Correspondance de Voltaire/1732/Lettre 241

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Correspondance de Voltaire/1732
Correspondance : année 1732GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 33 (p. 246-247).
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241. — À M. DE CIDEVILLE.
Ce mercredi des Cendres, 27 février.


La beauté qu’en secret Cideville idolâtre
Voit en lui deux talents rarement réunis :
Le cœur aimable de Daphnis,
Et le v… du héros qui f…… Cléopâtre.

Cependant, mon cher ami, votre cœur a mieux réussi que le reste, et l’on est beaucoup plus content de vos bergers que de vos héros. Notre ami Formont, qui n’a point de tragédie à faire jouer, vous aura mandé plus au long des nouvelles de Daphnis et d’Antoine. Pour moi, qui cours risque d’être sifflé mercredi prochain[1], et qui vais faire répéter Ériphyle dans l’instant, je ne puis que me recommander à Dieu, et me taire sur les vers des autres.

Je voudrais que vous raccommodassiez votre besogne à Paris, et moi la mienne ; mais, comme probablement vous en avez de plus agréable à Rouen, je vous dirai seulement : Felices quibus ista licent[2]. Cependant, quand vous voudrez avoir du relâche et venir à Paris, j’espère, mon cher ami, pouvoir vous procurer non-seulement un appartement, mais une vie assez commode. C’est une affaire que j’ai dans la tête. Vous m’avez accoutumé à vivre avec vous, et il faut que j’y revive.

Adieu : je vous embrasse tendrement. Plura alias.

  1. Ériphyle fut jouée, pour la première fois, non le mercredi 5 mars, mais le vendredi 7 mars 1732.
  2. Ovide, Métam., X, 329.