Contes populaires d’Afrique (Basset)/140

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E. Guilmoto, Éditeur (Les Littératures populaires, tome XLVIIp. 372-376).
LXXX. — KIMBOUDOU[1]

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LES ENFANTS DE LA VEUVE[2]


Une femme donna naissance à des enfants. Quand elle eut fini de les mettre au monde, les enfants grandirent. Leur père mourut. L’aîné dit :

— Je veux apprendre l’art de la chasse.

Le second dit : — Je veux apprendre l’art de la chasse.

Ils prirent leurs fusils ; ils allèrent dans les bois. Ils ne virent pas de gibier. La pluie arriva, ils dirent :

— Sauvons-nous de la pluie.

Ils coururent ; ils vinrent à une maison de Makichi. Ils y trouvèrent un mbanza (instrument de musique) de Makichi et en jouèrent. Un Dikichi arriva, il conduisait deux buffles. Il demanda :

— Qui joue du mbanza ?

Il les entendit dire :

— Si tu es un homme fort, entre dans la maison ; tu seras la nourriture de mes chiens.

Il s’arrêta en dehors. Un autre Dikichi arriva : il conduisait trois buffles. Il demanda à celui qui était dehors :

— Pourquoi te sauves-tu de la maison ?

Il répondit :

— Je fuis deux hommes qui y sont : ils veulent nous tuer pour la nourriture de leurs chiens.

D’autres vinrent ainsi que leurs chefs. Celui-ci demanda :

— Pourquoi vous sauvez-vous de la maison ?

— Nous fuyons deux hommes qui veulent nous tuer.

Le chef entra, salua et dit :

— Sortez.

Les deux hommes dirent :

— Nous ne sortirons pas.

Le chef appela les autres et dit :

— Mettez-les dehors.

Ils se mirent à les chasser.

L’aîné s’assit ; le plus jeune combattit les Makichi. Il en tua quatre ; il en restait huit. Il en tua quatre de nouveau ; les jeunes gens s’assirent.

L’aîné vainquit : il tua les quatre qui restaient. Il prit le chef et lui coupa la tête. Alors il repoussa une tête ; il la coupa de nouveau. Il en revint une autre L’ainé dit :

— Nous ne pouvons pas le tuer ; asseyons-nous.

L’ainé devint un bagre (sorte de poisson). Le Dikichi le prit et l’avala. Le bagre alla regarder dans ses cœurs où étaient les clefs de leurs maisons. Il les trouva, les prit et sortit. Le plus jeune qui le remplaçait coupa la tête du Dikichi. Celui-ci mourut.

Ils ouvrirent les chambres ; ils y trouvèrent des esclaves à qui ils donnèrent à manger. Ils montèrent à l’étage supérieur et l’ouvrirent. Ils trouvèrent trois dames, leur donnèrent à manger et dirent :

— Vivons ici.

Tandis qu’ils restaient là, leur mère alla dans un autre pays avec ses deux petits enfants.

— La nourriture que nous mangeons ne nous suffit plus. Allons chercher du bois à feu.

Ils allèrent en chercher et s’égarèrent. Ils vinrent à la maison d’une étrangère, d’une vieille femme. Ils entendirent la vieille dire :

— Vous êtes mes enfants : allez me chercher du bois à feu.

Ils allèrent en chercher et en apportèrent. Ils mangèrent, ils dormirent et se levèrent. La vieille leur dit :

— Allez encore chercher du bois à feu.

Ils allèrent en couper. La plus jeune, une fille, apporta son bois à feu. Le plus âgé s’arrêta. Il trouva son père mourant et disant :

— Pourquoi coupez-vous du bois à feu ?

— Je ne sais pas, père.

Il reprit : — Je vous le dirai tout de suite quand vous irez chercher de l’eau.

Le plus âgé retourna aussi vers la vieille femme.

Elle leur dit :

— Allez chercher de l’eau.

L’ainé et la plus jeune y allèrent. La plus jeune apporta l’eau à la maison. L’aîné s’arrêta et dit :

— Mon père, dis-le-moi à présent.

Il lui dit :

— Aussitôt que la vieille femme met l’eau sur le feu, quand elle te dira : Regarde si l’eau bout, alors dis-lui : Je ne sais pas. Lorsque la vieille regardera l’eau, pousse-la dedans. Plonge sa tête dans l’eau bouillante.

L’aîné fit ainsi que son père lui avait dit. Il poussa la vieille et la tint dans l’eau. La vieille femme mourut.

L’aîné et la cadette entrèrent dans la maison, ils enlevèrent tout l’argent et coururent retrouver leur mère.

C’est fini.



  1. Le Kimboudou est parlé dans la province d’Angola, dans l’Afrique occidentale portugaise.
  2. Heli Chatelain, {{lang|en|Folk tales of Angola, Boston, Houghton, Mifflin et Cie 1894, in-8, p. 111-115.