Correspondance de Voltaire/1736/Lettre 565
Je suis bien languissant, mon cher ami ; il faut que j’ordonne à mon cœur de n’être point bavard avec vous, cette poste-ci.
Ma santé ne m’a pas permis de retoucher la dédicace et le discours que je vous adresse ; mais je persiste, pour de très-bonnes raisons, à faire paraître ces deux pièces, attendu que j’aime la vérité et que je ne crains point mes ennemis.
Toute peine mérite salaire. Launai[2] a acquis mon mépris et mon indignation pour l’infâme conduite qu’il a tenue avec moi ; mais il lui faut un présent pour avoir lu Alzire aux comédiens : ce n’est pas à lui, mais à moi que je le donne.
J’ai songé à faire une autre galanterie à Berger.
Qu’est-ce qu’Alzirette à la Foire ? On dit qu’elle est de Lefranc ; je le voudrais.
Voici un paquet pour M. des Alleurs, s’il n’est pas encore parti pour Constantinople[3] ; s’il l’est, vous aurez la bonté de l’envoyer par la poste, par la voie de Marseille.
Je suis bien surpris de ne pas recevoir des nouvelles de monsieur votre frère ; c’est la première fois qu’un débiteur s’est plaint de n’entendre pas parler de son créancier.
Ménagez-moi toujours des juges et des amis comme Pollion elle petit B…[4].
Vous avez sans doute montré les deux discours[5] aux deux respectables frères[6], à qui j’ai tant d’obligation.
Vous avez dû recevoir de la main d’Émilie une lettre, qui vous dédommagera de tous les petits articles laconiques de ce billet-ci.
Adieu ; dans l’état de langueur où je suis, je crains bien d’aimer trop la vie. Je vous embrasse tendrement.