Correspondance de Voltaire/1739/Lettre 1099

La bibliothèque libre.
Correspondance de Voltaire/1739
Correspondance : année 1739GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 35 (p. 205).

1099. — À MADEMOISELLE QUINAULT.
7 mars, à Cirey.

Thalie, qui gouvernez Melpomène, parmi les Mahomets, les Warvick et les Alméides, ce que vous savez trouvera-t-il sa place ? Vous en aviez vu l’ébauche ; je l’envoie avec quelques coups de pinceau, qui sont le fruit de vos judicieux conseils ; il m’est venu de si terriblement beaux sujets dans la tête que j’ai peur de ne plus rien faire que des pièces de théâtre. De façon ou d’autre, je suis à vous, mademoiselle, ou comme admirateur ou comme auteur. J’ai l’honneur de vous avertir qu’un grand jeune homme bien fait[1] qui idolâtre la comédie, et qui voudrait mériter d’approcher de vous, est venu exprès me trouver à Cirey ; il s’est d’ailleurs imaginé qu’il pourrait entrer dans les écuries du roi, qu’on pourrait le présenter à M. le prince Charles ; enfin il m’a pressé, conjuré de lui donner une lettre pour vous. Je n’ai pu résister à la vanité que je sentais de passer pour avoir auprès de vous quelque crédit. Je lui ai donné cette lettre, il est parti sur-le-champ pour Paris, il est peut-être à présent à votre porte ; c’est là où je serais, si je n’étais à Cirey. Pourquoi me refusez-vous le petit mot que je vous ai demandé ? Vous savez pourtant quel est mon tendre, mon éternel dévouement pour vous. V.

  1. Degouve.