Coran Savary/Vie de Mahomet/JC638

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Traduction par Claude-Étienne Savary Voir et modifier les données sur Wikidata.
G. Dufour (1p. 97-125).

(Depuis la chute d’Adam, suivant Abul-Feda. 6223. — Depuis la naissance de J.-C. 638. — Après l’hégire. 8. — De Mahomet. 60.)

Khaled, fils d’Elwalid, Amrou, fils d’Elas, Othman, fils de Talha, ne tardèrent pas à s’y rendre. Le premier était le meilleur général des Arabes. À la journée d’Ahed où il commandait la cavalerie des coreïshites, il avait fait pencher la victoire de son côté. Amrou, fils d’Elas, le même qui dans la suite conquit l’Égypte[1], avait été envoyé deux fois en ambassade vers le roi d’Abyssinie[2], pour redemander les transfuges ; mais le prince, gagné par Jafar, avait rejeté sa demande. Othman, préfet du temple de la Mecque, jouissait d’une grande autorité parmi les idolâtres. Ces trois chefs coreïshites lisant dans l’avenir, prévirent que le vainqueur des Juifs, l’allié des têtes couronnées, le législateur de sa nation, en serait bientôt le conquérant. L’un, guerrier ambitieux, voyant la valeur des Coreïshites enchaînée, désirait de combattre sous un général intelligent, et de montrer ses talens sur un plus grand théâtre. L’autre, après deux ambassades où il avait demandé la tête des compagnons de Mahomet, craignait pour ses jours. Othman, revêtu de la plus belle charge de l’Arabie, voulait prévenir une disgrâce qui ne lui paraissait pas fort éloignée. Tous trois, poussés par des motifs différens, se firent musulmans, et prêtèrent à leur apôtre serment de fidélité. Il leur assura l’oubli du passé ; il flatta leur ambition, et leur accorda ses bonnes grâces.

[3] Mahomet avait envoyé Elharêt, fils d’Omaïr, au souverain de Bosra, pour l’engager à se faire musulman. L’ambassadeur, arrivé à Mouta, s’y reposait dans une parfaite sécurité. Il ignorait le sort qui l’attendait. Amrou, fils de Shoraïl, gouverneur de la ville pour l’empereur Héraclius, le surprit au sein de la paix, et l’assassina. C’est le seul des ambassadeurs de Mahomet qui ait été tué. Résolu de venger sa mort, il arma trois mille hommes, et leur ordonna de s’avancer jusqu’à Mouta, ville de Syrie, située vis-à-vis d’Elcarac[4], d’inviter les habitans à se soumettre à l’islamisme, et sur leur refus, de porter le fer et la flamme au sein de leurs foyers. Ce fut la première fois que les Arabes prirent les armes contre les Grecs. Cette étincelle produisit un vaste incendie qui, pendant huit cents ans, embrasa l’Orient. Depuis cet instant le flambeau de la guerre ne cessa presque d’être allumé entre les deux nations, jusqu’au temps où les Ottomans conduits par Mahomet II s’emparèrent de Constantinople[5].

Mahomet donna le commandement de l’armée à Zaïd son fils adoptif, et déclara en présence de ses soldats que, s’ils perdaient leur général, Jafar, fils d’Abutaleb, le remplacerait, et que s’il était tué, ils éliraient à sa place Abdallah, fils de Rowaha. Les Musulmans se mirent en marche sous les ordres de Zaïd[6]. Animés par la vengeance, ils traversèrent courageusement les sables brûlans et les vastes déserts de l’Arabie. Après des fatigues incroyables ils vinrent camper près de Mouta. À la nouvelle de leur approche les ennemis s’étaient rassemblés. Une armée de cent mille hommes était prête à fondre sur eux. On tint conseil. Le plus grand nombre était d’avis d’éviter le combat, et de dépêcher un courrier au prophète pour lui demander du secours[7]. Ce conseil timide déplut à Abdallah. Il se leva au milieu de l’assemblée, et dit : « compagnons, marchons contre les infidèles. Ouvrons-nous un passage à travers leurs bataillons. Il ne peut nous arriver que cette alternative, ou le martyre ou la victoire. » Ce sentiment prévalut. On se prépara au combat. Les croyans ne formaient qu’un corps de trois mille hommes ; mais chacun d’eux était endurci au métier des armes. Sept années de triomphes avaient élevé leurs âmes. À force de vaincre, ils étaient devenus invincibles. Cent mille hommes ne les effrayèrent point. Ils livrèrent la bataille. Elle fut longue et sanglante. Zaïd qui combattait dans les premiers rangs tomba couvert de blessures. Jafar releva l’étendard, et soutint la gloire du nom musulman. Un soldat lui ayant abattu la main qui le portait, il le prit de l’autre ; elle fut coupée. Il le serra entre ses bras jusqu’au moment où il tomba dessus percé de coups. Abdallah saisit l’étendard ensanglanté, et fit des prodiges de valeur pour empêcher les ennemis de s’en emparer. Il succomba sous le nombre comme les deux premiers généraux. Les Musulmans prenaient la fuite. Khaled accourut, releva l’étendard de l’islamisme, et rappela à l’entour les plus braves guerriers. Le combat recommença avec une nouvelle fureur. Khaled faisant un dernier effort, enfonça les bataillons ennemis, perça le centre de l’armée, et la mit en fuite. La nuit seule l’empêcha de poursuivre sa gloire. Élu général d’une voix unanime, il campa sur le champ de bataille. Avant le lever du soleil ses troupes étaient sous les armes, et s’avançaient en bon ordre. Lorsqu’il fut à la vue des ennemis, il eut recours au stratagème. Il élargit ses rangs ; il fit plusieurs marches et contre-marches, et par des manœuvres savantes parut déployer à leurs yeux surpris une armée nombreuse. Les Grecs étonnés crurent qu’il avait reçu de puissans renforts. L’épouvante s’empara de leurs âmes. L’impétueux Khaled les ayant attaqués, ils n’opposèrent qu’une faible résistance, et se débandèrent, laissant leurs bagages au pouvoir de l’ennemi. Khaled chargé de dépouilles, et couvert de gloire ramena ses troupes victorieuses. Il joignit à la science d’un grand capitaine une valeur héroïque. Pendant le combat neuf épées s’étaient rompues dans ses mains[8]. Les autres généraux n’avaient pas combattu avec moins de vaillance. On compta cinquante coup d’épée et de lance sur le corps de Jafar, tous reçus par devant.

