Correspondance de Voltaire/1761/Lettre 4581

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Correspondance : année 1761
Garnier (Œuvres complètes de Voltaire, tome 41p. 333).
4581. — À M.  LE DUC DE NIVERNAIS[1].
Aux Délices, 21 juin.

Vous devenez, monseigneur le duc, tout jeune que vous êtes, le père de l’Académie, et vos discours vous ont rendu cher au public. La protection que vous donnez aux descendants de Corneille augmente encore, s’il est possible, la vénération qu’on a pour vous.

Tous mes soins deviendront infructueux, s’il ne se trouve quelques âmes aussi sensibles et aussi nobles que la vôtre. Je me flatte que votre nom, imprimé à la tête des souscripteurs, engagera plusieurs personnes à donner le leur. On portera sans doute le roi à permettre, en qualité de protecteur, qu’il soit regardé comme le premier bienfaiteur de la famille du grand Corneille. Je suis bien sûr que, dans l’occasion, vous voudrez bien appuyer mes propositions de votre crédit et de vos conseils. Je vous en fais mes très-humbles remerciements : Mlle  Corneille y joindrait déjà les siens si les ménagements qu’on doit aux infortunés m’avaient permis de l’instruire de ce qu’on fait pour elle.

J’ajouterai que je crois convenable que chaque académicien, non-seulement donne son nom, mais qu’il nous procure des souscripteurs : car, lorsque les sieurs Cramer seront à Genève, comment pourront-ils en avoir à Paris ?

Je vous demanderais pardon, monseigneur, de tous ces détails, si vous aviez moins de générosité ; j’ai seulement peur de n’avoir pas assez de santé pour conduire cette entreprise à sa fin.

J’attends votre discours avec impatience, et serai toute ma vie, monseigneur, avec autant d’estime que de respect, etc.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.