Chants et chansons politiques/La Vache à Gambon

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G. Guérin, libraire (p. 46-47).


LA VACHE À GAMBON

Air : de Calpigi.


Jadis, sous un roi despotique
Pour désigner un hérétique,
On s’écriait : c’est un Judas !
Il est de la vache à Colas, (bis)
Aujourd’hui, mes amis, pour dire
Qu’un français n’aime pas l’empire,
Nous avons un nouveau dicton :
Il est de la vache à Gambon. (bis)

Gambon trouvant que l’on abuse
Des droits du fisc, il se refuse
À payer tous les lourds impôts
Dont on nous frappe à tout propos, (bis)
Mais le peuple prenant à tâche
De lui rendre, à ses frais, la vache[1]
Qu’on vendit devant sa maison :
Il est de la vache à Gambon. (bis)
Toutes les fois qu’un homme honnête
À l’arbitraire tiendra tête,
Un pouvoir fort et maladroit,
En vain contestera ce droit, (bis)

En lui voyant donner l’exemple
De chasser les vendeurs du temple,
Le Peuple dira : c’est un bon !
Il est de la vache à Gambon. (bis)

On a sur la place publique,
Des pantins comme en politique,
Équilibristes singuliers.
Mangeant à tous les râteliers. (bis)

Et voyez-en les conséquences.
Quoique donnant des espérances ;
On ne dit pas de Darimon :[2]
Il est de la vache à Gambon. (bis)

Mais tout homme n’est pas à vendre :
Il ne s’agit que de le prendre
Dans les rangs des hommes de cœur
Qui ne vivent que pour l’honneur. (bis)

À Rochefort allez donc dire :
« Ralliez-vous au second empire. »
Rochefort vous répondra : Non.[3]
Il est de la vache à Gambon. (bis)

  1. Le journal La Marseillaise ouvrit dans ses colonnes d’une souscription pour le rachat de la vache du citoyen Gambon (Janvier 1870.) Elle recueillit de nombreuses offrandes.

    Ch. Ferdinand Gambon fut élu en 1848 représentant de la Nièvre. Il votait avec la Montagne. — Il fut condamné à la déportation par la haute cour de Versailles et fut détenu à la prison d’État de Belle-Isle. — Redevenu libre, il refusa l’impôt au gouvernement de Napoléon III.

  2. Renégat politique.
  3. Rochefort sortit de Sainte-Pélagie où il était détenu illégalement, pour faire partie du gouvernement du 4 septembre 1870 ; mais en honnête républicain, il donna sa démission le 1er novembre, pour ne pas se trouver complice des mesures réactionnaires que prenaient ses collègues contre le peuple parisien.