[9] Mahomet ayant appris le succès de ses armes à Mouta assembla le peuple, et dit : « Zaïd portait l’étendard de l’islamisme à la tête de l’armée, et il a succombé. Jafar l’a pris, et il a succombé. Abdallah l’a relevé, et il a subi un pareil sort. » À ces mots les croyans fondirent en larmes. Lui-même était pénétré d’attendrissement ; mais reprenant son récit, il ajouta : « enfin un guerrier[10], l’épée des épées de Dieu ayant saisi l’étendard, a forcé la victoire à se déclarer pour les Musulmans. »

La joie de cette victoire fut troublée par la perte de trois généraux. On avait apporté leurs corps à Médine. On y voyait les glorieuses blessures dont ils étaient couverts. Ce spectacle fit verser des pleurs à tous les habitans. La ville fut couverte d’un deuil universel. Mahomet ne put retenir sa sensibilité. Il partageait la douleur publique, et regrettait deux amis élevés auprès de lui dès l’enfance. Il prit le fils de Jafar dans ses bras, et l’embrassant tendrement, le mouilla de ses larmes. Ayant rencontré la fille de Zaïd, il se jeta à son cou, et ne put étouffer ses sanglots. Saad l’apercevant dans cet état lui dit : « Ô prophète ! que vois-je ? — Ce sont, lui répondit Mahomet, les regrets d’un ami envers son ami »[11]. On fit de magnifiques funérailles aux généreux guerriers, et après la pompe funèbre, Mahomet voulant adoucir la tristesse commune, dit : « Ô Musulmans ! ne pleurez plus sur Jafar, son sort est digne d’envie. Dieu lui a donné deux ailes, et il s’en sert pour parcourir l’immense étendue des cieux ouverts à ses désirs. »

[12] Un événement qui eut de grandes suites fit diversion à la douleur et aux larmes. Les enfans de Becre, autorisés par le traité d’Hodaïbia, étaient entrés dans l’alliance des Coreïshites. Les Cozaïtes s’étaient rangés du côté de Mahomet. La haine qui divisait ces deux tribus leur avait fait prendre ces partis opposés. Les enfans de Becre voyant leurs ennemis endormis à l’ombre de la paix, sentirent renaître leur ancienne animosité. La facilité de la vengeance les fit passer sur la sainteté des lois. Ils demandèrent des troupes aux Coreïshites, et allèrent attaquer les Cozaïtes. Ils surprirent un de leurs bourgs, massacrèrent une partie des habitans, et mirent les autres en fuite[13]. Les malheureux alliés vinrent porter leurs plaintes à l’apôtre des croyans. Il leur promit son assistance.

Les Coreïshites, en fournissant des troupes contre les Cozaïtes, avaient violé le traité d’Hodaïbia. Ils ne tardèrent pas à sentir l’inconséquence de cette conduite. Pour en prévenir les suites, ils députèrent Abusofian à la Mecque, avec ordre d’offrir toutes les satisfactions imaginables : démarche inutile. Charmé de trouver une occasion si favorable à ses desseins, Mahomet voulait en profiter. Sous prétexte de venger la cause de ses alliés, il avait juré dans son cœur d’abaisser l’orgueil des idolâtres, et de se rendre maître de la Mecque. Abusofian, en arrivant à Médine, descendit chez Omm Habiba, sa fille, épouse de Mahomet. Il la pria d’intercéder pour lui ; mais ayant voulu s’asseoir sur son lit[14], elle le plia promptement. « Ô ma fille ! lui dit-il, préférez-vous ce lit à votre père ? » « C’est la couche de l’apôtre de Dieu, répondit Omm Habiba, et vous êtes idolâtre. » Abusofian, indigné, sortit en maudissant sa fille. Il entra dans l’appartement du prophète, et après l’avoir complimenté, lui parla de négociation. Il ne put en obtenir une parole[15]. Ce silence obstiné lui fit sentir la grandeur du mal. Il chercha des médiateurs. Abubecr et Ali, sollicités de parler en sa faveur, refusèrent de l’entendre. L’ambassadeur humilié retourna à la Mecque, et rendit compte du mauvais succès de sa mission.

Tandis que les Coreïshites, incertains, délibéraient sur le parti qu’il fallait prendre, Mahomet faisait de grands préparatifs. Ses confédérés étaient avertis de se rendre à Médine. Tous les Musulmans devaient prendre les armes. Résolu de fondre à l’improviste sur les idolâtres, il défendit d’entretenir aucune communication avec eux. Hateb, pressé par le désir de sauver sa famille, transgressa la loi. Il écrivit ces mots : « Hateb, fils de Battea, aux Mecquois, salut. Apprenez que l’apôtre de Dieu se dispose à vous attaquer. Préparez-vous à la défense. » Sara, servante des fils de Hashem, se chargea pour dix écus d’or de porter la lettre. Mahomet découvrit la trahison[16]. Il envoya Ali et Zobaïr à la poursuite de Sara. Ils l’atteignirent à quelque distance de la Mecque. On lui demande la lettre. Elle proteste qu’elle n’en a point ; on la fouille ; les recherches sont vaines. Ali, indigné, lève son sabre, et dit qu’il va lui abattre la tête. Sara, effrayée, déploie ses longs cheveux, et rend l’écrit caché dans leur épaisseur. Mahomet montrant à Hateb le gage de sa perfidie, lui demanda quel motif avait pu le porter à violer sa défense. « Apôtre de Dieu, répondit le coupable, je prends le ciel à témoin que je n’ai point oublié l’obéissance que je vous ai jurée, et que mon cœur n’a point changé de religion[17]. Mais étranger à la Mecque, j’ai laissé au milieu des idolâtres une femme et des enfans. Ils y sont sans parens, sans amis. Je voulais qu’un service signalé leur fit trouver des protecteurs. » « Apôtre de Dieu, s’écria Omar, Hateb est un hypocrite et un incrédule ; permettez que je lui coupe la tête. » — « Arrêtez, Omar. Épargnez le sang de mes compagnons. Hateb est un de ceux qui ont combattu à la journée de Beder. Il est absous. » Mais, afin d’arrêter un exemple dont les suites eussent été dangereuses, il fit descendre ce verset du ciel : « Ô croyans ! n’entretenez aucune liaison avec mes ennemis et les vôtres. Vous leur montrez de la bienveillance, et ils ont abjuré la vérité qu’on leur a enseignée. Ils vous ont rejetés, vous et le prophète, du sein de leur ville, parce que vous aviez la foi. Si vous les combattez pour la défense de ma loi et pour mériter mes faveurs, devez-vous conserver de l’amitié pour eux ? Je connais ce qui est caché au fond de vos cœurs, et ce que vous produisez au grand jour. Celui qui trahira mes intérêts aura abandonné la justice[18]. »

