicie et la Transylvanie, qui n’aient pas de musée d’histoire naturelle ; néanmoins il y a à l’hôtel des mines de Léopold une collection de roches du pays et des Carpathes faite par M. Rudolph, qui a accompagné feu M. Lill dans ses voyages. À Clausenburg en Transylvanie, il y a quelques roches à l’Académie ; et la belle bibliothèque du baron Bruckenthal, à Hermannstadt, offre quelques uns des fossiles recueillis et décrit, par M. Fichtel.

Pour avoir une idée complète des moyens d’instruction pour l’histoire naturelle qu’offre l’Autriche, il faut encore ajouter aux collections précédentes celles de Vienne, qui comprennent le Musée brésilien et le grand Cabinet d’histoire naturelle. Ces deux collections, maintenant séparées à cause du manque de place, seront un jour réunies, lorsqu’on aura pris le parti de bâtir un musée ad hoc dans quelque faubourg de Vienne.

Le Musée brésilien comprend tout ce que les savans autrichiens envoyés au Brésil, aux frais de l’empereur, ont rapporté d’objets naturels des trois règnes : la géologie et la minéralogie y occupe une grande salle entière ; mais il y a trop de doubles des mêmes roches. M. Natterer est encore au Brésil, et ne revient que cette année.

Le cabinet d’histoire naturelle, le troisième en Europe pour plusieurs parties, à l’exception de l’anatomie comparée, contient la collection minéralogique publique la plus riche de l’Europe. Cette dernière occupant trois grandes salles garnies d’armoires vitrées et de corps de tiroirs, a fait l’admiration des savans réunis dernièrement à Vienne.

En 1826, l’empereur créa à l’université de Vienne une chaire de minéralogie pour M. Mohs, alors professeur à Freiberg, et ce dernier reçut en même temps l’invitation de mettre en ordre le cabinet minéralogique et la permission d’y donner son cours. Aux richesses qu’il possédait déjà étaient venues se joindre surtout la collection bien connue de M. Vander-Null, une collection de cristaux de M. Partsch, et beaucoup de choses venue par le canal du consul-général d’Autriche aux États-Unis. Pour garnir toutes les armoires, et rendre le coup d’œil plus symétrique et agréable, M. Mohs fit encore acheter des doubles, de manière que le même minéral se présente sous verre en plusieurs endroits. Si l’arrangement est superbe et agréable à l’œil, plus d’une personne aurait désiré à côté de cela une petite collection d’étude placée dans l’endroit le plus favorable pour la lumière ; et chaque minéral devrait porter le nom de la localité dont il provient. Cette masse de minéraux a rétréci la place qui devrait être consacrée aux roches et aux fossiles ; on a été obligé de placer des corps d’armoires dans le milieu des salles, pour recevoir les objets géologiques. L’on y remarque plusieurs fossiles intéressans des Alpes, beaucoup d’ossemens tertiaires et des alluvions, et une belle suite de divers bois fossiles. Le tout a été étiqueté et déterminé dans ces derniers temps autant qu’il était possible.

La grande collection des roches et fossiles d’Autriche, faite par M. Partsch, occupe de grands corps de tiroirs placés provisoirement dans des salles du cabinet zoologique ; tandis que sa collection de Transylvanie occupe une salle du musée minéralogique de l’Institut polytechnique. Dans ce dernier sont aussi les collections géologiques de M. Riepl, qui sont classées par grandes divisions géographiques naturelles, telles que les Alpes, les Carpathes, la Bohème, etc., et dans chaque division les roches sont placées dans les tiroirs dans le même ordre de superposition qu’elles ont dans la nature. Les plus gros morceaux, les types des dépôts les plus connus ou des masses métallifères, se trouvent dans des armoires vitrées placées sur les tiroirs. Le format des échantillons est très grand ; ils sont tous taillés admirablement bien, et ont chacun leur étiquette, outre leur numéro de catalogue, de manière que cette collection est une des plus belles qui existent, autant pour la vue que pour l’étude.

Si l’établissement des musées a fait avancer les sciences naturelles, je ne dois pas cacher que l’impulsion vers l’étude aurait été encore plus forte, si l’empire d’Autriche offrait un plus grand nombre de sociétés savantes. Si l’établissement d’académies soldées par le gouvernement, comme en France, pourrait offrir des inconvénient en créant un corps délibérant dans l’état, l’existence de sociétés scientifiques simplement reconnue, par le gouvernement n’aurait que des avantages sans présenter ces écueils, comme on en a la preuve dans beaucoup de pays. C’est le seul moyen d’entretenir l’émulation parmi les savans et de populariser la science. Néanmoins il y a des sociétés d’agriculture dans chaque état et presque dans chaque province, et leur influence est très bienfaisante, en ce qu’elles embrassent bien des objets qui n’ont que des rapports éloignés avec l’agriculture, tels que l’histoire naturelle, la statistique du pays, les routes, les compagnies d’assurance contre l’incendie, la grêle, etc.

