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Contes des mers du sud/5

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Traduction par Paul Gruyer et Louis Postif.
Contes des mers du sudHachette (p. 146-175).

MAOUKI

Il s’appelait Maouki et était fils d’un chef.

C’était un adolescent pesant cent dix livres, avec une tignasse épaisse et crépue comme en possèdent les nègres.

Nègre, il ne l’était pas au sens absolu du mot. Sa peau n’était pas d’un noir bleu, ni d’un noir pourpre, comme celle des vrais fils de Cham. Elle était plutôt violâtre et tirait sur la couleur prune.

Ses dents, par contre, étaient complètement noires, d’un noir de suie.

Elles devaient cette riche coloration à sa mère qui, sitôt achevée la seconde dentition de l’enfant, les avait teintes ainsi à l’aide d’une poudre minérale provenant d’une certaine pierre qui se rencontre dans le sol de l’île, parmi les éboulis, et que l’on pile. L’opération s’était effectuée en une seule nuit et les dents de Maouki en avaient pour toute leur durée.

Maouki avait trois tambos. Le tambo, en Mélanésie, correspond au tabou polynésien.

Les trois tambos de Maouki étaient les suivants :

En premier lieu, il ne devait jamais donner la main à une femme, ni permettre à une femme de le toucher, lui ou ses objets personnels.

Secondement, ne jamais manger de palourdes, ni aucun aliment cuit sur un feu ou dans un récipient où des palourdes avaient été cuites.

Troisièmement, ne jamais toucher un crocodile, ni naviguer dans une pirogue transportant la plus menue portion d’un crocodile, ne fût-ce qu’une dent de ce saurien.

Malaïta est la plus sauvage des îles Salomon. Si sauvage qu’aucun négociant étranger, ni aucun planteur n’ont jamais réussi à y prendre pied.

Tous ceux qui l’ont tenté, depuis les marchands de bois de santal jusqu’aux pêcheurs d’holothuries, ces coquillages qui font le régal des Chinois, ont été tués à coups de tomahawks,

Ou encore, d’une façon plus moderne, par les balles dum-dum des Sniders, dont les indigènes se sont fournis, par voie d’échange, auprès des trafiquants de passage.

Malaïta, en revanche, par l’intermédiaire de ses chefs, procure aux recruteurs de main-d’œuvre des travailleurs plus ou moins bénévoles, qui s’engagent par contrat à aller trimer dans les autres îles de l’archipel pour un temps déterminé et moyennant un salaire de trente dollars par an.

Car les indigènes de ces îles, qui se sont civilisés au contact des blancs, dédaignent aujourd’hui, quelque prix qu’on leur offre, de travailler dans les plantations.

Maouki avait les lobes des oreilles démesurément étirés, et percés d’une vingtaine de trous.

Les plus petits de ces orifices étaient ornés de vis de cuivre, de clous de fers à cheval, de bouts de cordelettes, de feuilles de palmiers et, aux heures où le soleil était moins torride, pour éviter qu’elles ne se fanassent, de fleurs écarlates d’hibiscus,

Dans l’un d’eux, il portait également sa pipe de terre.

Les plus gros trous, où le fourneau de la pipe aurait pu passer tout entier, étaient garnis de bouchons de formes variées, taillés dans du bois, et de vieilles cartouches.

Maouki portait en outre, dans sa chevelure, un couteau dont la lame était repliée sur une mèche crépue.

Notre homme, on le voit, était éclectique dans sa parure et n’avait pas besoin de poches :

Où ces poches auraient-elles, d’ailleurs, trouvé place ? puisqu’il n’avait, pour tout vêtement, qu’une bande de calicot, de quelques centimètres de large, dont il se ceignait les reins.

Mais le bijou qu’il arborait avec le plus d’orgueil était l’anse d’une ancienne tasse de porcelaine, suspendue à un grand anneau d’écaille, lequel passait à son tour dans le cartilage du nez.

En dépit de tous ces colifichets, Maouki était au demeurant ce qu’on, peut appeler, en Mélanésie, un joli garçon.

Ses traits, petits et réguliers, délicats même, étaient d’apparence efféminée, comme ceux d’une toute jeune fille.

Bouche et menton étaient menus, et mâchoire, nez et front n’accusaient pas la moindre énergie.

Seuls les yeux, où se percevait une flamme voilée, trahissaient, observés avec attention, les autres aspects de ce caractère composite et ses forces cachées : l’audace intrépide, l’obstination, l’ingéniosité et la ruse.

Quand l’occasion se présentait pour Maouki de mettre en jeu toutes ces forces qui dormaient en lui, c’était, chez ceux qui le voyaient agir, une véritable stupéfaction.

Le père de Maouki était, à Malaïta, le chef de Port-Adam.

Situé au bord de la mer, Port-Adam est ce qu’on appelle un village « d’eau salée ».

