Chants et chansons politiques/Les Comptes fantastiques d’Haussmann

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G. Guérin, libraire (p. 25-28).


LES COMPTES FANTASTIQUES D’HAUSSMANN


AIR : Halte-là, halte-là !


Quand Julien fait des boulettes[1]
C’est un bien grand pâtissier ;

Quand Haussmann double nos dettes,
C’est un bien grand financier !
Et, tous les jours il régale
Comme architecte ou maçon,
Notre chère capitale,
D’un beau plat de sa façon.
 Ce préfet,
 Est parfait,
Il fait bien tout ce qu’il fait.

Ainsi qu’une tarte aux pommes,
Il triangule un quartier ;
Ah ! c’est le premier des hommes
Pour employer le mortier !
S’il crée une grande artère,
Il passe par dessus tout,
Mais en jetant tout par terre…
Et lui seul reste debout.
 Ce préfet, etc.

Ce préfet est homme rare,
Mais il est fort dépensier ;
Édifice, rue ou square
Doivent au Crédit foncier ;[2]

Et s’il nous amène un fleuve[3]
Par un aqueduc nouveau :
C’est qu’il faut qu’il nous abreuve…
Payons et buvons de l’eau !
  Ce préfet, etc.

Ah ! les comptes fantastiques
D’Haussmann sont très-contestés,
Nos députés élastiques
Les ont toujours adoptés ;
On n’a jamais vu la Chambre
Désapprouver ce qu’il fait ;
Elle dirait : ça sent l’ambre
S’il daignait lui faire un p…
  Ce préfet, etc,

On sait, par expérience,
Que jamais Rouher ne ment,
Et qu’elle est son influence
Dans notre gouvernement ;
Ne sachant comment s’y prendre
Notre Auvergnat s’est blousé,
Quand il a voulu défendre
Le Paris haussmannisé.[4]

  Ce préfet,
  Est parfait,
Il fait bien tout ce qu’il fait.


  1. Julien, célèbre pâtissier du boulevard des Italiens.
  2. "Pour faire face aux dépenses nécessitées par les travaux de la ville, on aliéna pendant quarante ans les revenus futurs de Paris. Le traité, fait illégalement avec le Crédit foncier, fut ratifié par la Chambre, une faculté d’emprunt de 465 millions fut laissée à la disposition de M. Haussmann. (Mars 1869).
  3. La D’Huis.
  4. Quarante et une voix seulement refusèrent la