Correspondance de Voltaire/1759/Lettre 3885

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Correspondance de Voltaire/1759
Correspondance : année 1759GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 40 (p. 139-140).

3885. — À M.  PIERRE ROUSSEAU[1].
11 juillet 1759.

M.  Desmal, monsieur, a reçu votre lettre ; il vous est très-obligé de votre souvenir, et quoique son frère ait été fâché contre je ne sais quel monsieur de V. qui lui a ravi insolemment l’honneur d’avoir mangé du jésuite et d’avoir voyagé avec M.  Martin. Votre journal est le seul qu’il lise avec plaisir. Il pense absolument comme vous sur l’ex-jésuite dont vous lui parlez, à cela près qu’il ne le dit jamais : il voudrait fort avoir quelque pièce à vous communiquer, mais votre journal n’en a certainement pas, et d’ailleurs ce M.  Desmal est si gâté par ses voyages, et pense quelquefois d’une manière si hardie, que son frère le capitaine, tout lustig qu’il est du régiment, n’oserait pas faire imprimer ses rêveries à Zastrow, Il craint si terriblement de déplaire à la Sorbonne qu’il s’est fait maçon, laboureur et jardinier ; il gouverne ses terres et n’écrit point sur l’agriculture, comme font tant de gens qui n’ont jamais vu que les Tuileries et qui enseignent hardiment la multiplication du blé. À l’égard des pucelles, il est trop vieux pour s’en mêler, et il serait bien fâché de se brouiller avec saint Denis, pour la tête duquel il a toujours eu un respect vivement sincère.

Il vous fait ses très-humbles compliments, dans le goût d’un homme qui a voyagé avec Martin.

  1. Bibliothèque royale de Bruxelles, mst 11583. — Cette lettre nous a été communiquée par M.  F. Brunetière, à qui nous sommes également redevables de la commuaication des lettres 3542, 3059, 3088, 3107, dans le tome XXXVIIIe et des lettres 3178, 3220 et 3286, dans le tome XXXIXe