Maouki avait, dès son enfance, autant vécu dans l’eau que sur le sol ferme. C’était, à proprement parler, un amphibie.

À un an, il avait appris à nager,

À sept ans, il plongeait droit sous dix mètres d’eau et pouvait y demeurer, sans respirer, durant une minute entière.

Il était intime avec les poissons, les crustacés et les roches sous-marines, et le maniement d’une pirogue n’avait point de secret pour lui,

C’est alors qu’il fut volé par les « broussards », qui habitent l’intérieur de l’île, ont pour la mer une répulsion invincible, ne savent même pas nager et sont les ennemis nés des hommes d’eau salée.

Les villages des broussards sont dispersés dans l’épaisseur de la jungle, sur la partie haute de Malaïta, et la fumée qui s’en élève, dans le calme du matin, annonce seule qu’il y a là des hommes.

Les blancs ne se risquent jamais chez les broussards.

Ceux qui l’ont osé, lorsqu’ils cherchaient l’or à Malaïta, ont, derrière eux, laissé leurs têtes coupées, pendues, grimaçantes, aux poutres enfumées des huttes.

Maouki devint l’esclave du vieux Fanfoa, qui était chef d’une vingtaine de villages.

Et, dès lors, il ne vit plus la mer que de loin, à travers les déchirures de la jungle et des forêts vierges, ou du faîte des rocs nus des pics.

Lorsque Maouki atteignit dix-sept ans, un grand malheur advint à Fanfoa.

Le tabac manqua complètement au vieux chef.

Les temps étaient durs et la faute en incombait à Fanfoa et à ses broussards, qui avaient commis une dangereuse erreur.

Le seul petit havre où les broussards se risquaient parfois à descendre était Suo.

Si étroite était cette baie, encerclée de palétuviers qui faisaient pendre leurs rameaux sur l’eau profonde, qu’une goélette n’y pouvait virer sur ses ancres.

Sans penser à mal, deux hommes blancs, montés sur un cotre, pénétrèrent un jour dans ce traquenard.

Ils venaient quérir des recrues et possédaient, Sur leur bateau, beaucoup de tabac et des marchandises d’échange, sans parler de trois fusils et de munitions abondantes.

Les affaires allèrent au mieux pour les deux parties en présence, et, au cours de la première journée, vingt recrues furent inscrites sur le registre du bord. Le vieux Fanfoa signa en personne.

Mais, le soir du même jour, les vingt recrues massacraient les deux blancs, pillaient toutes les marchandises et brûlaient le cotre.

Après quoi il y eut, chez Fanfoa et dans tous ses villages, une merveilleuse abondance de tabac et de marchandises de toute sorte.

Puis il fallut déchanter. Un navire de guerre anglais vint, un beau matin, s’embosser devant Malaïta et, de plusieurs milles de distance, lança sur le centre de l’île une grêle d’obus.

Les broussards, épouvantés, s’enfuirent dans la jungle.

Alors plusieurs compagnies débarquèrent en armes et parvinrent jusqu’aux villages, où ils brûlèrent toutes les huttes, avec leur contenu.

Cocotiers et bananiers furent abattus, les jardins retournés, avec leurs légumes, et tués tous les poulets et tous les cochons.

Ce fut, pour les broussards, une terrible leçon et, trois mois durant, aucun blanc ne se présenta plus pour négocier.

Quand les recruteurs reparurent à Suo, ils furent accueillis avec des égards extrêmes et des protestations sans fin d’amitié,

Une goélette demeurée au large, avec ses canons prêts à faire feu, envoya à terre une embarcation.

Et les marchandises d’échange ne furent livrées aux émissaires de Fanfoa qu’après que les recrues désignées eurent été transportées à bord de la goélette, où elles signèrent le contrat d’usage.

Plus mort que vif, Maouki était du nombre.

Son tour venu, il fut mené, entre deux blancs armés de revolvers, à la grande cabine où un autre blanc était assis avec un livre ouvert devant lui, sur lequel il écrivait à l’aide d’un petit bâton des signes étranges et mystérieux.

L’homme blanc examina Maouki, comme il eût fait d’un porc ou d’une volaille. Il lui fit lever les bras, lui tâta la poitrine et les biceps, ainsi que les cuisses et les muscles des jambes.

Puis, satisfait de son inspection, il inscrivit quelque chose sur son registre.

Maouki, en guise de signature, toucha de la main le bâton à écrire. Ce qui signifiait qu’il s’engageait à travailler trois ans durant sur les plantations de la Moongleam-Soap-Company.

Il reçut, comme arrhes, une demi-caisse de tabac, un lot de canifs et de couteaux de poche, une pièce de calicot et des grains de collier.

Le tout dont la valeur était à retenir, ultérieurement, sur le salaire qui lui serait dû.

La longue plume, coquettement piquée sur la tête de Maouki, fut arrachée et ses cheveux coupés court.

