Correspondance de Voltaire/1738/Lettre 844

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Correspondance : année 1738GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 34 (p. 440-441).
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844. — À M. L’ABBÉ MOUSSINOT[1].
27 mars (1738).

En réponse à celle du 24.

J’accepte les douze assiettes, non les plats ; le lustre à la mode, tel que Lebrun en vend, non les vieux lustres, quelque beaux qu’on les dise ; la pendule, avec cent vingt francs de retour, non celle qu’on fait quatre cent quarante francs.

Quand on viendra, mon cher ami, de la part d’un M. Médine demander trois cents florins, dites : J’ai reçu commission de les prêter, hoc verum ; mais de les prêter en l’air, hoc absurdum. Qu’un bon banquier fasse son billet payable dans un an, et je les prête.

Idem, je veux bien prêter au sieur Le Ratz de Lanthenée[2], ingénieur, trois cents livres ; mais que celui qui imprime (son ouvrage ? ) signe un billet payable dans un an. Il faut prêter et non perdre ; être bon et non dupe.

Quelques louis au compteur de l’argent du sieur Michel pour ses peines : passé deux cents livres, non. Je prie toujours votre frère de me dire d’où il tient l’Almanach du Diable, qu’il m’a envoyé d’office, et le Recueil du sieur Ferrand. Il peut et doit me le dire : je ne le commettrai point.

Le d’Arnaud avait promis d’apprendre à écrire. S’il avait une bonne écriture, je l’aurais placé. C’est un sot. Dites-lui cette vérité pour son bien.

Je me réfère aux précédentes pour tout le reste, À votre loisir, demandez à votre avocat son avis sur ces deux cas :

1° Un homme doit une rente viagère hypothéquée sur une terre. Il vend la terre sans avertir le pensionnaire viager. Que dit la loi à cela ? Et si ce vendeur a encore des biens libres, le viager a-t-il toujours son droit d’hypothèque ? S’il n’a pas de biens libres, que devient la rente viagère après la mort de ce débiteur ?

2° Un homme a des rentes viagères ; il s’en va à Utrecht pour jansénisme ou calvinisme, comme il vous plaira ; il doit cent mille francs, et avant de partir il délègue dix mille livres de rentes pour dix ans. Cependant on confisque son bien. La confiscation a-t-elle lieu ? Ses créanciers seront-ils payés ? Ses délégations sont-elles payables sa vie durant ? Deux belles questions ! Vale.

La boîte émaillée couverte de cristal de roche n’est pas ce qu’on demande. On s’est mieux expliqué depuis ma dernière. C’est une boîte d’or émaillée de fleurs en mosaïque. Il y en avait à Paris, il y a quelques années. Un de vos brocanteurs peut trouver cela.

Je vous embrasse.

  1. Édition Courtat.
  2. Gentilhomme liéigeois, dont il a été question tome XXII, page 398.