[19] Les préparatifs étant achevés, Mahomet partit de Médine le 10 du mois Ramadan[20]. Les Mohagériens, les Ansariens, et quelques escadrons arabes, composaient une armée formidable[21]. Elle fut grossie dans sa marche par plusieurs détachemens des tribus confédérées. Le même général qui, à la journée de Beder, n’avait pu réunir que trois cent treize soldats, comptait dix mille combattans rassemblés sous l’étendard de l’islamisme. Il avait marché avec tant de promptitude et de secret, qu’il était aux portes de la Mecque avant que les Coreïshites eussent appris son départ de Médine. Il campa sur le soir à[22] Morr el Dahran, et attendit le lever du soleil pour fondre sur les idolâtres. Dix mille feux furent allumés par son ordre. Omar, établi mestre de camp, fit une garde si exacte, que toute communication fut interrompue avec les ennemis. Elabbas, touché de compassion et alarmé du sort qui menaçait sa patrie, sortit du camp pendant la nuit, cherchant quelqu’un qui pût apprendre aux Coreïshites que l’orage grondait sur leurs têtes. Il rencontra Abusofian, Hakim et Bodaïl, sortis de la ville pour prendre des informations de l’ennemi. Ayant aperçu à travers les ténèbres une multitude de feux, ils s’en retournaient épouvantés. « Où courez-vous ? leur cria Elabbas. — Est-ce Elabbas ? dit Abusofian. — C’est moi-même. — Qu’aperçois-je derrière vous ? — Mahomet qui vient vous visiter à la tête de dix mille hommes. — Que me conseillez-vous de faire ? — De venir sur-le-champ lui demander sûreté, autrement c’est fait de vous. » Le conseil fut suivi. Omar, qui veillait à la garde du camp, ayant reconnu le chef des idolâtres, s’écria : Dieu soit loué ; voici Abusofian entre nos mains sans pacte ni alliance[23]. Il courut vite demander sa tête à Mahomet. Elabbas intercéda pour son prisonnier, et le prophète lui donnant sa parole pour sauve garde, dit à son oncle : Emmenez-le à votre quartier ; vous me le présenterez demain matin. Au point du jour il était dans sa tente. « Hé bien ! lui dit le général des croyans, n’est-il pas temps de reconnaître qu’il n’y a qu’un Dieu ? — Je n’en doute nullement. — N’est-il pas temps aussi de reconnaître que je suis son apôtre ? — Pardonnez à ma sincérité, jusqu’à présent j’ai pensé différemment. » « Malheur à vous ! lui dit Elabbas. Rendez hommage à la vérité, ou votre tête… » La fierté d’Abusofian céda. Il embrassa la religion du plus fort, et prononça la double profession de foi. Hakim et Bodaïl imitèrent son exemple. Mahomet ayant tiré Elabbas à l’écart, lui dit : « Conduisez Abusofian à l’entrée de la vallée, afin qu’il voie défiler mes troupes. » « Volontiers ; mais il est ambitieux ; il aime la gloire. Accordez-lui quelque titre qui puisse flatter son amour-propre, et le distinguer aux yeux de ses compatriotes[24]. » L’avis fut approuvé, et l’on proclama cet ordre : « Quiconque entrera dans la maison d’Abusofian, qu’il soit sauvé. Quiconque se réfugiera dans le temple, qu’il soit sauvé. Quiconque fermera sa porte, qu’il soit sauvé. Quiconque se retirera dans la maison de Hakim, qu’il soit sauvé. » Elabbas ayant conduit le chef idolâtre au lieu indiqué, parut s’y arrêter sans dessein. À mesure que les Musulmans défilaient sous leurs yeux, il satisfaisait sa curiosité sans affectation. Lorsque la garde du prophète vint à passer, Abusofian apercevant des soldats hérissés de fer, dont l’œil farouche, la démarche fière inspiraient la terreur, demanda qui étaient ces guerriers. Ce sont, lui répondit Elabbas, les Mohagériens et les Ansariens qui accompagnent partout l’apôtre de Dieu. — « Le royaume du fils de ton frère est parvenu à un haut degré de puissance. — Telle est la majesté du caractère auguste d’apôtre. » À ces mots, il congédia Abusofian, qui, ayant fait aux idolâtres le rapport de ce qu’il avait vu, répandit parmi eux la consternation.

Mahomet ayant renvoyé Hakim et Bodaïl, disposa son armée de la manière suivante : Il donna un détachement à Zobaïr, avec ordre de gagner, par le chemin de Cada, les hauteurs qui dominent la Mecque. Il commanda à Saad de se rendre maître des collines que traverse le chemin de Coda. Ali, à la tête de la cavalerie, portant en main l’étendard de l’islamisme, devait s’arrêter sur le mont Hajoun, jusqu’au moment où Saad crierait ces mots menaçans : « Voici le jour de deuil et de carnage ; voici le jour où les lieux saints seront violés s’il est nécessaire[25]. » Khaled, commandant les confédérés, était chargé de descendre dans la plaine, et de marcher vers les murs de la ville. Mahomet se tenait à l’arrière-garde prêt à envoyer des ordres partout où le besoin l’exigerait. Tous les généraux avaient défense de combattre, à moins qu’ils ne fussent attaqués. Ces ordres donnés, les différens corps se mirent en mouvement. Zobaïr n’ayant point trouvé d’ennemis du côté des montagnes, arriva aux portes de la ville sans coup férir. Khaled éprouva de la résistance dans la plaine. Plusieurs bataillons de Coreïshites lui disputèrent le passage, et décochèrent leurs flèches. Khaled les attaqua l’épée à la main, les mit en fuite, et les poursuivit jusque dans les murs de la Mecque. Mahomet ayant aperçu le carnage du sommet de la montagne, s’écria : « Ciel ! que vois-je ? N’avais-je pas défendu de combattre ? » Les idolâtres, lui répondit-on, ont attaqué Khaled, et il se défend. Il lui envoya ordre d’épargner le sang[26]. Il descendit du mont Hajoun, et fit son entrée à la Mecque au moment où le soleil paraissait sur l’horison. Ali portait devant lui l’étendard de l’islamisme ; Abubecr était à sa droite, Ozaïd à sa gauche. Derrière lui marchait Osama, fils de Zaïd. Il s’inclina profondément pour remercier le ciel qui le rendait maître du territoire sacré et du sanctuaire d’Abraham. Il récita à haute voix le chapitre quarante-huitième, qui commence par ces mots : « Nous t’avons accordé une victoire éclatante. Dieu t’a pardonné tes fautes ; il a accompli ses grâces, et il te conduira dans le sentier de la justice. Sa protection est pour toi un bouclier puissant, etc. » Tandis qu’il soumettait un peuple qui n’avait jamais connu de maître, il ne paraissait occupé que d’idées religieuses. La tête ceinte d’un turban noir, le corps couvert du manteau de pèlerin, il semblait plutôt un fervent musulman que le conquérant de la Mecque. Il marcha droit au temple. Son premier soin fut de faire abattre trois cent soixante idoles placées à l’entour. Il les frappait de la canne qu’il portait à la main, en prononçant ces mots : « La vérité a paru, le mensonge va disparaître et il ne se montrera plus[27]. » Et cet autre verset : « La vérité a paru, le mensonge s’est dissipé comme une vapeur légère[28]. » Lorsque les divinités des Arabes eurent couvert la terre de leurs débris, il accomplit les sept circuits sacrés autour du temple, et toucha avec un respect religieux l’angle de la pierre noire[29]. Avant d’y entrer, il en fit arracher des portraits[30] de femmes, objets d’un culte sacrilége. À la vue des tableaux où Abraham et Ismaël étaient représentés tenant en main les flèches du sort, il s’écria : « Malheur aux idolâtres ! Ils ont peint nos respectables patriarches d’après leurs idées superstitieuses. Qu’ont de commun avec Abraham et Ismaël, les flèches du sort ? » Après avoir détruit tous les objets encensés par la superstition, il entra dans le temple, prononça la formule, Dieu est grand, etc., et fit la prière avec deux inclinations. De là il se rendit au puits de Zemzem, découvert par l’ange à Agar. Il s’y désaltéra, et fit l’ablution sacrée. Ces diverses cérémonies remplies, il assembla les Coreïshites, et leur dit[31] : « Il n’y a qu’un Dieu. Il a accompli ses promesses, et a secouru son serviteur. Lui seul a renversé les bataillons ennemis. Il m’a donné l’empire sur vous, et s’est servi de mon ministère pour vous faire abjurer l’idolâtrie. Vous n’accorderez plus les honneurs divins à des pierres insensibles. Vous ne décernerez plus un culte sacrilège à nos pères Abraham et Ismaël, qui sont des hommes comme nous. Mortels ! nous vous avons formés d’un homme et d’une femme ; nous vous avons partagés en peuples, en tribus, afin que l’humanité règne au milieu de vous. Le plus estimable aux yeux de l’Éternel, est celui qui le craint[32]. » Il devait la prise de la Mecque à la force de ses armes[33]. La conquête lui donnait le droit de réduire tous les habitans en esclavage. S’étant donc tourné vers l’assemblée, il leur dit : « Qu’attendez-vous de moi ? Comment prétendez-vous que je vous traite ? » Comme un frère généreux, lui répondit-on. — Allez : vous êtes affranchis ; reprenez votre liberté.