Un lava-lava d’un jaune éclatant, plus décent que l’étroite bandelette qui voilait seule sa nudité, lui fut finalement remis, avec ordre de s’en envelopper.

La goélette, avec une soixantaine de recrues, remit ensuite à la voile.

La navigation dura plusieurs jours et Maouki vit défiler, du pont de la goélette, plus d’îles et de terres qu’il n’en avait jamais soupçonné d’exister.

Il connut des effets inouïs de la magie des blancs. Notamment une machine de cuivre et de fer, toute trépidante et toute fumante, encastrée dans les flancs du navire et qui, pour faire avancer la goélette, remplaçait le vent quand celui-ci manquait.

Et des boîtes aussi, qui, lorsqu’on les remontait, parlaient et riaient, comme font les hommes.

Bien plus. Il vit un blanc dont la sorcellerie personnelle était si puissante qu’il pouvait retirer de sa bouche toutes ses dents et les remettre en place, avec la même facilité,

La goélette accosta en Nouvelle-Géorgie et Maouki fut mis aussitôt à la besogne, c’est-à-dire à défricher la jungle et à couper des bambous.

Pour la première fois, il connut ce que travailler signifiait.

Même comme esclave de Fanfoa, il n’avait jamais peiné de la sorte.

Il fallait trimer de l’aurore à la tombée de la nuit, avec deux repas seulement pour se sustenter. La nourriture, au surplus, manquait totalement de variété.

Durant des semaines entières, rien d’autre au menu que des patates douces. Puis, durant d’autres interminables semaines, rien que du riz.

En alternance avec les travaux de défrichement, Maouki avait pour tâche d’écorcer les noix de coco et d’entretenir les feux où se préparait le coprah.

La fumée de ces feux produisait une terrible inflammation des yeux et quand Maouki en était aux trois quarts aveugle, on le remettait à couper la jungle et à abattre des arbres.

Comme il était habile à manier la hache, il fut ensuite attaché à une équipe de pontonniers. Pour une faute qu’il avait commise, il passa un mois dans celle des constructeurs de routes, la plus fatigante de toutes.

Ou bien encore il était utilisé comme rameur, quand les baleinières partaient quérir du coprah dans les autres îles ou lorsque les hommes blancs s’en allaient pêcher à la dynamite.

Entre temps, il apprit le « bêche-de-mer »[1], qui lui permit de converser soit avec les blancs, soit avec les autres noirs recrutés un peu partout et qui parlaient tous des dialectes différents.

Il connut également que, quand un blanc avait parlé, il tenait toujours parole.

Si un bâton de tabac avait été promis à un noir en guise de récompense, le noir le recevait.

Si défense avait été signifiée à un noir d’accomplir tel ou tel acte, sans quoi on lui ferait « sonner sept cloches », et si le noir ne tenait pas compte de l’interdiction prononcée, les sept cloches sonnaient.

Maouki s’était d’abord demandé ce que sonner sept cloches pouvait bien signifier.

Mais il se rendit compte rapidement que ce terme de bêche-de-mer voulait dire appliquer au coupable une telle raclée que le sang lui giclait du corps et que, parfois même, ses dents sautaient.

Et Maouki sut encore qu’aucun noir n’était puni ni frappé sans raison. Même quand les blancs étaient ivres, ce qui leur arrivait fréquemment, ils ne passaient pas leur ivresse sur un innocent.

Maouki, au total, se trouvait fort mal de sa situation, Il n’oubliait pas qu’il était fils d’un chef et, comme tel, il haïssait la contrainte.

Il avait la nostalgie du sol natal, principalement de Port-Adam, dont il avait été enlevé depuis tant d’années.

Bref, un jour vint où il décida de s’échapper.

Il s’enfonça dans la brousse avec l’idée de s’y cacher le temps nécessaire, puis de redescendre à la mer et de s’emparer secrètement de quelque pirogue, dans laquelle il s’en retournerait à Malaïta.

Mais il y gagna la fièvre, au cours de sa vie errante, et à moitié-mort s’en revint de lui-même sous le harnais.

Il se sauva une seconde fois en société de deux autres noirs de Malaïta.

Les trois hommes reçurent l’hospitalité dans la paillote d’un de leurs congénères, ancienne recrue libérée, et qui s’était installé à son compte dans un petit port côtier.

Mais Maouki et ses compagnons furent trahis.

Au cours de la nuit qui suivit, deux blancs, arrivés dans une baleinière, firent irruption dans la paillote. :

Ils se saisirent des fugitifs, leur firent sonner sept cloches, puis les ficelèrent comme des gorets et les jetèrent dans la baleinière, en complète marmelade.

Quant au propriétaire de la paillote, qui s’était aussi imprudemment compromis, ce fut sept fois sept cloches qu’il fut mis à sonner.

Ses cheveux, sa peau, ses dents volèrent en un mirifique feu d’artifice et il fut découragé, pour le restant de ses jours, de donner asile aux recrues en rupture de ban.

