Correspondance de Voltaire/1760/Lettre 4059
J’aime votre concitoyen[2] ; il me procure le plaisir d’avoir de vos nouvelles. Je voudrais bien voir l’enduit de poix-résine dont vous avez embaumé ce fou de Maupertuis, avec sa petite perruque et sa loi de l’épargne. Avez-vous bien exalté son âme ?
J’ai peur que vos corps ne meurent de faim à Berlin.
Je ne sais comment vous envoyer l’Almanach[3] de Priam et d’Hector, que votre Troyen m’a envoyé pour vous. Quand votre guerroyant philosophe daigne m’écrire par Michelet, je fourre tous les paquets possibles dans le mien ; mais il m’écrit par d’autres voies lorsqu’il me fait cet honneur. Je ne peux, en conscience, vous envoyer par la poste un Almanach qui vous coûterait plusieurs florins d’empire ; je ménage votre bourse par le temps qui court. La France est ruinée comme la Prusse. Voilà à quoi se réduisent les beaux exploits du meilleur des mondes possibles. Ajoutez-y quelques centaines de mille pauvres diables de monades au diable d’enfer.
- ↑ Formey, qui a imprimé cette lettre dans ses Souvenirs, tome Ier, page 303, n’en donne pas la date ; mais il dit qu’elle accompagnait une lettre de Grosley du 20 février. (B.)
- ↑ Grosley, Champenois (voyez tome XXXIX, page 378), pouvait être appelé concitoyen ou compatriote de Formey, dont la famille était originaire de Vitry en Champagne.
- ↑ Le volume des Éphémérides troyennes pour 1759, in-24.