Le même jour Mahomet fit usage du pouvoir que lui donnait l’emploi de chef suprême de la religion[34]. L’heure de midi étant venue, il ordonna à Belal, son crieur, de monter sur la Caaba et de proclamer la prière. La charge importante d’intendant du temple était sollicitée par Elabbas. Othman, le même qui était venu embrasser l’islamisme à Médine, la possédait. Mahomet l’obligea de lui remettre les clefs, et allait en gratifier son oncle ; le mécontentement d’Othman l’arrêta. Sentant combien il lui importait de gagner les principaux chefs des Coreïshites, il lui renvoya les clefs. Pour consoler Elabbas, il le mit en possession du gobelet avec lequel les pèlerins boivent l’eau du puits de Zemzem. La famille d’Elabbas possède encore aujourd’hui ce monument antique conservé avec un respect religieux[35]. Un acte qui assurait la puissance de Mahomet, termina ce jour glorieux. Tous les habitans de la Mecque vinrent lui prêter serment d’obéissance. L’inauguration se fit sur la colline Elsafa. Il était assis sur une éminence, entouré de ses officiers. Les citoyens s’étant avancés, il leur promit serment de fidélité. Ils jurèrent entre les mains d’Omar qu’ils lui seraient fidèles et obéissans jusqu’à la mort. Les femmes se présentèrent ensuite, et il reçut lui-même leur serment. Parmi les dames coréïshites se trouvait Henda, l’épouse d’Abusofian, la même qui, au combat d’Ahed, avait dévoré le cœur de Hamza[36]. Elle était déguisée. Mahomet, qui l’avait proscrite crite, la chercha des yeux et la reconnut. Se voyant découverte, elle se jeta à ses pieds, et lui dit : « Je suis Henda. Oubliez le passé. Pardonnez. » Il lui pardonna.

Mahomet, comme nous l’avons vu, avait défendu à ses généraux de verser le sang ; mais il avait nommé un certain nombre de coupables qu’ils devaient immoler partout où ils les rencontreraient. Pour préparer les Coreïshites à cet attentat, il leur tint ce discours[37] : « Citoyens de la Mecque, le même jour où le créateur suprême tira les cieux et la terre du néant, il établit la Mecque pour être un sanctuaire inviolable. Ce temple, cette ville, ce territoire sont sacrés. Personne ne souillera de sang humain l’asile des mortels. On ne pourra pas même y couper un arbre. Ces attentats ne furent jamais permis. Ils ne le seront jamais. Un privilége particulier me dispense aujourd’hui de la loi générale. Je n’en userai plus dans la suite. La Mecque sera toujours pour moi sacrée et inviolable ; j’en prends à témoin le Dieu invisible que j’adore. Je garderai religieusement ma promesse. »

Les auteurs varient sur le nombre des proscrits[38]. Abul-Feda n’en compte que dix, six hommes et quatre femmes : ce sont les principaux. Acrema, fils d’Abugehed, était le premier dont le sang devait être répandu. Le jour de la prise de la Mecque il s’enfuit dans l’Arabie Heureuse. Il venait d’épouser Om Hakim. Cette jeune dame, désolée de la perte de son mari, alla se jeter aux genoux du prophète, et les mouilla de ses larmes. Elle obtint la grâce qu’elle sollicitait, partit sur-le-champ, alla trouver Acrema et lui porta la nouvelle de son pardon[39]. Elle vint ensuite le présenter à Mahomet, qui le reçut avec bonté, et le fit colonel des Hawazenites. Devenu musulman, Acrema combattit avec autant de courage pour sa nouvelle religion, qu’il l’avait fait pour ses idoles[40]. Il fut tué à la bataille de Bermuc, sous le califat d’Abubecr.

Le second proscrit fut Hobar. C’était un homme riche, qui avait outragé Mahomet, et insulté ses filles de concert avec Hawaïret. Il se cacha avec tant de soin, qu’il se déroba aux recherches des satellites. Dans la suite, pressé par le repentir, et par la crainte d’être découvert, il se rendit à Médine, et se fit musulman. Comme il sollicitait l’oubli du passé, Mahomet lui dit : « ô Hobar ! je vous ai pardonné. L’islamisme efface tous les crimes commis dans le temps d’ignorance. »

[41] Le troisième fut Abdallah, fils de Saad, un des chefs les plus distingués de la tribu des Coreïshites. D’abord musulman et secrétaire de Mahomet, il écrivait les versets du Coran sous sa dictée. Enflé de ses connaissances, il devint le censeur de son maître. Il changeait des mots, tronquait des versets, et se moquait du Coran avec ses amis. La fraude ayant été découverte, il abjura l’islamisme. Après la prise de la Mecque, Othman l’amena au prophète et sollicita sa grâce[42]. Il ne l’obtint qu’après des instances réitérées. Lorsqu’il se fut retiré, Mahomet dit à ses officiers : « Je n’opposais une si longue résistance, que pour vous laisser le temps de me défaire de ce fourbe. » Ne deviez-vous pas, lui répondirent-ils, nous marquer par un signe votre intention ? Un signe perfide, ajouta Mahomet, est indigne d’un prophète[43]. Abdallah vécut jusqu’au califat d’Othman, qui le fit gouverneur d’Égypte. Il était excellent écuyer, et aimait passionnément les chevaux. Il récita en mourant le chapitre des coursiers[44].

Le quatrième fut Mekias. Nous avons parlé de son crime. Apostat et assassin, il méritait la mort. Oubliant au milieu des verres le danger qui le menaçait, il se livrait à la joie avec quelques idolâtres. Tamila l’apprit, l’alla trouver, et lui coupa la tête.

Le cinquième fut Abdallah, fils de Khatal. Envoyé par Mahomet, pour recueillir les aumônes des fidèles, il avait tué le musulman qui lui servait de domestique. N’osant plus reparaître à Médine, il apostasia, et prit à son service deux comédiennes qui le suivaient partout, chantant des vers satiriques contre le prophète[45]. Espérant trouver un asile à l’abri des autels, il s’était caché dans le temple. On le découvrit, et il fut mis à mort.

Elhawaïret fut le dernier des proscrits. Il était de la tribu des Coreïshites. Fier de ses richesses et de sa naissance, il avait souvent insulté le prophète. Un crime plus atroce le lui avait rendu odieux[46]. Sur le point de s’enfuir de la Mecque, Mahomet avait chargé Elabbas de conduire ses deux filles à Médine. Elhawaïret les ayant rencontrées en chemin, les heurta brutalement, et les renversa par terre. Cette indignité n’avait point été oubliée. Elle fut punie. Aly ayant rencontré le coupable, lui abattit la tête.