Maouki se soumit à l’inévitable et se tint coi, un an durant.

Sa bonne conduite lui valut d’être promu domestique d’intérieur chez un des blancs.

Il eut, dès lors, une bonne nourriture et la vie plus douce.

Sa tâche consistait uniquement à tenir la maison propre et à chaque heure du jour, presque à chaque heure de la nuit, à servir, au blanc et à ses amis qui lui rendaient visite, du whisky et de la bière.

Le métier n’était pas désagréable. Mais, plus encore, Maouki aimait Port-Adam.

Deux années lui restaient à accomplir. C’était plus qu’il n’en pouvait supporter.

En sa qualité de domestique d’intérieur, il avait sous la main des facilités pour fuir, qu’il ne possédait pas auparavant.

Il combina soigneusement son plan d’évasion.

Au cours d’une nuit sans lune, dix noirs de Malaïta et un onzième de San-Cristoval se glissèrent hors des baraquements.

Ils vinrent rejoindre Maouki, qui disposait de la clef du hangar où était enfermée la baleinière de l’homme blanc.

La baleinière fut poussée à la mer, équipée d’une douzaine de Winchesters et de munitions adéquates, et d’une caisse de dynamite, avec les détonateurs. Des provisions de bouche et dix caisses de tabac y furent également embarquées.

La mousson du Nord-Ouest soufflait et la baleinière rama vers le Sud.

On naviguait la nuit et pendant le jour on se cachait avec la baleinière que l’on tirait à terre dans quelque îlot inhabité.

L’île de Guadalcanar fut atteinte, ainsi que le détroit qui la sépare de Florida.

Alors les vivres manquèrent.

Que firent les hommes de Malaïta ? Ils tuèrent l’homme de San-Cristoval, lui coupèrent la tête, qu’ils mirent soigneusement de côté, et firent cuire le reste du corps pour le manger.

Le but approchait. La côte de Malaïta n’était plus distante que d’une vingtaine de milles.

Mais, vers le point du jour, la baleinière, retardée dans sa marche par un fort courant, tomba en plein sur un cotre, monté par des blancs et dont l’unique canon, habilement pointé, eut rapidement raison des dix noirs et de leurs fusils,

Maouki et ses compagnons, les menottes aux mains, furent amenés à Tulagi, où le grand maître blanc avait sa résidence[2].

Et le grand maître blanc tint une cour de justice, qui ordonna, pour commencer, que les fugitifs seraient attachés un à un à un poteau, pour y recevoir vingt coups de fouet.

Ils furent condamnés, en outre, à une amende de quinze dollars chacun et réexpédiés en Nouvelle-Géorgie, où leurs anciens maîtres leur firent sonner sept cloches et les remirent incontinent au travail, ;

Mais Maouki n’était plus, désormais, domestique d’intérieur. Il fut incorporé à l’équipe des routes,

Quant à l’amende de quinze dollars, elle serait récupérée par six mois de travail supplémentaire.

Pour sa part de tabac volé, Maouki écopa, en sus, d’une autre année de travail.

Port-Adam s’éloignait de plus en plus.

Maouki, hanté par l’idée fixe de fuir à tout prix, parvint une nuit, à voler une pirogue.

Il pagaya seul vers la côte orientale d’Ysabel. mais ne réussit qu’à se faire capturer aux deux tiers de la route par les blancs du lagon de Moringe.

Il leur échappa huit jours après, et se réfugia dans la brousse.

Mais, à Ysabel, la brousse est inhabitée et il n’y a dans l’île que des hommes d’eau salée, tous convertis à la religion chrétienne.

Les blancs promirent une récompense de cinq cents bâtons de tabac à qui capturerait Maouki.

Et chaque fois que Maouki se risquait vers la mer, dans le dessein de voler une pirogue, il était immédiatement repéré et pourchassé.

Quatre mois s’écoulèrent ainsi, sans qu’il pût être prise, et les hommes blancs portèrent la récompense à mille bâtons de tabac.

Maouki fut finalement appréhendé et renvoyé en Nouvelle-Géorgie.

Or, mille bâtons de tabac, dont le remboursement lui incombait, représentent cinquante dollars. Soit un travail supplémentaire d’un an et huit mois.

De ce fait, Port-Adam était maintenant à cinq ans de distance.

Pas un instant, la pensée ne vint à Maouki d’accomplir ces cinq années de servitude.

Le mal du pays ne faisait, au contraire, que croître en lui. Il réitéra son essai d’évasion et la tentative avorta dans l’œuf.

Son cas fut porté devant Mr Haveby, gérant pour les îles de la Moongleam-Soap-Company, et il fut jugé incorrigible.

Or les incorrigibles étaient expédiés, par la compagnie, aux îles Santa-Cruz, où elle avait également des plantations et qui sont distantes de plusieurs centaines de kilomètres des îles Salomon.

Maouki fut embarqué pour cette destination.