La Société de Vienne est composée de 400 membres et sous le patronage du prince héréditaire ; mais celle de Styrie, fondée en 1817, et présidé, par l’archiduc Jean, est la plus remarquable de toutes ; car elle compte dans ce pays seul 2,900 membres, et elle est composée d’une société centrale établie à Gratz, et de 25 sociétés cantonnales[3]. Elle porte le titre de Société pour l’avancement de l’agriculture, de l’histoire naturelle et de la statistique. L’intérêt de ses séances annuelles est augmenté par les députations que les sociétés de Vienne, de Klagenfurth, de Laibach et de Gorizia, y envoient. Cette association public un journal sous le titre de Verhandlungen und Aufsatze ; publication dont il existe déjà une trentaine de volumes. Elle se soutient par des cotisations annuelles, et son reliquat en 1829, tous frais payés, s’élevait à 5,167 francs.

En parcourant la Styrie méridionale, je fus bien étonné d’apprendre que la belle route de montagne, entre Saint-Ilgen et Wolau, avait été construite uniquement par la Société d’agriculture de Styrie, dont les membres s’étaient cotisés avec quelques maîtres de forges éclairés des environs. S’il est bien honorable pour cette société d’être arrivée à un tel résultat, l’on reconnaît l’à-propos d’avoir placé le buste de son fondateur vis-à-vis d’une des cavernes calcaires de la fente pittoresque occupée par cette route.

Une Société de lecture, composée de 180 personnes payantes, est attachée au Johanneum de Gratz ; c’est le rendez-vous habituel de tous les gens les plus distingués et les plus éclairés de Gratz. La bibliothèque de cette Société est abonnée à plus de cent quarante journaux périodiques scientifiques, littéraires et politiques de pays très divers. La Société du Johanneum publie en même temps à ses frais un journal intitulé Steyermarkische Zeitschrift. qui est arrivé au douzième volume. A la fin de 1830, les fonds de réserve de celle Société s’élevaient, tous frais payés, à 3,135 fr.

Dans l’Italie vénitienne les six villes suivantes : Padoue, Vérone, Vicence, Udine, Trévise et Schio offrent des sociétés de lecture où l’on est étonné de trouver réunis aux principaux journaux de l’Europe, les ouvrages périodiques scientifiques les plus renommés en Italie, en France et en Angleterre. M. Massiagli a fondé à Venise un établissement semblable.

Il y a un Athénée des sciences et arts à Venise, à Bergame et à Brescia, et un cabinet de la Minerve à Trieste.

L’institut royal des sciences et arts de Milan, composé de 11 membres soldés et 14 membres honoraires, fait peu, parce que ses membres ne sont pas tous à Milan.

L’Académie royale des sciences et des arts de Padoue et de Pavie est très peu active.

On trouve encore à citer dans l’Italie autrichienne l’Académie des sciences dei Concordi à Rovigo. l’Académie d’agriculture, du commerce et des arts à Vérone. l’Académie d’agriculture d’Udine, une société savante sous le titre d’Academia de gli agiati. à Roveredo, et l’Académie de Pirgile à Mantoue.

L’ancienne Société royale des sciences de Parme a repris de l’activité, et fait une publication. D’un autre côté, la Société du musée national de Prague. composée de cent quarante membres, et présidé, par M. le comte G. de Sternberg, a publié jusqu’ici un bulletin qui est devenu mensuel depuis, et qui est maintenant malheureusement interrompu. Elle forme aussi une espèce de Société de lecture.

La Société royale des sciences de Prague est composée de 40 membres et fait une publication ; la Société patriotique et économique de Bohême compte 70 membres et 121 correspondans. Il y a de plus à Prague une Société pomologique.

Brunn, en Moravie, est le siège de la Société pour l’avancement de l’agriculture, de l’histoire naturelle et de la statistique de la Moravie et de la Silésie, société attachée au Musée-François de la même ville. Elle compte une soixantaine de membres.

La nouvelle Académie des sciences de Pest n’a encore rien fait paraître, quoique tous les académiciens, soient nommés, et qu’elle tienne des séances particulières, et tous les ans, en septembre, une séance publique générale. La langue hongroise paraît occuper beaucoup cette Société, qui tâche de l’épurer, et qui, cette année, a distribué des prix pour les meilleurs compositions faites dans cette langue pendant l’année.

Quant aux publications scientifiques périodiques qui se font dans l’empire autrichien, j’en compte au-delà de vingt-cinq, dont neuf offrent de l’intérêt pour le géologue. (Voy. pour plus de détails, le numéro de mars du Journal de Géologie pour 1831.)

