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Code de procédure civile 1806/Partie I, Livre V, Titre XV

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France
Partie I, Livre V, Titre XV : De l'Emprisonnement.
(p. 133-138).

Titre XV.
De l'Emprisonnement.

780. Aucune contrainte par corps ne pourra être mise à exécution qu’un jour après la signification, avec commandement, du jugement qui l’a prononcée.

Cette signification sera faite par un huissier commis par ledit jugement ou par le président du tribunal de première instance du lieu où se trouve le débiteur.

La signification contiendra aussi élection de domicile dans la commune où siège le tribunal qui a rendu ce jugement, si le créancier n'y demeure pas.

781. Le débiteur ne pourra être arrêté, 1.° avant le lever et après le coucher du soleil;

2.° Les jours de fêtes légales;

3.° Dans les édifices consacrés au culte, et pendant les exercices religieux seulement;

4.° Dans le lieu et pendant la tenue des séances des autorités constituées;

5.° Dans une maison quelconque, même dans son domicile, à moins qu’il n’eût été ainsi ordonné par le juge de paix du lieu, lequel juge de paix devra, dans ce cas, se transporter dans la maison avec l’officier ministériel.

782. Le débiteur ne pourra non plus être arrêté, lorsqu'appelé comme témoin devant un directeur du jury ou devant un tribunal de première instance, ou une cour de justice criminelle ou d’appel, il sera porteur d’un sauf-conduit.

Le sauf-conduit pourra être accordé par le directeur du jury, par le président du tribunal ou de la cour où les témoins devront être entendus. Les conclusions du ministère public seront nécessaires.

Le sauf-conduit réglera la durée de son effet, à peine de nullité.

En vertu du sauf-conduit, le débiteur ne pourra être arrêté ni le jour fixé pour sa comparution, ni pendant le temps nécessaire pour aller et pour revenir.

783. Le procès-verbal d’emprisonnement contiendra, outre les formalités ordinaires des exploits, 1.° itératif commandement; 2.° élection de domicile dans la commune où le débiteur sera détenu, si le créancier n’y demeure pas: l’huissier sera assisté de deux recors.

784. S’il s’est écoulé une année entière depuis le commandement, il sera fait un nouveau commandement par un huissier commis à cet effet.

785. En cas de rébellion, l’huissier pourra établir garnison aux portes pour empêcher l’évasion, et requérir la force armée, et le débiteur sera poursuivi conformément aux dispositions du Code criminel.

786. Si le débiteur requiert qu’il en soit référé, il sera conduit sur-le-champ devant le président du tribunal de première instance du lieu où l’arrestation aura été faite, lequel statuera en état de référé: si l'arrestation est faite hors des heures de l'audience, le débiteur sera conduit chez le président.

787. L’ordonnance sur référé sera consignée sur le procès-verbal de l’huissier, et sera exécutée sur-le-champ.

788. Si le débiteur ne requiert pas qu’il en soit référé, ou si, en cas de référé, le président ordonne qu’il soit passé outre, le débiteur sera conduit dans la prison du lieu; et s'il n'y en pas, dans celle du lieu le plus voisin: l’huissier et tous autres qui conduiraient, recevraient ou retiendraient le débiteur dans un lieu de détention non légalement désigné comme tel, seront poursuivis comme coupables du crime de détention arbitraire.

789. L’écrou du débiteur énoncera, 1.° le jugement; 2.° les noms et domicile du créancier; 3.° l’élection de domicile s’il ne demeure pas dans la commune; 4.° les noms, demeure et profession du débiteur; 5.° la consignation d’un mois d’alimens au moins; 6.° enfin, mention de la copie qui sera laissée au débiteur, parlant à sa personne, tant du procès-verbal d’emprisonnement que de l’écrou. Il sera signé de l’huissier.

790. Le gardien ou geolier transcrira sur son registre le jugement qui autorise l’arrestation: faute par l’huissier de représenter ce jugement, le geolier refusera de recevoir le débiteur et de l’écrouer.

791. Le créancier sera tenu de consigner les alimens d’avance. Les alimens ne pourront être retirés lorsqu’il y aura recommandation, si ce n’est du consentement du recommandant.