Mais, tandis que la goélette faisait escale en vue de Santa-Anna, il se jeta à l’eau pendant la nuit, gagna la terre, vola deux fusils et une caisse de tabac à l’un des colons installés dans l’île, mit la main sur une pirogue et pagaya vers San-Cristoval, situé à soixante-dix kilomètres seulement de Malaïta.

Sa déveine voulut qu’une bourrasque du Nord se déchaînât durant la traversée et le repoussât à Santa-Anna, où le colon victime de son vol le mit aux fers et le garda jusqu’au retour de la goélette.

Pirogue et fusils furent restitués, sans plus, à leur légitime propriétaire. Mais la caisse de tabac, où il avait quelque peu picoré, fut portée au compte de Maouki, au taux d’une année de supplément de travail.

Soit, au total, six années dues par lui à la compagnie.

Il fut ramené en Nouvelle-Géorgie, non sans un nouveau plongeon dans la mer, qu’il esquissa en cours de route et qui lui valut six mois de rabiot.

« Nous allons, déclara, à son arrivée, Mr Haveby, envoyer ce coco-là à l’île Lord-Howe. C’est là que réside Bunster et nous laisserons ces deux têtes de fer s’arranger entre elles. Le résultat inévitable en sera que Maouki aura la peau de Bunster, ou Bunster celle de Maouki. Dans un cas comme dans l’autre, ce sera pour nous un bon débarras. »

Si, partant d’Ysabel, on gouverne droit vers le Nord, on rencontre, au bout de cent cinquante milles, l’île Lord-Howe. Île annulaire et sablonneuse, qu’encercle un rempart de coraux.

Son pourtour ne dépasse pas une centaine de milles et, à son point culminant, le sol atteint tout juste dix pieds d’altitude.

Géographiquement, elle se rattache aux îles Salomon. Mais ses habitants, que des migrations successives y ont amenés, sont de race, de mœurs et de langage, en majeure partie polynésiens.

Pas un blanc ne visite jamais Lord-Howe. Thomas Cook et Fils n’y amènent pas leurs touristes. Ils en ignorent l’existence.

Aucun missionnaire n’y est, non plus, jamais venu prêcher la foi chrétienne.

À la suite de quelques sanglantes leçons, que leur valurent des massacres de blancs qui s’étaient risqués à aborder, les indigènes sont, aujourd’hui, doux comme des moutons.

Pour rien au monde, ils n’oseraient toucher à un cheveu de ces hommes d’une race supérieure qui leur ont imprimé, au fer rouge, un respect salutaire.

Lord-Howe n’en a pas moins conservé une fâcheuse réputation et les Instructions Maritimes

continuent à signaler les indigènes comme traîtres et félons.

Max Bunster était l’unique colon établi à Lord-Howe, où il représentait la Moongleam-Soap-Compay, qui n’avait pas trouvé d’autre moyen de s’en délivrer.

C’était un robuste et colossal Allemand, qui avait quelque chose de détraqué dans le cerveau. Un demi-fou, pour parler charitablement.

Il était, en même temps, lâche et brutal, et dépassait en sauvagerie le pire des sauvages qui l’entouraient.

Bunster avait, comme agent de la compagnie, fait ses débuts à l’île Savo, où sa brutalité le rendit bientôt impossible.

Mais le premier remplaçant qui lui fut envoyé fut accueilli par une volée de coups de poing et quasiment assommé,

Le bateau qui l’avait amené le remporta, le jour même, en complète marmelade.

Une seconde fois, Mr Haveby, bien décidé à relever Bunster de ses fonctions, expédia à Savo un géant du Yorkshire, qui avait la renommée d’un casse-tout et préférait un bon pugilat au plus exquis des déjeuners.

Bunster se montra prudent vis-à-vis du nouveau venu et, dix jours durant, avec la plus suave complaisance, le mit au courant de sa tâche.

Mais comme au bout de ces dix jours le gars du Yorkshire, ayant pincé une violente dysenterie, avait dû s’aliter, Bunster lui tomba dessus à bras raccourcis, lui pila la mâchoire et lui démolit deux ou trois côtes.

C’est alors que Mr Haveby décida de transférer Bunster à l’île Lord-Howe.

Dès que la goélette qui l’avait transporté eut jeté l’ancre, Bunster célébra cet événement en mettant à sec une caisse de gin et en rossant dans les grands prix le second du navire, homme d’un certain âge, asthmatique par surcroît et qui n’était pas de taille à se défendre.

Une fois à terre, Bunster défia, sur le rivage même, tous les Canaques présents, qui étaient venus en nombre, promettant une caisse de tabac à celui qui réussirait à l’abattre.

Successivement, il en mit trois hors de combat, mais fut défait lui-même par un quatrième qui, au lieu de recevoir la caisse de tabac, fut gratifié d’une balle de revolver en pleine poitrine.

Ainsi débuta le regne de Bunster sur Lord-Hovwe, où il établit un régime de terreur.