Henda, épouse d’Abusofian, Sara domestique des fils de Hashem, Fariata et Cariba, les deux comédiennes d’Abdallah, furent les seules femmes proscrites. Les trois premières obtinrent leur grâce. Fariata seule fut punie de mort.

[47] La prise de la Mecque arriva un vendredi le 21 du mois Ramadan[48]. Mahomet y resta environ quinze jours pour régler les affaires du gouvernement et de la religion. Pendant ce temps, ses lieutenans parcouraient les provinces voisines, appelaient les peuples à l’islamisme, et renversaient les idoles[49].

Ismaël avait apporté à la Mecque le culte d’un Dieu unique, et élevé un temple à sa gloire. Ses descendans le conservèrent long-temps dans la pureté ; mais leur nombre s’étant augmenté, la ville ne put plus les contenir dans son étroite enceinte. Des colonies sorties de son sein, se répandirent dans les provinces voisines. Elles emportaient avec elles des pierres du sanctuaire d’Ismaël. Ces monumens sacrés ne servirent d’abord qu’à leur rappeler leur origine, et la religion de leurs pères. Peu à peu la présence de l’objet vénéré fit oublier les motifs qui le rendaient vénérable. La pierre devint dieu ou déesse. On lui décerna un culte et des sacrifices. La corruption s’étendit. La Mecque elle-même reçut les divinités de ses voisins, et devint le foyer de l’idolâtrie. Mahomet s’était armé contre ce culte sacrilége. Soit qu’il mît sa gloire à faire adorer un Dieu unique, soit qu’il envisageât une seule religion comme le moyen le plus propre pour réunir les forces des Arabes divisés, il combattit l’idolâtrie avec un zèle ardent, et parvint à la détruire. Si, en forçant les peuples à changer de croyance, il leur faisait embrasser de nouvelles erreurs, au moins établissait-il parmi eux l’idée sublime d’un Être Suprême vengeur du crime, et rémunérateur de la vertu ; au moins abolissait-il les sacrifices affreux, où le père, étouffant dans son cœur le cri de la nature, inondait du sang de ses enfans les autels de ses dieux. Il est vrai que les apôtres qu’il envoyait pour convertir les idolâtres, n’étaient pas des hommes de paix. Ils prêchaient l’épée à la main ; et proposaient ou l’islamisme, ou l’esclavage.

Khaled, un de ces missionnaires armés, était allé prêcher les Jadimites. Ils avaient tué et dépouillé Auf, son oncle, lorsqu’il revenait de l’Yemen, avec de grandes richesses. Ce souvenir était gravé dans son cœur, et le désir de la vengeance l’animait plus encore que le zèle de la religion. Il campa près d’un de leurs puits. Les Jadimites s’y étaient rassemblés en armes, il leur proposa de se faire musulmans, et sur leur refus il leur livra combat. Ils furent vaincus. Une partie resta sur le champ de bataille. Les autres prisonniers devaient être emmenés en captivité[50]. Khaled leur ayant fait lier les mains derrière le dos, en immola plusieurs aux mânes de son oncle. Il proposa à ses compagnons d’égorger le reste. Salem, qui commandait une partie de l’armée, s’opposa à l’exécution de cet ordre barbare. Sa fermeté sauva les captifs. Mahomet blâma hautement la conduite de son général. Il leva les mains au ciel, et dit : « Seigneur, je suis innocent du crime qu’il a commis. » Il envoya sur-le-champ Ali avec une somme d’argent pour payer le sang des Jadimites. Lorsque l’envoyé eut acquitté tout ce que la loi exigeait, il demanda aux parens de ceux qui avaient été tués injustement, s’ils étaient satisfaits. Nous le sommes, répondirent-ils. La somme n’étant pas épuisée, il distribua à ces malheureux le reste de l’argent. Mahomet donna de grands éloges à la générosité d’Ali.

Les idolâtres se rendaient en foule à la Mecque, et prêtaient serment d’obéissance au vainqueur. Les Hawazenites, commandés par Malec, et les Takifites osèrent s’opposer au torrent[51]. Ces tribus belliqueuses engagèrent leurs alliés à s’armer pour défendre leur liberté et leurs dieux. Les Saadites et les Jochmites se rendirent à leur invitation. Ces derniers avaient pour chef Doraïde, vieillard de plus de cent ans, qui, sous les débris d’un squelette ambulant, conservait la vigueur d’âme et le courage d’un jeune guerrier. Tout aveugle qu’il était, il se fit porter dans une litière à la tête de ses soldats, et éclaira leur courage par son expérience. « Plût à Dieu, s’écriait-il à la veille de subir le joug, que j’eusse achevé ma carrière, et que mon corps reposât sous l’ombre d’un tombeau ! »

