Contes indiens (Feer)/III/9

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§ 9. — FATALITÉ, ACTIVITÉ

Nous avons vu tout à l’heure que les richesses viennent et s’en vont en dépit des efforts de l’homme aussi incapable de les attirer que de les retenir. Cet argument est mis dans la bouche de Vikramâditya et surtout d’un jeune prodigue. La question de l’instabilité des richesses et de la fortune se lie à une question plus vaste, celle de la fatalité. Le bonheur et le malheur nous arrivent-ils infailliblement, quoi que nous fassions ? Et n’avons-nous qu’à nous croiser les bras en attendant les arrêts du sort ? La question est agitée à propos d’un monarque détrôné par ses sujets, chassé de son pays, élu roi dans un autre sans aucun effort de sa part, attaqué par l’ennemi dans sa nouvelle capitale, jouant aux dés pendant qu’on travaille à sa ruine, restant néanmoins maître de ses États, et conservant ainsi sans souci ce qu’il avait acquis sans travail. Vikramâditya conclut de là que rien ne peut arrêter le cours du destin, qu’il est donc bien inutile de faire des efforts en pure perte ; mais un docteur lui oppose le Nîti-çâstra qui fait à l’homme un devoir de lutter contre la fortune, contre le destin, et de déployer constamment toutes les énergies qu’il a en lui (13).