Dès qu’il était signalé, venant vers un village, hommes, femmes et enfants détalaient à toutes jambes.

Même les chiens et les cochons s’écartaient de son passage et le grand chef de l’île n’hésitait pas à se cacher sous ses paillassons.

Les deux ministres du grand chef, chargés de régler avec Bunster les affaires courantes, vivaient dans un constant effroi.

Car le terrible homme n’admettait pas, en cas de litige, la moindre discussion. Ses gros poings étaient ses seuls arguments.

Ce fut donc à Lord-Howe que vint Maouki, pour y servir, durant six ans, sous les ordres de Bunster.

Et il était impossible de s’échapper de Lord-Howe, Bunster, pour éviter toute fuite des indigènes et des recrues, ayant ordonné de détruire toutes les pirogues qui se trouvaient dans l’île.

Les deux hommes étaient bien faits pour s’affronter : Bunster avec le poids massif de ses deuxcents livres, Maouki avec la sveltesse plus souple de ses cent dix livres.

Bunster était une brute dégénérée. Maouki était un primitif, non moins redoutable, Et, pour lutter l’un contre l’autre, ils avaient chacun leur manière.

Maouki n’avait, en débarquant, aucune idée du genre de maître auquel il était attribué. Personne ne l’avait averti.

Et, tout naturellement, il avait pensé que Bunster était l’image de tous les autres blancs qu’il avait connus.

C’est-à-dire un tyran pondéré, tenant toujours la parole donnée et ne frappant jamais un noir sans motif.

Bunster, au contraire, était au courant des antécédents de Maouki et, d’avance, était ravi d’avoir à cogner sur lui.

Justement, il avait tout récemment cassé un bras à son cuisinier et domestique d’intérieur, et lui avait démantibulé l’épaule.

L’emploi, se trouvant libre, fut dévolu d’office à Maouki.

Maouki ne tarda pas à connaître de quoi il retournait.

Le jour même de son arrivée, il reçut l’ordre d’aller acheter une poule au grand chef de Lord-Howe.

Mais le grand chef ne possédait, pour le quart d’heure, que des poulets étiques, qui n’étaient vraiment pas présentables.

Maouki s’en revint donc les mains vides et grimpa allégrement l’escalier qui conduisait au logis de Bunster (la maison était bâtie sur pilotis, à quatre mètres au-dessus du sable), afin de faire son rapport.

Bunster, sans le laisser parler, demanda le poulet.

Maouki voulut s’expliquer. Mais Bunster se souciait peu d’explications et frappa du poing.

Maouki reçut le coup sur la bouche et le heurt fut, si violent qu’il en fut soulevé en Flair, projeté à travers la porte de la véranda et, brisant la balustrade dont celle-ci était entourée, s’en alla choir sur le sable.

Il se releva à grand-peine, avec les lèvres ensanglantées et, dans la bouche, une collection de dents cassées.

« Cela t’apprendra », lui hurla de son perchoir le demi-fou, pourpre de rage, à obéir désormais aux ordres reçus. »

Épouvanté, Maouki se fit petit, petit, et résolut de ne jamais offenser la brute qui le tenait en son pouvoir.

Chaque jour, quelque noir recevait, pour une vétille, une formidable raclée, ou était mis aux fers, trois jours durant, sans nourriture.

Bunster vivait avec une femme indigène, qu’il s’était attribuée de force.

Maouki apprit que c’était la troisième qui avait cet honneur. Cela, pour l’excellente raison que la première et la seconde gisaient sous le sable, dans deux tombes, pieusement parées, par la famille, de branches de coraux.

Les noirs qui composaient l’équipage de la baleinière n’auraient pas mieux demandé que de faire chavirer l’embarcation et de noyer Bunster par accident.

Malheureusement Bunster avait l’œil, et, le revolver au poing, veillait à ce que la baleinière ne chavirât pas. |

Maouki, lui aussi, attendait une occasion propice, bien décidé à tuer l’Allemand, dût-il lui en coûter la vie.

Et l’Allemand n’ignorait pas qu’il devait se défier de Maouki plus que de toute la population de l’île réunie.

Mais, avec une joie sadique, Bunster se plaisait, pour cela même, à infliger à Maouki toutes les brimades et toutes les tortures qui étaient en son pouvoir.

Tous les autres blancs qu’il avait connus avaient respecté les fameux tambos de Maouki.

Il n’en allait pas de même avec Bunster.

Deux bâtons de tabac étaient, chaque semaine, alloués à Maouki.

Bunster les remettait à sa femme et c’était elle qui devait les lui transmettre. Voilà qui ne pouvait être et Maouki préférait se passer de tabac.

Il en allait de même avec les palourdes qui, elles aussi, étaient tambo.

Bunster ordonnait à Maouki de fricasser, pour cinq ou six jours, des ratas de palourdes qui abondaient à marée basse sur le sable du rivage.

