Correspondance de Voltaire/1751/Lettre 2199
Vous me mandiez, monsieur, au sujet de l’affaire de M. de Voltaire, que vous étiez persuadé qu’il était incapable de ce dont on l’accusait. Ce qui vient de se passer ici justifie la bonne opinion que vous avez de lui et que toute notre cour a eue. Son procès a été jugé jeudi dernier, à son honneur et gloire, et le juif joaillier condamné dans toutes les formes. M. de Voltaire avait acheté pour trois mille écus de bijoux qui n’en valaient pas mille, et comme la lésion est au-dessus de la moitié, le contrat a été regardé comme nul. Voilà le premier point du procès. Le second avait pour objet une lettre de change de dix mille francs, dont M. de Voltaire a cru devoir arrêter le payement. Cette affaire, simple en elle-même, a été embrouillée par tout ce que la chicane emploie ordinairement pour éloigner sa condamnation. Le grand chancelier et nos premiers magistrats ont été nommés commissaires dans cette cause, et leur jugement a été attendu avec d’autant plus d’impatience que les honnêtes gens étaient persuadés qu’il serait dicté par l’équité même. Je suis charmé de vous apprendre cette nouvelle, qui vous fera autant de plaisir qu’elle m’en a fait, par l’intérêt que je sais que vous prenez à tout ce qui regarde ce grand homme, etc.
- ↑ Cette lettre est extraite des Mémoires sur Voltaire, par Longchamp et Wagnière, tome II, page 311.