Correspondance de Voltaire/1762/Lettre 4979

La bibliothèque libre.

4979. — À M.  CATHALA,
pour madame calas[1].
26 juillet 1762.

M. Héron, premier commis du grand conseil, me mande qu’il est très-instruit de l’horrible arrêt de Toulouse. Il est d’avis qu’on porte à M. de Saint-Florentin la requête au roi signée de la veuve Calas, afin que l’affaire soit portée au conseil des dépêches. J’avais toujours été de cet avis ; cette voie m’a paru, comme à M. Héron, la plus sûre et la plus prompte. Je crois que Mme  Calas ou quelqu’un de ses amis bien instruits doit aller sur-le-champ chez M. Héron lui parler avec l’attendrissement le plus touchant et la plus entière confiance. C’est l’homme du monde le plus capable de donner les meilleurs conseils et de rendre les plus grands services. Il demeure rue Taranne, faubourg Saint-Germain.

J’insiste toujours pour que cette affaire, qui doit intéresser le genre humain, soit suivie avec une chaleur que rien ne ralentisse.

Je suis d’avis qu’on fasse venir, de Toulouse, une attestation du chirurgien qui soit favorable. Il sera aisé de l’avoir, et ce sera une pièce sur laquelle on pourra commencer le procès.

Depuis cette lettre écrite, j’ai vu celle de M. Lavaysse père et les lettres de Mme  Calas, du 21 juillet.

Je conjure cette veuve infortunée de ne pas se désespérer, et je supplie tous ses amis de ne se pas effrayer des lenteurs inévitables dans une telle affaire.

Si M. Mariette est occupé d’autres procès, M. d’Argental pourra choisir un autre avocat au conseil.

Mme  la marquise de Pompadour est très-touchée, et on en verra les effets avant qu’il soit un mois. L’Europe entière aura le jugement et les juges en horreur, et cet arrêt de tout le public vaut bien un arrêt du conseil. Il faudra bien que le conseil rende enfin justice quand le public l’aura rendue.

Encore une fois, qu’on voie M. Chaban et M. Héron.

  1. Éditeur, A. Coquerel.