Maouki aimait mieux jeûner que de violer son tambo. Mais Bunster n’admettait pas ce point de vue et commandait à Maouki d’ingurgiter sa part de rata.

Plutôt que d’obéir, Maouki eût mille fois préféré mourir. Alors les coups pleuvaient et effectivement Bunster l’aurait tué, s’il avait eu sous la main, pour le remplacer, un autre domestique.

Un des jeux favoris de Bunster était encore d’empoigner Maouki par sa tignasse crépue et de s’en servir pour lui cogner la tête contre les murs de la maison. La résonance du crâne mettait Bunster en une joie sans pareille.

Ou bien il appliquait soudain l’extrémité de son cigare sur la peau du pauvre diable. Il appelait cela une « vaccination » salutaire.

Et Maouki était vacciné plusieurs fois par semaine, quand ce n’était pas plusieurs fois par jour.

Une fois même, dans son délire du mal, Bunster alla jusqu’à arracher du nez de Maouki l’anneau d’écaille et l’anse de porcelaine qui y pendaient.

Le cartilage nasal, où passait la précieuse pendeloque, en fut déchiré et le sang ruissela.

Sous la douleur éprouvée, le visage de Maouki se crispa.

« Non ! Mais regardez-moi cette bobine ! » s’exclama Bunster, en se tenant les côtes.

Chacun sait que la peau du requin est semblable à du papier de verre. Les naturels des mers du Sud l’emploient à polir les troncs d’arbres où sont creusées leurs pirogues et à lisser le bois de leurs pagaies.

Mais la peau de raie est pire.

Et Bunster eut l’idée infernale de se fabriquer une moufle en peau de raie.

La première fois qu’il en essaya l’effet sur Maouki, il lui mit d’un seul coup la chair à vif, depuis le cou jusqu’à la saignée du bras, et s’en esclaffa.

Plus amicalement, il répéta l’expérience sur le dos de sa femme, et ce furent ensuite les matelots de la baleinière qui s’en virent gratifiés à fond.

Encore leur fallut-il témoigner de leur bonne humeur et grimacer un sourire forcé.

« Riez ! Riez donc, damnés noirs ! » criait Bunster.

Ce fut à Maouki que cette nouvelle torture fut spécialement dévolue.

Il y passait journellement et, bien souvent, c’était sur la chair mise à vif la veille même, que s’exerçait la facétieuse caresse.

Il en résultait que Maouki ne pouvait plus dormir, plusieurs nuits de suite.

Mais il souffrait patiemment et attendait en silence, certain que l’heure de la vengeance arriverait un jour.

Un beau matin, Bunster s’éveilla d’une humeur de chien.

Il se sentait mal à l’aise et résolut de faire sonner sept cloches à tout l’univers.

Il rossa Maouki, puis sa femme, puis l’équipage de la baleinière, puis encore Maouki.

Sur le coup de dix heures, il fut pris de frissons et, à onze heures, il grelottait de fièvre.

Ce n’était pas un accès passager, mais bel et bien une « fièvre d’eau noire », qui le terrassa et Le mit au lit les jours suivants, sans possibilité aucune de se lever,

Maouki observait son bourreau, qui s’affaiblissait de plus en plus.

Il ordonna aux noirs de sortir la baleinière de son hangar, de la réviser sur toutes ses coutures et d’y déposer son mât, sa voile et une paire d’avirons. Pensant que l’ordre émanait de Bunster, les noirs obéirent,

L’occasion était propice. Bunster gisait, totalement inconscient, Mais Maouki attendit encore.

Quand Bunster commença à aller mieux et reprit conscience des choses, tout en demeurant faible comme l’enfant qui vient de naître, Maouki emballa dans son coffre les objets qui lui appartenaient, y compris l’anse de la tasse de porcelaine.

Puis il se rendit à la paillote du grand chef de l’île.

« Bunster, malade, dit-il, Très malade. Toi, n’est-ce pas, aimer bien Bunster ? Bunster être un bon garçon. »

Le grand chef, craignant de tomber dans un traquenard, se contenta, pour toute réponse, d’éclater en sanglots.

« Compris ! reprit Maouki. Moi être grand chef dans mon pays. Et moi n’aimer pas ce maître blanc. Toi non plus.

« Toi envoyer, aujourd’hui même, dans la baleinière, un cent de noix de coco.

« Puis toi s’endormir, ce soir, tout tranquillement. Et tout le monde de même, dans ton village.

« Si toi et tes gens entendre grand bruit dans la maison du blanc, vous continuer à dormir très fort. Vous ne rien entendre du tout. Compris ? »

Maouki s’en revint ensuite vers le baraquement affecté à l’équipage de la baleinière.

« Vous, dit-il, aimer beaucoup grand maître blanc ? Bunster être bon garçon. »

Les noirs demeurèrent silencieux.