Instruit par ses espions, et du nombre des ennemis, et de leurs desseins, Mahomet sortit de la Mecque le six du mois de Chaval. Aux dix mille hommes qu’il avait amenés de Médine, il avait joint deux mille Mecquois. C’était l’armée la plus nombreuse qu’il eût commandée. À cette vue un des chefs ne put s’empêcher de dire : il est impossible que tant de braves guerriers soient vaincus par des troupes inférieures en nombre. Ces paroles déplurent à Mahomet, parce qu’elles inspiraient de la vanité à ses soldats, et qu’elles pouvaient leur faire négliger les moyens de vaincre. Il s’en plaint, en ces mots, dans le Coran : « Souvenez-vous de la journée de Honein, où le nombre de vos soldats vous enflait le cœur. À quoi vous servit cette armée formidable ! La terre vous sembla trop étroite dans votre fuite précipitée[52]. » Le général des croyans alla camper à Honein, vallée située à trois lieues de la Mecque. Il s’avança dans les gorges des montagnes pour aller au point du jour surprendre les ennemis campés à Autas[53]. Ils tournèrent contre lui son stratagème. Malec, profitant des ombres de la nuit, vint investir la vallée où les Musulmans étaient enfermés. Il plaça un corps de troupes à l’entrée, et leur recommanda de tenir ferme dans ce poste[54]. Il disposa le reste de ses soldats sur les collines et dans les creux des rochers. Au lever de l’aurore les Musulmans, déployant leurs drapeaux, se mirent en marche. Malec donna le signal, et ils furent assaillis d’une grêle de dards et de flèches. Cette attaque imprévue les déconcerta. Environnés de toutes parts, ils perdirent courage, et prirent la fuite avec tant de précipitation qu’il n’en resta pas deux ensemble. Mahomet exposé au plus grand danger qu’il eût couru de sa vie, se vit prêt à perdre en un instant le fruit de vingt années de travaux, de huit années de conquêtes. Entouré d’ennemis, presque seul au milieu des bataillons, il conserva son sang-froid et son intrépidité. Il se replia promptement vers la droite de l’armée, et s’arrêta dans un poste avantageux. Un petit nombre d’Ansariens et de Mohagériens se rassemblèrent autour de lui. Abubecr, Omar, Elabbas, et l’invincible Ali, résolurent de verser leur sang pour sa défense. Au milieu du désordre général, il criait : « Je suis Mahomet ; je suis l’apôtre de Dieu ; compagnons, où fuyez-vous ? revenez sous vos étendards. » Les ennemis, entendant sa voix, dirigèrent leurs coups de son côté. Ils pressaient vivement le petit bataillon où il faisait des prodiges de valeur. Aïman, Abdallah, fils de Zobaïr, et Ocaïl, frère d’Ali, tombèrent morts à ses côtés. Désespérant de pouvoir long-temps soutenir les assauts d’une armée victorieuse, il voulait se précipiter à travers les ennemis, et mourir glorieusement. Elabbas, voyant son dessein, se jeta à la bride de sa mule et l’arrêta. Puisque vous m’empêchez d’entrer dans la mêlée, lui dit Mahomet, rappelez mes soldats. Aussitôt, Elabbas qui avait la voix forte, cria : « Ô Musulmans ! revenez autour de votre apôtre, revenez sous vos drapeaux. » Les vallons répétèrent ces mots : les fuyards les entendirent. Ils s’arrêtèrent. Leur première terreur s’étant dissipée, ils rougirent de leur lâcheté, et accoururent en foule pour sauver leur prophète. Le combat recommença avec une nouvelle fureur. Les Hawazenites voulaient conserver leur avantage, les Musulmans effacer leur honte. Mahomet encourageait ses soldats. Considérant le choc des deux armées : « Voilà, dit-il, la fournaise qui s’enflamme. » S’apercevant que la victoire penchait de son côté, il employa, pour la décider, le même stratagème dont il s’était servi à Beder. Il prit une poignée de poussière, et la jetant vers les idolâtres : « Que leurs yeux, s’écria-t-il, soient couverts de ténèbres ! Courage ! compagnons, la victoire est à vous. » Au même moment les Musulmans poussèrent les ennemis avec tant de vigueur qu’ils les mirent en fuite[55]. Les Takifites tinrent ferme sous leurs drapeaux, et aimèrent mieux se faire hacher que de les abandonner. Malec, général des Hawazenites, se retira dans le château de Taïef avec les débris de son armée. Doraïd, chef des Jochmites, s’arrêta dans la plaine d’Aulas. Abu Amer, détaché à la poursuite des fuyards, l’atteignit et lui livra combat. Animés par la présence de leur vieux général, les Jochmites se défendirent courageusement. Enfin, après bien des efforts, les Musulmans remportèrent l’avantage. Il en coûta la vie à leur général[56]. Au fort de la mêlée il eut la cuisse percée d’une flèche. Abu Mousa, son neveu, le vengea. Il s’élança sur le soldat qui l’avait blessé, et le renversa à ses pieds. Abu Amer, consolé par la victoire, se fit arracher le fer meurtrier, et mourut dans l’opération. Près d’expirer, il dit à son neveu : « Saluez le prophète de ma part, et le priez d’implorer le pardon de mes fautes. » L’infortuné Doraïd eut une fin plus tragique. Ses troupes étant dispersées, il fuyait dans sa litière. Rabieh, jeune Musulman plein de feu, l’atteignit. Il le tira de la voiture, et le frappa de son épée ; mais il ne pouvait parvenir à lui ôter la vie[57]. « Prends, lui dit le vieux guerrier, mon sabre qui pend derrière avec mon bagage. » Rabieh détacha le sabre pesant, et lui fendit la tête.

Abu Mousa n’ayant plus d’ennemis à combattre, ramena son détachement au quartier général. Il se présenta devant Mahomet qu’il trouva assis sur un trône enrichi d’or et de pierres précieuses. Il lui rendit compte de son expédition, et lui rapporta les dernières paroles d’Abu Amer. Le prophète descendit de son trône, fit l’ablution sacrée, et levant les mains au ciel, lui adressa cette prière : « Seigneur, pardonne les péchés d’Abu Amer. Accorde-lui une place glorieuse au jour de la résurrection. Qu’il soit élevé au-dessus de la plus excellente partie de la création ! »

Poursuivant le cours de ses exploits, Mahomet alla mettre le siége devant TaïefMalec s’était retiré avec les Hawazenites. La place était forte. Il fallut l’assiéger dans les règles[58]. On ouvrit la tranchée, on fit approcher les beliers, les catapultes, les pierriers ; les murailles furent battues pendant vingt jours. Lorsque les brèches furent praticables, on donna l’assaut. Les Musulmans montèrent avec leur intrépidité ordinaire. Ils combattirent vaillamment ; mais ils trouvèrent une résistance insurmontable. Malec, à la tête des Hawazenites, les repoussa avec perte. Irrité du peu de succès de ses armes, Mahomet fit le dégât autour de la ville. Toutes les vignes furent coupées. On y mit le feu. Ce spectacle n’abattit point le courage des Takifites. L’amour de la liberté leur fit tout supporter[59]. Ce stratagème n’ayant pas réussi, Mahomet en employa un autre qui pouvait leur devenir funeste. Il fit publier autour des remparts qu’il donnerait la liberté à tous les esclaves qui se rendraient à son camp. Les assiégés firent si bonne garde, qu’il ne s’en échappa que vingt-trois. Ils furent déclarés libres. La ruse et la force devenant inutiles, Omar, par l’ordre du général, commanda aux troupes de plier bagage. Un murmure universel s’éleva. Hé quoi ! disaient les Musulmans, quitterons-nous prise avant que Taïef nous ait ouvert ses portes ? Témoin du mécontentement de l’armée, Mahomet fit publier l’assaut pour le lendemain. Les soldats, satisfaits, s’y portèrent avec ardeur. Ils gagnèrent la brèche l’épée à la main, et combattirent en désespérés sur les débris de la muraille ; mais les assiégés, retranchés dans un poste avantageux, présentant un front hérissé de lances et d’épées, tandis que leurs archers faisaient pleuvoir une grêle de dards et de flèches, formèrent derrière leurs murs renversés, un rempart impénétrable. Après des efforts inouïs, les assiégeans ayant perdu beaucoup de monde, voyant la plupart de leurs officiers blessés, furent obligés de se retirer. Mahomet fit donner une seconde fois l’ordre du départ, et personne ne murmura[60]. L’armée s’étant mise en marche, s’arrêta à Gerana, bourg situé entre Taïef et la Mecque[61]. C’était le dépôt de toutes les dépouilles enlevées à la bataille d’Hanein et d’Autas. On en fit le dénombrement. Il se trouva six mille captifs, hommes, femmes et enfans, vingt-quatre mille chameaux, quarante mille moutons et quatre mille onces d’argent. Les Hawazenites ne tardèrent pas à envoyer des députés au camp de Gerana. Mahomet se leva à leur arrivée, et leur fit un accueil gracieux. Ils embrassèrent l’islamisme, et le prièrent de leur rendre leurs prisonniers et leurs biens. « Mes soldats, leur dit-il, ne consentiraient jamais à vous accorder votre demande en entier ; choisissez de l’un ou de l’autre. » Ils retournèrent vers leurs compatriotes, et revinrent dix jours après demander les captifs de leur nation. Avant de les leur rendre, Mahomet assembla ses soldats, et leur fit cette courte harangue : « Ô Musulmans, vos frères sont venus vers vous, conduits par le repentir[62]. Ils m’ont conjuré de rendre la liberté à leurs pères, leurs mères, leurs enfans. » Je n’ai pu résister à leurs instances. Je serais charmé que vous approuvassiez ma conduite ; mais si quelqu’un de vous se croit lésé, qu’il parle ; je promets de le dédommager à la première rencontre où le ciel nous accordera de nouvelles dépouilles. » Ô prophète ! s’écrièrent le plus grand nombre, nous approuvons ce que vous avez fait. L’acclamation n’ayant pas été générale, il ordonna aux tribuns de recueillir les voix de chaque soldat, et de lui faire leur rapport. Ils l’assurèrent que toute l’armée avait approuvé sa générosité. La certitude d’un consentement unanime lui fit convoquer une nouvelle assemblée. Les députés des Hawazenites y ayant été introduits, il leur dit : « Tous les captifs qui sont tombés en partage à moi et aux enfans d’Abd Elmotalleb, sont à vous. » Les Mohagériens et les Ansariens dirent : « Tous ceux qui nous sont échus appartiennent à l’apôtre de Dieu. À l’instant les six mille prisonniers furent rendus aux Hawazenites. Un trait de munificence fit oublier aux croyans le sacrifice qu’ils venaient de faire. Il leur céda la cinquième portion du butin qui lui était due par droit de conquête. Avant de congédier les députés, il leur fit entendre que si Malec, leur général, venait embrasser l’islamisme, il lui rendrait sa famille, ses richesses, et qu’il ajouterait à ces bienfaits un présent de cent chameaux. Attiré par ces flatteuses promesses, le prince se rendit au camp de Gerana, et se fit musulman. Son attente ne fut point trompée. Flatté de l’accueil qu’il reçut, charmé d’avoir recouvert ce qu’il avait de plus cher au monde, Malec épousa avec chaleur les intérêts d’un vainqueur bienfaisant, et devint l’ennemi le plus redoutable des Takifites. Le commandement de tous ses compatriotes fut le prix de son zèle.

