Correspondance de Voltaire/1758/Lettre 3601

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Correspondance de Voltaire/1758
Correspondance : année 1758GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 440).
3601. — À M. TRONCHIN, DE LYON[1].
Délices, 5 mai.

Quoique M. le chevalier des Soupirs m’envoie des triplicata de son arrivée sur la côte de Coromandel, je tremble pour nos affaires d’Orient et d’Occident. Je voudrais que le Canada fût au fond de la mer Glaciale, même avec les révérends pères jésuites de Québec, et que nous fussions occupés à la Louisiane à planter du cacao, de l’indigo, du tabac et des mûriers, au lieu de payer tous les ans quatre millions pour nos nez à nos ennemis les Anglais, qui entendent mieux la marine et le commerce que messieurs les Parisiens.

Le roi de Prusse m’a accordé un congé pour un de vos Genevois prisonniers[2] ; c’est un Turretin, famille honorée ici presque comme les Tronchin. Cette petite aventure m’a fait un extrême plaisir. Je n’ai, Dieu merci, rien à demander pour moi à aucun roi de ce bas monde, et je suis enchanté d’obtenir pour les autres.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Voyez la lettre 3594.