Correspondance de Voltaire/1763/Lettre 5172

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Correspondance : année 1763GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 42 (p. 366).

5172. — À M.  DE CHEINEVIÈRES.
Janvier.

Je vous donne avis, mon cher ami, que je marie Mlle  Corneille. Je deviens aveugle ; mais ce ne sera pas moi qui jouerai dans cette affaire le rôle de l’Amour : c’est un jeune gentilhomme de mon voisinage[1], dont les terres touchent les miennes ; il a environ huit mille livres de rente ; il est sage et doux, fort aimable, fort amoureux, et fort aimé. Je me flatte qu’ils seront tous deux heureux chez moi ; leur bonheur fera le mien : je finis ma vie en vrai patriarche. Que dites-vous de la destinée de Mlle  Corneille ? Ne la trouvez-vous pas singulière ? Une nouvelle singularité, c’est que l’on joue Dupuis à la Comédie française, et que mon gendre s’appelle Dupuits. Je crois que vous et la sœur du pot[2] vous vous intéressez à cette nouvelle. Voilà l’occasion de faire de ces jolis vers dont vous me favorisez quelquefois. Pour moi, je peux faire des mariages, mais je ne puis plus faire d’épithalames.

Je vous embrasse du meilleur de mon cœur.

  1. Voyez page 353.
  2. Mme  la duchesse d’Aiguillon ; voyez tome XXXIII, page 406.