Correspondance de Voltaire/1761/Lettre 4583
Ô mes anges ! le coup est violent, le trait est noir, l’embarras est grand.
Zulime, soit : la voilà baptisée, la voilà Africaine ; elle a affaire à un Espagnol, il n’y a plus moyen de s’en dédire. Voici une petite lettre à Nicodème Thieriot[1] qu’il ne serait pas mal de faire courir. Allons donc ; je vais songer à cette Zulime ; la tête me bout. Serai-je toujours comme Arlequin, qui voulait faire vingt-deux métiers à la fois ? Patience.
Mille respects, je vous en conjure, à M. le comte de Choiseul ; comment va sa santé ?
Ayez la charité d’envoyer à M. le duc de Choiseul le présent paquet[2], après en avoir ri.
Qui est ambassadeur à Rome ? Je n’en sais rien. Quelqu’il soit, il faut qu’il fasse mon affaire au plus vite. Monsieur le comte de Choiseul, protégez-moi prodigieusement ; je veux que Rezzonico[3] m’accorde tout ce que je demande. Quand le seigneur, le curé, et toute une paroisse, présentent une supplique au pape, et que cette paroisse est auprès de Genève, et que c’est à moi qu’elle appartient, le pape est un benêt s’il nous refuse.
J’espère bien que tous les Choiseul me permettront de mettre leur nom en gros caractères parmi les souscripteurs de Corneille ; je vais d’abord tâter le roi.
Mes anges, si vous avez deux ou trois âmes à me prêter, envoyez-les-moi par la poste, car je n’ai pas assez de la mienne : toute chétive qu’elle est, elle vous adore.
Avez-vous reçu la cargaison de Grizel[4] ? Et les yeux ?