M. le professeur Czermak avait espéré publier un journal mensuel d’histoire naturelle à Vienne ; mais le libraire n’ayant pas voulu faire les frais des planches, ce projet a échoué. D’un autre côté, les états de l’Autriche inférieure font publier depuis 1831 un Recueil de mémoires, sur l’histoire naturelle, l’histoire, et la statistique de l’Autriche, intitulé, Beitrage zur Landes-Kunde Oesterreichs unter der Ens. Le premier volume contient un Mémoire intéressant sur la géographie des plantes dans les Alpes d’Autriche et de Styrie, dans lequel l’auteur, M. Zahlbruckuer, démontre l’influence du sol sur les végétaux ; le prodrome d’une faune de l’Autriche, par MM. Fitzinger et Kollar, et une notice sur les travaux géologiques de M. Partsch. Le second volume vient d’être mis en vente, et le troisième est sous presse.

Enfin, je terminerai en vous disant que la censure littéraire, modérée en Autriche, n’empêche pas l’introduction de toute espèce d’ouvrages étrangères, mais qu’elle détourne trop souvent les savans de publier leurs idées. Le nombre des censeurs n’est pas assez grand, suivant les uns ; ensuite, quoique la censure sur les ouvrages purement scientifiques soit pour ainsi dire nulle, tout le monde n’aime pas à soumettre sa pensée à autrui, ou l’on craint mal à propos les formalités.

D’après tout ce que je viens de dire, je crois pouvoir conclure que si les progrès de la civilisation et des sciences paraissent plus lents en Autriche qu’aux États-Unis, et même que dans quelques autres pays de l’Europe, cet empire n’en marche pas moins vers un état plus perfectionné, et qu’il n’est nullement stationnaire comme on voudrait le faire croire.

M. Boblaye lit un Mémoire intitulé Recherches sur les roches désignées par les anciens sous les noms de marbre lacédémonien et d’ophite.

Il rappelle la découverte que M, Virlet et lui ont faite en Laconie des carrières de Crocées, décrite, par Pausanias, sur la route de Sparte à Gythium, carrières qui, suivant cet auteur, fournissaient aux Romains une roche magnifique employée à décorer les temples, les bains et les pièces d’eau. M. Boblaye a reconnu dans ce marbre du bourg de Crocées un porphyre vert identique à celui que les antiquaires et les minéralogistes désignent sous les noms de porphyre vert antique, de serpentine, d’ophite, porphyre dont ils retrouvaient depuis long-temps des fragmens dans les monumens anciens de la Grèce et de l’Italie, et dont ils ignoraient l’origine.

Ce fait établi, l’auteur est conduit à rechercher quelle était la roche célébré, par toute l’antiquité sous le nom de marbre lacédémonien  ; il démontra par un grand nombre de passages tirés des auteurs anciens que ce n’était point un marbre véritable ni une brèche calcaire, comme l’ont cru les commentateurs modernes et la plupart des anciens, mais le porphyre vert antique.

L’identité démontrée du marbre lacédémonien avec un porphyre que les marbriers de l’Italie désignaient depuis long-temps, à raison de son seul aspect, sous le nom de serpentin ou d’ophite, dissipe l’obscurité d’un passage de Pline. liv. 36, ch. 7, qui ne paraît pas avoir été compris par les traducteurs et commentateurs modernes : il devient prouvé que Pline y a désigné le marbre lacédémonien ou le porphyre vert sous le nom d’ophite. et que, dès lors, à défaut d’autre autorité, on avait du moins celle du naturaliste romain pour introduire, avec cette acception, le nom d’ophite dans la nomenclature moderne.

M. Boblaye termine ce Mémoire en exposant les inconvéniens qu’aurait d’ailleurs son adoption : confusion, ou du moins idée de rapports avec les ophiolites ; groupes de roches tout-à-fait distinctes ; emploi d’un nom qui, dans l’antiquité comme de nos jours, a été appliqué à un grand nombre de roches diverses, et enfin défaut d’analogie avec les noms de porphyre, mélaphyre, mimophyre, etc., dont l’usage est consacré par le temps, et qui forment le groupe si naturel l’ophite doit entrer ; il propose, en conséquence, de le remplace, par Prasophire. nom qui indiquerait sa racine, la couleur de la roche, et, par sa désinence, la place qu’elle occupe dans le groupe porphyritique.

M. le président rappelle que la Société doit désigner celui des secrétaires qui fera en janvier 1833 le rapport des travaux de la Société durant l’année 1832, et que deux commissions d’impression pour le Bulletin et les mémoires être complétées ou renouvelées.

Ces questions sont renvoyées au conseil.



  1. Sur les travaux de chaque section, il a paru à Vienne une brochure intitulée Bericht über die Versammlung deutscher Naturforscher u Arste in Wien. In-4° de 131 pag., 1832.
  2. Voyez Guide au lac de Come et aux routes du Stelvio et du Splugen. In-8o, avec une carte et 18 vues. Come, 1831.
  3. Ces sociétés, ayant chacune un président et un conseil, sont établies à Brandhof, Bruck, Cilly, Feldbach, Florian, Grobming, Hieflau, Iudenburg, Marburg, Murzzuschlag, Peggau, Pollau, Prassberg, Radkersburg, Rann, Rottenmann, Teufenbach, Trofayach. Voitsberg, Weitz, Wildon, Windisch-Gratz ; enfin celle de Gratz est divisée en deux.