Ces négociations terminées, Mahomet partagea les dépouilles. Il lui importait de s’attacher les principaux chefs des tribus[63]. Tout ce que le droit des armes lui avait acquis, fut sacrifié pour gagner leur affection. Abusofian, ses deux fils, Yezid et Moavia[64] ; Sahal, fils d’Amrou ; Acréma, fils d’Abugehel ; Elharet et Sawan, fils d’Omia, les plus distingués d’entre les Coreïshites, furent comblés de ses faveurs. Les princes des autres tribus eurent aussi part à ses largesses. L’un d’eux, nommé Elabbas, fils de Mardas, mécontent des chameaux qu’il avait reçus en présent, s’en plaignit hautement. « Il faut, dit Mahomet, couper la langue à cet homme. » Il le combla de tant de dons, qu’Elabbas, confus et charmé, demeura muet. Les Ansariens, témoins de tant de grâces sans les avoir partagées, se crurent en droit de porter d’humbles plaintes à leur apôtre. Ils lui témoignèrent leur douleur respectueuse[65]. « Ô Ansariens ! leur dit-il, vous murmurez de ce que je répands les biens de la terre pour attirer les chefs du peuple à l’islamisme. Vous à qui la profession de la vraie foi a déjà assuré la félicité éternelle, pouvez-vous envier des chameaux, des dépouilles qui me servent à gagner le cœur des idolâtres, et à opérer leur conversion ? Gardes de l’apôtre de Dieu, retournez à votre quartier. J’en jure par celui qui tient mon âme dans ses mains, lorsque je vous vis pour la première fois sur le mont Acaba, vous m’inspirâtes une telle confiance, que je me serais livré entre vos mains, si je n’avais espéré que le ciel me fournirait les moyens de sortir de la Mecque. Si les Coreïshites avaient forcé le château d’Abutaleb où je m’étais retiré, je serais allé chercher un asile parmi vous. Ô Dieu ! fais miséricorde aux Ansariens et aux enfans des Ansariens. » Honorés de tant de confiance, pénétrés de ces tendres reproches, les gardes de Mahomet se retirèrent satisfaits. Lorsque tout fut terminé, un Musulman dont l’histoire ne nous a conservé que le surnom de Zou el Khowisara (auteur de la calomnie), osa dire en face à son général, qu’il n’en avait pas usé avec équité dans le partage du butin. « Malheureux ! lui dit Mahomet, si la justice n’est pas chez moi, où se trouvera-t-elle[66] ? » Omar voulut abattre la tête de l’insolent. « Laissez-le, ajouta le prophète, il doit donner le jour à une race qui sortira du sein de la religion, comme la flèche sort de l’arc, et qui n’y rentrera plus[67]. »

La victoire ayant soumis à l’islamisme la plupart des tribus arabes, leurs chefs, entraînés par des bienfaits, étant devenus ses appuis, Mahomet alla rendre grâces au ciel de ses succès. Il se rendit à la Mecque avec un cortége peu nombreux. Il visita les lieux saints, et accomplit les cérémonies d’usage. Partout il fit paraître ce respect religieux qui, imprimant dans les esprits une idée sublime du Dieu que l’on sert, réfléchit sur le ministre une partie de sa gloire. Ces devoirs sacrés étant remplis, il s’occupa des affaires du gouvernement, et nomma aux principaux emplois, Otab, fils d’Ozaïd, qu’il avait établi son lieutenant ; et Moadh, qu’il avait créé ïman, ou grand pontife, furent confirmés dans leurs charges. Le premier présidait aux affaires civiles ; l’autre, chef de la religion, devait enseigner au peuple la manière de célébrer les fêtes du pèlerinage. Pendant que ces soins le retenaient, les Ansariens, fidèles compagnons de ses travaux, murmuraient entre eux. Ils appréhendaient que leur apôtre n’établît à la Mecque le siége de son empire. Ils attendaient impatiemment son retour. Chaque moment qu’il y restait leur paraissait long. Mahomet était loin de justifier leurs alarmes. Il n’ignorait pas que la présence d’un maître eût réveillé les haines mal éteintes des Coreïshites ; qu’à la Mecque il n’eût été que le premier de ses concitoyens, tandis qu’à Médine il était roi, pontife, prophète. Il se hâta de retourner au camp de Gerana, et ramena ses troupes triomphantes à Médine. La joie de tout un peuple le flatta davantage que l’aspect des fiers Coreïshites humiliés. La naissance d’un fils nommé Ibrahim, combla ses vœux. Marie l’Égyptienne, cette jeune Cophte que lui envoya Mokaukas, le mit au monde quelque temps après son arrivée[68]. Il célébra cet heureux jour dans un festin qu’il donna à ses amis.

La même année, l’Arabie perdit Hatem, un de ses poëtes les plus distingués. Il était chrétien, et seigneur d’une ville nommée Khader, située dans la province de Najd, entre les monts Ajja et Salma. Il chantait dans ses vers, la vaillance et la bienveillance, vertus dont il était le modèle. Voici l’éloge qu’en fait Elmaïdan, auteur du livre des proverbes arabes : « Hatem fut généreux, vaillant, poëte distingué et toujours victorieux. Livrait-il un combat, il en sortait couvert de lauriers. Poursuivait-il une proie, il l’atteignait. Lui demandait-on une grâce, elle était accordée. S’il jouait au jeu de hasard, le sort le favorisait. S’il disputait le prix de la course, il fournissait le premier la carrière. S’il faisait des prisonniers, il leur rendait la liberté. » Les livres des Arabes sont remplis des exemples de sa générosité. Je ne puis me refuser au plaisir d’écrire le trait suivant, rapporté par le même auteur. Hatem, déguisé, traversait le territoire d’Anzirate. Un prisonnier chargé de fers le reconnut. Persuadé que s’il pouvait se faire entendre, ses liens allaient tomber, il s’écria : Abou Sofana[69] ! la captivité et la vermine m’ont rongé. Mon ami, lui dit Hatem, il ne fallait pas me nommer dans une terre étrangère. Cependant, il s’approcha du malheureux ; il le fit déchaîner et se mit à sa place. Étant connu, il ne put obtenir sa liberté qu’à prix d’or. Il resta dans les fers jusqu’à ce qu’il eût payé sa rançon, qui fut très-considérable.

