Correspondance de Voltaire/1736/Lettre 623

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Correspondance : année 1736GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 34 (p. 97-98).
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623. — À M. BERGER.

Je ne peux assez remercier M. Gonai. Il faut que la deuxième Henriade soit pour lui, car la première doit être pour vous,

Avez-vous semoncé le paresseux Thieriot, pour qu’il vous donne ses remarques ? C’est un juge qui fait bien durer le procès qu’il a appointé. Il sera responsable de mes fautes. Pressez-le, je vous en prie, car ce procès est devenu le vôtre. Le plus grand service qu’on puisse me rendre est d’être sévère.

Pourquoi n’aimez-vous pas les traits du tonnerre ? Mettez, si vous voulez, les feux ou les flammes ; mais j’aime autant les traits. Vous trouverez ici quelques petites corrections. Si vous rencontrez, dans votre chemin, quelques expressions oiseuses, quelques redites, quelques pléonasmes, ne manquez pas, je vous prie, de me dénoncer les coupables : je les bannirai à perpétuité de la Henriade.

J’ai lu les trois Épitres[1] de l’auteur du Capricieux, des Aïeux chimériques, du Café, etc., qui donne des règles de théâtre, et de l’auteur des couplets, qui parle de morale. Il me semble que je vois Pradon enseigner Melpomène, et Rolet endoctriner Thémis.

Je vous envoie l’ode sur l’Ingratitude : j’ai dédaigné de parler de Desfontaines ; il n’a pas assez illustré ses vices.

Je vous prie de donner à M, Saurin le jeune, et à M. Crébillon, des copies de cette ode : ils sont tous deux fils de personnes distinguées dans la littérature, que Rousseau a indignement attaquées. Ils doivent s’unir contre l’ennemi commun. Si Rousseau revenait, son hypocrisie serait dangereuse à. M. Saurin le père[2], et le contre-coup en retomberait sur le fils. Je sais sur cela bien des particularités. Faites, je vous prie, mille compliments pour moi à MM. Saurin et Crébillon, À l’égard de M, Hérault, s’il exige quelque chose de moi, je ferai ce que l’on exigera. Je vous prie de voir M. d’Argental et de lui parler.

Adieu, mon cher correspondant ; je suis bien sensible aux soins dont vous m’honorez. Mille compliments au gentil La Bruère et à nos amis.

  1. Voyez la note tome XXII, page 233.
  2. Voyez son article, tome XIV, page 133.