792. Le débiteur pourra être recommandé par ceux qui auraient le droit d’exercer contre lui la contrainte par corps. Celui qui est arrêté comme prévenu d’un délit, peut aussi être recommandé, et il sera retenu par l’effet de la recommandation, encore que son élargissement ait été prononcé et qu’il ait été acquitté du délit.

793. Seront observées, pour les recommandations, les formalités ci-dessus prescrites pour l’emprisonnement; néanmoins l’huissier ne sera pas assisté de recors, et le recommandant sera dispensé de consigner les alimens, s’ils ont été consignés.

Le créancier qui a fait emprisonner pourra se pourvoir contre le recommandataire devant le tribunal du lieu où le débiteur est détenu, à l’effet de le faire contribuer au paiement des alimens, par portion égale.

794. A défaut d’observation des formalités ci-dessus prescrites, le débiteur pourra demander la nullité de l’emprisonnement, et la demande sera portée au tribunal du lieu où il est détenu; si la demande en nullité est fondée sur des moyens du fond, elle sera portée devant le tribunal de l’exécution du jugement.

795. Dans tous les cas, la demande pourra être formée à bref délai, en vertu de permission de juge, et l’assignation donnée par huissier commis au domicile élu par l’écrou: la cause sera jugée sommairement, sur les conclusions du ministère public.

796. La nullité de l’emprisonnement, pour quelque cause qu'elle-soit prononcée, n’emporte point la nullité des recommandations.

797. Le débiteur dont l’emprisonnement est déclaré nul ne peut être arrêté pour la même dette, qu’un jour au moins après sa sortie.

798. Le débiteur sera mis en liberté, en consignant entre les mains du geolier de la prison les causes de son emprisonnement et les frais de la capture.

799. Si l’emprisonnement est déclaré nul, le créancier pourra être condamné en des dommages-intérêts envers le débiteur.

800. Le débiteur légalement incarcéré obtiendra son élargissement,

1.° Par le consentement du créancier qui l’a fait incarcérer, et des recommandans, s’il y en a;

2.° Par le paiement ou la consignation des sommes dues, tant au créancier qui a fait emprisonner qu’au recommandant, des intérêts échus, des frais liquidés, de ceux d’emprisonnement, et de la restitution des alimens consignés;

3.° Par le bénéfice de cession;

4.° A défaut par les créanciers d’avoir consigné d’avance les alimens;

5.° Et enfin, si le débiteur a commencé sa soixante-dixième année, et si, dans ce dernier cas, il n’est pas stellionataire.

801. Le consentement à la sortie du débiteur pourra être donné, soit devant notaire, soit sur le registre d'écrou.

802. La consignation de la dette sera faite entre les mains du geolier, sans qu’il soit besoin de la faire ordonner; si le geolier refuse, il sera assigné à bref délai devant le tribunal du lieu, en vertu de permission. L’assignation sera donnée par huissier commis.

803. L’élargissement, faute de consignation d’alimens, sera ordonné sur le certificat de non-consignation, délivré par le geolier, et annexé à la requête présentée au président du tribunal, sans sommation préalable.

Si cependant le créancier en retard de consigner les alimens fait la consignation avant que le débiteur ait formé sa demande en élargissement, cette demande ne sera plus recevable.

804. Lorsque l’élargissement aura été ordonné faute de consignation d’alimens, le créancier ne pourra de nouveau faire emprisonner le débiteur, qu’en lui remboursant les frais par lui faits pour obtenir son élargissement, ou en les consignant, à son refus, ès mains du greffier, et en consignant aussi d’avance six mois d’alimens: on ne sera point tenu de recommencer les formalités préalables à l’emprisonnement, s’il a lieu dans l’année du commandement.

805. Les demandes en élargissement seront portées au tribunal dans le ressort duquel le débiteur est détenu. Elles seront formées à bref délai, au domicile élu par l’écrou, en vertu de permission du juge, sur requête présentée à cet effet: elles seront communiquées au ministère public, et jugées sans instruction, à la première audience, préférablement à toutes autres causes, sans remise ni tour de rôle.