Correspondance de Voltaire/1736/Lettre 551

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Correspondance : année 1736GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 34 (p. 17-18).
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551. — Á M. BERGER.
À Cirey, janvier.

De ton Bernard[1]
J’aime l’esprit ;
J’aime l’écrit
Que, de sa part,
Tu viens de mettre
Avec ta lettre.
C’est la peinture
De la nature ;

C’est un tableau
Fait par Watteau.
Sachez aussi
Que la déesse
Enchanteresse
De ce lieu-ci,
Voyant l’espèce
De vers si courts
Que les Amours
Eux-même ont faits,
A dit qu’auprès
De ces vers nains.
Vifs et badins,
Tous les plus longs.
Faits par Voltaire,
Ne pourraient guère
Être aussi bons.

Mille compliments à notre ami Bernard, de ce qu’il cultive toujours les muses aimables. Je ne sais pas pourquoi le public s’obstine à croire que j’ai fait Montézume[2]. La scène est au Pérou, messieurs, séjour peu connu des poëtes. La Condamine mesure ce pays, les Espagnols l’épuisent, et moi, je le chante. Dieu me garde des sifflets ! Lefranc fait bien tout ce qu’il peut pour m’attirer cette aubade ; il empêche Mlle  Dufresne de jouer. Je ne sais si le rôle est propre pour Mlle  Gaussin. Si je ne suis pas sifflé, voilà une belle occasion d’écrire à M. Sinetti l’Américain. Adieu ; je ne me porte guère bien. Adieu, charmant correspondant.

  1. Voyez la dernière note de la lettre 543.
  2. Vovez la note sur la lettre 536.