Correspondance de Voltaire/1756/Lettre 3164

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Correspondance de Voltaire/1756
Correspondance : année 1756GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 36).

3164. — À M.  LE MARECHAL DUC DE RICHELIEU.
Aux Délices, près de Genève, avril.

Prenez Port-Mahon, mon héros ; c’est mon affaire. Vous savez qu’un fou d’Anglais parie vingt contre un, à bureau ouvert dans Londres, qu’on vous mènera prisonnier en Angleterre avant quatre mois. J’envoie commission à Londres de déposer vingt guinées contre cet extravagant, et j’espère bien gagner quatre cents livres sterling, avec quoi je donnerai un beau feu de joie le jour que j’apprendrai que vous avez fait la garnison de Saint-Philippe prisonnière de guerre. Je ne suis pas le seul qui parie pour vous. Vous vengerez la France, et vous enrichirez plus d’un Français. Je me flatte que, malgré la fatigue et les chaleurs, la gloire vous donne de la santé, à vous et à M.  le duc de Fronsac. Vous avez auprès de vous toute votre famille. Permettez-moi de souhaiter que vous buviez tous à la glace dans ce maudit fort de Saint-Philippe, couronnés de lauriers comme des Romains triomphant des Carthaginois.

Je n’ose pas vous supplier d’ordonner à un de vos secrétaires de m’envoyer les bulletins ; mais, si vous pouvez me faire cette faveur, vous ne pouvez assurément en honorer personne plus intéressé à vos succès.

Permettez que les deux Suisses vous présentent leur tendre respect.