Hatem laissa en mourant un fils nommé Adi, et la belle Sofana[70]. Ils suivaient la religion chrétienne ; mais une partie des Taïtes qui formaient leur tribu adorait encore les faux dieux. Mahomet envoya Ali avec des troupes, pour renverser Elfatas, leur principale idole. Adi prit la fuite, et se retira en Syrie avec une partie de ses richesses. Sofana était restée à Khader. Elle fut emmenée à Médine. Confondue dans la foule des captives, elle se trouva exposée au milieu de la place publique. Tandis que les compagnes de son infortune s’abandonnaient aux larmes et au désespoir, elle réfléchissait aux moyens de sortir de l’abîme. Ayant aperçu le prophète qui passait, elle se leva précipitamment, et lui dit : « Ô apôtre de Dieu ! celui qui m’a donné le jour n’est plus ; mon patron a pris la fuite ; faites-moi participer à la grâce que Dieu vous a accordée. » « Quel est votre patron ? lui demanda Mahomet. — C’est Adi, fils de Hatem, lui répondit Sofana. — Que le ciel vous accorde votre demande, comme je le fais moi-même. Il fit ôter ses liens, lui rendit la liberté, la combla de présens, et la renvoya à son frère. Adi fut si touché de cette générosité, qu’il partit pour Médine et embrassa l’islamisme.

  1. C’est cet Amrou qui, par l’ordre d’Omar, brûla la fameuse bibliothéque d’Alexandrie, perte à jamais irréparable pour les arts et les connaissances humaines.
  2. Jannab.
  3. Abul-Feda, page 100.
  4. Ce château fut nommé, par les Français, Crac de Mont-Réal. Il est situé au delà du Jourdain. Ils s’en rendirent maîtres après la prise de Jérusalem, en 1098 (l’an quatre cent quatre-vingt-douze de l’hégire). Quatre-vingt-neuf ans après, le grand Salah-Eddin ayant battu l’armée française près du lac de Tiberiade, reprit ce château avec plusieurs autres forteresses. Ce fut dans cette bataille que Régui (Lusignan, roi de Jérusalem), son frère Haimar, le seigneur du Mont (de Mont-Ferrat), Geoffroi, le prince Renaud, seigneur du château de Carac, furent faits prisonniers. Elmacin.
  5. Ils s’en emparèrent en 1453, l’an 857 de l’hégire.
  6. Jannab.
  7. Jannab, page 190.
  8. Jannab, page 190.
  9. Elbokar.
  10. Khaled porta dans la suite le nom d’épée de Dieu. Ce général fameux, vainqueur de Mahomet au combat d’Ahed, vainqueur des Grecs à Mouta, continua, sous le califat d’Abubecr et d’Omar, le cours de ses exploits glorieux. Le surnom que lui donna Mahomet ne fut point inconnu à ses ennemis. Théophane, p. 378, parle d’un émir nommé Khaled, et appelé l’épée de Dieu.
  11. Jannab.
  12. Abul-Feda, page 102.
  13. Idem, ibidem.
  14. Les Arabes n’ont ni chaises ni fauteuils dans leurs appartemens. Un sopha qui règne à l’entour forme leurs siéges. Le soir ils y étendent des matelas qui leur servent de lits. On les plie le matin, et la chambre à coucher devient salon de compagnie.
  15. Abul-Feda, page 102 et 103.
  16. Des écrivains enthousiastes disent que Gabriel, descendit du ciel pour l’en instruire.
  17. Abul-Feda, page 103.
  18. Le Coran, chap. 60, verset 1.
  19. Abul-Feda, page 103.
  20. Jannab, page 202.
  21. Abul-Feda, page 104. Jannab.
  22. Morr el Dahran est situé à quatre lieues de la Mecque.
  23. Abul-Feda, page 104 et 105.
  24. Idem, page 105.
  25. Abul-Feda, page 106.
  26. Jannab, page 208.
  27. Le Coran, chap. 34, tom. 2.
  28. Idem.
  29. Abul-Feda, page 107.
  30. Les Arabes croyaient que les anges étaient les filles de Dieu. Ils les représentaient sous la forme d’une femme, et leur rendaient des honneurs divins.
  31. Jannab.
  32. Le Coran, chap. 40, verset 13, tome 2.
  33. Abul-Feda, page 107.
  34. Jannab, page 213.
  35. Idem, page 214.
  36. Abul-Feda, p. 110.
  37. L’auteur du livre Chafa Elgeran.
  38. Jannab en compte seize.
  39. Idem.
  40. L’auteur du livre Chafat Elgeran.
  41. Jannab.
  42. Abul-Feda, page 109.
  43. Jannab.
  44. Le Coran, chap. 10.
  45. L’auteur du livre Chafa Elgeren.
  46. Idem.
  47. Abul-Feda, page 106.
  48. Jannab, page 205.
  49. Ebn. Ishak.
  50. Abul-Feda, page 111.
  51. Idem, page 112.
  52. Le Coran, chap. 9, tome Ier.
  53. Autas est le nom d’une vallée située entre Honein et Taïef. Jannab.
  54. Abul-Feda, page 114.
  55. Mahomet attribua l’honneur de cette victoire au secours divin.

    « Dieu couvrit de sa sauvegarde le prophète et les croyans. Il fit descendre des bataillons d’anges invisibles à vos yeux, pour punir les infidèles. Tel est le sort des prévaricateurs. » Le Coran, ch. 9, page 180, tome Ier.

  56. Jannab.
  57. Abul-Feda. Elbokar.
  58. Abul-Feda, page 117.
  59. Jannab.
  60. Abul-Feda, p. 120.
  61. Jannab, p. 238.
  62. Elbokar.
  63. Abul-Feda, p. 118.
  64. Moavia, sixième calife, fut la tige de la famille des Ommiades qui tirèrent leur nom d’Omaïa, son aïeul. Cette famille occupa l’empire jusqu’à la cent trente-deuxième année de l’hégire, qu’il passa aux Abassides.
  65. Abul-Feda, p. 119.
  66. Abul-Feda, p. 119. Jannab, p. 240.
  67. Si l’on en croit les historiens arabes, la prédiction s’accomplit. Zou Elkowisara donna le jour à Harkoud, surnommé Zou Elmezma (digne de blâme), qui fut le chef des Kharegites ou schismatiques, révoltés contre l’autorité de l’iman, grand pontife de la religion.
  68. Jannab, p. 244. Abul-Feda, p. 120.
  69. Abou Sofana signifie père de la perle. Hatem avait pris ce nom par amour pour sa fille nommée Sofana.
  70. Ebn Ishak.