« Compris ! Si vous entendre, ce soir, grand bruit dans la maison du blanc, vous dormir très fort. Vous ne rien entendre du tout. Compris ? »

Maouki ordonna ensuite à la femme de Bunster de s’en retourner dans sa famille.

La malheureuse tremblait de tous ses membres et ne savait si elle devait obéir.

Si elle eût refusé, Maouki, pour l’expulser de force, eût été bien embarrassé. Car son tambo ne lui permettait pas de porter la main sur elle.

Maouki insista plus rudement, et elle se décida à partir.

Quand la maison fut vide, Maouki, vers la fin du jour, entra dans la chambre où Bunster était assoupi.

Il commença par enlever tous les revolvers puis la moufle de raie.

Le premier contact avec Bunster fut une légère friction, qui emporta à celui-ci la peau du nez.

« Moi, n’est-ce pas, être bon serviteur et aimer beaucoup maître blanc ? » ricana Maouki.

D’une seconde friction, il mit à nu le front de l’homme. D’une troisième et d’une quatrième, il lui dégarnit les deux côtés de la figure.

« Ris donc, damné blanc ! Allons, ris ! » cria-t-il.

Consciencieusement, tandis que Bunster poussait des hurlements épouvantables, Maouki accomplit son œuvre.

Dans toute l’île on entendit le grand bruit qu’il avait annoncé. Mais nul ne bougea.,

Son travail terminé, Maouki emporta dans la baleinière tout ce qu’il trouva de fusils, de revolvers et de munitions, sans oublier la boussole.

Dans le magasin, il fit main basse sur les caisses de tabac.

Tandis qu’il poussait à l’eau la baleinière, dans la nuit tombante, une chose hideuse apparut — un être humain, dépourvu de peau, de la tête aux pieds, qui dégouttait de sang et courait sur le sable en grimaçant et en baragouinant on ne sait quoi.

Puis la chose s’effondra.

Alors Maouki s’en alla couper la tête de Bunster, qu’il enveloppa dans une pièce de calicot et plaça dans un coffre, à l’arrière de la baleinière.

Ensuite il dressa le mât, mit à la voile et, poussé par l’alizé du Sud-Est, navigua vers Malaïta.

Au bout de plusieurs jours, et sans avoir fait de fâcheuse rencontre, il débarqua à Port-Adam.

Son père étant mort, le frère de Maouki était passé grand chef.

Mais comme il avait tué un homme blanc et coupé sa tête, Maouki se hâta vers la brousse, seul abri sûr qu’il pût trouver.

Là, il commença par tuer le vieux Fanfoa et quelques autres chefs, et reçut la soumission des notables de tous les villages.

Son frère et lui se trouvèrent ainsi régner à la fois sur les hommes d’eau salée et sur les broussards.

Mais Maouki ne se sentait toujours pas rassuré. Il continuait à craindre la vengeance de la Moongleam-Soap-Company.

Effectivement, un message lui parvint un jour, lui rappelant qu’il devait à la compagnie six ans de travail, plus le prix des fusils, des revolvers et des caisses de tabac qu’il avait emportés.

On ne le chicanait pas, au demeurant, sur la mort de Bunster, considérée comme un excellent débarras.

Maouki répondit qu’il était prêt à négocier et donna un sauf-conduit pour l’homme blanc qui se présenterait, ;

Confiant dans la parole de Maouki, l’homme blanc pénétra dans la brousse.

Et, fait unique dans l’histoire de Malaïta, il en revint vivant, porteur de sept cent cinquante dollars, que Maouki avait, non sans peine, réunis et payés, en guise de rançon.

Maouki, maintenant, ne pèse plus cent dix livres. Il a considérablement engraissé et le cercle de son ventre a triplé.

Il a quatre femmes, des fusils et des revolvers comme aucun grand chef n’en avait jamais possédé, et a restitué à son nez l’anse de porcelaine qui y pendait.

Mais le plus précieux des fétiches dont il s’enorgueillit est la tête de Bunster, convenablement enfumée, qui pend, avec ses cheveux couleur de sable et sa barbe jaunâtre, à l’une des poutres de son palais de paille.

À des périodes fixes, il la contemple longuement, en appelant, sur lui et sur son peuple, la protection des Esprits.

Durant cette solennité, un silence de mort règne sur le village.

La tête de Bunster est réputée comme le plus merveilleux talisman que possède Malaïta et c’est à son étonnant pouvoir de sorcellerie qu’est attribuée la grandeur inégalée de Maouki.

  1. Le « bêche-de-mer » est, comme nous l’avons déjà vu un poisson comestible qu’on rencontre dans les eaux du Pacifique. Son nom a été donné au jargon spécial, mélange d’anglais, de français et de patois locaux, dont usent les colons quand ils s’adressent aux noirs, dans les îles océaniennes. C’est, dirions-nous, du « petit-nègre ».
  2. Tulagi, dans l’île de Florida, est la résidence du Commissaire général des îles Salomon.