Correspondance 1812-1876, 6/1875/CMXXXVIII
CMXXXVIII
À MADAME MARIE BOUCOIRAN, À NÎMES
Je n’avais pas compris le terrible télégramme[1]. J’ai cru qu’il s’agissait du pauvre enfant, et c’est aujourd’hui, par M. Sagnier, que nous savons toute l’étendue de votre malheur et du nôtre ; car c’est pour nous une perte de famille des plus cruelles. Je suis navrée et je m’attends à voir mon fils, qui est actuellement en voyage, éprouver une douleur égale à la mienne. Combien nous vous plaignons, pauvre chère amie ! Justement nous nous flattions de faire accepter à votre mari de passer avec vous quelques années près de nous à Nohant, pour nous aider à élever mes petites filles, comme il m’a aidé à élever leur père. Nous pensions que le malheur nous rapprocherait tous, et nous voilà accablés devant cette éternelle séparation, si peu prévue !
Soyez certaine, chère Marie, que notre amitié pour vous est doublée par le chagrin que vous éprouvez et que nous partageons avec vous. Il était si bon, si juste, si grand et si vrai en toute chose ! Il vous chérissait et vous respectait. Vous avez rendu son existence heureuse : c’est la seule consolation qui vous reste, mais elle est sérieuse, et vous assure notre fidèle amitié.
- ↑ Annonçant la mort de Jules Boucoiran.